J'ai envie de reprendre à mon compte une appréciation de Davitt Moronay, claveciniste et musicologue, concernant les Variations Goldberg de Bach : "Ce n'est plus la montagne qui accouche d'une souris, mais la souris qui accouche d'une montagne"
Le périple pour lequel
Ian Bostridge se propose de nous servir de guide est éblouissant et vertigineux. Son immense culture, qu'il n'impose jamais avec brutalité mais qu'il utilise comme incitant à explorer tous les aspects du Winterreise rend le voyage
passionnant, même dans ses descriptions musicologiques pointues. Son mérite est également de nous rapprocher des poèmes de W. Müller qui composent ce cycle, la poésie étant devenue le parent pauvre de la littérature à notre époque. L'ennui ne s'installe jamais tant les angles d'approche sont variés et audacieux. On
passe par
Beckett,
Thomas Mann,
Goethe, les trois soeurs Brontë,
Nietzsche, et...
Bob Dylan. On retrouve les photographies de cristaux de neige de l'Américain Wilson Bentley qu'avait également évoqué Éric Vuillard, dans Tristesse de la terre. Comme les oeuvres, même intemporelles ne naissent
pas nulle part, la contextualisation historique est sociale très fouillée nous permet de découvrir les aspects politiques et sociaux - qui ne sont
pas les plus évidents, de ce cycle de lieder, à une époque post-napoléonienne marquée par un conservatisme exacerbé. le livre est richement illustré, en écho aux nombreuses références picturales.
Bref, un travail d'ampleur, qui est source de bonheur, pour l'esprit comme pour les sens, et autant de pistes invitant à (re)partir à la découverte.
Sur l'ancienne échelle des vintage Guides verts Michelin - intéressant - mérite un détour - vaut le voyage, on opte sans hésitation pour "Vaut le voyage"