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Critiques filtrées sur 5 étoiles  

Septentrion ou l'irruption d'une langue.

“Parlez-moi encore un peu de vous. Votre voix me rappelle de si doux souvenirs qu'elle entretient un léger frémissement localisé en dessous des couilles dans le prolongement du tube.”

Un récit autobiographique mais qui a tout du roman, (in)carné.

“Comment expliquer aujourd'hui cette rage de lecture qui me tenait continuellement sous pression, cette faim de découverte, cette fébrilité vis-à-vis de tout ce qui était imprimé ?”

Ecrit au début des années soixante et interdit de publication pendant près de vingt ans c'est d'abord un style. Une prose poétique, à la fois un parlé de rue, d'argot parfois, explosive, scandaleuse, érotique, mais aussi drôle, spirituelle, délicate, onirique, on peut passer allègrement du scato au sacré voyez. C'est un souffle épique mais cru, une Odyssée de la loose, qui n'a pas peur de descendre dans les méandres de notre rapport à nous-même, mais ce faisant, c'est aussi une littérature brutalement honnête et sans (im)posture. C'est une littérature jouissive, au sens de la distinction de Roland Barthes dans le Plaisir du Texte. Malgré ses errements mis en mots, ne nous y trompons pas Louis Calaferte n'est pas qu'un “thug” ou un rebelle sans cause (à l'exception de celle de la littérature), il est aussi un sage, peut-être même un moraliste.

Septentrion raconte la quête d'un écrivain en puissance, vers l'écriture, vers la littérature, et si le narrateur n'a pas encore vraiment écrit, l'ouvrage lui est d'emblée fichtrement littéraire.

“Mes humiliations font partie du butin.” Louis Calaferte c'est l'écrivain impénitent. Son narrateur est un cheval sauvage, définitivement indomptable : dans son rapport au travail, à l'usine, comme une domesticité de l'homme. Mais aussi allergique à la vie rangée, à la vie de famille bourgeoise. Tous ces rejets ont un corollaire, le parasitisme, on doit toujours trouver quelqu'un à qui on doit toujours quelque chose, une aide… dont la contrepartie est sans cesse différée. Ce goût pour la marginalité cela me rappelle un autre écrivain-poète-dramaturge qui dynamita aussi la langue : Jean Genet.

“Au commencement était le sexe”. Avec un tel incipit, je ne dévoile rien en confirmant que (avec un seul “e” et un seul “u” n'est ce pas…) la sexualité est un personnage à part entière du livre. du reste, Octavio Paz ne disait pas autre chose, dans son essai La Flamme Double, le Prix Nobel mexicain notait “sexe, érotisme, amour sont les aspects du même phénomène, des manifestations de ce que nous appelons la vie. le plus ancien des trois, le plus considérable et fondamental est le sexe.”

“Pas moyen de baiser le quart de ce qu'on voudrait. Il faut s'y faire.” Néanmoins, le livre n'est pas une série d'exploits donjuanesques, le narrateur exposant sans orgueil sa dépendance et sa misère affectives. Evidemment le narrateur, souvent “en manque” (le désir fonctionnant peu ou proue sur le même modèle qu'un crédit renouvelable…) il décrit ses sensations et ses envies face aux anonymes croisées dans la rue, au café. Finalement c'est aussi un témoignage sur la frustration quotidienne, celle de ne pouvoir coucher avec tout le monde, du moins tous les gens qui nous plaise. Alors lorsque le narrateur trouve une partenaire de jeu, quelque part il assouvit à la fois son désir d'elle, mais on peut se demander s'il n'évacue pas aussi la frustration de tous les précédents désirs insatisfaits de sorte que la partenaire n'est pas seulement un trophée, mais aussi un lot de consolation…

“Moi j'aime pas le mot pornographie, tout ce qui relève des rapports du corps avec un partenaire, quelqu'il soit, rien en ce domaine-là ne me parait pornographie, au sens où la langue l'entend. Moi ça me parait plutôt une espèce de recherche constante de la part de l'un et de l'autre.” Voici ce que répondait Louis Calaferte aux sempiternelles critiques, les mêmes qui condamnaient la Lady Chatterley de D.H Lawrence au silence, au micro de Jacques Chancel. Il y a sans aucun doute des passages érotiques mais ils ne sont jamais gratuits, et c'est le cas de le dire, puisque notre narrateur commence dans la première partie du livre une carrière de gigolo avec la plantureuse Nora van Hoeck, une riche néerlandaise entre-deux-âges. le jeune Calaferte n'était du reste pas le seul futur artiste célèbre à vendre ses charmes dans le Paris de ces années là, les encore anonymes Serge Gainsbourg ou encore Alain Delon l'ont discrètement confié depuis.

Dans la seconde partie une rencontre m'as particulièrement plu, celle avec une inconnue dans un hôtel, cet impromptu dans un moment où personne ne s'y attend plus, qui est une véritable histoire dans l'histoire (comme souvent avec Septentrion), parenthèse de quelques pages, magnifiquement écrite, sensuelle et intensément vive. Passion fugace et délicate qui fit dire à l'écrivaine Marie-Hélène Lafon, sur le plateau de LGL, que c'était l'une des plus belles histoires d'amour de la littérature française “de la page 323 à la page 339”. Une histoire dont le souvenir convoque à nouveau pour moi des vers d'Octavio Paz :

"Détaché de mon corps, détaché
Du désir, je retourne au désir,
à la mémoire de ton corps. Je retourne.
Et ton corps flambe en ma mémoire,
Et flambe en ton corps ma mémoire."

“il faut vivre l'absurde ou mourir.” Si vous aimez l'intensité, si vous aimez les rapports textuels explosifs, la destruction des totems et des fausses courtoisies, des hypocrisies et des conformismes, si vous avez la rétine baladeuse, si vous êtes désespéré mais avec le goût du sacré, si vous avez l'optimisme entêté des tire-au-flanc alors ce livre est peut-être pour vous. Mais aucune obligation, Septentrion,et d'ailleurs toute la littérature, ce n'est peut-être qu'une affaire intime : “quelque chose de privé, de précieux, d'indispensable à certains” comme disait Louis Calaferte.

Sur ce, comme dirait Calaferte je vous dit « bonsoir, j'en ai assez dit » et je vais m'adonner à d'autres lectures privées et précieuses car, pour citer Jules Renard « quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire, j'ai la certitude d'être encore heureux” !

Très belle année livresque !

Qu'en pensez-vous ?
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Septentrion est un livre dur , car il est difficile d'avaler la franchise douloureuse de l'auteur ( semblable à celle de Bukowski ) . Plein d'humour aussi , mais surtout aux dépens des femmes et s'en est parfois dérangeant , au point qu'on le pense misogyne .... il l'est quelque peu , mais on le lui pardonnera sachant que la première femme qu'il connut ( sa mère ) le câlinait à coups de ceinturon . Il est dur aussi envers les moutons , ceux qui rampent , sont dociles , c'est là que s'exprime le mieux sa révolte .
Le style d'écriture , j'allais dire la technique , mais non , les mots sortent sans retenue , sans calculs , comme l'eau d'une bouche d'égout , est une grosse claque , un choc , une lave incandescente de mots , de qualificatifs qui vont parfois presque jusqu'au délire .
Lecteurs friands de beaux sentiments , de douces mièvreries , ce livre n'est pas pour vous , pas plus que " la mécanique des femmes " qui m'a paru moins abouti , moins circonstancié . Mais cette lecture est une expérience à connaître , même si au final elle peut vous décevoir ..... il est bon parfois d'être réveillé , même brutalement ... on s'en remet .
La sexualité a une grande place dans ce livre , mais que les petits cochons qui sommeillent , ne s'excitent pas inutilement , ce n'est pas pornographique .
Bukowski se mettait à nu dans " Journal d'un vieux dégueulasse " , et Calaferte fait de même , ne cache rien , ne se vante ni ne se complaît , il se " confesse " mais sans être enfant de coeur . Lui donnerez vous l'absolution ?
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« Au commencement était le Sexe. Sauveur. Chargé d'immoralité. Il y a la Bête. Héroïque. Puissante. Et au-delà de la Bête il n'y a rien. Rien sinon Dieu lui-même. Magnifique et pesant. Avec son oeil de glace. Rond. Statique. Démesurément profond. Fixe jusqu'à l'hypnose. Tragique regard d'oiseau. Allumé et cruel. Impénétrable de détachement. Rivé sur l'infini d'où tout arrive ».

Je pénètre malgré moi une oeuvre incomparable de la littérature française longtemps mise de côté par puritanisme — cause pornographie — comme Les Fleurs du Mal de Charles Baudelaire. Ce livre est une explosion des sens où le sexe voltige avec douceur avec les émotions de l'auteur et de son héros. Ce corps à corps sensuel des mots s'enivre de la puissance littéraire de Louis Calaferte perdu dans les humeurs de cet écrivain virtuel aux prises avec ses fantasmes, ses peurs, ses doutes, ses folies, sa débauche, sa phobie du travail. Lire ce livre, c'est comme manger un pigment fort des îles. La sève puissante coule dans vos veines pour vous brûler les entrailles avec malice et diablerie, ce roman autobiographique s'enflamme de ces impudeurs, cette vision des femmes respirent celle d'un homme amoureux de la gent féminine, surtout de leur chair, de leur plaisir, de leur désir, de cette envie de concupiscence, l'acte d'amour, le plaisir de la chair défendue.
Mais la folie rencontre la peur d'écrire, cette paralysie de ne pas pouvoir réussir, ce complexe des autres avec cette force d'attendre le bon moment d'écrire, de réaliser ce livre parfait, d'être dans la bonté des Dieux semant la grâce des mots et de l'inspiration. Nous voyageons dans l'univers d'un pique-assiette allant ci et là, d'amis, de maîtresse devenant gigolo aussi. Cette première partie est un tel délice, une mélopée de mots, de petits noms donnés à la maîtresse de notre héros gigolo, c'est un régal acide, sarcastique, machiste, vulgaire, ordurier…
C'est un roman indispensable à littérature française, Louis Calaferte vit pour l'écriture, il est submergé par cette force incontrôlable littéraire, il vit que pour cette passion dévorante, il s'enrage avec violence et passion dans cette folie où sa vie n'est que support pour cette dévotion de devenir écrivain...
Pour finir, je citerai Philippe Sollers :
« Ne pas avoir lu ou ne pas lire sur-le-champ Septentrion est foncièrement immoral »
Alors aller lire Septentrion !


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Un écrivain en germe, un gigolo actif, un cerveau aigu et aiguisé sur ce qui l'entoure, et la faim, au sens premier et au sens dernier.
Un livre très puissant, une écriture déliée, en saccades, en points et contrepoints, crue aussi mais tellement parlante.
Une claque, quand même. Oui. Ca claque. Et les apprentis ou futurs écrivains feraient bien de prendre de la graine de ce germe-là.
Sinon, prenez Bukwoski, un peu de Knut Hamsun et certaines pages de Joyce et vous pourriez bien décrocher un Calaferte. Je ne peux parler que de ce que je connais et donc peut-être ne serez-vous pas d'accord. Dans ce cas, allez vous faire foutre, naaaan, j'déconne. Enfin au moins un peu.
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Petit détour par ce qui devrait être, un incontournable de la Littérature, la Grande. Louis Calaferte (1928-1994) est un écrivain français né en Italie, hélas, beaucoup trop méconnu de nos contemporains (l'était-il seulement des siens ?). Il est l'auteur de ce livre sulfureux, Septentrion, publié en 1963, mais rapidement retiré de la vente, car tari de roman pornographique. Censuré en pleine période de « libération des moeurs », il faudra attendre plus de 20 ans pour que Denoel le réédite, en 1984.

La première question : comment un conglomérat de prête-noms gouvernementaux-littéraires, a t-il pu passer à côté d'un tel chef d'oeuvre, pendant plus de deux décennies, ne s'arrêtant qu'aux mots « foutre », « con » (au sens vaginal du terme), ou « salope » ? Une faute de goût, au mieux, une faute professionnelle, au pire, au même titre que l'interdiction des Fleurs du mal par exemple. Et les mots sont bien pesés, car dans la tumultueuse histoire du roman français au XXème siècle, il y a deux Louis : Céline, et Calaferte. Dans sa composition, Septentrion pourrait faire penser au Voyage ; une oeuvre fleuve, dans laquelle le personnage principal se laisse emporté au gré de ses pulsions, pour un livre qui semble écrit d'une traite, grâce à une plume qui coule sans jamais tomber dans la dissonance. Et quel style ! Une pure merveille. Chaque phrase vous collera une bonne gifle littéraire en pleine figure, et vous fera oublier très vite toutes les mauvaises choses que vos pauvres yeux auront pu ingurgiter jusqu'à présent. Dire que c'est méticuleux est un euphémisme, Septentrion est rédigé dans de la soie, chaque mot recèle du luxe verbal.

Le roman, probablement autobiographique, tourne autour des questionnements de l'écrivain, mais surtout d'une femme : la belle et nymphomane Nora van Hoecke, rentière hollandaise, dont le narrateur s'évertue à combler les pulsions perpétuelles et inassouvissables, en contrepartie de l'argent qu'elle lui donne, et de la vie luxueuse qu'elle lui offre. Elle lui permet de bien manger, de (bien) baiser, et d'aller à l'opéra, choses que ce narrateur fauché n'a jamais pu s'offrir, lui qui s'enfermait dans les toilettes de son usine de piles, pour déguster des livres. Cependant, il tombe dans un paradoxe, car cette orgie de bien-être matérialiste l'empêche d'écrire. Trait important du livre, la relation que le narrateur entretient avec la religion. Sans cesse entrain de s'adresser à Dieu, l'implorant, l'insultant, blasphémant, il paraît délaissé, et semble agir comme un enfant qui n'aurait pas reçu assez d'amour, et qui ferait tout pour provoquer ses parents. Cette dimension est sans nul doute un élément central de ce bijou romanesque, un cri d'appel à Dieu, de la plus charnelle des manières.

Pour ne citer que Philippe Sollers : « Ne pas avoir lu ou ne pas lire sur-le-champ Septentrion est foncièrement immoral »
Lien : http://luvuentendudotcom.wor..
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Un livre qui ne peut laisser indifférent qu'on pourrait détester pour sa misogynie patente, ou encenser pour sa verve romanesque d'une grande richesse en idées, en vocabulaire, en spontanéité qui s'exprime de façon frontale, sans réserve et souvent avec un humour décapant et réjouissant. Ses délires sont parfois excessifs, on a le sentiment qu'il se laisse dépasser par son appétence pour les mots et son imagination délurée et débridée, mais hormis ces quelques « hors piste », on est subjugué par la puissance du texte et du style. La crudité et la cruauté du discours sont d'un réalisme saisissant qui exprime de façon courageuse ce qui pourrait être fait, seulement pensé ou tu par la gente masculine.
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"Au commencement était le sexe".
Il y eu d'abord deux romans : Requiem des innocents et Partage des vivants, puis Septentrion. Rien qu'avec ces titres on capte différents aspects de ce dernier : violence et poésie, émotion et crudité. Calaferte a écrit un livre marquant, unique, comme le fut en son temps le Voyage au bout de la nuit de Céline. le livre est autobiographique, il revient sur ses années d'errance où il commença à se confronter au travail de l'écrivain. Son écriture est limpide, d'une pureté, d'autant plus choquante quand il parle de sexe ; elle est aussi ciselée, faites de phrases très courtes, comme en syncope, et qui démontre un conflit permanent avec la société, sur laquelle, ces traits brefs et rapides, sont autant de crachats bien ajustés. L'écrivain est un homme qui réclame sa liberté à tout prix, refusant de rester là où on aurait voulu qu'il soit : à l'usine où il se sent exploité depuis l'adolescence. Et cette envie qui le ronge et le pousse à écrire un livre est comme une faim insatiable, aussi forte que sa revendication à pouvoir penser librement, refuser ce que d'aucun éprouve comme allant de soi, et enfin pouvoir librement baiser. Son écriture est
une déflagration (terme employé par Jean-Pierre Pauty pour le tire de sa biographie). Romancier, poète, dramaturge, essayiste, il a tenu aussi un journal, sous le titre des Carnets (16 volumes!), il ne faut pas perdre de vue que Septentrion, malgré son style et sa force, ne nous donne à lire qu'un aspect d'une oeuvre immense et prolifique, malheureusement encore trop peu connu. Je ne suis pas certain qu'il ait été véritablement censuré en 1963, plutôt retiré de la vente suite à une condamnation pour pornographie (l'éditeur de l'époque n'ayant peut-être pas voulu le réimprimer
suite au scandale suscité), il aura fallu attendre 1984 pour qu'un éditeur ait le courage de la rééditer chez Denoël. Si quelqu'un connaît le fin mot de cette sombre histoire...
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On pense souvent qu'avec le temps, les années, les découvertes qui vous donnent une claque à vous dévisser la tête n'arrivent plus. J'ai eu cette sensation en découvrant Septentrion de Louis Calaferte. de la poésie à l'état pur. Une densité à couper le souffle. Un coup de poing, un coup de poing dans le ventre, un coup de bâton derrière la tête. Comme si l'on était né hier.

Un livre sur la création... la procréation, l'érection, la traction... le travail d'un homme qui se tue à la tâche. Pas le choix, question de vie ou de mort. Les phrases sont taillées au couteau. On peut y rester une journée, une nuit, sur une phrase de Calaferte. Les phrases s'enchaînent, passer une vie sur un paragraphe, une vraie mélodie, origine italienne, certainement. On glisse de digression en digression, sans jamais perdre le cap; elles décrivent un cercle, qui se referme sans cesse, à peine la place pour respirer. On se dit que l'on a jamais lu quelque chose comme ça. Peut-être chez Martinet, mais jamais aussi serré, aussi dense. Peut-être les chants de maldoror, moins éparpillé, avec une idée fixe : trouver un lit pour passer la nuit, trouver un con pour y enfoncer sa tige, tirer un coup, et trouver un crayon pour écrire ce que l'on a dans la tête. On ne sort jamais de cette ritournelle que nous fredonne Calaferte. On se dit que peut-être un livre suffit.
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Fait partie de ces livres dont on ne peut se détacher et dont on se dit en le refermant qu'il eut été dommage de passer à côté de cette lecture. Louis Calaferte, écrivain français mort à Dijon en 1994 à l'âge de 65 ans, a mis quatre ans pour l'écrire et il sera publié en 1963 avant de tomber sous le coup de deux interdictions du ministère de la Santé et du ministère de l'Intérieur durant vingt ans.

Il est vrai que la première partie est d'un érotisme torride et d'une rare exubérance. le style est particulièrement soigné et me fait penser à un mélange de Charles Bukowski et de Céline, les points de suspension en moins.

C'est l'histoire d'un gros dégueulasse obsédé par les chattes, qui préfère se faire entretenir par une rentière nymphomane, Melle Nora van Hoeck, la Hollandaise, plutôt que de retourner bosser à l'usine, afin de se donner le temps d'écrire.
Il n'écrira pas. L'engourdissement d'une vie bourgeoise confortable et sans soucis l'en empêche. A quoi bon ?
Mais Nora se transforme et devient bientôt comparable au « Fléau » de Paul Léautaud. Il ne la supporte plus. le jour où elle lui demande de s'installer à demeure chez elle , ce qu'il ne saurait envisager, même en rêve, il vide son sac et claque la porte après lui avoir soutiré de force quelques derniers billets.

Alors, c'est rapidement la rue, la cloche et les copains que l'on va taper de temps en temps pour disposer quelques jours d'une chambre miteuse au dernier étage d'un hôtel de passes.

Par bonheur, il rencontre Gaubert, un ancien copain tourmenté par le démon de l'écriture, une bonne pâte, qui forme avec sa femme un couple heureux, et qui accepte de le loger et de le nourrir pour lui permettre d'écrire.

Je n'en dirai pas davantage pour ne pas dévoiler l'issue de cette histoire très largement autobiographique.
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« Au commencement était le Sexe », annonce crânement le narrateur d'un livre qui ne fut autorisé, en 1963, qu'en édition « hors commerce ».

De chambres d'hôtel sordides en cafés sinistres, le narrateur de Septentrion mène une existence paisible jusqu'au jour où il rencontre la riche Mlle Nora van Hoeck qui le dispense de travailler à l'usine et l'entretient sans scrupule. Cet amant choyé rêve de rédiger un livre sur lequel il fonde tous ses espoirs et refuse bientôt le « royaume d'insouciance qu'elle (lui) ouvre à deux battants » Puis, il devient à nouveau un vagabond désoeuvré. Il tente de solliciter ses amis.

Un des grands de la littérature française. Quand je vois que qui est publié chaque année et que je compare avec des gens comme Louis Calaferte, on ne peut être que profondément atterré. Lisez Septentrion.

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