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Citations de Philip Roth (1711)


Mme Nimkin pleurant dans notre cuisine, "Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi nous a-t-il fait ça ?" Vous entendez ? Non pas : qu'avons-nous pu lui faire, oh non jamais ça - pourquoi nous a-t-il fait ça ? A nous ! qui aurions donné nos bras et nos jambes pour qu'il soit heureux, et un grand pianiste de concert par-dessus le marché ! Vraiment, peuvent-ils êtes aveugles à ce point ? Les gens peuvent-ils plonger dans de tels abîmes de stupidité et vivre ? Croyez-vous une chose pareille ? Peuvent-ils être réellement dotés de toute la machinerie complète, un cerveau, une moelle épinière et les quatre ouvertures pour les oreilles et les yeux - un équipement, Mme Nimkin, aussi spectaculaire que la T.V. en couleur - et continuer à traverser l'existence sans que les effleure le moindre soupçon sur les sentiments et les aspirations de quiconque autre qu'eux-mêmes ? Mme Nimkin, pauvre merde, je me souviens de vous, je n'avais que six ans mais je me souviens de vous et ce qui a tué votre Ronald, le futur-pianiste-de-concert, crève les yeux : VOTRE CHIERIE d'EGOISME ET DE STUPIDITE !
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Mais toi tu ne sais rien de tout ça.Tu ne sais rien de von Ribbentrop,rien de Goebbels,de Himmler et de Hess.Moi si,par contre.Tu as déja entendu parler du chateau en Autriche ou Herr von Ribbentrop régale ses pairs,les criminels nazis?Tu sais comment il l'a acquis,ce chateau?Il l'a volé.L'aristocrate qui en était propriétaire,Himmler l'a jeté dans un camp de concentration,et maintenent,le chateau appartient a ce marchand de vin.Est-ce que tu sais ou est Dantzig,Sandy?Est-ce que tu sais ce qui s'est passé,la bas?Est-ce que tu sais ce que c'est que le Traité de Versailles?Et Mein Kampf,ça te dit quelque choses?
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You have to enjoy power, have a certain ruthlessness, to accept the beauty and not mourn the fact that it overshadows everything else.
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Seymour Levov, dit «le Suédois», ancien athlète, bon citoyen admiré de tous, est un homme brisé. Merry, sa fille adorée, est devenue une terroriste. A-t-il été un bon père?

"Or survient la fille perdue, la fille en cavale, cette Américaine de la quatrième génération censée reproduire en plus parfait encore l'image de son père, lui-même image du sien en plus parfait et ainsi de suite... survient la fille en colère, la malgracieuse, qui crache sur son monde et se fiche éperdument de prendre sa place dans la lignée Levov en pleine ascension sociale, sa fille, enfin, qui le débusque comme un fugitif, qui le pousse la première dans la transhumance d'une tout autre Amérique; sa fille et ces années soixante qui font voler en éclats le type d'utopie qui lui est cher, à lui. Voilà la mort rouge qui contamine le château du Suédois, et personne n'en réchappe. Voilà sa fille qui l'exile de sa pastorale américaine tant désirée pour le précipiter dans un univers hostile qui en est le parfait contraire, dans la fureur, la violence, le désespoir d'un chaos infernal qui n'appartient qu'à l'Amérique.

C'est le dysfonctionnement total du commerce entre les générations comme on l'a vécu naguère, où chacun connaissait son rôle et prenait les règles très au sérieux, c'est la fin des échanges qui nous avaient acculturés depuis l'enfance, tous tant que nous sommes; la lutte pour la réussite des fils d'immigrés, jusque-là rituelle, vient de prendre un tour pathologique. Et où, je vous le demande? Dans le manoir d'un gentleman-farmer, notre Suédois hyperbanal, un type d'équerre comme un paquet de cartes, qui attendait une évolution diamétralement opposée des choses, et qui n'était en rien préparé à ce qui allait se produire. Comment aurait-il pu deviner, avec toute sa bonté soigneusement calibrée, qu'il fallait payer si cher pour vivre dans l'obéissance? L'obéissance, on la choisit pour faire baisser les enjeux, au contraire. Belle épouse. Belle maison. L'affaire se porte comme un charme. Son tyran de père, il le manipule assez bien. Il en jouit un maximum, de son paradis personnel. Ainsi vivent les gens qui réussissent. Ce sont de bons citoyens. Ils ont conscience de leur chance. Ils en sont reconnaissants. Dieu leur sourit. Quand il y a des problèmes, on s'adapte. Or, subitement tout change, et ça devient impossible. Plus rien ne sourit à personne. Et alors qui peut s'adapter? Voilà quelqu'un qui n'est pas fait pour que la vie batte de l'aile - ne parlons pas de l'invraisemblable. D'ailleurs qui est fait pour l'invraisemblable? Personne. Qui est fait pour la tragédie et la souffrance absurde? Personne. La tragédie de l'homme qui n'était pas fait pour la tragédie, c'est la tragédie de tout homme.

Il ne cessait de se regarder vivre de l'extérieur. La lutte de sa vie, c'était d'enfouir ce drame. Mais comment faire? De toute sa vie il n'avait jamais eu l'occasion de se demander:
«Pourquoi est-ce que les choses sont ce qu'elles sont?» Pourquoi se tourmenter lorsque les choses vont toujours à merveille. «Pourquoi les choses sont-elles ce qu'elles sont?» C'est la question sans réponse, et, jusque-là, il avait eu le bonheur d'ignorer même que cette question se posait.

Après toute la tension et l'effervescence qu'il nous avait fallu à nous, gens sur le retour, pour remonter le cours du temps jusqu'à cette heure où son passage nous indifférait tout à fait, et ressusciter ainsi l'innocence de notre promotion au milieu du siècle, l'allégresse de l'après-midi commençait à faire long feu, et je commençais à entrevoir la chose même qui avait dû laisser perplexe le Suédois jusqu'à l'instant de sa mort: comment avait-il pu devenir le jouet de l'histoire? L'histoire, l'Histoire de l'Amérique, celle qu'on lit dans les livres, qu'on apprend à l'école, était parvenue au vieux village paisible d'Old Rimrock dans le New Jersey, dans une cambrousse où on ne l'avait jamais vue pointer le nez depuis que l'armée de Washington avait pris deux fois ses quartiers d'hiver sur les hauteurs de Morristown. L'histoire, qui n'avait pas mordu de façon radicale sur le quotidien du petit peuple depuis la guerre d'Indépendance, avait retrouvé le chemin de ces collines enclavées et, contre toute attente, avec son génie de l'imprévu, elle avait mis à sac la demeure bien rangée des Seymour Levov, n'y laissant que décombres. On se représente toujours l'histoire comme un processus à long terme, mais, en réalité, c'est un agent très soudain.


Sérieusement, tout en évoluant avec Joy sur cette musique désuète, je me mis à m'imaginer pour ma gouverne ce qui avait bien pu définir au héros de Weequahic une destinée en tout point contraire à celle qu'on lui aurait imaginée du temps que cette musique et son invite sentimentale étaient de saison, et que le Suédois, son quartier, sa ville et son pays connaissaient leur âge d'or, le sommet de leur assurance, avec toutes les illusions dont l'espoir est porteur. Tout en tenant serrée dans mes bras Joy Halpern qui pleurait sans bruit sur la vieille rengaine qui nous enjoignait à nous tous, sexagénaires, de «rêver pour que les rêves se réalisent», je fis entrer le Suédois sur la piste. Ce soir-là, Chez Vincent, pour mille raisons excellentes, il n'avait pu se résoudre à me le demander. Pour autant que je sache, il n'avait pas l'intention de me le demander. La raison de sa présence n'était peut-être nullement de me faire écrire son histoire. C'était peut-être plutôt moi qui me trouvais là pour le faire.

Ça n'a rien à voir avec le basket.

Lorsque j'étais gosse, il était bien le seul à m'avoir inspiré, comme à tant de gamins, le désir d'être un autre. Mais se vouloir dans la gloire d'un autre, qu'on soit enfant ou adulte, est intenable pour des raisons psychologiques si l'on n'est pas écrivain, et pour des raisons esthétiques si on l'est. En revanche, embrasser son héros dans sa descente aux enfers, se laisser envahir par sa vie au moment où tout conspire à le diminuer, s'imaginer en proie à la même infortune, s'impliquer non pas dans son triomphe en cette heure irréfléchie où il polarise notre adulation, mais dans le désarroi de sa chute tragique, voilà qui mérite réflexion.

Me voici donc sur la piste de danse avec Joy, et je pense au Suédois, à ce qui est arrivé à son pays en l'espace d'à peine vingt-cinq ans, entre les années triomphales de la guerre au lycée de Weequahic et le moment où sa fille a fait exploser une bombe, en 1968; je pense à cette mystérieuse, cette troublante, cette extraordinaire transition historique. Je pense aux années soixante et au désordre causé par la guerre du Vietnam, aux familles qui ont perdu leurs enfants, et à celles qui ne les ont pas perdus; mais les Seymour Levov font partie des premières. C'étaient des familles progressistes, pleines de tolérance, de gentillesse, de bonne volonté, qui, justement, ont eu des enfants déchaînés, qui sont allés en prison, qui ont pris le maquis, qui sont passés en Suède ou au Canada. Je pense à la chute vertigineuse du Suédois, qui a dû s'en imputer la responsabilité. C'est par là qu'il faut commencer. Il n'y est pour rien, qu'à cela ne tienne. Il se tient quand même pour responsable. C'est ainsi depuis toujours, il porte des responsabilités monstrueuses, il se contrôle, mais il contrôle aussi tout ce qui menace de déborder, il donne le meilleur de lui-même pour que son monde ne se défasse pas. Oui, pour lui, il va de soi que la cause du désastre est une transgression. Quelle autre explication pourrait-il trouver? Il faut que ce soit une transgression, une seule, même s'il n'y a que lui pour la reconnaître comme telle. Le désastre qui le frappe tient à un manquement de sa part, croit-il.
Mais voilà, lequel?

Je dissipai l'aura du dîner Chez Vincent, où je m'étais empressé de conclure étourdiment que tout était aussi simple qu'il y paraissait, et je fis monter sur scène le jeune homme que nous allions tous suivre en Amérique, notre chef de file sur la voie de l'intégration, qui se sentait ici chez lui à la manière même des wasps, qui était américain sans se forcer: non pas parce que c'était le Juif qui trouve un vaccin, le Juif de la Cour suprême, le plus brillant, le plus éminent ou le plus fort, mais au contraire en vertu de son isomorphisme avec le monde wasp où il trouvait sa place par sa banalité, son naturel, son côté américain moyen. Sur les accords sirupeux de Dream, je m'arrachai à moi-même et à la fête des retrouvailles, et je me mis à rêver. Je rêvai une chronique réaliste. J'entrepris de jeter les yeux sur sa vie; non pas sa vie de dieu ou de demi-dieu dont les triomphes nous faisaient exulter gamins, mais sa vie d'homme aussi vulnérable qu'un autre. C'est ainsi que sans savoir pourquoi - or voici que, comme on dirait ailleurs - je le trouvai à Deal, New Jersey, dans la villa de bord de mer, l'été des onze ans de sa fille, du temps qu'elle ne décollait pas de ses genoux, l'affublait de toutes sortes de tendres sobriquets et ne pouvait «résister», comme elle disait, à l'envie d'explorer du bout du doigt ses oreilles si parfaitement collées à son crâne. Entortillée dans une serviette, elle traversait la maison en courant pour prendre un maillot sec sur la corde à linge, et criait: «Me regardez pas, vous autres!»; plusieurs soirs, elle avait fait irruption dans la salle de bains au moment où il se lavait, et s'était écriée à sa vue: «Oh pardonnez-moi, j'ai pensé que...», à quoi il avait rétorqué: «Ouste! Veux-tu bien fiche-le-camper.» Cet été-là, un soir qu'ils rentraient de la plage en voiture, ivre de soleil, affalée contre son épaule nue, elle avait levé les yeux vers lui et lui avait demandé avec un mélange d'innocence et d'audace, en jouant à la grande avant l'heure: «Papa, embbbbrasse-moi comme tu embbrasses mmmmaman!» Saoulé de soleil lui aussi, plein d'une fatigue voluptueuse après une matinée passée à se laisser rouler par les grosses vagues avec elle, il avait constaté en baissant les yeux dans sa direction que la bretel
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Mais en Amérique en général ce fut l'été du marathon de la tartufferie : le spectre du terrorisme qui avait remplacé celui du communisme comme menace majeure pour la sécurité du pays, laissait place au spectre de la turlute.

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On peut tout surmonter, avait repris Phoebe, même si la confiance est trahie, à condition que la faute soit avouée. Dans ce cas-là, on devient partenaires sur un autre registre, mais on peut rester partenaires. Tandis que le mensonge, le mensonge n'est qu'une manipulation minable, une manipulation méprisable de l'autre. On regarde l'autre agir selon des informations incomplètes, autrement dit s'humilier. C'est tellement banal, le mensonge, et en même temps, quand on te ment, tu n'en reviens pas. Les gens que vous bafouez, vous les menteurs, avalent tellement de couleuvres qu'ils finissent par baisser dans votre estime, malgré vous, n'est-ce pas? Je suis sûre que les menteurs sont si habiles, si tenaces, si fourbes que c'est la personne à qui ils mentent qui finit par leur sembler sérieusement limitée.
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Le moine qui s'était immolé par le feu avait dans les soixante-dix ans ; maigre, le crâne rasé, il portait le vêtement jaune safran. Assis en tailleur, le dos bien droit dans une rue déserte, quelque part au Sud Vietnam, assis avec grâce face à une foule de moines venus assister à l'évènement comme ils auraient observé un rite religieux, il avait renversé un grand bidon de plastique plein d'essence ou de kérosène sur lui, et il avait aspergé l'asphalte autour de lui. Puis il avait gratté l'allumette, et un nuage de flammes déchiquetées avait jailli de lui en crépitant.
Parfois les cirques présentent un cracheur de feu, qui semble faire sortir des flammes de sa bouche. Là, dans la rue de cette ville vietnamienne, ce moine à la tête rasée donnait l'impression non pas que les flammes s'emparaient de lui, mais qu'elles s'élançaient de sa personne même, et pas seulement de sa bouche, mais en éruption spontanée, de son crâne, de son visage, de sa poitrine, de son ventre, de ses jambes et de ses pieds. Comme il demeurait parfaitement droit, que rien dans sa physionomie n'indiquait qu'il se sentait brûler, qu'il ne remuait pas un muscle et criait encore moins, on aurait d'abord dit un numéro de cirque ; il semblait que c'était l'air qui se consumait, et non pas le moine, qu'il avait mis le feu à l'air, sans courir le moindre risque pour sa part. Sa posture était demeurée exemplaire ; c'était celle d'un homme absolument ailleurs, qui mène une autre vie, serviteur d'une contemplation oblative, méditative, sereine — simple lien dans la chaîne de l'être, tout à fait en dehors de ce qui se trouvait lui arriver au vu et au su du monde entier. Pas de cris, pas de convulsions, seulement ce calme au coeur des flammes — la caméra n'enregistre aucune douleur —, seuls souffrent le Suédois, Dawn et Merry, horrifiés dans leur salon. Sans préavis viennent de s'engouffrer chez eux le nuage de flammes, le moine au dos bien droit, sa brusque liquéfaction, sa chute; ils sont entrés chez eux, tous ces autres moines, assis le long du trottoir, témoins impassibles, certains les mains jointes devant eux à l'asiatique, dans un geste de paix et d'unité ; il est rentré chez eux, dans Arcady Hill Road, le cadavre carbonisé et noirci, tombé sur le dos dans cette rue déserte.
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« Je pense, quand je pense à la mort », était en train de dire Fish à ce moment-là, « je pense que je préférerais n’être jamais venu au monde. Je préférerais n’être jamais venu au monde. C’est ça, oui.
– Pourquoi ?
– Parce que la mort, la mort est une chose horrible. Tu sais. La mort, c’est pas une bonne chose. Alors je préférerais ne pas être né. » Cela, il le dit avec colère. Moi, je veux mourir parce que je n’y suis pas obligé, lui ne veut pas mourir parce qu’il y est obligé. « Voilà ma philosophie, dit-il.
– Mais ta femme était extraordinaire. Une très jolie femme.
– Oui, c’est vrai, ça c’est vrai.
– Deux enfants très bien.
– Ouais. Ouais. Oui. » La colère reflue, mais très lentement, par degrés. Ça ne va pas être facile de le convaincre qu’il peut y avoir des choses pour compenser l’existence de la mort.

(p. 570-571)
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Ce n’était pas la première fois qu’il pensait à sa mère, à sa mère assise sur la promenade en bordure de plage, attendant que Morty revienne de la guerre. Elle non plus n’avait jamais cru à sa mort. La seule chose qu’on est incapable d’admettre, c’est qu’ils sont morts. Ils vivent une autre vie. On se donne toutes sortes de raisons pour expliquer pourquoi ils ne sont pas rentrés. On commence avec les rumeurs. Quelqu’un jurait qu’il avait vu Nikki sur scène, sous un autre nom, pendant la saison d’été dans un théâtre de Virginie. (…) Seul Linc, quand ils étaient seuls, avait le courage de lui dire : « Honnêtement, Mick, tu le sais qu’elle est morte, non ? » Et sa réponse ne variait jamais : « Où est le corps ? » Non, la blessure ne se referme jamais, la blessure reste vive, comme chez sa mère, jusqu’à la toute dernière extrémité.

(p. 205-206)
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« (…) – La souffrance du malade se mesure au poids de ses secrets. » (…) « Faux », lui dit-il, (…) « ta hardiesse se mesure au poids de tes secrets, tes haines se mesurent au poids de tes secrets, ta solitude se mesure au poids de tes secrets, ta capacité de séduction se mesure au poids de tes secrets, ton courage se mesure au poids de tes secrets, ton vide se mesure au poids de tes secrets, ton désarroi se mesure au poids de tes secrets ; ton humanité se mesure… – Non. Ça mesure combien tu es inhumain, non humain et malade. C’est le poids des secrets qui t’empêche de t’asseoir en face de ton être profond. On ne peut pas garder un secret, dit-elle à Sabbath avec fermeté, et trouver la paix intérieure. – Eh bien, puisque la fabrication du secret est l’industrie la plus prospère sur cette terre, voilà qui règle le problème de la paix intérieure. »

(p. 137)
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À l’été 1998, mon voisin, Coleman Silk, retraité depuis deux ans, après une carrière à l’université d’Athena où il avait enseigné les lettres classiques pendant une vingtaine d’années puis occupé le poste de doyen les seize années suivantes, m’a confié qu’à l’âge de soixante et onze ans il vivait une liaison avec une femme de ménage de l’université qui n’en avait que trente-quatre.
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Il était le champion du tact – du tact, de l’esprit, de la patience. La bêtise humaine ne l’étonnait jamais. Même mort, il m’apaise infiniment.
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(Philip Roth à Ivan Klima)
L'écrivain polonais Tadeusz Borowski a dit que la seule façon de parler de l'Holocauste, c'était de se placer du point de vue des coupables, des complices, des impliqués ; c'est ce qu'il a fait dans ses faux mémoires "Par ici pour le gaz, Messieurs-Dames". Il a peut-être même dépeint l'engourdissement moral comme plus dramatique, plus terrifiant qu'il ne l'avait vécu en tant que prisonnier à Auschwitz, justement pour révéler l'horreur du camp mieux qu'une innocente victime. Sous la botte soviétique, quelques-uns des écrivains les plus originaux d'Europe centrale que j'aie pu lire en anglais ont adopté ce même parti-pris - Tadeusz Konwicki, Danilo Kis et Kundera, pour ne nommer que les trois K, progéniture du cafard kafkaïen venue nous dire qu'il n'est pas d'anges immaculés et que le mal vit en nous aussi bien que hors de nous. Encore cette autoflagellation, malgré ses ironies et ses nuances, n'échappe-t-elle pas à l'envie de blâmer et à l'habitude morale de situer le mal dans le système alors même qu'on est en train d'observer comment ce système vous contamine. Vous avez l'habitude d'être du côté de la vérité, avec tous les risques que cela comporte de devenir imbu de sa propre vertu, bien-pensant, didactique, et de donner dans la contre-propagande obligée ; vous n'avez pas l'habitude de vivre sans avoir contre vous un mal objectif, bien défini et reconnaissable. Je me demande ce qu'il adviendra de votre littérature et des habitudes morales qui y sont implantées, à présent que le système a disparu et que vous voilà en tête-à-tête avec vous-même.

1990, p. 98.
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Le romancier apprend au lecteur à appréhender le monde comme question. Il y a de la sagesse et de la tolérance dans cette attitude. Dans un monde construit sur des certitudes sacro-saintes, le roman est mort. le monde totalitaire, qu'il ait pour base Marx ou l'islam, est un monde de réponses plutôt que de questions. le roman n'y a pas sa place. En tout cas, il me semble qu'à travers le monde les gens préfèrent aujourd'hui juger plutôt que comprendre, répondre plutôt que demander, si bien que la voix du roman peine à se faire entendre dans le fracas imbécile des certitudes humaines.

M. Kundera, entretien avec l'auteur. 1980
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On manipule la littérature pour toutes sortes de raisons et avec des objectifs aussi bien généraux que privés, mais on ne devrait pas confondre de telles utilisations arbitraires avec la réalité que l'écrivain est difficilement parvenu à faire exister dans une oeuvre d'art. Après tout, quantité de romans, dont la qualité n'a rien de commun avec ceux de Kafka, en arrivent parfois à être canonisés et élevés au rang d'oeuvre d'art non pour leur valeur esthétique mais, aussi indigents soient-ils d'un point de vue littéraire - par exemple le réalisme soviétique -, à cause de leur utilité en tant que propagande et de leur valeur aux yeux d'une cause politique ou d'un mouvement; ce ne sont que des affiches politiques déguisées.
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Si on a un peu de cervelle, on sait très bien que la vie que l'on mène est idiote et ce, au moment même où on la vit. Si on a un peu de cervelle, on sait qu'on est voué à mener une vie idiote parce qu'il n'en existe pas d'autre. Et qu'il n'y a rien de personnel là-dedans. Quoiqu'il en soit, des larmes d'enfant lui montent aux yeux tandis que Mickey Sabbath - oui, le Mickey Sabbath de la bande de soixante-dix-sept milliards de connards qui constituent l'histoire de l'humanité - qui dit adieu à l'idée qu'il est seul et unique en son genre et qui marmonne le coeur brisé: "Qu'est-ce que ça peut foutre?"
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Si la question ne se pose pas, ne la mets pas sur le tapis.
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Philip Roth
Le devoir de l'écrivain, c'est d'écrire du mieux qu'il peut.
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Nous sommes dans le flot du temps, nous y coulons jusqu'à la noyade finale.
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Et soir après soir, je m'endormais dans l'enchantement du magnifique but tout neuf que j'avais trouvé à ma vie de gosse de huit ans : y échapper.
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