Les rues sont pleines de gens.
Nous allons, nous filons, régulièrement, parfois tête baissée mais nous ne pouvons les ignorer. Sinon, inévitablement, nous pourrions leur rentrer dedans et vice versa. Nous ne voudrions pas finir les quatre fers en l'air, comme l'on dit, ou face par terre, en colère et peut-être ne pas voir les choses comme il faudrait.
Nous préférerons accorder à chacun son passage et parfois observer à la dérobée, coquins que nous sommes.
C'est bien moins risqué.
Le détective
Sherlock Holmes préfèrera regarder où il met les pieds, c'est du bon sens. C'est préférable pour une affaire. Et il préfèreea observer, avec discernement. Avoir de la hauteur.
Ceci permettra de ne pas juger hâtivement et d'éviter de se méprendre, sur une histoire, sur les personnes.
C'est ce qui arrivera le jour où un nouveau client très agité viendra sonner à sa porte et à celle de son fidèle Watson, Rue Baker Street.
Holmes l'avait vu arriver par sa fenêtre.
Qui pouvait sortir par cette journée froide à pierre fendre?
Et se risquer d'une manière si agitée à se rompre le cou, en belle redingote, en arpentant si hâtivement les trottoirs gelés?
Quelqu'un dans l'émotion, quelqu'un avec une triste affaire à résoudre sans doute? Une affaire qui ne peut attendre.
En général, notre cher Holmes fait souvent mouche.
" Vous êtes venu me confier votre histoire, n'est-ce pas? Votre empressement vous a privé de vos forces. Attendez d'être tout à fait remis, je vous prie; après quoi je me ferai le plaisir d'examiner le petit problème, quel qu'il soit, que vous voudrez bien me soumettre...".
Nous apprécierons le bon soin de la mise en place de cette nouvelle intrigue et son bon sens de la psychologie.
Ne jamais se fier aux apparences, chers jeunes lecteurs.
Ne juger jamais trop vite les "fous".
D'ailleurs, chers jeunes lecteurs, les gens d'un calme olympien peuvent être aussi sereins qu'une rivière apaisée et cacher aussi de lourds secrets.
Nous vous déconseillerons dans ce cas de jouer aux jeux de cartes avec eux.
Les gens agités en revanche peuvent avoir des histoires importantes à raconter, il faut savoir simplement parfois écouter.
" - J'ai le sentiment qu'il faut agir vite. Voilà pourquoi je me suis hâté de venir vous trouver, dès que l'inspecteur de police m'a suggéré de solliciter votre coopération. Comme cette neige ralentit les fiacres, j'ai pris le métropolitain et terminé le chemin au pas de course. Ce qui explique mon essoufflement, car je n'ai pas l'habitude de faire de l'exercice...".
Les pages d'illustrations de Christelle Espié sont superbes, toujours impeccables. Nous sommes à Londres, au XXème siècle et nous profiterons d'un riche talent aux pinceaux pour rendre les personnages théâtraux et d'un réaliste expressif.
Mais, excusez-moi, chers jeunes lecteurs, de vous couper de la visite d'Alexander
Holder chez
Sherlock Holmes.
Loin de moi l'intention de vouloir détourner votre attention.
Nous parlerons ici d'une disparition d'ailleurs et d'un bijou d'une incroyable valeur: le diadème de béryls.
Quel est le nom de ce propriétaire dont le banquier préfèrera conserver l'anonymat?
Un membre de la famille royal peut-être?
Nous jubilerons d'impatience.
Quel est le lien qui unira ce client à ce bijou très renommé en Angleterre?
L'auteur
Sir Arthur Conan Doyle fera ce que nous avons pourtant fait, son personnage
Holder racontera le motif impérieux de sa visite et en même temps, l'auteur détournera sournoisement notre regard pour la suite de l'aventure, multipliant les protagonistes dans l'entourage de
Holder, multipliant les suspects potentiels donc et nous perdant ainsi, compliquant la visibilité des intentions de chacun aussi efficacement qu'une cible marquée à extirper d'un jeu de mikado.
Où est le bijou?
Qui aurait intérêt à jouer un mauvais tour à ce banquier?
Son fils, sa nièce, sa servante ou l'ami de son fils, l'étrange Sir George Burnwell?
Le banquier
Holder aura perdu le précieux gage d'un client et nous retracerons le parcours de sa journée afin de déterminer à qui profitera le crime dans un moment d'inattention.
C'est encore l'acolyte d'Holmes, son fidèle
Docteur Watson, qui racontera et la confidence sera passionnante.
Le grand roman illustré nous donnera l'impression de partager tranquillement une conversation, câlé dans notre fauteuil, exposant des faits, par opposition à l'ambiance, très excitants et captivants.
Nous serions prêts à répondre à notre narrateur :
" Ah? Oui, vraiment, il a fait ça?
Mais dans quel but? Où était-il parti le soir suivant? Croyez-vous que cette personne soit la coupable?"
Vous l'aurez compris l'atmosphère sera pleine de suspens et nos deux conteurs, auteur et narrateur, nous tiendrons bien ferrés.
La vérité et les apparences sont souvent étonnantes.
Conan Doyle saura "faire son beurre", comme l'on dit familièrement et servir d'excellents récits à partir de cette respectable société londonienne à double visage.
Nous sommes encore une fois très amateur de cette collection de Holmes chez Sarbacane.
C'est un délice.