«
le Lait des Rêves » de
Leonora Carrington (2018, Ypsilon, 56 p.) comporte 10 contes du merveilleux et de l'étrange, comme seule elle savait les écrire et les illustrer.
Le titre de ce livre est le titre et le thème de la Biennale d'Art de Venise 2022 du 23 avril au 27 novembre. La curatrice
Cécilia Alemani a compilé et édité ces contes, ainsi que choisi ce titre, à la fois pour la Biennale et le livre. le catalogue qu'elle édite reprend ces contes «
The Milk of Dreams » (2022, Biennale di Venezia, 368 p.)
Ce petit livre complète le premier volume des oeuvres complètes, « L'oeuvre Ecrit » (2020, Fage, 208 p.) qui comporte 27 contes écrits entre 1938 et 1975. Ils sont introduits par une préface de Max Kober. le tout comporte, parmi les plus connus « La Maison de la Peur, «
La Débutante », « Quand ils passaient », « L'Oncle
Sam Carrington », « Les Soeurs », « Lapins Blancs », « le Septième Cheval ». Ce sont donc des univers stupéfiants de magie, truffés de passages où s'engouffrent toutes les autres réalités.
Cecilia Alemani a dirigé l'édition inaugurale consacrée à « Buenos Aires » à l'Art Basel Cities. Depuis 2011, elle est directrice et conservatrice en chef de High Line Art, le programme d'art public à New York. Cette exposition fit partie du High Line Park, parc linéaire à ciel ouvert qui utilise l'ancienne ligne désaffectée des anciennes voies ferrées aériennes du Lower West Side. Un long pont suspendu de 2.3 km qui va jusqu'à Lower West Side à Manhattan. Les parties sont arborées ou simplement engazonnées. Très agréable et aussi très fréquenté au milieu du paysage urbain dans le Meatpacking District, à travers Chelsea.
Le livre original « Leche del sueño » (2013, Fondo de Cultura Economica USA, 48 p.) est introduit au niveau de sa poésie et traduit par
Lise Thiollier. Il comporte des textes et illustrations en couleur du fils de Leonora, Gabriel Weisz « Entre contes et bêtes sans nom », ainsi qu'un texte d'
Alejandro Jodorowsky « Les choses sont à ceux qui en ont le plus besoin ». Son autre fils Pablo Weisz illustrera une réédition du New York Review of Books « The Hearing Trumpet » (2021, NYRB Classics, 224 p.) avec un texte traduit en anglais par Antonia
Lloyd-Jones et suivi par une postface de
Olga Tokarczuk. de même «
The Milk of Dreams » a été récemment réédité (2017, NYRB Children's Collection, 56 p.) avec les illustrations de Gabriel Weisz, et les textes d'
Alejandro Jodorowsky.
Gabriel Weisz se souvient d'être assis dans une grande pièce dont les murs étaient couverts d'images de créatures merveilleuses, de montagnes immenses et de végétation luxuriante pendant. Sa mère leur racontait des histoires fabuleuses et amusantes. Cette pièce a ensuite été blanchie à la chaux, mais certaines de ces merveilles ont été conservées dans le carnet que Carrington a appelé «
le Lait des Rêves », offert ensuite en signe d'amitié mystique à
Alejandro Jodorowsky.
Le livre de contes introduit des histoires et aussi des personnages étranges.
« Jean sans tête » est une histoire qui devrait plaire aux fabricants de fenêtres, comme publicité pour dormir les croisées fermées.
« le garçon avait des ailes à la place des oreilles ». Mais une nuit, à force de remuer les oreilles, « sa tête s'envola par la fenêtre ». Evidemment, tout le monde n'a pas de telles oreilles, sauf Babar. Sachant que les éléphants d'Afrique possèdent de très grandes oreilles alors que leurs cousins d'Asie en ont de plus petites.
Mais, sa mère, en tant que bonne mère « colla sa tête avec du chewing-gum ». c'est également un bel exemple de placement du vocable « chewing-gum » dans le la poésie.
« L'enfant Georges », expose un autre cas de disfonctionnement biologique. « Georges aimait manger le mur de sa chambre ». Cas rare, mais probable, et en tous cas, reconnu par la Faculté, puisqu'il existe en pharmacie des « flacons de pillules de mur ». Il n'est pas précisé si au Mexique, ou en France, ces médicaments sont remboursés par les mutuelles médicales.
« Hubert le beau ». C'était « le plus beau garçon de la ville » Mais sa grande beauté égalait sa méchanceté. Rien de plus amusant que de « mettre des rats dans les lits de ses soeurs ». Jusqu'au jours où l'une d'elles « mit un crocodile dans son lit ».
Je me souviens d'un album de ma fille intitulé « Il y a un crocodile sous mon lit » de Ingrid et
Dieter Schubert (1980, Grasset, 32 p.). L'histoire a dû avoir du succès car il existe aussi un «
il y a un alligator sous mon lit » de
Mercer Mayer (2010, Gallimard, 32 p.). On peut continuer à exacerber les peurs enfantines avec un gavial, caïman ou autre alligatoridé.
« le monstre de Chihuahua » narre l'histoire d'une petite fille qui avait « six jambes », et qui n'arrêtait pas de dire « cinq et quatre, cinq et quatre, cinq et quatre, 5+ 4, 5 + 4, 5 + 4 ». Celà rappelle Hans Arp durant sa présentation au conseil de révision qui se met nu et répond à toutes les questions : « nom, date de naissance, profession… » par un « 1914 ». Il fait ensuite le total, sous le portrait d'un président à moustache et mèche rebelle.
« L'horrible histoire des petits morceaux de viande ». C'est la plus logue des histoires, avec pour sujet Lolita Estomac. de son vrai nom « Madame Dolores Catapum de la Carza ». Au marché, elle avait toujours « une petite boite de viande pourrie qu'elle donnait aux enfants qui ensuite avaient mal à l'estomac ».
Par la suite trois enfants subissent les méfaits de Lolita estomac, qui leur coupe la tête et le place dans
la cage du perroquet. Survient un indien qui les délivre et les recolle, mais n'importe comment. C'est un peu l'histoire de Saint Nicolas et du boucher, à la sauce mexicaine. Ce dernier n'ayant pas le mode d'emploi du montage de ces meubles de la firme suédoise.
« La méchante histoire du thé à la camomille » vante les vertus diurétiques du thé à la camomille, surtout quand « Petit Ange » se libère, par la fenêtre sur les passants. « Jusqu'à ce qu'un éléphant et un cheval arrivent ».
Comme quoi les mixions n'attendent pas le nombre des années.
« L'histoire noire de la femme blanche ». « Une femme blanche portait du noir. du noir avec du noir » et de plus, « elle joue de la flûte ». Celà rappelle « La Mouche de M ; Grégoire » dans les « Contes » au tome III de l'« Oeuvre Ecrit », qui utilise « ses savonnettes et ses pyjamas étaient noirs, c'était sa couleur préférée ».
« La gelée et le vautour ». D'où l'importance de ne pas quitter sa recette des yeux, surtout s'il s'agit de « gelée à la fraise ». Un vautour peut tomber dedans, ce qui force ensuite à « manger le vautour en entier et ses plumes »
« L'histoire répugnante des roses » ou comment, en tant que boucher on peut cultiver son jardin et y faire pousser des roses. C'est le cas de Don Crecensio. Mais à condition d'éviter les mouches et « de leur couper les ailes pour en faire des petites tortues ».
« le fils de l'avocat ». Il s'agit bien de Jérémie, le fils de l'avocat, qui fait des trous dans le sofa, et qui leur donne à manger, comme à des bouches.
« Monsieur Moustache Moustache », un homme qui a deux visages, mange des mouches et danse avec son dindon. Ainsi que sa femme « Madame Moustache Moustache à l'envers ». Ils sont tous « très moches ». En plus, il y a également un lapin « le lapin est beau, mais il n'est pas à eux. »