William Moreland, bandit de grand chemin, qui s'était assagi à sa rencontre avec Mary Boultor, suite aussi à la naissance de leur fils, Jack, doit reprendre la route dans les Rocheuses, et le chemin du dynamitage de coffres, dans les mines, les grands hôtels... pour assurer l'avenir de son fils, tombé malade en même temps que sa mère, mais lui ayant survécu. Âgé de douze ans, en cette année 1917, Jack est confié à Soeur Beatrice, qui a quitté les ordres bien malgré elle pour hériter de la maison familiale, ce qui ne convient pas du tout au jeune adolescent, habitué à vivre, avec ses parents, dans leur cabane au fond des bois et des montagnes, au plus proche de la nature et du minimalisme matériel qu'il permet, avec une liberté totale de mouvement et d'apprentissages.
Les chapitres, assez nombreux, plus ou moins brefs, alternent d'abord, sans ordre strict, entre William, qui survit et se débrouille tant bien que mal à réaliser son but, alors qu'il est désormais quinquagénaire et bien moins en forme qu'avant sa rencontre avec Mary, et Jack, qui ronge son frein chez la Soeur, en colère contre son père qui l'a abandonné, et à une vie qui ne lui correspond pas, et à des rumeurs toutes plus désagréables les unes que les autres sur le compte de son paternel, puis ils s'intéressent ensuite, en plus, à Soeur Beatrice, à Wilson, un trappeur guide de chasse avec qui a travaillé Moreland, et à Sampson, voisin de la famille dans les bois, vieillard en partie amérindien qui a choisi, lui aussi, de s'isoler de la civilisation. Chacun aura son rôle à jouer dans l'histoire, et chacun, ou presque, révèlera, au fil de celle-ci, une part de ses secrets les plus troubles, ce qui mènera à un dénouement tout autant surprenant que parfaitement mené par
Gil Adamson, qui nous montre ainsi que le mal n'est pas forcément là où l'on l'attend.
A travers ces personnages, l'autrice nous raconte aussi, magistralement, une part de l'Histoire des Etats-Unis, entre crépuscule d'un Far-West vieillissant, à la manière de Moreland et de Sampson, qui en sont les plus parfaits représentants, et aube d'une nouvelle époque qui commence à se dessiner, faite de davantage de sédentarité, de loisirs, de tourisme, ce qu'a bien compris Wilson, qui fait, au contraire de ses compagnons, la bascule entre les deux mondes. Et Jack, dans tout ceci, à qui l'on laisse le choix entre le crépuscule et l'aube, que va-t-il faire ? C'est, finalement, toute l'essence du roman, à mon sens ici, que de suivre
le fils de la veuve à travers l'apprentissage de la vie en mode western.
Le fils de la veuve est un superbe roman, qui m'a happée dès les premières pages, d'une plume comme je les aime, précise, réaliste, qui prend le temps de décrire une atmosphère, sans pour autant être dénuée d'une certaine poésie, ici présente pour mieux magnifier la nature, ou, à l'inverse, pour rendre encore plus percutants ses dangers, également d'une certaine violence âpre, allant après tout de soi en ce début de XXème siècle états-unien. C'est ma plus belle découverte de ce début d'année.
Je vais désormais lire avec plaisir le premier roman de
Gil Adamson,
La veuve, qui s'intéresse justement à l'histoire de la rencontre entre William Moreland et Mary Boulton.