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EAN : 9782916940731
84 pages
Inculte éditions (13/03/2012)
3.48/5   31 notes
Résumé :
Mikhaïl Kalachnikov est l’homme le plus décoré de Russie. Toujours vivant et célébré, cet inventeur insatiable a fait basculer le siècle avec une arme éponyme, l’AK-47. Son arme a toujours été du côté des soldats les moins bien formés, pour changer de mains avec le temps : du soldat de l’Armée Rouge aux gangs de Los Angeles, en passant par les guérilleros cubains, les enfants-soldats en Afrique et les Talibans en Afghanistan. En 2011, 100 millions d’AK-47, copies et... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Du mythe de l'ingénieur global au triomphe du marchand fragmenteur, avec l'AK 47 et son inventeur...

Paru en mars 2012, ce court texte (80 pages) est l'adaptation de la pièce radiophonique "AK-47" réalisée pour France Culture.

Deux fils, étroitement et brillamment enchevêtrés : d'une part, la vie de l'ingénieur mécanicien Mikhaïl Kalachnikov, inventeur, passionné, patriote fervent, conducteur de char, protégé de Joukov et de Voronov, général sur le tard après avoir été fils de déporté dékoulakisé et fugueur par deux fois (au moins), d'autre part, le destin de sa création la plus célèbre, l'AK-47, symbole du progrès mécanique technique, de la robustesse pensée, des luttes de libération, avant de devenir, dans un de ces tragiques ou ironiques retournements de l'histoire, celui des conflits incessants du capitalisme triomphant et parcellisant, celui des enfants-soldats ivres de drogue et de rage, celui d'une consommation quasiment ultime.

Si Oliver Rohe nous laisse un peu sur notre faim, c'est que l'on sent bien qu'il pouvait nous en dire beaucoup plus, tant ses réflexions sur l'imagination technicienne et les paradoxes du capitalisme marchand, ancrées dans les ordres de Lénine sur la poitrine du vieil inventeur et les nécessités du calibre 7,92, font virevolter nos neurones, entre nombreux sourires et yeux stupéfaits...

"(...) et tenteront alors, non sans difficulté, de s'adapter à leur tour aux temps nouveaux qui exigeaient ainsi, pour des raisons de configuration spatiale et temporelle des combats, de stratégie d'attaque et de défense, qu'on règle une bonne fois pour toutes ce terrible dilemme des munitions et qu'on adopte par conséquent un armement individuel inédit.
Maintenant nous tenions enfin le nouveau calibre."

"À observer maintenant une carte répertoriant pour nous les usines de fabrication, les arsenaux et les centres de stockage, les zones de conflits et les routes officielles ou clandestines de la distribution des armes, de ces quelque cent millions de Kalachnikov certifiées ou contrefaites inondant le marché mondial, sans qu'aucune réglementation et qu'aucun contrôle sérieux ne vienne encadrer leur circulation, leur circulation libre et effrénée, à observer les trajets compliqués et les circonvolutions de ce flux incessant de Kalachnikov sur le marché, il devient encore plus aisé de comprendre que ce fusil d'assaut imaginé par un paysan russe bientôt centenaire n'épargne aucun continent et aucune région, que sa dissémination forme un réseau d'échanges de plus en plus dense et touffu, à l'image de n'importe quelle autre marchandise d'envergure planétaire, d'une boisson gazeuse, d'un téléphone mobile ou d'un produit immatériel. (...) Mais cette impression est évidemment fallacieuse, parce que la marchandise AK-47 ne travaille au contraire qu'à la fragmentation permanente des territoires, à leur fractionnement en portions, en parcelles toujours plus réduites sur le modèle de la guerre civile infinie (...)"

Et on n'hésitera donc pas, le cas échéant, à relire l'opuscule sur la route improbable du musée Kalachnikov d'Ijevsk, ou sur celle, un peu plus vraisemblable, de la salle du même nom du Musée d'Artillerie de Petersbourg.
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Le barbon Mikhaïl Kalachnikov a rendu l'âme, le 23 décembre 2013, et on a pu lire des articles célébrant son parcours, et le «succès» commercial de son invention, dans les plus grands journaux.

Adaptation d'une pièce radiophonique publié en 2012 aux Editions Inculte, «Ma dernière création est un piège à taupes» recèle, sous une écriture simple et d'une apparente froideur, une narration brillamment conçue - juxtaposant les fils entrelacés de la vie de Mikhaïl Kalachnikov, de l'histoire de l'AK-47 «symbole brandi par l'exploité contre le capitaliste, par l'opprimé contre le colonisateur» devenu une marchandise courante, et enfin des images de guerre, témoignages de la fragmentation des conflits, et de l'horreur du spectacle diffusé par les grands media, créateur de compassion et de satisfaction personnelle -, une approche narrative qui permet d'écarter tout risque d'une fascination esthétique pour une arme devenue une «icône», la kalachnikov AK-47.

On découvre ici un Mikhaïl Kalachnikov ingénieur de génie, totalement dévoué à l'efficacité guerrière autant qu'à l'esthétique de son invention, sans aucune attention à ses conséquences, par aveuglement ou par stupidité. Cet homme, qui était aussi poète, est représenté en chien aboyeur, toujours focalisé sur l'amélioration de son arme, bien que la défaite allemande, son obsession initiale, ait été depuis consommée depuis des décennies et malgré la diffusion de l'AK-47 sur tous les théâtres de conflits, finissant par se retourner contre l'Armée rouge elle-même.

Une lecture dont on ne peut regretter que la brièveté, d'une intelligence et d'un souffle impressionnants.
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Le sous-titre cynique, " Mikhaïl Kalachnikov, sa vie, son oeuvre", ainsi que l' illustration de la couverture en disent long sur le sujet abordé. le roman est construit à partir de trois récits entremêlés. Oliver Rohe nous livre d' une part la biographie d' un homme, né pratiquement avec la Révolution d' Octobre et toujours considéré dans son pays comme héros national depuis sa tristement célèbre conception. Un second récit retrace l' historique du célèbre "bébé" , l' Avtomat Kalachnikova, comment ce fusil d' assaut, au départ symbole de l' affranchissement des peuples a fini par devenir un banal objet de la mondialisation au prix attractif, envahissant en quantités faramineuses - cent millions d' exemplaires en circulation-la totalité des zones de conflit de la planète, précédé par sa réputation de robustesse et de fiabilité. En troisième lieu, l' auteur met en scène l ' AK-47 dans des images - choc extraites des médias internationaux. En fin de compte, ce court essai ( 82 pages), brillamment rédigé, se lit d' une traite : c' est instructif, édifiant et somme toute ......déprimant.
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Lire ce livre d'une traite - comme une salve d'AK 47.
Faire appel à ses réminiscences géopolitiques de la fin du siècle passé pour apprécier le cheminement de cette arme mythique qui passe des mains du brave soldat soviétique, à celui des révolutionnaires anti-coloniaux puis des anti-impérialistes, puis des terroristes de tous bords, puis, comble de l'ironie, des talibans anti-communistes pour finir entre celles des truands de banlieue.
Réfléchir à l'énorme industrie générée par cette arme, à son marché mondial, et ses réseaux de distribution.Unique.
Penser que tout cela n'a été rendu possible que par la volonté d'un fils de koulak, échappé d'un camp de Sibérie, devenu symbole d'un régime dont il était exclu au départ.
Refermer le livre, le rendre à la bibliothèque ou le ranger dans la sienne.
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Kalachnikov. Sa vie son oeuvre. Ce fils de paysans modestes né en 1919 a d'abord connu la déportation en Sibérie. Amoureux de l'ordre et de la mécanique, il est l'inventeur du fusil d'assaut l'AK-47 dont le succès dépasse toutes les ambitions et les frontières, de la sphère étatique à la sphère privée. On n'arrête pas le progrès!
Récit très court à l'ironie froide et mordante. Un petit chef d'oeuvre!
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critiques presse (4)
LeMonde
05 juillet 2012
Ainsi que le souligne Olivier Rohe dans un beau texte intitulé Ma dernière création est un piège à taupes, l'ancien sergent de l'Armée rouge, aujourd'hui presque centenaire, est essentiellement un homme d'ordre, ayant l'amour du travail bien fait et la haine des délinquants.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Telerama
16 mai 2012
Il y a quelque chose de résolument godardien chez cet écrivain trop rare, dont on peut goûter cet opuscule en attendant un livre plus ambitieux, où éclatera pleinement son impressionnante science narrative.
Lire la critique sur le site : Telerama
Liberation
15 mai 2012
Oliver Rohe entremêle trois voix. Normal pour un texte qui fut d’abord une pièce radiophonique.
Lire la critique sur le site : Liberation
Lhumanite
02 mai 2012
Le livre va et vient entre le destin historique de l’arme du siècle et la plongée dans la vie de son concepteur.
Lire la critique sur le site : Lhumanite
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
La perte de plusieurs milliers de ces soldats russes tombés dans les opérations de harcèlement constant et les innombrables traquenards mitonnés pour eux par des moudjahidin pareillement pourvus de fusils d’assaut AK-47 avait constitué une étape décisive, sans doute même la première, dans le processus de démantèlement de l’empire communiste ; ces pertes accumulées dans les rangs de l’Armée rouge étaient le signe manifeste d’un soulèvement de l’organisme soviétique contre lui-même, comme si la simple présence de ces armes parmi les ennemis intérieurs afghans contenait déjà la promesse biologique d’un cancer à venir.
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Il était maintenant assis sur une couverture pliée et dans la paume de ses mains ouvertes et fébriles, délicatement recueilli comme une corneille blessée : un pistolet automatique qu’il avait déterré de sa cachette par accident, quelques minutes plus tôt, en heurtant une latte irrégulière du plancher. Il touchait là pour la première fois de sa vie à une arme à feu et ça avait été comme un jeune chien découvrant son aboiement. Stupéfait par l’étrangeté de cette soudaine profération, mais pressentant qu’à travers elle il coïncidait avec sa nature, rejoignait sa destination.
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Il écrivait à nouveau des poèmes.
Sur le caoutchouc, la fonderie, les soudures.
Sur les femmes
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Un territoire à occuper, à surveiller et à défendre, c'est à dire un débouché potentiel pour les fusils d'assaut AK-47.
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Vidéo de Oliver Rohe
Le 5.04.2023, Oliver Rohe était l'invité de Marie Richeux dans “Par les temps qui courent” (France Culture), pour évoquer “Chant balnéaire”.
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