Olympien, prodigieux, «
Histoire de Lou » est salvateur. « Grâce à l'association « Les Amis de
Jean Proal » les Éditions La Trace viennent de rééditer ce magistral récit. Interlude, perle rare, ce texte de renom est un classique de haute littérature. Dans ce monde de fable et d'ésotérisme, d'une picturale philosophie, l'histoire assigne la douceur de vivre dans l'envergure d'une épiphanie déployée : le sens avant le mot. L'idée venue des profondeurs intrinsèques d'un livre inoubliable, magique matin et nuit métaphysique. Tout est entrelac, ferveur et apprentissage. Dans ce conte des sagesses révélées l'écologie affleure ses prémices sans même s'en douter un seul instant. Visionnaire et appliquée, l'humilité des grandeurs d'âmes, les paysages à perte de vue, des animaux doués d'anthropomorphisme. Des êtres, farandole dessinant les étoiles pour demain. Ce texte interlude est une chance. le marque-page qui retient le meilleur de toutes vies.
« Lorsque le petit garçon ouvrit les yeux après la sieste, il ne vit que le ciel bleu noir entre les crêtes blanches des montagnes, car il était couché sur le dos, juste au milieu de la vallée. »
Lou, le fils imaginaire que
Jean Proal façonne tel Geppetto avec la marionnette Pinocchio. Lou, qui murmure à l'oreille des animaux, poésie théologale. Lou est innocent, pur, les cheveux rouges fée, n'ayant de crainte que l'abîme d'une mère disparue à sa naissance.
« Enfant intensément vivant, libre et lumineux. »
Le conte dévoile sa gestuelle. « La Dame des Neiges » veut anéantir Lou et Pa son père. Les hommes ne peuvent franchir le royaume de la montagne, sanctuaire, lieu vierge, l'écologie s'élève, apothéose. Une double lecture annonce ce qui advient. Visionnaire, poétique et regain, lever du voile sur une histoire parchemin. « La Dame des Neiges » parle aussi aux animaux.
« Debout autour de la table du grand Conseil, légèrement inclinés, les notables du Royaume attendaient que la Dame des Neiges eût pris place. »
« Ils n'ont que deux pattes, dit le chamois d'un ton dédaigneux : des pattes comme des arbres. »
Pa et Lou déambulent dans cet espace de quête et de quintessence. Les animaux métaphoriques :
« Ils ne parlent pas, dit la deuxième hulotte, puisque l'homme aux cheveux blancs s'est endormi dans l'herbe. Mais le petit garçon m'a demandé si je voulais être son amie. » « La mère des truites danse comme une jeune fille à la surface du lac rond. -Tu veux dire qu'elle chasse ! demanda la Dame. -Elle ne chasse pas, répondit la troisième hulotte, froissée : elle danse. Elle danse pour le petit garçon. »
Comment réagir lorsque ses sujets (les animaux) sont subjugués par « Point Zéro » : Lou, la voix d'or et le coeur Graal ne sachant que le langage de l'immaculé, la candeur des héros qui s'ignorent.
Vallée entrelac, plénitude, peuple solitaire, alliance d'une reine, la nature macrocosme, « La Dame des Neiges » est pourtant l'emblème du bien contre le mal. La rime est belle à couper le souffle. Lechant glorieux.Le conte éclat et les larmes heureuses.
« Elle sentit lui revenir, la dresser, la durcir, toute sa vertu qui était responsabilité. Cette route… » « le métier de Pa c'était de faire de vraies routes dans la montagne avec de vrais dessins. Man ne pouvait pas se passer de la montagne et Man est morte. Et depuis nous faisons la route qui doit nous ramener au pays de Man. Mais moi je sais bien que ce n'est pas une vraie route. »
Cette fable est renom. Grave et belle, douce et bien au-delà de Lou, la route des mirages révélés. La langue noble d'un texte qui touche à l'invincible. Dans cette miraculeuse envolée littéraire, on ressent l'amplitude d'un incontournable. Lou, Pa, La Dame des Neiges sont les paraboles d'un monde rêvé, ce que la montagne délivre comme messages subliminaux. On ressent la quiétude des syllabes enchantées. Ce texte est cela : l'apaisement et la grâce d'une écriture culte.