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Citations de Olivier Rolin (348)


... Qu'y-a-t-il là-bas, derrière ? Rien, le bord du monde peut-être, ou alors la répétition infinie des mêmes choses. Des bois, des champs, des steppes, des chemins, des vols de corbeaux, des clochers minuscules sous les nuages.
La Russie est une forêt, liès, et la Russie est une plaine, polié,. Et la Russie est espace, prostor.
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...ne le prends pas mal, tu es comme moi et comme tout, beauté, le reflet anamorphosé d'un motif primordial. Ainsi, par exemple, étant amoureux de toi, ce n'est pas exactement de moi que je le suis, mais d'une forme dérivée de la même forme que moi. Et chacune de celles qu'avant toi j'ai aimées aujourd'hui - parce que je ne te cache pas qu'avant d'arriver jusqu'à toi, je me suis laissé séduire plusieurs fois - était aussi une variation de ce thème originel, assez proche d'ailleurs de celle que tu réalises et qui te définit, si bien qu'il n'est pas faux de dire que les aimant, je m'approchais de t'aimer (mais on peut prétendre aussi, cela revient au même, que t'aimant, c'est elles toutes que j'aime en toi : car fidélité amoureuse et don-juanisme ne sont que deux aspects d'un même phénomène lumineux, comprends-tu ?).
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Je fais des mosaïques avec des éclats de pierre.Il est vite extrêmement habile dans cette technique ,qu'il utilise à des fins inattendues : il fait des portraits de Staline. Le fait-il par conviction, ou bien pour leurrer l'administration du camp,et obtenir ainsi une autorisation de visite pour Varvara ? Pour que le camarade Staline l'apprenne et réponde à ses lettres, et lui fasse enfin justice ? De toute façon, aveuglement ou pauvre ruse,il y a quelque chose de sinistre à voir cet homme,ce savant,faire sans qu'on l'y oblige le portrait de celui au nom de qui il est crucifié. (p.101)
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C'était en mars 2013 et je devais prendre à Arkhangelsk un petit avion pour aller aux îles Solovki-un autre de ces lieux qui ne se sont pas très centraux dans le monde,mais dans ma vie,si. Je passerais aussi,durant ce voyage,par la bourgade où Brodsky fût exilé, Konocha.Je garde de l'hôtel de ce bord un souvenir divertissant tant il était sinistre.(...)
Dans n'importe quel autre pays,de telles remarques seraient celles d'un enfant gâté, habitué au confort.Elles le sont peut-être, d'ailleurs,je veux bien en admettre l'éventualité, néanmoins elles échappent à la futilité dans la mesure où je crois que cette laideur,ce défaut répandu dans les choses et certains êtres font partie d'une esthétique générale dont le camp du Goulag était le centre obscur.Elles font partie d'un immense travail de domestication du peuple- d'apprentissage de la résignation-dont la terreur était la forme la plus violente,mais l'habitude du moche et de l'insuffisant une autre composante, plus insidieuse et omniprésente. Vraie ou fausse,cette théorie m'est un outil pour tenter de comprendre la Russie contemporaine. "Aucun pays n'a mieux maîtrisé l'art de la destruction de l'âme de ses citoyens que la Russie ",écrit Brodsky. (p.102)
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Détroit de Béring, détroit de la Sonde, de Malacca, de Torrès, détroits d'Ormuz et de Bab-el-Mandeb, détroit de Tiran, détroit de La Pérouse... ce sont des noms qui suscitent en moi le désir d'aller voir les lieux qu'ils désignent, d'être en quelque sorte en eux. "Détroit de Tartarie", avec l'idée vague d'éloignement, de sauvagerie qui accompagne le nom de Tartarie, est un des plus attirants. Le vocable "Tartarie" ne désigne rien de précis, aucune région géographique, aucune civilisation déterminée : c'est une contrée très lointaine dans l'est, du côté de la Sibérie ou de la Chine ; l'assonance du nom avec celui de "barbarie", avec le Tartare qui était le lieu le plus profond de l'Enfer des Grecs, le souvenir du "Désert des Tartares", l'entourent d'échos menaçants.
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Mais vos modèles à vous, vous les trouvez dans la pub, cette espèce d’éternité de pacotille qui est le contraire de l’histoire. Alors là, évidemment, c’est le bonheur à tous les étages. Mais ça ne marche pas comme ça. L’humanité, merde, on n’est pas des top modèles…
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Ce jour-là, huit janvier 1934, la Commission gouvernementale pour l'entretien du corps de V.I. Lénine avait respectueusement procédé à l'examen de la momie de Vladimir Ilitch, conservée à l'intérieur du mausolée de la place Rouge. Les membres de la commission avaient été extrêmement satisfaits du résultat, Lénine était frais comme une rose, ce qui constituait, soulignaient-ils, "une performance scientifique d'une importance mondiale, sans précédents dans l'Histoire" (les pharaons n'étant guère présentables).
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Certains de ces morts, comme le météorologue, on sait à présent, des dizaines d'années après qu'ils ont été assassinés, dans quelle fosse ils reposent, on peut aller poser une photo d'eux avec des fleurs artificielles sur l'emplacement de leur supplice, mais l'immense terre russe, zemlia, enferme encore des centaines de milliers de cadavres en des lieux qu'on ne connaître peut-être jamais. L'espace russe, c'est aussi cela, en fin de compte : l'espace de ces morts innombrables.
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Vingt ans d'Afrique m'ont habitué à ne pas considérer la magie comme une chose extraordinaire. L'alcool y aide peut-être aussi.
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C'est sans plaisir mauvais que je rapporte ces choses désolantes : contrairement à certains, la décrépitude russe ne me réjouit pas, et je ne pense pas que nous ayons lieu de nous en réjouir. Ce qui m'étonne, c'est qu'un pouvoir fort, nationaliste, qui a disposé pendant des années de la rente pétrolière et gazière, laisse son pays s'enfoncer dans une telle déréliction.Dans ces régions de l'Extrême-Orient, le contraste avec le modernisme de la Chine voisine est frappant : il faut reconnaître que la dictature chinoise, au moins, est efficace.
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Or un style, c'est aussi ce qui isole : ce qui sépare de la langue usuelle, plate, je l'ai déjà dit ; mais aussi ce qui sépare des autres styles. Ce qui fait qu'un écrivain vrai est irréductible aux autres, incomparable avec les autres, qu'on ne peut le confondre avec nul autre. Un style c'est un exil, une sécession, une retraite volontaire hors de la langue commune, et hors aussi des usages que recueille et exalte la tradition littéraire.
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Une prison y est installée [à Goa en Inde]. À l’entrée, un panneau signale qu’il est interdit d’y introduire « de l’alcool, de la ganja, de l’opium, des feuilles de bétel... des échelles de bambou, des bâtons, des couteaux, des armes à feux, des explosifs, des livres ... ». Il est réjouissant de voir les livres rangés parmi les stupéfiants et les moyens propres à faciliter l’évasion, il y a beaucoup de justesse dans cet avertissement.
(P.196)
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Quand j'écris j'ai l'habitude de marcher de long en large pour chercher les mots,ou les attendre. (...)
A peine ai-je réussi à fabriquer une phrase ou deux que j'ai besoin de me détendre. Et aussi d'une irrépressible envie de bouger-je ne ferais pas un bon ermite, un styliste encore moins. Tout est vide,parfaitement vide le matin de mon départ, et j'ai du mal à y croire. Tant de livres, tant d'objets,tant d'années-trente-sept! La moitié de ma vie,presque toute ma vie d'homme,--tout a fini par disparaître .Liquidation totale.(p.14)
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La réduction des animaux sauvages à l'état résiduel de curiosités touristiques est un des grands mouvements vers le pire qu'aura connus l'époque (...) Pour un archéologue ou un paléontologue du trentième siècle, mettons, s'il y a encore dans ce temps des gens qui se préoccupent de sonder le passé, cette disparition paraîtra sans doute plus significative que les décombres des guerres de Syrie (et je ne dis pas cela pour en diminuer l'importance actuelle, ni l'horreur).
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J'admire la connaissance que Sacha et Anatoly ont de cette nature immense, sauvage, qui les entoure. Leur érudition, me dis-je, vaut bien la mienne. Et en même temps, cependant que Sacha, cramponné au volant de sa vieille Lada, me raconte ses histoires, je me souviens du village presque mort de Baïkalskoïe, je crois comprendre que ce pays, ces gens, ont connu des cataclysmes dont nous n'avons plus idée, et qui nous interdisent, me semble-t-il, de les juger avec ce que nous croyons être nos confortables certitudes.
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Voyager, c'est se déshabituer.
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C'est une petite société bigarrée, cosmopolite, qui gravite dans les alentours de la bibliothèque. En marge du camp, mais nullement clandestine, acceptée par l'administration, encouragée même, pendant longtemps. A côté des travaux épuisants, des misérables rations de pain et de lavasse, des isolateurs glacés et des exécutions, il y a aussi cette vie, vestige d'un temps révolu. C'est le paradoxe du SLON, le "camp à destination spéciale des Solovki". C'est une histoire difficile à comprendre - je ne prétends pas l'avoir complètement, parfaitement comprise. Dans aucun des innombrables camps du Goulag on ne retrouvera cette singularité des Solovki. Un évêque catholique érudit y côtoie un ancien chef des sections d'assaut du parti communiste allemand, un austère météorologue y croise un roi des Tsiganes. Une violence politique extrême les a jetés là, sur cette île que les glaces environnent six mois par an, qu'enveloppe la longue nuit d'hiver drapée d'aurores boréales, un déni extrême de justice les a arrachés à leur famille, leur métier, leur maison, à toutes les choses petites et grandes dont on fabrique une vie et dont le souvenir les poursuit ; mais cette violence, ce déni de justice laissent subsister, un temps au moins, la possibilité d'une existence humaine.
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Il me plairait de penser qu'Alexeï Féodossiévitch sentit naître en lui une curiosité pour les météores en regardant rouler les nuages au-dessus de la plaine infinie. Peintres et écrivains ont maintes fois décrit ce paysage de la campagne russe ou ukrainienne. Profondeur vertigineuse de l'espace, vastitude où tout semble immobile, silence que ne trouent que des cris d'oiseaux, cailles, coucous, huppes, corbeaux. Champs de blé ou de seigle, étendues d'herbes bleues piquées de fleurs jaunes d'absinthe, entre lesquels file un chemin creusé d'ornières. Bosquets de bouleaux et de peupliers graciles, les bulbes dorés d'une église brillant au loin, les toits d'un village, parfois l'éclat mince d'une rivière : c'est le paysage de "La steppe" (qui se déroule dans ces confins ukraino-russes), de "Dans son coin natal", de beaucoup de récits de Tchékhov, qui écrit dans ces années-là, le paysage de la poésie d'Essénine, de tableaux de Chichkine ou de Lévitan. Parfois, au fond d'une distance immense, la cheminée d'une locomotive rappelle qu'au sein de ce temps apparemment figé quelque chose de neuf est en train de se produire, qui est peut-être le progrès, et qui est peut-être aussi une menace.
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On se prend à se demander ce qui se serait passé si la folie de Staline, décapitant toutes les élites du pays, scientifiques, techniques, intellectuelles, artistiques, militaires, décimant la paysannerie et jusqu'à ce prolétariat au nom de quoi tout se faisait, dont l'URSS était supposée être la patrie, n'avait pas substitué, comme ressort de la vie soviétique, la terreur à l'enthousiasme. L'introuvable «socialisme» que les «héros» s'imaginaient construire, et ceux aussi, comme Alexei Féodossiévitch Vangengheim, qui n'étaient pas des héros, seulement d'honnêtes citoyens soviétiques, aimant leur travail, pensant servir le peuple en le faisant avec compétence, peut-être aurait-il existé ? Peut-être se serait-il avéré un système infiniment préférable au capitalisme ? Peut-être le monde entier, à part quelques pays arriérés, serait-il devenu socialiste ?

Allons, ne rêvons pas.
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Ainsi, c'est de lettres qu'elle serait tissée! Supposons... Grouillante
de lettres, tatouée intérieurement, pour ainsi dire, comme les avant-bras et le torse de ce pauvre Wilhelm... (Et autre chose avait-il dit, ce malappris ! Elle en rougit encore. Elle a bien fait de le chasser, vraiment !). Et le Verbe se serait fait chair ! Un formidable entrelacs de mots croisés ! Voyelles, consonnes, même des x et des Z, ainsi ses douleurs, peut-être, ce serait à cause de ces petits crochets et croix minuscules agrippés au-dedans d'elle ? D'un autre côté, s'il n'y avait que des o... On se déferait... Cette idée la fait rire innocemment. Bon, supposons. Ca a l'air de marcher. Maintenant elle peut passer, pour la première fois, au troisième degré de l'enseignement.
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