Retour de voyage partagé avec
Sandrine Cnudde, une auteure que j'avais effleurée en survolant sa
Patience des fauves. Ici une rencontre plus intime avec
La constellation de la sandale. Une traversée de l'Occitanie à pied par les bas-côtés .
A l'automne 2019
Sandrine Cnudde est invitée au futur Salon du livre pyrénéen de Bagnères de Bigorre d' Octobre 2020. Elle accepte avec enthousiasme et décide de s'y rendre à pied bien avant que la pandémie se déclare, pourtant quelques mois plus tard elle ne change pas de cap et se lance dans l' aventure. La voilà partie seule en pleine canicule depuis Uzès (Gard) en septembre 2020 pour un périple de 600km d'une durée estimée à sept semaines.
Nous la suivons alors par monts et par vaux, par mots et par veaux, capturant la beauté du monde, déchiffrant les paysages, délivrant des fulgurances et accueillant l'inattendu.
Sandrine Cnudde au fil des pages nous livre ses trouvailles, ses considérations, ses découvertes, ses souvenirs, ceux de la terre qu'elle arpente, ceux des hommes qui l'ont façonnée, décryptant les signes invisibles, la marque de guerres fratricides, les traces de cultes oubliés, des empreintes qu'elle revisite de son regard.
Sandrine Cnudde choisit le plus souvent les chemins de traverse qu'elle préfère aux chemins balisés dont elles s'éloignent régulièrement chérissant les lisières et les franges. Faisant confiance à son intuition elle déniche alors des recoins, des tanières d'où surgissent des trésors, des gouffres. de bordures en cors durs, elle écoute ses yeux, sa bouche voit, ses oreilles absorbent, ses narines dissolvent les impressions, les sensations multiples pétillent et crépitent comme des feux follets. Tous les sens en éveil ricochent de pierres en pierriers, des bulles de gaz et d'éther coalisées s'échappent pour une danse de l'invisible, l'auteur arrive alors à retrouver les gestes et l'instinct de la première femme à l'aube de l'humanité. Une poésie enjouée ou grave, minérale, accidentée, aux pulsations sonores,
Sandrine Cnudde aime les mots, les éléments, la lire est un voyage sans cesse renouvelé.
A l'écoute de ses semailles, comme les auditeurs de ses soirées étapes paysannes « J'irais po-aimer chez vous », programmées avant son départ, nous baignons dans les poèmes choisis de et par
Sandrine Cnudde. Une sélection privilégiant l'oralité et l'expression des peuples premiers tel ceux de
Maria Sabina dont un des poèmes porte le titre éponyme de cette relation de voyage
La constellation de la sandale. Des poèmes narratifs et des éclairs visuels parsèment ce journal de bord , un récit poétique qui traduit son expérience au monde et aux autres lors d'une période où les liens se délient. Un témoignage sur les territoires traversés.
Des conditions météorologiques difficiles, des moments de grande solitude et d'épuisement, conjugués à la sollicitude et la bienveillance de proches et de rencontres ainsi que sa pugnacité permettent à
Sandrine Cnudde de mener son projet à bien et d'arriver à temps sous une pluie battante à son lieu de rendez-vous.
Poète, photographe, nomade en création ,
Sandrine Cnudde saisit le monde en mouvement, le nectar du vivant et de l'éphémère à travers des tranches de territoires et nous invite dans son monde intérieur.
Une traversée Ouest
Sud Ouest de l'Occitanie étonnante, un plaisir de se jeter dans la gueule du ciel et de sombrer dans l'univers poétique de
Sandrine Cnudde.
Une lecture aspirante et inspirante, une escapade occitane où l'on prend son pied crinière au vent et qui donne envie d'aller musarder dans les lieux évoqués.
Une belle découverte.