« Prince, n'enquerez de sepmaine
Où elles sont, ne de cest an,
Qu'à ce refrain ne vous remaine :
Mais où sont les neiges d'antan ! »
En poésie, j'ai toujours préféré
François Villon que je cite ici, à
Charles d'Orléans. Villon, c'est mon filon, c'est mon sillon, c'est mon jargon. Les princes, qu'ils soient à baïonnettes ou à talonnettes, ce n'est pas trop ma chansonnette...
Quant aux princesses, je les préfère plus roturière que royale, elles sont royales lorsqu'elles sont élues de mon coeur.
Il en est cependant une, proche de la Cour sous le règne de Charles X, qui m'intriguait depuis quelques lustres,
La Princesse de Montpensier et j'avais envie de découvrir les territoires de son coeur et de son âme. Alors, vite, je vous entraîne à galop vers elle.
La particularité de ce roman du XVIIème est son auteure, une certaine
Marie-Madeleine Pioche de la Vergne, comtesse
De La Fayette, oui cette fameuse
Madame de la Fayette...
En ce temps-là, c'est-à-dire en 1566, la France est déchirée par la guerre civile, une guerre de religion qui n'en finit pas et qui débouchera sur la tragique nuit de la Saint-Barthélemy, le 24 août 1572.
Dans ce tumulte, la belle Mademoiselle de Mézières est contrainte d'épouser le Prince de Montpensier alors qu'elle aime le Duc de Guise.
Objet des désirs du brillant Duc d'Anjou, futur Henri III, et de l'amour sincère du comte de Chabannes, ancien précepteur de son mari, comment cette toute jeune femme, déchirée entre son devoir et sa passion, pourra-t-elle trouver sa voie au milieu du marigot que forme la Cour ?
L'Histoire nous apprend en effet qu'en ce temps-là le monde était aussi dangereux au sein des méandres de la Cour que sur les chemins de traverse.
C'est tout l'intérêt de ce passionnant et court roman, de la taille d'une nouvelle, construit sur des faits historiques que
Madame de la Fayette s'empresse vite d'arranger à sa sauce. Intéressant d'ailleurs de lire dans les notes en bas de page que cette histoire aurait influencé le destin du Duc de Guise et certains de ses actes futurs... Quand on connaît la bio du personnage, c'est dire l'importance de nos battements de coeur et de leurs émois !
S'il y a quelque chose de souverain pour moi ici c'est le texte. En effet l'autre intérêt, majeur pour moi, fut ce texte, le verbe, le phrasé... L'acuité que cette fameuse
Madame de la Fayette déploie dans son expression. Ah ! Que c'est beau... C'est la langue française du XVIIème siècle dans toute sa splendeur...
Derrière un texte ciselé aux petits oignons, nous découvrons l'envers du décor, les chassés-croisés des sentiments amoureux, la jalousie presque animale, souvent cela se résume à une géométrie assez précise, si l'on s'entend qu'un triangle est précis...
Mais brusquement le triangle ne tient plus. Ici il faudrait en effet parler de quadrilatère, ou de quadrille pour dire les choses plus poétiquement... Oui, quatre : le mari, l'épouse, l'amant et l'ami, le maître à penser...
Et quel ami ! le pauvre Comte de Chabannes que j'ai tant aimé dans son côté pathétique...
Dans ce chassé-croisé qui nous fait sourire au début, nous pourrions penser que les choses sont relativement simples.
Ici, ce sont des affaires de princesses si loin des contes de fées. Dans les contes de fées on ne parle pas d'adultère. Quoique ! Ici, oui, puisque c'est le sujet principal.
Les rivalités des princes tournent autour des princesses au début, à fleuret moucheté. On sent vite que la vraie artillerie est prête à sortir un peu plus tard.
Madame de la Fayette sait m'émerveiller dans cette manière qu'elle a de poser les personnages sur cet échiquier amoureux et d'écrire le désespoir de l'amour.
Il y a en effet un désespoir de l'amour qui est dit ici avec beauté. « L'on est bien faible quand on est amoureux », constate le narrateur.
J'ai eu de l'empathie pour cette Princesse de Montpensier, désirée par des hommes puissants, influents, fracassée dans l'amour, dévastée, princesse devenue éphémère par cette histoire, pas éphémère pour moi, je l'ai retenue par mes pensées dans ce gouffre où elle s'enfouissait.
En revanche, j'en veux terriblement à
Madame de la Fayette sur la dernière phrase du récit, terriblement moralisatrice. Je vous la laisse découvrir...