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EAN : 9782234077447
198 pages
Stock (20/08/2014)
3.49/5   46 notes
Résumé :
En 1933, Thomas Mann quitte Munich pour un voyage d’agrément en Suisse, avec sa femme Katia et les petits. Pendant ce temps, dans la patrie, le monde s’écroule. C’est le début de l’exil… Un exil d’abord résigné, jusqu’à ce jour de février 1936 où Thomas Mann se résout à condamner publiquement le régime nazi dans une lettre qu’il destine au Neue Zürcher Zeitung.
Lorsque le roman s’ouvre, Thomas Mann pénètre dans l’enceinte du journal pour remettre la lettre à ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (18) Voir plus Ajouter une critique
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Réfugié en Suisse avec sa famille, Thomas Mann se languit de l'Allemagne, patrie qu'il aime et pour laquelle il souffre alors qu'elle sombre dans l'horreur nazie. Tout son entourage le presse de prendre la plume, de dénoncer ce qui se passe à Berlin. Un écrivain de sa trempe et de sa renommée ne peut pas se permettre le silence. On pourrait croire qu'il cautionne, qu'il est lâche. Thomas Mann rédige alors une lettre qui doit paraître dans un grand journal allemand. « Il a laissé parlé sa conscience et sa conviction profonde, ainsi dit la lettre, que de l'actuel gouvernement allemand il ne peut rien sortir de bon, ni pour l'Allemagne ni pour le monde. » (p. 13)

Durant les trois jours qui précèdent la parution de sa lettre, l'écrivain doute : a-t-il eu raison d'écrire ce texte ? « Ce n'est pas son genre de se consumer de haine. » (p. 78) À n'en pas douter, sa lettre fera grand bruit en Allemagne. Presque aussi certainement, ses livres seront interdits dans sa propre patrie. « Qu'un écrivain persécuté par le Reich y rencontre le succès, n'est-ce pas un coup porté au régime ? » (p. 97) le retour lui sera interdit puisque l'Allemagne nazie l'accuse déjà de fuite et de trahison. « L'image de sa patrie se fait de plus en plus et imprécise. Il est devenu un outsider, un spectateur qui ne connaît plus la vie en Allemagne que de seconde main. » (p. 61) Enfin, cette lettre peut mettre en danger toute sa famille : accomplir son devoir de citoyen vaut-il vraiment de courir ce risque ? L'auteur peut-il encore retenir sa lettre ? Publier cette accusation, est-ce perdre l'Allemagne pour de bon ou en préserver la meilleure part, celle qui ne se plie pas devant un régime qui aboie ?

Ce premier roman est une réussite. L'auteure révèle avec talent les doutes et les peurs d'un homme vieillissant qui est fatigué de mener des batailles et de fuir. Mais tel un chevalier éternellement loyal, il revêt une dernière fois son armure de papier et porte une féroce estocade à l'ennemi immonde qui menace son pays. L'Histoire le sait déjà, la lettre de Thomas Mann a bien été publiée, mais il était tout à fait intéressant d'interroger les jours qui ont précédé sa publication : il faut se souvenir que L Histoire accouche parfois de ses héros dans la douleur et qu'un acte de bravoure peut cacher des abysses d'incertitude.
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Dans ce roman, Britta Böhler nous invite à explorer la vie intime de Thomas Mann à travers trois jours qui vont marquer sa vie.
Ici, la romancière propose de découvrir l'intimité de l'homme à un moment de sa vie où il est le plus fragile, c'est-à-dire quand il est parti d'Allemagne en 1933 pour ce qu'il croyait être un voyage d'agrément en Suisse et sans dire adieu à sa patrie.
Or le livre commence en février 1936 à Zurich et le romancier supporte mal son exil. Sous la pression de son entourage, il se résout à publier une lettre de protestation contre le régime nazi dans le « Neue Zücher Ziung » un des plus importants journaux de langue allemande de l'époque.
Le roman s'ouvre le jour où Thomas Mann dépose cette lettre à la rédaction :
« Avec un frisson, il avait repensé à cette parole prophétique de Heine : ce n'était qu'un prélude, là où l'on brûlait des livres, on finissait par brûler des gens ».
Mais le rédacteur en chef qui doit prendre connaissance de sa lettre avant publication est souffrant et sera absent trois jours.
La publication sera donc retardée. Trois jours de terrible doute pour l'écrivain.
Thomas Mann se révèle dans sa fragilité. En exil, ses amis, les honneurs et sa maison familiale lui manquent. Il sait que publier cette lettre signifie tourner le dos à l'Allemagne pour toujours et aussi perdre ses lecteurs.
Et qu'est-ce qu'un écrivain sans ses lecteurs ? Et un père qui mettrait en péril la vie des siens ? En tant qu'homme, père et citoyen, sa décision, aussi difficile soit elle, est finalement sans appel, car « lorsqu'on hait le mal de toute son âme, on devra dire adieu à son pays natal. »
Dans ce premier roman, Britta Böhler invite à explorer la vie intime de Thomas Mann à travers trois jours qui vont marquer sa vie. Elle réussit avec brio à donner à cet immense écrivain, l'air d'un homme ordinaire en proie à ses doutes, à ses peurs, à ses chagrins et nous le rend profondément humain.
« La décision » est un premier roman très réussi.
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En 1933 Thomas Mann a quitté Munich pour un voyage en Suisse, le retour se révèle risqué et quasi impossible, les nazis ont confisqués une grande partie de ses biens et sa sécurité n'est plus assuré. Adieu maison à laquelle l'écrivain est très attaché et surtout adieu à la bibliothèque de 8000 volumes même s'il garde un rien d'espoir de les récupérer.
le voyage se transforme en exil pour le Prix Nobel de littérature obtenu en 1929, il trouve, après bien des pérégrinations, à se loger dans une maison à Zurich au bord d'un lac. En 1936 les exactions en Allemagne prennent le tournant qu'on connait et sa femme et surtout ses enfants le pressent de prendre parti, de s'exprimer. Erika surtout est sévère avec lui elle « lui reprochait sa superbe, qualifiait sa retenue de marque d'arrogance, affirmait qu'il était déplacé, à pareille époque, de vouloir ainsi faire fi de la réalité. »

Thomas Mann s'apprête à publier une lettre dans le Neue Zürcher Zeitung, l'indisponibilité de son ami l'éditeur Korodi lui donne quelques heures de répit et il hésite soudain.
Aucun suspense dans ce livre car on sait que la Lettre aux Allemands fut publiée mais on entre dans l'intimité d'un homme au bord de la rupture avec sa patrie, rupture qu'il pressent douloureuse.

Il a à la fois l'envie de combattre les nazis et le besoin d'écrire en paix, il donne raison à son frère Heinrich qui a pressenti très tôt la catastrophe, mais on perçoit à travers ses atermoiements la crainte de n'être plus lu en Allemagne, de ne plus pouvoir faire vivre sa famille.

C'est un homme d'ordre, de manies et l'on est partagé entre l'agacement parfois et la compassion devant l'écroulement de tout ce qu'il a défendu, aimé, célébré.
l sait qu'une fois la lettre publiée les liens avec l'Allemagne seront définitivement rompus alors il essaie de se rassurer

« Même s'il n'a plus le droit de vivre dans sa patrie, tant qu'il continuera d'y être lu et de pouvoir écrire pour elle, il ne sera pas tout à fait sans patrie. »



J'ai aimé cette réflexion quand Thomas Mann ne peut plus se contenter de vivre dans la peur

« Ses livres seraient interdits en Allemagne et lui inévitablement déchu de sa nationalité. » et le ressentiment pour ses amis d'hier et la presse dans laquelle « On affirmait qu'avec sa conférence sur Wagner, il avait souillé la mémoire du grand compositeur »
lui qui aime tant la musique de Wagner.

Le livre est court et les fréquents retours en arrière rythment très bien le récit.

Entrer ainsi dans la sphère de pensée d'un des grands écrivains du XXème siècle est un très bon moment de lecture, son portrait est convaincant.

Dans sa lettre il a dit
« Tant que je vivrai, fût-ce même comme citoyen du Nouveau Monde, je resterai Allemand et je souffrirai du destin de l'Allemagne et de tout ce que, par la volonté de tyrans criminels, elle a infligé moralement et physiquement au monde. »

Un premier roman réussi pour Britta Böhler avocate de profession mais qui a choisi la voie politique et le roman pour s'exprimer






Lien : http://asautsetagambades.hau..
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En 1936, Thomas Mann est exilé en Suisse alors que Hitler impose sa loi en Allemagne, son pays natal dans lequel il ne peut désormais revenir sans riquer d'être arrêté. Cependant, le Prix Nobel se tait encore et n'a pas encore condamné publiquement le régime nazi. Dans La décision, Britta Böhler raconte avec brio trois jours parmi les plus importants de la vie de l'auteur de la montagne magique. Trois journées de doutes et de questions lancinantes, qu'il consigne dans ses carnets intimes. La question de l'engagement de l'écrivain n'est pas la seule qui est traitée dans ce roman qui réussit le prodige, en moins de 200 pages, de tracer le portrait d'un intellectuel vieillissant et accablé, et de nuancer sa personnalité des traits complexes qui la composentt. Au quotidien comme dans son oeuvre, dans son amour immodéré pour Wagner, par de discrètes allusions à son homosexualité latente, dans ses rapports familiaux, dans le couple qu'il forme avec Katia. Thomas Mann marche, se promène avec son chien, boit un verre de vermouth, fantasme sur un garçon de café, travaille avec difficulté, enrage devant la propagande du Reich, se dispute avec ses enfants, s'inquiète de ne plus jamais pouvoir remettre les pieds en Allemagne si jamais il prend "la" décision. le livre de Britta Böhler est plus palpitant qu'un thriller et touche l'intime d'un homme d'une façon qui peut paraître légère mais qui se révèle d'une profondeur inouïe.
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Nouvelle pierre à l'édifice de la connaissance des sentiments contraires qui animèrent l'Allemagne aux prémices de la conquête du pouvoir du parti nazi et d'Adolf Hitler ; à savoir la soumission forcée, l'adhésion volontaire ou non à travers un symbole de la littérature allemande et le Prix Nobel de Littérature ; Thomas Mann.
C'est au moment où ayant quitté Munich (ville symbolique pour Hitler) pour une installation en Suisse afin de voir l'état de santé de son épouse souffrante s'améliorer et alors qu'il est pressé de toute part de prendre position politiquement, à l'encontre de ses convictions profondes que l'auteur des « Buddenbrook », hésite encore à dénoncer le régime nazi, c'est du moins le point supposé de départ du roman de Britta Böhler. Loin du monologue, l'auteure nous offre un vrai suspense et une biographie partielle de Thomas Mann.

• Trame et personnages :
Ce roman est une fidèle représentation de l'Allemagne à une année charnière ; 1936.
C'est l'occasion pour nous de découvrir le contexte d'une époque, le quotidien, l'intimité et l'histoire familiale d'un très grand écrivain. le portrait dressé est vivant, pertinent et tout sauf terne.
De Suisse où Thomas Mann réside depuis trois ans pour préserver la santé de son épouse, à l'image de l'élite intellectuelle et sociale allemande, il fait le constat que la prise du pouvoir pat les nazis et Adolphe Hitler est arrivée à un stade irréversible et que personne ne l'a sentit venir. Partagé entre patriotisme, attachement à la terre natale, nostalgie, sa position que la littérature ne doit pas s'engager politiquement, reconnu mondialement comme la référence littéraire et culturelle, son Prix Nobel et les engagements politiques contraires de sa famille, Thomas Mann rédige une lettre de condamnation du régime nazi dans les journaux qui devrait le propulser dans l'opposition politique et à l'encontre d'une partie croissante de ses compatriotes.
Perdu entre ses contradictions, la pression familiale, la crainte d'être considéré comme un traitre à la patrie, d'être un paria et de perdre aussi ses revenus, Britta Böhler fait de Thomas Mann, un homme qui revient sur son passé, ses racines, cherchant à comprendre ce qui a pu entraîner l'Allemagne dans ces excès, réalisant combien le passé heureux n'est plus, constatant les premières exactions (on est à deux ans de la Nuit de Cristal et les idées de « Mein Kampf » sont largement diffusées. Tous ses chers concepts classiques ne sont plus et l'Allemagne qu'il a connu et dont il est aux yeux de ses compatriotes comme du monde le symbole a définitivement perdu. Tel un condamné, il va lui falloir s'engager et de la manière la plus sincère et forte.
• Contexte et véracité historique :
Pour moi on est tout simplement dans un contexte historique avéré et fidèle à l'Histoire, les faits évoqués, les personnages présentés (la famille Mann, Wagner, les cabarets) sont parfaitement rendus et les dilemmes ou débats intimes vivant et passionnément compréhensibles.
• Sentiment global au terme de la lecture :
Riche roman biographique, parfaite illustration d'une époque, un Thomas Mann dont on imaginait mal qu'il soit si humain et traversé de sentiments contraires. Roman à caractère biographique c'est aussi un livre qui fait réfléchir sur le rôle que doit jouer ou non la littérature dans la politique (soutien ou opposant d'un régime ?)

Lien : http://passiondelecteur.over..
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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Chaque jour dans les journaux de nouvelles monstruosités . Les communistes et autres opposants du régime réduits au silence , en fuite , arrêtés ou assassinés . Ce qui se passait était inconcevable . Toutes ces lois , tous ces décrets : cela avait du être préparé de longue date . Pourquoi , à Berlin , les conservateurs n'en avaient-ils pas eu vent ? Et l'empressement avec lequel tous collaboraient , les libéraux , le centre , le parti populaire bavarois . Aucun d'eux ne résistait . Avaient-ils soudain tous perdu la raison ?
Puis étaient arrivées les élections de mars , et il avait repris espoir . Hitler s'était trompé , la majorité des allemands n'avaient pas voté pour lui . Mais bientôt , il était apparu que cela ne changeait rien . De nouveaux décrets d'urgence avaient suivi , le Reichstag avait été complètement neutralisé . En novembre , il devait y avoir de nouvelles élections , et Hitler célébrait sa défaite comme une victoire . Innombrables fêtes dans tout le pays , avec drapeaux et défilés . Et le peuple exultait . les gens étaient complètement déchaînés , ivres et aveugles . Peu après les élections , Hindenbourg avait supprimé le vieux drapeau du Reich pour le remplacer par le drapeau à croix gammée .
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C'est le résultat d'une insatisfaction qui avait couvé en profondeur, alimentée depuis longtemps en secret, une pourriture qui n'avait cessé de se répandre. Et, soudain, tout cela avait trouvé à s'extérioriser. L'inexprimé était enfin remonté à la surface et avait, pour ainsi dire de lui-même, pris possession du pays tout entier. A l'instar d'un acide qui s'infiltre doucement dans la terre, irrésistiblement, toujours plus loin. Un acide qui traverse toutes les couches jusqu'à ce que tout soit rongé et désagrégé. Et le peuple, blessé et incompris, étourdi par les promesses, s'estime bien guidé, courageux, révolutionnaire. Quelle méprise désespérante !
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Le secret des chaussures brillantes : après les avoir cirées et brossées, il faut les frotter avec un oignon, puis les polir. Martha lui garde toujours quelques vieux oignons. On peut aussi chauffer les chaussures cirées avec une bougie, cela fluidifie la cire, qui se laisse alors facilement polir. Il a déjà essayé et s’est brûlé la main en plus de la chaussure. L’oignon est une solution plus simple et moins dangereuse, quant à l’odeur, elle se dissipe rapidement.
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Il ne veut même pas penser au monstre qui siège à Berlin . Tout chez cet homme est abject , le coté militaire de bas étage , le pathos , la voix . " On dirait un chien enchaîné pris de folie " . Dit-il à Katia chaque fois qu'un discours de Hitler est retransmis à la radio . La voix trahit la rancœur abyssale de l'homme , la soif de vengeance purulente du bon à rien , du raté qui n'a connu que l'échec . L’éternel demandeur d'asile incapable de rien faire , qui fouille les blessures du peuple avec son éloquence de tribun et qui a su adroitement associer sa propre insuffisance au sentiment d'infériorité des masses .
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Wagner,le peintre inégalé de l'âme. Sa musique,une oeuvre merveilleuse,mais morbide,profondément ambigue. D'une germanité exemplaire, trop exemplaire peut être . Une manifestation éruptive de la nature allemande sous une forme théâtralisée,ainsi que la formidable autopromotion et autocritique qu'on puisse imaginer. Peut-on sans honte aimer cette oeuvre? Plus on s'interroge sur Wagner,moins on y voit clair.
"Dans cinquante ans, je régnerai sur le monde musical " précisait-il
Aveugle à tout et à tous,exclusivement voué à son art. L'esprit allemand était tout pour lui,l'Etat allemand, rien.
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Interview de Britta Böhler à propos de son roman "La Décision"
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