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EAN : 9782070140824
208 pages
Gallimard (26/02/2015)
3.35/5   17 notes
Résumé :
À Tcheremochné, dans cette région bousculée par l’histoire que l’on appelle Bucovine, vit Daroussia. Tout le monde se moque d’elle dans le village, de son mutisme, de son prétendu handicap mental. On la dit folle mais Daroussia sait qu’elle n’est pas simple d’esprit. Si elle ne parle jamais aux autres ses pensées fusent sans retenue, et il n’y a qu’au cimetière, seule près de la tombe de son père, que Daroussia la Douce parvient à converser à voix haute.
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Alors que l'Ukraine est hélas toujours sous les feux de l'actualité, la traduction de Daroussia la douce, livre de Maria Matios, l'une des représentantes les plus éminentes de la littérature du pays, apporte un éclairage nouveau sur son destin mouvementé tout au long du XXe siècle. La première partie de Daroussia la douce se lit comme un conte naïf. L'histoire d'une jeune femme muette que beaucoup considèrent comme simple d'esprit mais qui n'est que discrète et renfermée jusqu'au jour où elle rencontre un homme étrange avec qui elle pourrait enfin couler des jours heureux, mais le conditionnel est de rigueur. Dans un deuxième temps, le roman bascule une trentaine d'années en arrière, soit au début de la seconde guerre mondiale. le ton se fait alors plus dramatique alors que la Bucovine, région ouest de l'Ukraine, voit défiler des occupants divers : allemands, roumains, soviétiques. Et ainsi se dévoile l'origine du mutisme de l'héroïne du livre, traumatisée par un souvenir d'enfance. le roman fait une large place aux commentaires des voisines de Daroussia, véritables commères, comparables à un choeur antique. Assez décousu dans un premier temps, le roman, à mesure qu'il devient plus grave, acquiert une véritable force et se révèle une chronique singulière, originale et prenante de ce coin d'Ukraine que L Histoire a sérieusement malmené.
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Ce texte présente une vision d'une Ukraine rurale écrasée par les superstitions, les commérages et, de manière plus violente et surtout imprévisible, les brutalités des envahisseurs successifs, au cours de l'époque soviétique et de la Seconde Guerre mondiale.
C'est un roman foncièrement sombre, éclairé seulement par quelques pages de complicité entre Darroussia et Ivan, ou entre les parents de Darroussia 15 ans plus tôt.
Mais ces passages sont brefs et l'obscurité retombe bien vite sur ce décor, où les voisins médisants ou les petits chefs sadiques détruisent facilement la moindre tendance à l'humanité.
Un tableau aussi désespérant fait hélas douloureusement écho au sort actuel de l'Ukraine, soumise, une fois encore, à une invasion barbare et arbitraire. Mais outre des longueurs (les bavardages des voisines !), un style aride, une narration parfois confuse et une manière étonnante de survoler certains moments-clés (la fin est une vraie queue de poisson), ce texte ne donne pas une image très positives des Ukrainiens : Darroussia est appelée la Douce, pour ne pas dire l'Idiote ou la Folle, mais tous les habitants du village ont l'air d'être aussi abrutis les uns que les autres. Femmes superstitieuses, hommes violents, alcooliques, voleurs... c'est à désespérer de l'espèce humaine.
C'est donc une lecture qui ne m'a pas vraiment emballé, surtout à cause des longueurs, de l'écriture plate, très descriptive, ainsi que de cette vision sombre dont je n'ai pas réussi à extraire un sens ou l'étincelle d'une réflexion.
Il faudra que je me tourne vers d'autres autrices ukrainiennes.
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Dans un village en Ukraine, vit une jeune fille du nom de Daroussia. Elle est surnommée Daroussia la Douce car elle serait une folle : elle ne parle jamais à personnes, sauf au cimetière devant la tombe de son père, adore plonger dans le lac glacé où s'enterrer a moitié, et la mention de bonbons lui donne des malaises. Pourtant, Daroussia comprends le monde une fois chez elle.
Un jour, arrive Ivan Tsvytchok, un excentrique personnage, vagabond simple, qui excelle dans la guimbarde, un instrument singulier. Il rencontre Daroussia et s'installe avec elle. Tout semble bien se dérouler à merveille puisqu'ils s'entendent bien. Mais une nuit, lorsqu'il revient chez lui, vêtu comme un soldat soviétique, Daroussia craque...
Le titre m'avait interpellé ainsi que la couverture très belle et l'étrange résumé. Verdict ? J'ai plutôt bien aimé, même si je m'attendais plus.
L'écriture est très déstabilisant, poétique mais parfois aussi un peu haché, il faut s'habituer. C'est peut-être aussi la traduction qui tente de retranscrire l'écriture singulière.
Encore plus surprenante : il y a plusieurs voix pour le livre, avec la présence d'un choeur de commères où la voix de Maria, une voisine bienveillante de Daroussia, nous rappelant les choeurs tragiques.
Ce qui fait la force du roman, c'est que on est plongé dans l'univers des villages ukrainiens, avec leurs traditions, leurs superstitions surprenantes, leurs folklores mais aussi aux commères malveillantes, aux jalousies, aux jacasseries bêtes et futiles. le jugement est plus vite donné dans les campagnes.
Mais l'Histoire, la terrible Histoire, est là malheureusement. Car le décor est une région ayant été sans cesse meurtrie par des occupations et des exactions de leurs occupants, les plus terribles étant ceux des Soviétiques. La vie y est bouleversée et parfois brisée comme celui du passé de Daroussia. Une fois qu'on découvre l'histoire de ses parents et surtout de la raison sur les maux de Daroussia, on ne peut être qu'horrifier et compatir douloureusement pour elle. On dénonce aussi la jalousie destructrice et à quel point les ragots peuvent faire mal.
En revanche, il y a des longueurs mais trop de longueurs, souvent le récit s'eternise avant la dernière partie dévoilant le secret de Daroussia. Ceux qui veulent tout de suite de grands actions, renoncez, il n'y en a guère.
Mais c'est un livre à ne pas délaisser, car derrière le destin de la belle Daroussia, c'est celui d'une partie de l'Europe marquée par L Histoire. C'est aussi montrer la marque de l'Histoire sur l'existence humaine. Mais aussi que les fous ne sont pas toujours aussi fous...
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Un roman tout en délicatesse et pourtant dans un contexte extrêmement dur.L'écriture de Maria Matios est imagée, poétique .Ce livre est à découvrir d'urgence,on y voit l'histoire de ces Ukrainiens entre 1930 et 1970.
Daroussia vit à Tcheremochné, elle ne parle pas, on la dit muette et simple d'esprit . Elle est allergique aux sucreries, doit s'enterrer dans la boue ou dans l'eau pour cesser de souffrir terriblement.
Un jour, elle rencontre Ivan, qui fabrique de guimbardes.
On va découvrir son passé, difficile.
C'est une très belle histoire servie par une merveilleuse plume.
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L'histoire de Daroussia, dans ce roman, se conjugue en trois temps: le présent, cette jeune femme "muette" que les commères du village prennent pour simplette mais que l'on protège tout de même. Et puis sa rencontre avec Ivan, le fabricant de guimbarde, qui va en héros essayer de rendre sa voix à Daroussia tout en lui vouant un respect absolu. Enfin "son" histoire, liée au passé tragique de l'Ukraine, et c'est dans cette partie du livre que l'on découvre ce qui a marqué Daroussia au point de la rendre mutique.
Une écriture très belle , beaucoup de poésie. Des passages un peu confus à mon goût.
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Citations et extraits (44) Voir plus Ajouter une citation
« Vous ne vous y connaissez pas tellement, car une femme à la
maison n’est pas forte pour ce qui est de la guerre et ne comprend pas
grand-chose aux affaires militaires. Mais regardez juste : les Roumains
ont pris les hommes pour la guerre-abattoir, et qui sait combien en
seraient revenus et si les corbeaux n’avaient pas déjà dispersé leurs os
blancs ? Et s’il y en a qui reviennent, qu’est-ce qui se passera ensuite ?
Mais écoutez bien ceci, ma bonne dame, cela veut bien dire quelque
chose si les Roumains ont déguerpi sur l’ordre allemand comme
autrefois les Moscovites : ni vu ni connu ?! Ils étaient là plus de vingt
ans et l’Allemand en une seule journée les a chassés comme la
poussière d’une remise. C’est pas pour rien si, au lieu des Roumains,
les Magyars aujourd’hui filent dans les villages et gâtent nos filles.
C’est que peut-être l’Allemand ne fait pas tellement confiance aux
Roumains et préfère tenir le front avec ce maudit Magyar. Onoufriy
Matios est descendu ces jours-ci d’Okolena et raconte que tout
Okolena a été creusé de tranchées, et qu’une autre ligne est en
préparation du côté de Sirouk. C’est que, d’ici un jour ou deux, il y
aura un grand massacre... Quelque chose a changé du côté du front,
vous l’entendez bien, les canons approchent. Et si les canons tirent du
côté de Berehomet, c’est que l’Allemand a pris la décision de fuir chez
lui. Et si l’Allemand se retire, c’est que le front approche et que le
village peut être évacué. L’Allemand est bien ordonné... Je ne dors
pas la nuit et écoute la terre bouger, et je ne fais que retourner les
choses dans ma tête. Je pense à tout, Maria...
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Elle ne se rend chez papa qu'en marchant au beau milieu de la rue. Les voitures passent, les carrioles défilent, les gens se pressent, mais Daroussia n'en a cure : elle va chez son papa en princesse. Les futurs mariés qui se rendent à l'église ou un défunt qu'on porte au cimetière ne céderont le moindre pas du milieu de la rue et personne ne viendra contredire cette tradition. Pourquoi Daroussia ne pourrait-elle pas faire de même ?
Elle avait même demandé autrefois à papa pourquoi la future mariée se rend à l'église comme si toute la rue appartenait à elle seule.
-Car avant le mariage, elle est une princesse, répondit papa.
-Et après le mariage? demanda Daroussia.
Le papa a soupiré on ne sait pourquoi : - Une femme malheureuse.
Tant que Daroussia ne sera pas devenue malheureuse, elle ira toujours chez papa en princesse. Et personne n'a le droit de l'en empêcher.
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Tout de même, elles n’ont rien dans la caboche ni Dieu dans leur
cœur, ses voisines qui pensent qu’elle est simple d’esprit. Elle n’est
pas simple d’esprit, elle est douce.
Elle enveloppe les racines des dahlias dans une couverture, et
alors ? C’était justement au moment où la neige était déjà partie mais
le gel était encore là. Daroussia offrait les fleurs à tout le village car
elle en avait fait une telle récolte en automne qu’il y en avait plus que
de patates dans sa cave. Elle les a donc portées aux maisons qui ne
fleurissaient jamais. Mais comment porter les racines nues par un
froid aussi vif ? Est-ce que Vassuta porte son petit-fils dans le verger
vêtu d’un seul pantalon ? Elle l’emmaillote bien dans une couverture
et ce n’est qu’après qu’elle le prend dans ses bras pour le bercer en
traversant le village. La fleur vivante n’est-elle pas comme cet enfant ?
Daroussia est assise à même le sol, encore chaud des rayons d’été,
et caresse les joyeuses têtes d’asters, ébouriffe de sa main les boucles
odorantes. Elle leur parle, leur raconte tout et rit — qu’y a-t-il de mal
à cela ?
ventre pour me raccourcir la vie avec sa gnôle, qu’il brûle de mille feux,
Seigneur... Et que ma langue sèche de dire des choses pareilles !
... Et Daroussia la Douce, assise au milieu de ses fleurs, à trois pas
de Maria et de Vassylyna, fait et défait sa natte maigre et blanchie
depuis belle lurette, écoutant ce qu’on dit d’elle, et ne fait que sourire doucement.
Pourquoi dit-on qu’elle est douce alors qu’elle comprend tout et
qu’elle sait le nom de toute chose, quel jour on est et combien de
pommes a données le verger de Maria, combien de nouveau-nés il y a eu au village entre deux Noëls et combien il y a eu de morts ?!
Au conseil du village, on consulte le registre pour ce genre de
renseignements, alors que Daroussia tient tout dans sa tête. Elle parle
mieux aux poules qu’aux gens. Les arbres la comprennent, les chiens
la laissent tranquille, mais les gens — non. Ils n’arrivent pas à la
laisser seule.
Mais elle n’a pas envie de parler aux gens, car ils pourraient alors
lui donner un bonbon.
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Donc, des deux côtés du Tcheremoche, peu profond au printemps
et débordant en été, mais, indépendamment de la saison, toujours
rapide et bavard, étaient nichés entre collines et monts boisés, comme
dans la gorge profonde d’une femme, deux villages de montagne au
nom identique : Tcheremochné. Si l’on pouvait les regarder à vol
d’oiseau ou au moins du milieu de la rivière, on s’apercevrait que les
deux villages se faisaient face, se reflétant comme un visage dans un
miroir. Depuis la nuit des temps, les habitants des deux
Tcheremochné parlaient presque la même langue maternelle,
joignaient les mains pour le même « notrepère », célébraient le même
jour Noël et Pâques, leurs vêtements aussi étaient identiques, leurs
serments et leurs remerciements, seules les salutations des gens des
deux côtés de la rivière différaient légèrement et c’était probablement
leur unique dissemblance.
Mais de temps en temps leurs terres ancestrales passaient d’un
État à l’autre, comme une femme sans volonté qui échouait à un
homme plus chanceux, c’est pourquoi de temps à autre, et pendant
de nombreuses années sédimentées parfois en siècles, ceux qui
habitaient au pied de deux montagnes jumelles étaient séparés par
une frontière qui passait au milieu de la rivière, non concernée par ce
genre de modification.
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Daroussia colle doucement son oreille contre terre mais, soudain,
saute sur ses pieds. Elle cherche frénétiquement autour d’elle, puis se
frappe le front, enlève de ses épaules la moitié de lijnyk 7 usé et en
recouvre le bas de la tombe, comme si elle enveloppait les pieds gelés
de papa. Lui, qui a tant souffert du froid, qui a tant travaillé sa vie
durant, pourrait-il avoir chaud juste avec de la terre et de l’herbe ?
Lorsque Daroussia entre dans l’eau jusqu’à la taille ou s’immerge
à moitié dans un trou creusé, elle ne cherche pas la chaleur, mais un
salut pour sa tête. Elle entre dans l’eau ou dans la terre, pas pour
longtemps, juste le temps que le feu quitte sa cervelle. Mais si elle
devait rester des années dans la terre glacée, comme papa, elle
chercherait peut-être aussi de la chaleur.
Et voilà, maintenant que la voix de papa a dit qu’il avait froid, elle
décide de le réchauffer un petit peu. Elle caresse à travers la glaise sa
poitrine émaciée, elle prend un à un ses doigts, coiffe ses cheveux. Et
puis elle fait la fête. Et l’église la plus peuplée du village n’est pas
aussi joyeuse que la fête de Daroussia avec papa en ce lieu.
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