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EAN : 9782914577472
141 pages
Lettres vives (18/11/2010)
4.25/5   2 notes
Résumé :

Je me suis coupé la langue. je l'entends maintenant qui parle, jetée entre feuilles sèches, mottes gelées et plaques de neige. Que dit-elle pour qu'il en sorte ainsi ce bruissement continu d'une eau courante sous le froid et la brume ? En attendant, je suis muet devant le jour. Ne me restent que des veux vides d'aveugle et un corps qui n'est pas le mien. Le temps s'est arrêté dans sa course effrénée. On (lirait un v... >Voir plus
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OUBLIER L’HEURE


Extrait 2

  La mousse et l’écorce. Je regarde toujours. L’espace bouge, pas les feuilles. Demain s’est arrêté, comme la montagne, juste au fond des yeux. La traversée du jour se fait mal, mes mains sont trop pleines. Les vider demande un effort. Surtout quand on attend ce qui ne vient pas, puisque c’est là. Soudain, je ne sais plus. La margelle et le seau ont basculé. Le noir est devenu plus noir. Je retrouve la mousse et l’écorce. Et le ciel à l’envers.

  Parce que je suis perdu, le jour recommence. Sinon, il serait son nom, simplement. Je ne le verrais pas. Je ne dirais pas ce que j’en sais. C’est-à-dire pas grand-chose. Mais là : ce qui tombe, monte, traverse le regard ; ce qui brille, s’éteint ; ce qui tremble ou s’obstine. Se taire pour parler mieux ? Deux heures dix. Quelle somme de souffrances, dis-tu. Ça, c’est aussi le jour. Tous ces cris. On n’y voit plus. Comme tout faire tenir ensemble ? L’odeur et les pommes, le rouge et le sang. Oui, je suis perdu mais je vois quelque chose.

  ― Quelque chose ?
  ― Oui, quelque chose ― pas rien.
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Je regarde mes mains comme si elles ne m’appartenaient pas. Peut-être d’ailleurs ne m’appartiennent-elles pas comme ne m’appartiennent ni mon nom ni mon visage. Je lève les yeux. Sur la fenêtre le bulldozer s’est arrêté comme pris dans un silence de fin du monde.

Une vague invisible, mais je la vois. Elle est là, sous le scintillement de l’herbe, le balancement des feuilles, dans la danse immobile de la montagne, la transparence du bleu, l’attente d’un jour où rien ne se passe que ce qui passe. Une sorte de soulèvement vide où tout s’arrête, remuements, tournoiements, tous les mouvements, les gestes, la vitesse, la lenteur, grouillements, précipitations sans fin, comme une cataracte inverse où tout, un instant, reste dans un suspens, dans l’illusion d’un temps si vaste qu’on pourrait croire y entrer. Trous noirs, naines blanches et géantes rouges, quasars, synapses, cellules, molécules, électrons, bribes, flux et reflux, infimes éclats d’une éternelle métamorphose. Mais — table, vitre, ciel ou clôture — j’y suis, et c’est pourquoi — citrons, lampe, chêne — je suis perdu.

Le temps dessine ses images. Entre clôture et ciel s’ouvre le vert d’un pré qu’on ne reconnaît pas. Si je pouvais, comme un oiseau rapide, je traverserais l’espace d’un seul battement d’aile vers l’obscure lisière de la montagne. Seul le regard m’y conduit, en revient, tissant du corps au jour les fils d’un indicible désir.
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DANS L’INDÉFINI


Extrait 2

Trous noirs, naines blanches et géantes rouges, quasars, synapses,
cellules, molécules, électrons, bribes, flux et reflux, infimes éclats
d’une éternelle métamorphose. Mais — table, vitre, ciel ou clôture
— j’y suis, et c’est pourquoi — citrons, lampe, chêne — je suis perdu.

  Le temps dessine ses images. Entre clôture et ciel s’ouvre le vert
d’un pré qu’on ne reconnaît pas. Si je pouvais, comme un oiseau
rapide, je traverserais l’espace d’un seul battement d’aile vers
l’obscure lisière de la montagne. Seul le regard m’y conduit, en
revient, tissant du corps au jour les fils d’un indicible désir.
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J’écoute. Une route au soleil. Un espace plus vaste avec le bruit des feuilles poussées par le vent. De temps à autre, une voiture. Puis un silence relatif. Où se logent des prés, des maisons, des montagnes. Que chercher d’autre que ce présent ? Une touffe de lavandes sèches, un cerisier à peine jauni, un parking. Des cris d’enfants disent la vie. Je ferme les yeux. Sur la peau, une légère chaleur. Un souffle. Une attente qui n’attend rien.

*

Retrouver une vieille habitude empêche-t-il d’être perdu ? Assis à la même place -- mais il n’y a jamais de même place --, je laisse le paysage (couleurs, ombres et lumières, mouvements) me traverser les yeux. Les bruits du jour, les images s’éloignent. N’en reste qu’une trace mouvante, très longue à s’effacer. Ensuite, c’est un suspens. Entre quoi et quoi, comment le dire ? Ensuite, comme une entrée dans le sommeil. À ce moment précis, une vague étincelante me submerge et tout rentre dans l’ordre.

*

J’ai cessé d’être perdu et plus rien ne m’arrive...
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DANS L’INDÉFINI


Extrait 1

  Je regarde mes mains comme si elles ne m’appartenaient pas.
Peut-être d’ailleurs ne m’appartiennent-elles pas comme ne
m’appartiennent ni mon nom ni mon visage. Je lève les yeux.
Sur la fenêtre le bulldozer s’est arrêté comme pris dans un
silence de fin du monde.

  Une vague invisible, mais je la vois. Elle est là, sous le
scintillement de l’herbe, le balancement des feuilles, dans
la danse immobile de la montagne, la transparence du bleu,
l’attente d’un jour où rien ne se passe que ce qui passe.
Une sorte de soulèvement vide où tout s’arrête, remuements,
tournoiements, tous les mouvements, les gestes, la vitesse,
la lenteur, grouillements, précipitations sans fin, comme une
cataracte inverse où tout, un instant, reste dans un suspens,
dans l’illusion d’un temps si vaste qu’on pourrait croire y entrer.
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Vidéo de Jacques Ancet
POÉSIE HISPANIQUE – l’Espagne contemporaine : de l'Ultraísmo à Sanchez Ortiz (France Culture, 1982) Une compilation des émissions « Albatros », par Gérard de Cortanze, diffusées les 3, 10, 17, 24 et 31 janvier 1984 sur France Culture. Invités : Jacques Ancet, Saül Yurkievich, Claude Miniere et Severo Sarduy. Poètes évoqués : José Angel Valente, Pere Gimferrer, Andres Sanchez Robayna, Julian Rios et Emilio Sanchez Ortiz.
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