Citations de Michel Houellebecq (3671)
La possibilité de vivre commence dans le regard de l'autre.
Seule la littérature peut vous permettre d'entrer en contact avec l'esprit d'un mort, de manière plus directe, plus complète et plus profonde que ne le ferait même la conversation avec un ami
Il était, selon les dires de la directrice de la maison de retraite, "raisonnablement intégré", ce qui voulait vraisemblablement dire qu'il n'adressait à peu près la parole à personne.
Je me tus méthodiquement : quand on se tait méthodiquement en les regardant droit dans les yeux,en leur donnant l'impression de boire leurs paroles,les gens parlent.Ils aiment qu'on les écoutent,tous les enquêteurs le savent;tous les enquêteurs,les écrivains,tous les espions.
"Je n'avais aucun projet, aucune destination précise; juste la sensation, très vague, que j'avais intérêt à me diriger vers le Sud-Ouest ; que, si une guerre civile devait éclater en France, elle mettrait davantage de temps à atteindre le Sud-Ouest . Je ne connaissais à vrai dire à peu près rien du Sud-Ouest, sinon que c'est une région où l'on mange du confit de canard ; et le confit de canard me paraissait peu compatible avec la guerre civile. Enfin, je pouvais me tromper."
Mes articles étaient nets, incisifs, brillants ; ils étaient généralement appréciés, d'autant que je n'avais jamais de retard sur les dates de remise. Mais cela suffirait-il à justifier une vie ? Et en quoi une vie a-t-elle besoin d'être justifiée ? La totalité des animaux, l'écrasante majorité des hommes vivent sans jamais éprouver le moindre besoin de justification. Ils vivent parce qu'ils vivent et voilà tout, c'est comme ça qu'ils raisonnent ; ensuite je suppose qu'ils meurent parce qu'ils meurent, et que ceci, à leurs yeux, termine l'analyse. Au moins, en tant que spécialiste de Huysmans, je me sentais obligé de faire un petit peu mieux.
Voilà bien le premier effet de la psychanalyse : développer chez ses victimes une avarice et une mesquinerie ridicules, presque incroyables. Inutile d’essayer d’aller au café avec quelqu’un qui suit une analyse : inévitablement il se met à discuter les détails de l’addition, et ça finit par des problèmes avec le garçon.
A mesure que vous approchez de la vérité, votre solitude augmente. Le bâtiment est splendide, mais désert. Vous marchez dans des salles vides, qui vous renvoient l'écho de vos pas. L'atmosphère est limpide et invariable ; les objets semblent statufiés. Parfois vous vous mettez à pleurer, tant la netteté de la vision est cruelle. Vous aimeriez retourner en arrière, dans les brumes de l'inconnaissance ; mais au fond vous savez qu'il est déjà trop tard.
Continuez. N'ayez pas peur. Le pire est déjà passé. Bien sûr, la vie vous déchirera encore ; mais, de votre côté, vous n'avez plus tellement à faire avec elle. Souvenez-vous-en : fondamentalement, vous êtes déjà mort. Vous êtes maintenant en tête à tête avec l'éternité.
A la question de savoir quand un étranger au pays pouvait se faire accepter dans une zone rurale française, la réponse était : jamais. Ils ne manifestaient d’ailleurs en cela aucun racisme, ni aucune xénophobie. Pour eux, un Parisien était un étranger à peu près au même titre qu’un Allemand du Nord, ou qu’un Sénégalais […]
À travers les chiens nous rendons hommage à l'amour, et à sa possibilité. Qu'est-ce qu'un chien, sinon une machine à aimer?
«Notre malheur n'atteint son plus haut point que lorsque a été envisagée, suffisamment proche, la possibilité pratique du bonheur.»
Mon père est mort il y a un an. Je ne crois pas à cette théorie selon laquelle on devient réellement adulte à la mort de ses parents ; on ne devient jamais réellement adulte.
Le président était intelligent, ses détracteurs les plus acharnés ne songeaient nullement à disputer son intelligence, mais de plus il avait l’usage des hommes, l’intuition de leurs potentialités inexplorées comme de leurs failles.
Tout objet présuppose le sujet, et ne reste ainsi qu'une représentation.
( Schopenhauer, Le Monde comme volonté et comme représentation.)
Au milieu du suicide occidental, il était clair qu'ils n'avaient aucune chance. (...)
Ils étaient tristes, parfois, mais surtout ils étaient graves. Ils savaient l'un comme l'autre qu'ils vivaient leur dernière véritable relation humaine, et cette sensation donnait quelque chose de déchirant à chacune de leurs minutes. Ils éprouvaient l'un pour l'autre un grand respect et une immense pitié. Certains jours pourtant, pris dans la grâce d'une magie imprévue, ils traversaient des moments d'air frais, de grand soleil tonique, mais le plus souvent ils sentaient qu'une ombre grise s'étendait en eux, sur la terre qui les portait, et en tout ils apercevaient la fin.
Vivre sans lecture c'est dangereux, il faut se contenter de la vie, ça peut amener à prendre des risques.
J'avais même parlé une fois à une fille jeune, jolie, attirante, qui fantasmait sur Jean-François Copé; il m'avait fallu plusieurs jours pour m'en remettre. On rencontre vraiment n'importe quoi, de nos jours, chez les filles
LA POURSUITE DU BONHEUR
Une sensation de froid
Le matin était clair et absolument beau;
Tu voulais préserver ton indépendance.
Je t'attendais en regardant les oiseaux:
Quoi que je fasse, il y aurait la souffrance.
Il y a toujours eu chez toi une espèce d'honnêteté anormale, une incapacité à ces compromis qui permettent aux gens, au bout du compte , de vivre. (p.43)
Dix ans plus tard, considérant Houellebecq, Jed prenait conscience qu'il y avait dans son regard, à lui aussi, une passion, quelque chose d'halluciné, même. Il avait dû susciter des passions amoureuses, peut-être violentes. Oui, d'après tout ce qu'il savait des femmes, il paraissait probable que certaines d'entre elles aient pu s'éprendre de ce débris torturé qui dodelinait maintenant de la tête devant lui en dévorant des tranches de pâté de campagne, manifestement devenu indifférent à tout ce qui pouvait s'apparenter à une relation amoureuse, et vraisemblablement aussi à toute relation humaine.