Le Tueur - Affaires d'Etat, tome 2 : Circuit court

Criminalité et politique... pour certain, une évidence s'impose, pourquoi encore les séparer alors que ces deux mondes sont étroitement liés.

Pour le Tueur, l'enfer c'est cette couverture d'employé modèle. Se taper de l'encodage de données à longueur de journée... vite que cela se termine, même si il faut l'avouer, il y a trouvé certains... avantages.

Quand la mission a été activée, à savoir foutre le bordel entre les petits malfrats des zones Nord et Sud de cette petite ville portuaire française propre à tous les niveaux, il s'est retrouvé dans son élément. Quelques cadavres, une petite mise en scène pour faire croire à un règlement de comptes entre dealers... la routine.

Dans les jours qui vont suivre, ça va mitrailler à tout va entre les bandes rivales, la mission est un succès.

Mais voilà, très vite, les données vont être analysées autrement....

Les flics chargés des enquêtes vont les classer comme espéré. Une fois que cette racaille se fait descendre, ça arrange bien leurs affaires, et personne ne pleurera ces cadavres, à part leur mère, et encore...

Mais le Maire, Marchand, trouve dans ces événements tragiques un élan plutôt inattendu.
Au lieu d'accuser le coup de voir sa ville à feu et à sang, il trouve une énergie pour dénoncer la politique intérieure française comme étant trop centrée sur Paris et ses banlieues.

D'interviews en plateaux télé, le voici même annoncé comme ministre au gouvernement.

En attendant, Adil qui était infiltré dans une de ces bandes est retrouvé mort.
Le Tueur et son équipe perdent la trace du traffic d'armes qu'ils étaient supposé surveiller, un membre de valeur de l'équipe en la personne d'Adil, et Marchand, que l'on soupçonne d'être derrière tous ces traffics est en passe de devenir Ministre...

Le succès de cette opération n'aura été que de très courte durée....

Il est vrai que j'ai mis quelques temps à me replonger dans l'ambiance et que la relecture du premier tome a été grandement bénéfique.
Il est aussi vrai que la forme du livre nécessite une disponibilité intellectuelle pour pleinement en profiter.
Mais, une fois que tout cela est rassemblé, je déguste cette lecture avec un grand plaisir. On est finalement plus proche du roman d'espionnage que de la BD d'action de détente. Les planches alternent les séquences d'introspection et d'analyse societale par le personnage principal avec des séquences d'action brutales et crédibles avec une froideur parfois déconcertente.
Et c'est exactement cela qui me plaît... Ce réalisme et cette précision chirurgicale.
Vivement la suite.

Curieux télescopages avec la vie réelle :
- le 15 novembre, le Monde livre un reportage hallucinant sur le port du Havre intitulé Menaces, enlèvements, assassinats... Coke en docks
- le 12 décembre, on apprend l'arrestation d'un employé municipal de St Ouen accusé d'être le "cerveau" du trafic de drogue local.
Le cycle "Affaires d'état" de la série de Jacamon & Matz a pour décor une ville portuaire sise visiblement sur la Manche et pour protagoniste un cadre municipal dirigeant occulte d'un trafic de drogue. le maire de la ville, pourri jusqu'à la moelle, préfère couvrir le trafic plutôt que d'avoir des voitures brûlées dans ses cités. Flanqué d'un comparse bavard, notre héros le Tueur est missionné par la DGSI - ou la DST, on ne sait trop - pour mettre un peu d'ordre dans tout ceci, quitte à désorganiser le trafic et provoquer une multiplication des règlements de compte.
Le scénario sonne juste, le dessin est de qualité et la couleur soignée. Les habitués de la série connaissent la propension du personnage principal à soliloquer au fil de vignettes gigantesques. de fait, le rythme est lent (on est loin de Katanga ou de S.O.S Météores) et les états d'âme du Tueur atteignent des hauteurs philosophiques inattendues.
Bref, ces deux tomes du premier cycle Affaires d'état sont d'un bon niveau. Cependant il ne faudrait pas que le style de Jacamon & Matz ne devienne caricature.

J'ai pris le temps de relire le tome 1 avant de me lancer dans celui ci : c'était une bonne idée.
Je trouve cette seconde série avec le personnage un peu plus intéressante, un peu plus "policière" avec une enquête que j'arrive à suivre.
Évidemment, il y a toujours ce long monologue très cynique qui parfois m'agace un peu.
Mais ça reste très sympa à lire, et il me tarde de découvrir la suite

Toujours en mission au Havre, Denis et son associé, Nicolas, un ancien des forces spéciales, maquillent leur massacre de malfrats dans un entrepôt pour faire croire à une guerre entre gangs. le stratagème fonctionne à merveille, même si l'un des policiers l'a bien compris, et dans cette ville des meurtres sont alors commis en pleine rue pour se venger. Bientôt le maire de la ville s'exprime sur les plateaux télé pour réclamer davantage de sécurité. Il est alors pressenti pour entrer au gouvernement...

Avec des agents secrets comme protagonistes, observant les criminels comme les politiciens comme s'il s'agissait d'animaux de laboratoire dont ils prévoient les réactions, ce scénario porte essentiellement des réflexions cyniques sur la manipulation des masses par les hommes politiques.