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EAN : 9782020089289
183 pages
Seuil (01/11/1985)
3.89/5   9 notes
Résumé :
183pages. in8. broché.

Recueil de 18 nouvelles.
C'est à cette forme de récit que Böll doit ses premiers succès auprès du public et de ses pairs: il obtenait le Prix du Groupe 47 pour Les brebis galeuses, en 1951. C'est à elle aussi qu'il a eu recours, fidèlement, tout au long de sa carrière littéraire.
30 années séparent la première histoire Drôle de cirque (1950), qui exploite avec humour et tendresse le vécu d'un passé récent - adolesc... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Qui n'a jamais conservé, oubliée sur le rebord d'une fenêtre, reléguée au fond d'un buffet ou traînant dans un coin en guise de cendrier, une vieille tasse sans anse dont on s'est souvent demandé pourquoi on ne s'en était jamais débarrassé ? C'est peut-être parce qu'elle a partagé notre vie, un peu de notre quotidien, et qu'il semble qu'on l'ait toujours connue, vieille tasse amie qui nous a suivi lors de déménagements, de déplacements, de voyages, qui nous a réchauffé lorsqu'on avait froid, qui nous a désaltéré lorsqu'on avait soif, sur laquelle on a pressé nos mains, posé nos lèvres…
Ha ! Si l'on pouvait écouter tout ce qu'elle a à dire, cette vieille timbale toute ébréchée, à l'émail passé, aux couleurs éteintes, elle en aurait tant à raconter…Sûrement qu'elle arriverait alors à la même conclusion que la tasse sans anse dans la nouvelle d'Heinrich Böll et s'exclamerait résignée, « que ces humains sont déraisonnables ! »

« Que ces humains sont déraisonnables ! »…à l'instar de cette tasse sans anse née d'un plat à gâteaux et d'un respectable beurrier, Heinrich Böll (1917-1985) a inlassablement exprimé cette déraison humaine tout au long d'une oeuvre brillante et dense, composée de romans, de nouvelles et d'essais : « L'honneur perdu de Katharina Blum », « Portrait de groupe avec dame », « La mort de Lohengrin », etc…

L'expérience forcée de la guerre, le rejet du nazisme et plus généralement le dégoût inspiré par l'uniforme, ont stimulé cet écrivain phare de l'Allemagne d'après-guerre vers une littérature dominée par un engagement politique de chaque instant, un esprit critique plein d'acuité et une volonté de restituer la puissance et la grandeur de la langue de Goethe que le jargon nazi avait dénaturée.

Les 18 nouvelles qui composent le recueil du « Destin d'une tasse sans anse » ont été rédigées sur 30 ans, de 1950 pour les premières jusqu'à l'aube des années 1980 pour la dernière. Elles sont aussi excellentes que variées. Chacune a son ambiance, son décor, son univers bien particuliers, pourtant elles font montre d'un identique sens moral, participent d'une même volonté de mettre en scène des êtres insignifiants au prise avec une réalité qui les perturbe, les déçoit, les trahit ou les effraie, dans un pays qui a déposé, comme une lie tenace, les traces honteuses d'un dramatique passé au fond des consciences.

L'auteur allemand, Prix Nobel de littérature en 1972, y déploie avec brio une belle maîtrise narrative, une connaissance aigue de l'être humain qu'il soumet à une ironie fine et un esprit quelque peu grinçant qui prête souvent à sourire mais sait aussi être tendre et compatissant.
Sous le couvert de l'humour, les histoires de l'écrivain sont également parcourues d'un fort devoir de mémoire et d'une volonté de tirer les enseignements d'un passé que certains, et notamment les gouvernements et les classes dirigeantes, voudraient s'empresser d'oublier et tentent d'occulter ou à défaut d'édulcorer.

Si elle ne s'affiche pas toujours au fronton de ses livres, si elle ne porte pas toujours haut les armes du racisme, de la haine et du rejet par lesquelles elle détruit, la guerre court ainsi régulièrement, tout au moins en filigrane, le long des oeuvres d'Heinrich Böll.
Elle y prend différents visages, s'incarne dans plusieurs rôles et diverses formes : une musette de combattant faisant le tour du monde dans « Les aventures d'une musette », des enfants jouant aux réfugiés dans « Drôle de cirque », quelques minutes de bonheur pour un soldat ivre dans « Une cuite à Potocki »…
Toujours bien réelle et présente, elle s'exprime aussi de façon plus larvée, avec les armes de la bassesse, de la trahison ou de la bêtise, dans l'évolution économique et sociale d'individus sans scrupule rassemblés sous les maîtres mots de Rendements et Profits, ainsi qu'en témoignent les nouvelles « Comme dans les mauvais romans », « Il va sa passer quelque chose » ou « Pas une larme pour Schmeck »…

Etayé par une écriture effilée et économe, Heinrich Böll exploite particulièrement bien le format court de la nouvelle par cette façon personnelle d'aller droit au but, sans effet de style inutile, au gré d'une langue fluide, simple, concise. On n'est ni dans le laconique, ni dans l'épuré ou le lapidaire, on est dans une volonté de clarté, sans arêtes ni détours; ce qui doit être dit est dit et bien dit, exprimé de façon claire, nette, précise.
Au terme de ces 18 nouvelles portées par un bel élan pacifiste et un solide sentiment moral, le constat sera celui de la tasse sans anse : « Que ces humains sont déraisonnables ! »…
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Un recueil de nouvelles parfois inégales à mon goût. J'ai adoré l'histoire de la tasse qui se trouve délaissée sur un rebord de fenêtre alors qu'elle a eu une vie bien mouvementée jusque là.
L'auteur fait souvent preuve de cynisme.
Un homme attend une femme sur un quai de gare. Il connaît l'heure d'arrivée mais pas le jour, il vient donc tous les jours. Personne. Il devient parano, est persuadé que le chef de gare l'observe d'un mauvais oeil et va l'arrêter. Sa haine grandit de son côté.
Un jeune soldat part avec sa musette au combat et ne reviendra pas. Mais sa musette, si ! Elle passera dans les mains de plusieurs soldats et par hasard, le dernier qui l'aura en main mourra devant la maison natale du premier.
Un homme va à la rencontre de son ancien ami qui lui a piqué sa femme.
Un monastère se vide de temps en temps, au grand désarroi de hautes autorités qui viennent pour s'y ressourcer. Que font les moines à l'extérieur ? Ils vont on ne sait où, se ressourcer eux-aussi...
Je ne résumerai pas tout mais cela donne une idée. C'est varié.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Je pensai à ce que j'avais voulu lui dire : que c'était une vraie souillon, qu'elle n'avait aucune notion de l'argent, que j'avais maintes fois trouvé des cheveux dans la margarine et sans cesse ces maudites taches de graisse sur les livres, les journaux et même les photos . Il était difficile de la tirer du lit le matin et sa conception naïvement prolétarienne du petit déjeuner au lit comme luxe suprême avait pour conséquence des restes de confiture sur les draps et des taches de café brunâtres sur l'édredon . Oui, et puis elle était paresseuse , et même pas propre, il avait toujours fallu que je l'oblige à se laver avec méthode -- j'avais souvent dû l'attraper pour de bon et la fourrer dans la baignoire comme on baigne un enfant, avec cris et ébrouements de circonstance . Oui, et les fréquentes colères qu'elle piquait, tout en n'étant cependant jamais de mauvaise humeur -- de mauvaise humeur, ça non, jamais ! Puis je pensai tout d'un coup à la maison que nous construisions et où je n'allai jamais, laissant ce soin à Franziska et à l'architecte .
-- Et imagine-toi, me dit Walther, elle ne veut pas construire ! Moi qui ai toujours cherché une femme qui ne voulait pas construire-- eh bien, ça y est, je l'ai enfin trouvée ! Elle déteste tout ce qui est chantier et construction .Je faillis dire :"Moi aussi ", mais je me retins et dis seulement :
--Fais-lui mes amitiés .
[ Extrait de la nouvelle : "Nostalgie ou les taches de graisse", 18ème et dernière nouvelle du recueil "Le destin d'une tasse sans anse"
Ed; du Seuil 1985 pour la traduction française
Extrait des Gesammelte Erzählungen. 1981 ]
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Je puis annoncer maintenant au lecteur disposé à suivre plus avant le cours de mes pensées et pourvu d'assez de coeur pour admettre que même une tasse sans anse puisse ressentir de la douleur et manifester quelque sagesse, que, les moineaux ayant depuis longtemps fini de picorer leurs miettes, ma vie ne court plus aucun danger immédiat. Une tache claire de la grandeur d'une assiette à soupe est apparue entre-temps sur la vitre embuée et je vois distinctement l'arbre à l'intérieur, ainsi que le visage de mon ami Walter, qui me sourit, le nez écrasé contre le carreau. Walter, qui, il y a trois heures - avant le début de la distribution des cadeaux -, faisait des bulles de savon, me montre maintenant du doigt à son père ; celui-ci hoche la tête et montre du doigt le chemin de fer tout neuf que Walter vient de recevoir en cadeau, mais Walter hoche la tête à son tour - et, cependant que la vitre se couvre à nouveau de buée, je suis certaine que, dans une demi-heure au plus tard, je serai revenue dans la pièce chaude...
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- A ta place, j'écrirais une sociologie des marques d'autos. Conduire, c'est apprendre à rouler les autres - et les pires sont les prétendus chevaliers du volant : cette amabilité démocratique forcée est à vous donner la nausée ! C'est la parfaite hypocrisie - des gens qui, pour ainsi dire, réclament une médaille pour quelque chose qui est tout naturel.
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Chacun peut rire de tout ce qui, par nature, va de soi pour lui.
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