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Critiques de Mircea Eliade (140)
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Le sacré et le profane

Mircea Eliade, historien des religions, délivre un court essai empruntant largement à l’anthropologie pour étudier le sacré à l’aune des mythes et nombreuses religions primitives peuplant notre vaste monde.



Eliade traque, dans cet ouvrage paru en 1956, les manifestations du sacré dans la vie humaine. Ces manifestations ou “hiérophanies” peuvent être spatiales, l’homme cherchant à être au plus proche de Dieu, à la fois proche du ciel et au centre de l’espace habité.

Le sacré est aussi temporel, à l’inverse du profane pour qui l’humain ne s’inscrit que dans les contingences d’un temps historique privé de sens, l’homme sacré voit dans le temps une forme de cycle, d’éternel retour, où l’on se purge du passé pour se régénérer, où l’on reproduit/commémore l’acte créateur du cosmos.



Entre sacré et profane, nous aurions tort de voir une démarcation figée, l’un engendre l’autre au cours de l’Histoire. L’auteur roumain met en évidence un processus de désacralisation du monde (que se soit notre rapport à la Nature, à la sexualité etc) toutes ces manifestations, si elles ne répondent plus à un ordre religieux défini, portent encore l’héritage d’un passé sacré qu’il soit superstitieux, politique (à l’exemple de l’eschatologie communiste) ou inconscient.



Une introduction à l’œuvre scientifique d’Eliade, par ailleurs romancier, qui en dit juste assez pour donner envie de suivre son sillon ou du moins, d’en savoir plus sur l’Histoire des religions.



Qu’en pensez-vous ?
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Les dix-neuf roses

Un subtil mélange, laissant le soin au lecteur d’entrer ou de rebondir sur la face qu’il veut, empilant des possibles strates, mise en abîme détendue… où l’avant-garde est considérée, à l’instar de Bolaño, comme une sérieuse farce, d’une goguenardise savante et recherchée, dont l’existence sert autant l’art et la recherche qu’elle apparait dérisoire… tout comme la littérature, nous chuchoterait le grand esprit qu’est Mircea Eliade, à travers son double divisé, tantôt narrateur-larbin secrétaire, oeuvrant dans l’ombre du grand écrivain national d’une nation à tendance totalitaire des années 60… Notre roumain francophile restera à jamais entre les deux, tout en les incarnant simultanément…



Une histoire qui se lirait comme un thriller, avec une étrange galerie d’individus, chacun mu par d’inassouvies pulsions, sa part d’ombre éclairée par une étrange familiarité, un déjà-vu trop réaliste pour n’être que du roman.

L’érudition à tendance hégélienne du texte pourrait se résumer à ce mot, probablement neuf pour le lecteur courant, qu’est l’anamnèse, expérience possiblement divinatoire d’un passé ressuscité, porte d’entrée, mais surtout de sortie, d’un roman sur le fil dont la quatrième de couverture à l’audace d’en interpréter la fin, interrogeant encore et toujours la place à donner à cet espace éditorial trop souvent bavard…



Du bien bel ouvrage, dont les manques ne s’expriment jamais ouvertement, confirmant l’impression d’un morceau pris dans une vie, continuant sans qu’on ne reste à l’observer, étrange et envoutant roman auquel il manquerait quelques voyelles.
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Les Roumains : Précis historique

Ce texte (réédition de 1992), publié pour la première fois en 1943, porte bien son nom. Il s’agit d’un très bref texte de vulgarisation sur l’Histoire des Roumains. La forme me semble parfaite, mais le contenu est inexorablement « daté » et sous le signe d’un certain parti pris. Ainsi, selon l’article wikipédia de Mircea Eliade : « En octobre 1940, après que la Garde de fer fut arrivée au pouvoir en même temps que fut instaurée la dictature militaire de Ion Antonescu (l’État national légionnaire, Statul Național Legionar), Eliade est nommé, grâce au concours d’Alexandru Rosetti, attaché culturel du régime auprès de la légation de Roumanie à Londres, poste auquel il sera mis fin bientôt à la suite de la rupture des relations diplomatiques entre la Roumanie et la Grande-Bretagne. Son séjour à Londres avait cependant duré assez de temps pour permettre aux services secrets britanniques de le cataloguer comme « le plus nazi » des membres de la légation roumaine. Après avoir quitté la capitale britannique, il remplit la fonction de Conseiller et de Responsable de presse (ultérieurement d’Attaché culturel) à l’ambassade de Roumanie au Portugal à Lisbonne, de janvier 1941 jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, d’abord comme diplomate au service de l’État national légionnaire, puis enfin au service du régime d’Ion Antonescu. Sa fonction consistait à diffuser de la propagande en faveur de l’État roumain. »

C’est a Lisbonne que l’auteur rédige ce précis historique (cf. quatrième de couverture de la présentation éditeur).

À noter la présence d’une chronologie sommaire en fin d’ouvrage et d’une intéressante bibliographie. Le texte est divisé en trois parties presque égales dont la troisième a attiré le plus mon attention : la vie spirituelle des Roumains traite de la question du christianisme, des deux mythes de la spiritualité roumaine (cf. ma citation), des caractéristiques fondamentales de la culture roumaine ainsi que de ses personnalités marquantes (cf. mes autres citations de ce jour). Les deux autres parties traitent respectivement de l’origine et de la formation du peuple roumain, ainsi que des moments de références dans son histoire : Mircea « le Vieux »(1386-1418), grand voïévode de Munténie, l’esprit de croisade avec Jean Corvin et Étienne le Grand, Michel le Brave et l’union de toutes les principautés roumaines, les révolutions et les guerres pour l’indépendance et enfin l’unité.

À noter également la couverture qui représente le prince Neagoe Bessarab (1512-1521) et sa famille dans une peinture votive de l’intérieur de l’église du monastère de Curtea de Argeș.
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La nuit bengali

Au début du 20e siècle, Allan, un jeune ingénieur anglais part faire fortune (ou, du moin, un nom) dans les Indes britanniques. C’est un monde complètement différent de tout ce qu’il a connu mais, au moment où il commençait à s’y faire, il tombe malade. Il est recueilli par son patron Narendra Sen, chef de famille bengali, aussi mais grand admirateur de la civilisation occidentale. Les mois qu’il passe chez son hôte auront permis à Allan de bien récupérer, de mieux apprécier la culture indienne mais surtout de tomber amoureux de la jeune Maitreyi. Mais un tel amour interdit, même s’il est partagé et passionné, ne peut qu’entrainer des conséquences néfastes… C’est le début de « La nuit bengali ».



Mircea Éliade signe ici une grande histoire d’amour. Allan et Matreyi ne sont pas destinés à s’aimer au premier regard. D’ailleurs, l’Anglais raillera le physique de l’Indienne, même sa culture qu’il juge un peu arriérée. Et le génie de l’auteur réside justement dans ce contraste, ce couple étrange que rien ne semblait prédestiné à s’aimer. Il faut parfois croire au destin… Avec le temps, les deux jeunes personnes apprendront à se connaître, à s’apprécier puis enfin à s’aimer. Mais attention, pas de mièvreries ni de trucs à l’eau de rose ! C’est du sérieux, dans le genre Roméo et Juliette. Ou bien Abélard et Heloïse.



Puis viendront les obstacles : le caractère imprévisible de Maitreyi mais surtout les mœurs bengali, jamais vraiment comprises par Allan même s’il les a étudiées. Avec le système de classes, de castes, et tout ce bataclan, il est inenvisageable pour le père d’accorder la main de sa fille à un étranger.



Au-delà de l’histoire d’amour qu’il nous propose, Mircea Éliade a su dépeindre admirablement bien l’Inde. À la fois de manière romantique et réaliste ! Tout un exploit ! Et tout y passe : la caractère hautain des étrangers et administrateurs coloniaux, la fierté des Bengalis, l’incompréhension et les relations parfois tendues entre les Occidentaux et les locaux. La jungle tout près, la chaleur et l’humidité. L’hospitalité des gens. Les femmes vêtues de leurs saris colorés, les thés parfumés et autres nourritures. Et que dire des différences culturelles ! L’auteur a tout de même passé quelques années en Inde, alors qu’il était un jeune homme et qu’il étudiait les religions (il a rédigé une thèse de doctorat sur le yoga). Donc, il sait de quoi il parle quand il raconte le parcours d’Allan.



Mircea Eliade est un auteur roumain dont on parle peu, en tous cas au Canada, et c’est très dommage. Il mérite plus de reconnaissance ! « La nuit bengali » est le quatrième livre que je lis de lui – et le meilleur à date – et je compte bien continuer à explorer son œuvre édifiante mais aussi intéressante.
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Mademoiselle Christina

Mircea Eliade s’est essayé au roman fantastique. Lui, dans lequel je voyais un romancier si sérieux, un professeur de l’histoire des religions, un philosophe ! Il sort de sa zone de comfort, et s’éloigne un moment d’un style de romans qui lui convenait si bien. Mais bon, je suppose qu’il est difficile de passer à côté d’un tel genre quand on vient de la Roumanie, ce pays aux légendes si tentantes.



Pourtant, je ne savais pas que j’allais plonger dans le fantastique quand j’ai choisi ce livre, et pas beaucoup plus quand j’en ai commencé la lecture. Dans tous les cas, l’atmosphère que j’éprouvais n’était pas celle habituelle, ni lourde ni menaçante, pas plus d’une empreinte d’une peur anxieuse. Non, pas du tout. Je pensais avoir affaire à un roman historique ou, à la rigueur, un roman psychologique.



Mais petit à petit (peut-être un peu trop lentement à mon goût ?) le voile se lève sur un drame passé, la mort de Mademoiselle Christina. Son souvenir hante encore le château de Mme Mosco. Mais est-ce seulement son souvenir ? Et ses apparitions si… réelles, est-ce seulement des rêves ? Le peintre Egor Paschievici et le professeur Nazarie, invités, prennent sur eux de découvrir la vérité.



Le vague mystère qui se laissait deviner au début prend toujours plus d’ampleur. Par exemple, les murmures et les non-dits, ce soleil qui s’éteint au loin, cette musique étrange qui enveloppe les personnages, plein de petits détails judicieusement placés. Le malaise souhaité était là mais ce ne fut pas suffisant pour que je ressente réellement la peur. J’étais tout au plus intrigué, jamais angoissé.



C’est que, malgré les apparitions plus nombreuses de Mademoiselle Christina, ses conséquences tardaient à se faire menaçantes ou dangereuses. D’ailleurs, qu’est-elle au juste ? Je croyais que Christina était un esprit ou un fantôme, puis une goûle, puis un tas d’autres choses. Je ne crois pas que le mot vampire ait été mentionné une seule fois mais une présence si envoûtante et glaciale à la fois impose l’évidence.



Ma critique semble négative mais j’ai bien apprécié cette lecture. Mircea Eliade est un grand auteur et ça se réflète dans son écriture. Mademoiselle Christina, malgré son rythme lent, se démarque de bon nombre de ces romans de vampires à l’eau de rose qui ciblent les jeunes adolescentes. C’est agréable de lire autre chose que des trames axées uniquement sur l’action ou un amour insipide.
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Le sacré et le profane

Il est des livres qui vous marque et celui-ci en fait partie grâce la puissance de ses énoncés , grâce également à son style limpide , du fait de ses concepts utiles , et du fait aussi de son extrême accessibilité .

Il est absolument primordial pour tout à chacun de savoir où il habite , et pour se faire il faut nécessairement avoir une vision claire de deux données de base : l'espace et le temps .

Dans un univers athée vous avez le passé , le présent et l'avenir ( l'avenir qui quelquefois et bizarrement , est laïque et messianique comme pour l'avènement du socialisme par exemple ! ) .

Dans un univers religieux vous avez le passé , le présent , le passé , le présent , etc. et ainsi de suite ...

Mais l'avenir dans tout cela ? Et bien ce n'est pas évident , pas toujours en tout cas, et ce n'est pas évident non plus de savoir ce qu'est le passé et surtout , quand il est vraiment du passé .

L'espace laïque par ailleurs est simplement règlementé et ordonné , mais situé nécessairement dans le même univers que celui de l'observateur . Dans l'univers religieux , il y a des lieux qui sont ailleurs . Où cela ? pas facile de savoir en fait et donc des espaces à réfléchir et à acquérir .

Si vous voulez comprendre la phénoménologie fondamentale du fait religieux ( et éviter de dire et de faire des bêtises ) , vous devez explorer ces deux notions d'espace et de temps dans les univers religieux et dans leur corollaire, les dimensions profanes et concevoir les dynamiques de passage de l'un à l'autre et la signification réelle des transgressions , comme de la même manière celle du pur et de l'impur .

Les systèmes que l'homme religieux , idéologique , ou bien philosophe expérimente socialement parlant ( donc relevant des sciences humaines pour leur analyse ) ont la particularité de systématiquement exister pour l'être qui vit dans leurs cadres contraignants . Ce cadre existe même si vous êtes persuadé du contraire sur des bases rationnelles ou non !

Je veux dire que si vous mettez votre tenue de plongée et que vous nagez en pleine Nouvelle Angleterre puritaine pendant l'épisode des sorcière de Salem , il vous faudra pour y comprendre quelque chose admettre que la sorcellerie existe , de même vous ne devrez pas considérer le tarentulisme au XIX e siècle en Italie du sud , épisode où des femmes deviennent spectaculairement des araignées pendant la messe , comme des membres d'une simple équipe de sportifs du type de celle de l'ex RDA , par exemple , ou encore comme des touristes en permission de sortie d'un lieu thérapeutique .

C'est facile en fait , quand vous buchez sur Latran IV , 1215 , vous partez d' une évidence simplissime : Dieu existe , et pi sé tout ! , de même si vous assistez à une veillée mariale où tout le monde pleure en permanence , ne pensez surtout pas que ces gens sont fous , même si c'est très impressionnant et même inquiétant comme topo ? surtout si comme moi vous n'êtes pas intime avec la Vierge Marie !

Si le numineux conditionne la vie sociale , il faudra bien admettre et reconnaitre son existence comme un fait palpable et déterminant ....

Mircea Eliade examine dans ce document la façon dont l'univers religieux est structuré ( ces bases et ces processus transcendent allègrement les cultures et les différences culturelles ) .

L'auteur définit précisément et méticuleusement ce qu'est un espace sacré et un espace profane . de même il y a un temps profane et un temps sacré , qui ont des répercussion sur le caractère opératoire des mythes et de même conditionnent aussi le point de vu existentiel de l'individu comme celui de la collectivité .

Ce petit ouvrage vous permettra de jouer au touriste distingué quand vous entrerez dans une église et vous pourrez ainsi comprendre quelque chose à ces lieux qui contrairement aux apparences sont ailleurs et de fait , votre petite copine et vos potes en seront baba et il devront bien cesser d'admirer la déco pour passer à des choses plus sérieuses !

De même si vous êtes fondamentaliste vous pourrez enfin comprendre pourquoi des gens se rassemblent chaque année sur la plage en montrant la face cachée de la lune , alors que ces mêmes personnes s'en abstiennent généralement ( et souvent heureusement ) dans les jardins publiques le reste de l'année !

Un petit livre passionnant et tout à fait indispensable , comme vous pouvez le constater !

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Noces au paradis

Quelque part dans les Carpates roumaines, Mavrodin et Hasnas, deux hommes entre deux âges, parlent entre eux. Ils racontent chacun leur brève mais intense histoire d’amour. Le premier avec Ileana et le deuxième avec Lena. Rapidement, on se rend compte qu’ils parlent de la même femme, l’ayant connue un après l’autre. Ici, je ne dévoile rien : ceux qui ne l’auraient pas lu sur la 4e de couverture ou dans la préface le comprennent dès le début.



Pour résumer, Noces au paradis, c’est l’histoire de deux amours qui ne pouvaient durer.



C’est aussi l’histoire d’une femme mystérieuse. Ileana-Lena parle un français sans accent mais elle connaît par cœur des comptines pour enfant en allemand. Toutefois, elle est sans passé ni famille. Parfois, il est question d’une tante ou d’un vague cousin (l’est-il réellement ?) mais c’est tout. Les deux hommes peuvent passer outre tant elle est belle, élégante, intelligente. Mais, ce qui la caractérise surtout, c’est sa détermination et son désir de liberté. Dès le début je l'ai aimé et j'ai essayé de la comprendre.



Toutefois, ni Mavrodin ni Hasnas ne l’ont jamais vraiment comprise. Ils croyaient l’avoir apprivoisée mais ils se sont trompés. Pour leur malheur à tous les deux. Bien sur, elle a ses torts : mystère insondable, elle dévoile peu sur elle. Et l’auteur sait très bien entretenir cette aura de mystère qui l’entoure. Mais, si Ileana cache bien des choses, elle fait savoir rapidement ce qu’elle veut et ce qu’elle ne veut pas (comme devenir mère, avoir des enfants). Et les deux hommes le savaient avant de s’emmouracher d’elle et s’en sont rappelé trop tard.



Finalement, Noces au paradis est l’histoire de deux hommes fiers, orgueilleux, sur d’eux, de leur supériorité masculine et de l’amour que leur aura porté Ileana-Lena, surtout incapables de la moindre concession ou si peu et surtout trop tardivement. C’est ’histoire de deux hommes qui ont possédé le grand amour quelques instants, qui l’ont tenu au creux de leur main et qui l’ont laissé s’échapper.



Mircea Eliade n’a pas nécessairement la plus belle plume, les plus magnifiques tournures de phrase ni le vocabulaire le plus exquis. Du moins, c’est ce qui semble paraître à travers la traduction. Mais il sait mener une bonne intrigue, plonger au cœur de l’âme humaine. Pas pour y trouver la part d’ombre de chacun, non, mais pour y chercher l’espoir, le désir d’aimer et d’être aimé. Le tout avec réalisme. Bref, un auteur trop peu connu qui vaut le détour !
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Le mythe de l'éternel retour

Deux ans pour venir à bout de cet essai philosophique pour le moins ambitieux, toujours en quête de réponses sur le sens des choses, je me suis laissé tenter il y a bien longtemps dans un moment de grande détresse littéraire… Et Je me suis perdu dans un langage complexe et laborieux dont mes connaissances se limitent au néant philosophique… Pourtant j'essaie, j'apprends parfois, mais je vulgarise à grande échelle, dès que l'auteur rentre dans une construction plus intellectuelle, je me perds dans l'abime profond de mon incompréhension la plus personnelle.



Pour faire court, J'ai imaginé qu'elle était plus longue et donc que je pouvais commencer à fricoter avec une certaine forme de pensée plus avancée, que mon cerveau était capable de déchiffrer un vocabulaire plus riche et structuré de manière quantique, mais moins compréhensible pour le commun des ordinaires dont je revendique l'appartenance au grand désespoir de mon égo qui ambitionnait pour moi de grandes choses…



Alors bien évidement, je ne lis que bien rarement depuis deux trois ans, faute de temps, de projets qui me coutent en sommeil, une petite fille merveilleuse qui grandit inlassablement collée aux jambes de ses géniteurs désemparés par l'ampleur de la dépendance de ce petit être qui réclame tellement d'attention qu'elle en devient oppressante, bref lire un tel ouvrage par période plus ou moins éloignées n'aide pas forcément à la comprenette, j'ai perdu le fil, j'ai perdu l'envie, la concentration, l'intérêt, car pour être honnête je ne m'attendais pas à ça.



Je ne vais pas faire la critique de ce bouquin, j'en ai saisi les grandes lignes, notamment sur le rapport de l'histoire avec l'homme ou de l'homme avec l'histoire, l'auteur décortique le rapport entretenu depuis les temps archaïques aux temps modernes, là ou les plus anciens réfutaient l'histoire, l'homme moderne par les avancées scientifiques la légitimise…



C'est un ouvrage très complet qui démontre la place des croyances, des archétypes, des héros, des légendes, des dieux, de la quête de sens de tout être humain, des histoires à se raconter pour justifier, assouvir, asservir, ou l'individualité n'est que l'illusion d'un éternel recommencement de toute chose justifiant bien des barbaries, au non de l'ignorance comblée quant à elle par les siècles qui passent, qui nous apprend à accepter les souffrances du passé sans pour autant les ignorer au nom d'une spiritualité erronée, l'histoire existe bien, elle n'est pas le fruit de la colère divine, ou de nos dettes cosmiques accumulées depuis la boucle du temps qui devient infinie.



Bref je suis une bite, je ne sais pas expliquer ni convaincre, je n'ai pas ces capacités, le plus frustrant c'est de lire ce type d'ouvrages, d'en tirer une certaine sagesse d'esprit, et pourtant les oublier quelques mois après.



Alors c'est un essai de vulgarisation dont ma pensée critique serait réfutée car impossible à formuler, je me contente de lire, d'apprendre un minimum de trucs sans être capable de dissocier le bon du mauvais, mais pas bien grave, ce style de lecture permet quand même d'affuter ma pensée, de répondre à des questions que je me pose à longueur de temps.



A plus les copains

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La nuit bengali

J’ai un peu de mal à démêler mon ressenti à cette lecture.

Bien sûr, je suis loin d’être insensible à l’aura de l’histoire d’amour impossible entre Allan, un occidental qui travaille en Inde, et Maitreyi, une jeune fille bengali, poétesse, qui lui donne la sensation bizarre d’un rêve. On sent, à travers ce trouble amoureux, l’attirance, voire une certaine fascination pour l’Inde et sa culture, son côté mystérieux, étonnant, déroutant, pour le narrateur occidental, mais aussi les préjugés dont il est loin d’être dénué, se considérant longtemps « comme un homme normal entré en relation avec une barbare », les incompréhensions dramatiques, les tensions, le côté déséquilibré et destructeur de cette relation. Au départ, j’ai plutôt été intéressée par la confusion des sentiments, les oscillations je l’aime/je ne l’aime pas, mais à la longue parfois ça piétine, il y a quelque chose de complaisant, de pas vraiment abouti, d’un peu brouillon.

Et surtout je ne sais pas bien quoi penser du narrateur, alter ego de Mircea Eliade dans ce roman semi-autobiographique, dont on est invité à épouser le point de vue, ce qui m’a parfois mis mal à l’aise. Evidemment, on le comprend, on se projette en lui, mais vu de l’extérieur on pourrait trouver qu’il se conduit comme un butor avec une mineure, et avec cette famille si accueillante sur laquelle il va avoir un effet dévastateur. J’aimerais bien lire le livre de Maitreyi, choquée semble-t-il à la lecture du roman de Mircea Eliade, et qui donne sa version de leur relation dans Na Hanyate, mais je ne crois pas ce soit traduit en français. Il semblerait que la publication de La Nuit bengali soit assez compromettante pour elle, ce qui ne fait qu’accentuer le fait que je sois un peu mal à l’aise avec ce roman.
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Le vieil homme et l'officier

Le vieil homme et l’officier commence par ce qui semble être un malentendu. Un directeur d’école retraité s’impose auprès du major Borza pour bavarder, se rappeler le bon vieux temps. Mais voilà que l’officier en question ne se rappelle pas de lui malgré des souvenirs vaguement ressemblants qui lui reviennent à la mémoire. Une filature et un interrogatoire amènent le vieil homme, Zaharia Farâma, à raconter son histoire et, par le fait même, celle de quelques uns des élèves de son école (dont le jeune Borza), jadis, autour des années 1912-1917. Une période troublée, marquée par la première guerre mondiale mais surtout troublée par des événements en apparence anodins (un garçon juifs qui se noit dans une cave vide, un autre qui veut prendre sa place mais qui disparaît après la guerre, etc.). Des histoires compliquées imbriquées les unes dans les autres.



Cet interrogatoire, qui se déroule dans les premières années du communisme en Roumanie, est peut-être une critique du régime stalinien (totalitaire). Après tout, pourquoi des ressources policières importantes sont déployées pour éclaircir l’histoire ordinaire d’un directeur d’école retraité ? Mais, en même temps, cette histoire est-elle aussi banale qu’on le croit ? Plus Zaharia Farâma déballe ses souvenirs du passé, plus ceux-ci semblent constituer un enchevêtrement d’anecdotes et de faits aux ramifications plus importantes qu’il n’y paraît. Et s’il était au cœur d’une conspiration ? Je dois admettre que, de temps à autre, je commençais à m’y perdre dans tous ces détails, un vrai labyrinthe. L’ennui menaçait de me prendre à tout moment. Heureusement, le roman n’est pas trop long et la finale, inattendue et magistrale, vient tout ramasser.
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Commentaires sur la Légende de maître Manole

Pas un essai, comme le revendique l'auteur lui-même, mais plutôt un prétexte à d'érudites comparaison et remarques sur l'irrépressible besoin de spiritualité (la conclusion paraît toujours d'actualité : "L'absolu ne peut pas être extirpé, il peut seulement être dégradé"), tasse de thé toujours fumante de Eliade. "Nous pensons depuis longtemps [et malheureusment ce nous de modestie n'est pas toujours convaincant] qu'on ne peut pas bâtir une philosophie des cultures populaires sans en avoir eu une familiarité longue et disciplinée avec les documents fournis par le folklore, l'ethnographie et l'histoire des religions. Cette familiarité suppose des années de recherches sans gloire, d'exténuantes analyses "verticales" ou de laborieuses enquêtes "horizontales" pour préciser la circulation d'un motif [...]" Je suis de ceux qui apprécient celle balade mythologico-toponymique (Curtea de Argeș) avant tout pour ses qualités littéraires. En cela, les nombreux fragments cités ici (dans une version originale d'Alain Paruit) sont révélateurs du génie folklorique roumain. Aussi, « l'horizontal » précédent me rappelle avec une pointe d'ironie bienveillante la réponse d'une collègue (cf. chez Eliade, le chapitre Maitreyi Devi) qui, interrogée sur sa thèse, répondit que de toute façon, il s'agissait d'un « doctorat horizontal ». Je retiens aussi que l'auteur a l'élégance de rendre hommage à Constantin Noica et l'idée de s'interroger sur le partage éventuel de la parenté de ce mythe avec les voisins balkaniques (cf. chapitre 3).
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Journal des Indes

Journal des Indes est, comme son nom l’indique, un journal personnel. Il contient les événements du quotidien, les constations, les réflexions de Mircea Eliade pendant son séjour dans ce grand pays de 1929 à 1931. Il était au tout début de la vingtaine et souhaitait étudier les religions et les symboles, visiter des ashrams, ce genre de trucs. Il faut se rappeler qu’il s’agit du journal d’un jeune homme, pas celui du grand historien, philosophe et romancier qu’il est devenu. Si on y trouve le germe de certaines idées, on n’y suit qu’indirectement ses recherches. Quelques mentions, l’occasion, où il fait d’un cours exceptionnel de la part d’un professeur, ou des échanges avec d’autres étudiants. On retrouve surtout beaucoup de situations d’interculturalité.



En effet, à l’époque, l’Inde était sous occupation britannique, le jeune Mircea prend pension chez une anglaise. Là, il croise plusieurs Européens, certains de passage, d’autres en poste. Leurs relations avec les Indiens sont souvent empreintes de sentiments de supériorité. Cela donne lieu à quelques accrocs. En tant que Roumain (membre d’une nation moins impérialiste), Mircea fait preuve de plus de respect et de retenu que beaucoup d’autres. Aussi, il rencontre la jolie Catherine…



Ces années-là (1930-31) marquent également le début de la révolution civile, un mouvement indépendantiste indien plus organisé, autour de Gandhi, et Mircea en est le témoin privilégié. Régulièrement les Européens et les Anglo-Indiens devaient se retirer dans leurs quartiers. Magasins fermés, rues désertes… Mais la vie continue. Le jeune Mircea doit se remettre au travail, étudier. Étant curieux de nature, c’est aussi un grand lecteur. J’ai apprécié voir les auteurs qui l’ont intéressé, peut-être influencé : Tagore, Huxley, Mann, Wyndham Lewis, Dostoïevski, Dos Passos et même Kipling (je suppose que, à l’époque, il était impossible de ne pas le lire).



Bref, Journal des Indes a été pour moi une lecture agréable, sans rebondissement ni découverte (il faut dire que j’ai déjà lu une quinzaine des bouquins de Mircea Eliade, tant des romans que des essais) mais il donne un aperçu sur une époque révolue, un état d’esprit. Il donne surtout un aperçu sur les années de formation et la manière dont l’histoire pu marquer un des plus grands esprits du XXe siècle.
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Le sacré et le profane

Si le sacré s’oppose au profane, alors l’état de l’homme areligieux est profane. Dans cet essai, Mircea Eliade a accompli un miracle théologique : condenser et trouver le dénominateur commun des croyances de tous temps et de tous lieux.





Le sacré surgit sur trois dimensions –dans les emplacements géographiques- mais aussi sur quatre dimensions –sur la courbe du temps. Il implique une dimension cosmique en conférant à l’homme religieux une importance directement liée au rôle que la nature lui attribue, et lui enseigne une histoire de la vie et de la mort qui prend sens face à l’absurde de celui qui a fait mourir ses dieux. La démarche de Mircea Eliade est d’ailleurs inconsciemment areligieuse : suggérer que le profane existe au même titre que le sacré, n’est-ce pas lui accorder une légitimité au moins égale ? Pourtant, le cheminement emprunté par Mircea Eliade oppose le sacré et le profane dans un combat inégal qui fait la part belle au sacré. Après en avoir exposé les différentes modalités, après avoir évoqué certains exemples des manifestations religieuses différemment rencontrées dans le monde et dans le temps, Mircea Eliade expose l’attitude de l’homme areligieux. Malgré une apparence de libération et d’intégrisme intellectuel, tout n’est que perte et désolation pour l’homme rendu à son monadisme primordial. Se détacher de dieu nécessite de se détacher de la communauté –qu’elle soit famille, village ou humanité-, du foyer, de la nature et du confort. Face à l’homme moderne rongé par ses nouvelles angoisses existentielles, l’homme nourri au sacré cesse de sembler naïf et crédule. Il paraît au contraire avoir déjà réussi à comprendre ce qui motive l’homme areligieux d’abandonner toute croyance, mais il possède en plus le savoir qu’il ne se suffit pas à lui-même pour surmonter le néant. En posant sur le monde une grille d’interprétation religieuse, Mircea Eliade semble vouloir nous montrer que le croyant transcende la réalité. Le sacré étant le lieu et le moment de manifestation du réel, l’homme religieux gagne la possibilité de vivre avec une conscience augmentée de sa propre réalité.





« Une existence « ouverte » vers le Monde n’est pas une existence inconsciente, ensevelie dans la Nature. L’ « ouverture » vers le Monde rend l’homme religieux capable de se connaître en connaissant le Monde, et cette connaissance lui est précieuse parce qu’elle est « religieuse », parce qu’elle se réfère à l’Être. »





Une autre hypothèse concernant le positionnement de Mircea Eliade quant au sacré et au profane se profile lorsqu’on se réfère à la culture et à la contre-culture qui, comme Pierre Bourdieu l’avait déjà fait remarquer, ne sont que l’opposition d’ « une culture à une autre », d’une culture « dominée » à une culture « dominante » -ainsi pourrait-on dire que le sacré et le profane sont des religions tantôt dominées, tantôt dominantes, l’homme intégralement areligieux (ne croyant même plus qu’il ne croit en rien) n’existant pas. En reconnaissant cette fatalité, Mircea Eliade semble toutefois se diriger vers cet athéisme paradoxal qui s’affirme lorsqu’on reconnaît l’impossibilité de son existence.





Extrêmement court et accessible, le sacré et le profane s’inscrit dans un vingtième siècle marqué par la mort des dieux. Si les exemples du sacré proviennent de sources variées, les exemples du profane proviennent presque exclusivement du monde contemporain à Mircea Eliade. L’essai devient tragique : l’homme s’imaginant devenir moderne en se montrant areligieux se coupe de tout contact réel avec autrui, la nature et le monde. En réalité, il ne devient jamais complètement areligieux et transmet sa foi à d’autres systèmes « athées ». En ne conservant que ce qu’il y a de pire dans le sentiment religieux (le dogmatisme, le fanatisme) et en éliminant ce qu’il y a de meilleur (la communion, le sens), cette nouvelle religion athée semble vouée à l’autodestruction. Mais peut-être n’est-ce là que la reviviscence du mythe de l’éternel retour ? …


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Minuit à Serampore - Le secret du docteur Hon..

Mircea Eliade est un auteur roumain fascinant : c’est un grand érudit (il a fondé l’histore moderne des religions) ayant produit de nombreux ouvrages sérieux, mais également un romancier. Et son œuvre narrative couvre plusieurs genres, allant du roman d’amour (La nuit bengali) au fantastique (Mademoiselle Christina).



Les deux nouvelles qui composent ce recueil mêlent les deux passions de l’auteur : spiritualité et fantastique. Dans la première, Minuit à Serampore, trois Occidentaux spécialistes de l’Orient vont passer la soirée chez une connaissance à quelques kilomètres de Calcutta. Sur le coup de minuit (évidemment, ça ne pouvait être à un autre moment qu’à cette heure propice aux manifestations de l’étrange !), les convives prennent leur congé. Sur le chemin du retour, ils sont témoins d’événements incompréhensibles et se perdent dans les bois. Ils croient s’en sortir en trouvant refuge dans une demeure singulière. Leurs aventures ne sont pas terminées… J’ai beaucup aimé cette histoire. Le début est un peu lent et il ne s’y produit pas tant (les romans mais surtout les films plus contemporains ont habitué les lecteurs à davantage de suspense et d’émotions fortes !) mais l’effet est tout de même réussi.



La deuxième nouvelle, Le secret du docteur Honigberger, m’a beaucoup moins plu. Le narrateur, un autre orientaliste, est de retour à Bucarest après un long séjour en Asie. Là, une vieille dame lui présente les documents de son défunt mari, lesquels contiennent les travaux du docteur mentionné dans le titre. Le reste de la nouvelle est constitué des tentatives du narrateur de déchiffrer ces documents et, conséquemment, les secrets qu’ils détiennent. Les pérégrinations de Honigberger m’avaient d’abord intrigué mais Eliade, en tentant d’expliquer ses théories philosophiques et spirituelles, m’a perdu. L’histoire devenait trop technique, trop cérébrale et je n’en comprenais pas tout le sens. Je m’attendais à une intrigue narrative, pas à un traité ésotérique. Le plaisir de lire n’y étant plu, mes yeux glissaient sur les lignes et je me suis rendu à la fin sans avoir tout saisi. Dommage.
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La nuit bengali

Allan, ingénieur européen, travaille aux Indes sous les ordres de Narendra Sen, un bengali. Celui-ci s’attache à lui et l’héberge dans sa famille. Il fait connaissance avec l’ainée, Maitreyi, une jeune fille de seize ans, belle et intelligente. Il se persuade de ne rien éprouver pour elle mais petit à petit, ses sentiments pour elle vont évoluer…

Dans les années 30, une histoire d’amour nait entre deux êtres qui tout semblent opposer au début. Allan, vingt-cinq ans, venu travailler aux Indes et Maitreyi, seize ans, belle et pleine d’esprit. C’est un amour qui va se construire pièce par pièce, sans le vouloir, un peu par jeu parfois. Pourtant, Allan éprouve parfois une vive aversion pour ces Indiens aux mœurs étranges ! Le système des castes, leurs différentes conceptions de l’amour, du monde, de l’amitié, de la famille… tout un ensemble qui peine à comprendre. Et l’amour qui arrive par vagues, lui fait changer sa perception de l’hindouisme.

Assez particulière, cette histoire d’amour m’a plu par son opposition de différentes cultures, par sa construction. Cependant, j’ai trouvé un peu curieux que le jeune Allan soit européen et non d’une nationalité précise (peut-être français ?). Est-ce pour donner plus d’importance à leurs différences culturelles (chrétien/hindou) ?

Je suis contente d’avoir découvert ce roman roumain dont j’avais beaucoup entendu parler. J’essayerai de voir l’adaptation cinématographique avec Hugh Grant (1988) !

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Le roman de l'adolescent myope

Le roman de l’adolescent myope commence comme un roman d’apprentissage. L’auteur-narrateur Mircea Eliade raconte ses années de jeunesse. Il a dix-sept ans, se trouve laid, avec un corps maigrichon, un visage peu avenant, une myopie sévère qui le force à porter des lunettes hideuses, etc. Bref, une adolescence qui ne l’a pas épargné. (Quoique je crois qu’il l’ait imaginé pire qu’elle ne l’était.) Mais il est intelligent, heureusement, il aime beaucoup lire. Et cette intelligence, avec sa grande culture, compenseront pour son physique qu’il juge disgracieux.



Dans la première partie, on suit Eliade dans ses péripéties avec ses amis, leur quête des jolies filles, les études, la fin des classes. C’est plutôt agréable à lire, je me suis un peu attendri sur le sort de ce pauvre garçon, pris dans un corps qu’il déteste, qui se réfugie un peu dans les livres mais pas trop car ses amis l’encouragent à les suivre dans leurs sorties et leurs quêtes amoureuses. Le tout dans un décor auquel je suis peu habitué : Bucarest, Roumanie, au début du XIXe siècle. J'étais curieux de lire la suite.



Malheureusement, la deuxième partie m’a moins plu. La troisième non plus. Eliade a dix-huit, dix-neuf ans, puis le début vingtaine. Il délaisse sa mansarde pour chercher sa place dans le grand monde. Les cours l’amusent, les virées avec les amis prennent davantage d’importance. Les femmes aussi. Surtout, il écrit ; il réussit même à faire publier des articles dans des journaux.



Mais il manque un petit quelque chose à toute cette suite ininterrompue d’événements. J’avais l’impression de lire un texte courant. Bon, j’exagère, mais un roman devrait donner plus que : « J’ai fait ceci, puis cela, puis après ceci encore, etc. » Selon moi, il manquait un état d’âme, si je puis m’exprimer ainsi. Je ne savais pas trop ce que je devais retirer de ma lecture de ses péripéties d'enfance. L’écriture est jolie, les faits racontés ne sont pas inintéressants, certes, mais la magie n’y opérait pas. Dans tous les cas, pas au milieu ni la fin. Dommage.
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Mademoiselle Christina

Mircea Eliade, historien des religions, mythologue, philosophe et romancier roumain du XXè siècle nous propose ici une fiction fantastique au pays de Dracula. Si l’ambiance est lourde dès le départ, la naïveté et l’ignorance des invités de la maison fait place peu à peu à l’incrédulité face à la conduite étrange de leurs hôtes. Rêve ou réalité, le doute s’installe tandis que l’angoisse étreint le coeur d’Egor, amoureux de Sanda, la jeune fille de la maison, en proie à une étrange léthargie.



«C’était le commencement d’une aventure étrange, diabolique - dont il avait peur, mais qui l’attirait néanmoins comme un fruit défendu, empoisonné».



Des propres mots de l’auteur : «la narration se développe sur plusieurs plans, afin de dévoiler progressivement le fantastique». Peu à peu tous les personnages entrent dans la danse infernale, alors que Sanda se meure. Les visions se multiplient et les rêves laissent d’étranges vestiges dans le monde de la réalité. Tout repose sur la mort tragique de Christina il y a plus de trente ans. Maison et alentours sont depuis ensorcelés.



«Muettes depuis fort longtemps, d’innombrables âmes mortes se contentaient de se rapporter nouvelles et moqueries en frémissant de toutes leurs feuilles»



Entrainé dans cette ronde infernale, Egor devra utiliser toute sa volonté et son courage, pour lutter et tenter de détruire la goule.



Ambiance très noire pour ce court roman, qui pourrait fort bien être adapté sur les écrans, assorti de convaincants effets spéciaux comme savent les créer les cinéastes d’aujourd’hui.


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À l'ombre d'une fleur de lys...

J'ai lu plusieurs romans et ouvrages de Mircea Eliade, c'est un auteur que j'apprécie beaucoup et, quand je vois son nom sur un bouquin, je suis preneur. Peu importe ce qu'il propose, je suis certain que je vais aimer. Eh bien, pour la première fois, j'ai été déçu. Doublement. Son recueil de nouvelles À l'ombre d'une fleur de lys n'a pas réussi à capter mon intérêt, mon enthousiasme. Dans un recueil, peu importe l'auteur, il y a bien quelques unes des histoires qui rejoignent moins le lecteur. C'est normal. Incidemment, après une puis deux qui, bien qu'elles soient correctement écrites, ne m'ont pas accroché, je ne m'en faisais pas trop. Je me disais, « la prochaine, je vais l'aimer. » Eh bien non. Aucune – je précise, vraiment aucune – ne m'a accroché. Les personnages me rebutaient, ne me donnaient pas l'envie d'en savoir plus sur eux, ce qu'ils faisaient ne m'intéressait pas. Vraiment, une grosse déception.
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Le serpent

Dorina et quelques-uns de ses amis vont s'amuser dans la forêt, ils organisent une petite fête. En chemin il rencontre Andronic un étrange personnage possédant un grand pouvoir de séduction, qu'ils veulent bien dépanner et qui se met à faire la fête avec eux. Ensemble ils font plusieurs jeux, dont un où tous se cachent. Une nouvelle fantastique d'Eliade, sa spécialité, autour d'Andronic, personnage fascinant par excellence qui, à travers le jeu, initie les autres au pouvoir de la nature. La première que j'ai lue est aussi ma préférée.

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Le sacré et le profane

Dans cet ouvrage, Eliade décrit les rapports qu’entretiennent le sacré et le profane dans le quotidien des peuples visionnés: tout comme le démontre également Lévi-Strauss, est sacrée toute chose ayant un lien avec le mythe et possédant ainsi une dimension supplémentaire dans son signifié. Son concept fondateur de la hierophanie:

« On n'insistera jamais assez sur le paradoxe que constitue toute hiérophanie, même la plus élémentaire. En manifestant le sacré, un objet quelconque devient autre chose, sans cesser d'être lui-même, car il continue de participer à son milieu cosmique environnant. Une pierre sacrée reste une pierre ; apparemment (plus exactement : d'un point de vue profane) rien ne la distingue de toutes les autres pierres. Pour ceux auxquels une pierre se révèle sacrée, sa réalité immédiate se transmue au contraire en réalité surnaturelle. »



A cela il ajoute , puisqu'elle n'existe pas dans les faits dans le vécu, la distinction dans le temps entre sacré et profane. Le temps sacré est alors situé sur une dimension pan-historique alors que le profane est diachronique. Le temps sacré est élastique et se situe toujours au début du temps des hommes; ainsi, celui qui vie un rituel ou une fête basée sur la naissance des temps s'y situe t il lui même en quelque sorte Il utilise à cette fin l'exemple du passage au Nouvel An qui reprend un modèle cosmogonique, celui du passage du Chaos au Cosmos : la Création. Tout ce qui a eu lieu avant cette nouvelle Création est donc détruit (p.ex. les péchés sont annulés grâce à l'expulsion d'un bouc émissaire), dans un éternel de commencement du temps sacré.



Mais ce temps sacré, puisqu'il ne peut être différencié dans la vie du quidam par les faits (pour une culture donnée cueillir telle plante possède un sens sacré relié à tel mythe ou divinité et un aspect trivial, nourricier ici), forme des poches de qualité transcendantale, se superposant au temps du vécu, le temps profane, y ajoutant une dimension numineuse.



« C’est en raison de notre prédisposition innée, dit-il, à classer les objets du monde selon une échelle de force [verticale], qu’une simple pierre finit par désigner quelque chose de "tout autre" qu’elle-même. Et ce "tout autre", c’est le lien ; c’est la quantité d’énergie ligative qui se dégage d’un signe à un moment donné de son histoire. »



Ainsi il différencie les sociétés de la tradition vivant presque exclusivement dans cette qualité temporelle double, de nos sociétés modernes où le temps profane lutte avec et supplante le temps sacré. (même si l'on peut percevoir des formes de croyances et de mythes modernes)
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