C'est un livre très richement tissé qui mélange différentes histoires et thèmes. La scène d'ouverture, un homme plutôt confus qui arrive en plein hiver sur une île désolée du Canada, est magnifiquement dépeinte. Il contient également une nuance mystérieuse qui rend les sauts qui suivent acceptables. le focus se porte brièvement sur un artiste qui s'installe temporairement sur cette île et trouve un cadavre, puis sur une femme "avec une condition" (une forme d'autisme/Asperger) qui avait apparemment une relation avec l'homme décédé et maintenant veut devenir « le gardien de son passé ». Les trois scénarios s'imbriquent parfaitement, mais
Urquhart commence alors une très longue chronique familiale dans un style quelque peu épique, voire marquezien, comprenant des éléments magiques. Cette chronique semble également fusionner avec les scénarios précédents. Entre-temps, divers thèmes ont été abordés, tels que la question de la normalité et du traitement des personnes atteintes d'une condition, de l'importance des cadres géographiques, de l'inévitable fugacité de la vie et du pouvoir destructeur de la volonté humaine, de la force éclairante de l'amour, etc. Aussi l'atmosphère très détachée, un peu rêveuse qui entoure Sylvia (la femme autiste) m'a séduite, avec son accent sur l'introspection, sur le fait de regarder sans voir et sur le pouvoir dévorant du temps.
Urquhart relie le tout au paysage Canadien, et à une oeuvre de
Robert Smithson, A Map of Glass (d'où le titre), dans laquelle s'expriment la fragilité et la sublimité de la vie et de la matière, ainsi que la relation destructrice entre l'homme et la nature. En bref, ce livre a pas mal de viande sur l'os, et
Urquhart est un styliste qui certainement beaucoup de talent littéraire. Pourtant quelque chose rongeait ma lecture ; il y a quelque chose qui ne va pas dans la structure somptueuse du livre, les différentes intrigues et l'accumulation parfois opaque d'images. Donc, au final, ça ne m'a pas vraiment touché. Peut-être vaut-il la peine d'être relu ?