[Lu dans le cadre d'une masse critique graphique Babelio]
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De l'Annonciation à la Résurrection" est un ouvrage qui retrace la totalité du parcours terrestre de Jésus en 75 “stations” : 75 extraits des Evangiles (dans la traduction du chanoine Osty), auxquels répondent dans une fulgurance de traits et de couleurs 75 tableaux du peintre
Macha Chmakoff, brièvement explicités par leur auteur.
Il est difficile de poser des mots sur ce qui ne s'exprime pas par des mots, et particulièrement lorsque, comme moi, on ne possède pas de compétence en matière de critique picturale. Je ne peux donc livrer ici (et je tiens à le préciser) que mon ressenti de simple lectrice et de femme de bonne volonté qui s'efforce de construire jour après jour son chemin de lumière et de foi...
Selon la tonalité du texte évangélique et la nature de son message,
Macha Chmakoff emploie ici essentiellement deux modes d'expression picturale qui se complètent et se répondent : des couleurs intenses, presque saturées, pour dire la puissance des émotions, de la stupeur et de l'émerveillement (guérisons et miracles, Transfiguration, Ascension et Pentecôte), la nouveauté et l'importance du message (Paraboles) ou l'intime de la solitude et de l'angoisse (Gethsémani, humiliations de Jésus) ; des couleurs pâles, presque fantomatiques, pour dire le dessaisissement de soi en présence du mystère divin en action et presque palpable, de la Parole qui s'incarne, des Portes célestes qui s'entrouvrent (présentation de l'Enfant aux mages, baptême de Jésus, conversion de Zachée, résurrection de Lazare, Crucifixion…)
Mais quel que soit le mode d'expression choisi, reviennent comme une constante hautement signifiante la verticalité des personnages comme aspirés d'en haut, déjà, par les cieux dans ce récit où la présence du souffle divin est tangible, et l'absence de traits distinctifs - les visages ne sont qu'esquissés, les corps sont des silhouettes - comme si, par ce choix, le peintre s'était refusé à nous imposer son propre regard afin d'offrir aux nôtres un plus vaste espace de liberté et de méditation.
L'ouvrage (que j'aurais aimé cependant en plus grand format - et c'est mon seul regret - pour rendre davantage justice aux toiles originales) est tout simplement splendide. Les textes de
Macha Chmakoff, qui a par ailleurs suivi un cursus de théologie, ne sont pas seulement explicatifs de sa peinture mais font également, avec beaucoup de profondeur, de finesse et de sensibilité, oeuvre d'exégèse. le choix de la traduction Osty, réputée pour sa rigueur et sa fluidité, est intéressant. Et l'ensemble constitue une proposition spirituelle originale et puissante qui a été pour moi un très beau moment de recueillement et l'occasion de découvrir un grand peintre que je ne connaissais pas.
Un très grand merci pour ce précieux cadeau à Babelio, aux éditions Salvator et à
Macha Chmakoff.