Une rare déception chez cet éditeur ô combien appréciable...
Le second roman d'Étienne Deslaumes, récemment paru (2012) chez
Monsieur Toussaint Louverture, un éditeur qui compte depuis un moment parmi mes chouchous, m'a beaucoup déçu.
À l'occasion d'une fusion / absorption entre deux sociétés d'assurance, le narrateur, directeur juridique de l'absorbée, plus petite, dresse sur quelques mois un portrait plutôt vitriolé de ses collègues et patrons, entre observations de psychologie clinique et simples remarques désabusées, sur le thème général de la méchanceté / médiocrité de l'être humain au travail...
Soit, le thème est bon, et peut être très riche... Mais on ne trouvera ici ni la verve et la jubilation d'un Agrati lorsque son Zol colorie ses tableurs en attendant l'improbable nouvelle mission, ni la férocité parodique d'un
Alain Wegscheider lorsqu'il applique thématique et vocabulaire du management à des entreprises (réellement) mafieuses, ni les clins d'oeil poétiques d'un
Julien Campredon (chez le même éditeur), ni surtout, dans un registre plus sobre (et donc plus proche de celui d'Étienne Deslaumes), les minutieux agencements et la fougue verbale du grand précurseur du genre qu'était
René-Victor Pilhes, dont "
L'imprécateur" (1974) reste difficile à égaler...
À force de cultiver un registre de demi-teintes mornes, sans réelle saveur, et avec un humour trop proche de celui de "Caméra café", l'ennui s'installe, sans que l'on parvienne à en créditer l'intention de l'auteur...
Il reste au final quelques bons mots, quelques bouts de portraits bien vus, ce qui est tout de même maigre, et l'espoir que l'auteur saura nous enchanter davantage la prochaine fois...