Écrivain, critique d'art, professeur de philosophie et éditeur, Jean-Paul
Michel est aussi poète. Après la lecture de " le plus réel est ce hasard, et ce feu ", j'ai voulu poursuivre la découverte de sa poésie, que je connaissais assez peu, avec " Défends-toi, Beauté violente ! ".
Les textes que contiennent ces deux recueils m'ont touché par leur style mais également par la pensée de leur auteur. C'est comme une poésie-pensée, une écriture qui s'inscrit dans la matière de l'expérience, du vécu qui n'omet cependant pas le tragique de l'existence. Dans l'acte d'écrire, Jean-Paul
Michel édifie le poème comme un acte d'intégration, d'acceptation de notre finitude mais aussi un acte de reconnaissance faite à la beauté du monde. Il y a chez lui un retour constant aux réalités élémentaires qu'offrent le soleil, le feu ou la mer, l'efflorescence des choses qui nous ouvre vers une condition, une manière d'être dans le monde.
Pour cela, Jean-Paul
Michel ne craint pas de bousculer, de défaire la langue et ses signes pour qu'elle atteigne un pouvoir nouveau, une capacité à étonner, à captiver, à éblouir.
Il y a dans les textes des deux recueils des formes syncopées, fragmentées qui scindent les mots et les phrases mais qui n'altèrent pas le rythme, la musicalité et jamais le sens du poème. Il y a chez l'auteur, cette volonté de permettre au langage d'égaler tout ce qui est, d'unir plus étroitement le monde à la perception, même imparfaite, que nous en avons.
Illustration de cette belle poésie, ce poème que j'ai gardé comme un de mes préférés :
« Nous avons tout donné à la hâte vienne
le temps d'un retour recueilli Viennent
présence quiète vie confiante - mais
les nommer seulement mesure
leur perte
Se pourrait-il qu'une heure nôtre un jour tournât
vers un autre point - clair et heureux - un visage
formé à scruter l'obscur - d'être de
n'être pas ?
Ce qui, hier, noir et cruel garda
quelque gaîté dans nos désordres se
pourrait-il, maintenant, nourrir de l'accueil, du
recueil de cela qui, hier, fut
réputé ennemi &
affronté ?
Nous seront-ils donnés le talent de patience, le goût
du retour à la flambée
des choses
- l'acharné devoir de ne pas
renoncer ?
Et quelle « Paix » ? Comment se pourraient taire
la douleur, la joie, le Feu
qui nous emportent, les rires sous
des soleils - cruels
d'injuste gaîté ?
Ce goût, par crises, d'un « oui » - pourtant ! »
.