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Ce livre m'a scotché ! Bon, c'était un peu gagné d'avance, car j'aime beaucoup les créations qui tournent autour de Salem (Arthur Miller, Thomas Gilbert). Ce qui me plaît dans ce thème, c'est la façon dont chaque écrivain met en place la machination diabolique de la chasse aux sorcières, avec plus ou moins de part de fantastique.

Pour Maryse Condé, c'est une vraie réécriture moderne. On trouve d'ailleurs les mots féminisme et racisme dans le récit, ce qui m'a, je dois dire, un peu déstabilisée puisque cela ce passe au 18e siècle. le personnage de Tituba est d'une richesse incroyable, son lien avec la nature et sa spiritualité sont profonds. J'ai aimé le fait que Maryse Condé traite toute sa vie, avec la même intensité que l'épisode de Salem (pour lequel elle reprend les transcriptions du procès). Ici la fiction se mêle donc à la réalité de façon à combler les manques d'archives.
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De la Barbade à Boston à Salem, sous la férule de Darnell Davis, puis de Susanna Endicott, puis du révérend Samuel Parris, cette pauvre Tituba était condamnée avant même d'être née, les stigmates de son peuple enchainés au passé lui sapant le présent, aujourd'hui lui étant tout aussi insipide que gorgée d'eau fétide et stagnante. Fruit du viol puis devenue orpheline, c'est sous l'aile de Man Yaya qu'elle trouva aisance et réconfort, souffle d'espoir lui permettant de se retrouver, de renouer, se forger une identité. Mais Salem saura vite fait la bafouer, la condamner au pilori avant même d'être entendue, mépris et racisme lui servant de jury impitoyable et carnassier. « Moi, Tituba sorcière... » de Maryse Condé, saut dans un passé sombre et tortionnaire, mais virevoltant d'une plume habile et légère, enivré des effluves du sud, de Hoodoo, pointe de sorcellerie !
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Histoire vraie d'une esclave dont la mère a été arrachée au pays Ashanti ( actuel Ghana), puis violée par un marin anglais sur un de ces bateau de traite ( 12 millions d'Africains ont été raptés , mis en esclavage et exilés dans les champs de canne à sucre aux Antilles au cours des siècles), puis pendue devant sa fille pour n'avoir pas accepté un autre viol venant de son nouvel acquéreur. Tituba, dont le nom est connu, (malgré la supposition ironique de Maryse Condé, qui en écrivant sur elle, lui fait dire que son nom sera oublié ),est éduquée par une vieille femme aux pouvoirs bénéfiques, et restera tout le temps en contact avec la jeune fille, même après sa mort. Car les invisibles, ou anges gardiens, continuent de la protéger et de la guider, à travers ses aventures, dont la sortie de son ile natale, la Barbade, jusqu'à Boston puis Salem. Par Arthur Miller, nous connaissons le procès des sorcières de Salem, une hystérie collective qui s'est soldée par 300 procès, 22 exécutions et des morts en prison. Tituba fait partie des accusées, s'en sort en avouant que, oui, elle est bien une sorcière.
Maryse Condé fait parler cette jeune esclave, ses douleurs, ses prisons, mais aussi ses extases érotiques, « la mer des délices » dit elle, qui lui permettent de s'accrocher malgré tout à la vie. Et aussi son avortement d'un enfant qu'elle ne veut pas voir souffrir autant qu'elle…. Et qu'elle voit cependant parmi les invisibles qui la protègent. le même thème de la mère esclave refusant de mettre au jour un enfant a été repris par Toni Morrison dans Beloved. C'est tout un pan de l'histoire de l'occident qui est évoquée, ce que les êtres humains ont sans doute fait de pire, en réduisant d'autres à n'être rien, à n'avoir pas d'existence, et à pouvoir être châtiés durement même sans raison, sévices multipliés par le monde puritain pour qui le diable est partout et doit être poursuivi. le bonheur de la végétation de son ile, longuement décrite, de la mer « sa grande main humide en travers de mon front, sa vapeur dans mes narines » , de tout ce qui vit sur terre et des invisibles qui sont présents et , surtout, de ses amours charnelles, sont toutes des consolations sans doute inventées par Maryse condé, qui reprend l'histoire et la continue à sa guise. Donc Tituba n'est pas oubliée, saluons sa mémoire.
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Dans cette histoire, Maryse Condé, grande autrice antillaise, prix Nobel de littérature alternatif en 2018, s'immisce dans les blancs de l'histoire pour raconter le destin d'une femme esclave au 17e siècle, qui va se retrouver dans une posture d'esclave à cause de l'amour d'un homme : jusqu'à ce que John Indien ne vienne lui déclarer sa flamme et ne l'épouse, Tituba vit tranquillement à l'écart du monde, dans une case, en causant avec ses "Invisibles", tous ses proches qui ont quitté la vie terrestre mais restent à ses côtés et la guident dans la vie.

Mais en nouant sa vie à celle de cet homme qui va se révéler bien peu courageux par la suite, Tituba entre au service d'une femme qui la revendra à un pasteur américain. Pour Tituba, c'est un choc de culture et de civilisation qu'elle va devoir affronter en quittant le monde créole et ses croyances pour découvrir l'Amérique ultra puritaine des colons : les cheveux doivent être cachés, on fait l'amour avec ses vêtements, la foi chrétienne est la seule qui puisse exister, et toute personne qui ne rentre pas dans ce cadre est forcément possédée par le Démon...

Au fil des pages, Maryse Condé prend la voix de Tituba pour relater cette vie de privation, de frustration mais aussi de pouvoir. Car Tituba est une sachante et avant tout une femme libre. Tituba sait soigner les maux du quotidien avec ce qui existe dans la nature. Elle croit à des forces supérieures différentes de celles de ces puritains, et pour toutes ces raisons, Tituba fascine et envoûte, Tituba est forcément une sorcière, Tituba doit mourir. Et si l'histoire de Tituba est marquée par le procès de Salem en 1692, là n'est pas l'enjeu du livre : on passe très vite sur ce qui va s'y dire et s'y nouer. L'important, l'essentiel de cette histoire est de démontrer comment les fantasmes ont pu se créer autour d'une femme qui avait du mal à concilier sa culture d'origine, ses croyances, avec l'injonction du puritanisme américain.

Si on peut relever certains anachronismes dans le récit de Maryse Condé, comme certains propos tenus par Hester, cette femme dont Tituba croise la route en prison, c'est avant tout l'histoire d'une femme puissante dans un monde tenu de main de maître par les hommes qui nous est racontée, l'histoire d'une femme qui s'oppose, qui sait, et qui en devient dangereuse. Si elle réussit, elle est coupable, si elle échoue, elle l'est également. Il n'y a pas d'autre destin pour Tituba que celui d'être pointée du doigt et soumise au bon vouloir de ceux qui se pensent plus puissants.
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Je connais Tituba depuis un cours d'option que j'avais suivi (au collège !), basé autour du thème de la sorcière. Depuis cette période, je me suis passionnée pour ce sujet. Evidemment, le fameux procès des Sorcières de Salem a été la première chose que j'ai étudié mais il est vrai que Tituba est bien souvent évincée de l'Histoire.

Ce roman, narré à la première personne, raconte donc son histoire, de sa naissance jusqu'à sa mort.

J'ai été très surprise de la position du personnage dans le roman. J'avais imaginé Tituba comme une sorcière revendiquée, consciente de son statut surnaturel. Or, dans le roman, elle se voit en réalité comme une « guérisseuse », une médiatrice entre les vivants et les morts et se plait à rendre service, à faire profiter le monde de son art. Ne comprenant pas pourquoi la société la rejette et surtout la traite de sorcière, elle n'en reste pas moins compatissante et bonne. Au fil de son histoire, le sort s'acharne sur elle et elle ne semble pourtant pas avoir le pouvoir de le déjouer.

Croyant que j'allais me plonger dans une histoire de sorcellerie, j'ai découvert une véritable ode à la féminité, au corps et à l'amour. Débordante de passion, Tituba se bat seule contre une société d'hommes où les femmes, surtout si celles-ci sont noires, ne servent qu'aux services et à la procréation.

Je pense que l'auteure, en faisant volontairement l'anachronisme avec Esther, la compagne de cellule de Tituba, brandit le drapeau du féminisme et de l'émancipation des femmes. En y réfléchissant, dans le roman, à chaque fois que Tituba est en contact avec un homme, celui-ci entraîne sa perte d'une façon ou d'une autre. Elle le saura mais l'ignorera, aimant trop l'amour, malgré les préventions des deux femmes qui l'accompagnent, sa mère Abena et Man Yaya.

Bien que le roman manque d'action si nous nous attendons à une histoire de sorcellerie comme on les aime, le contenu n'en reste pas moins passionnant par le savoir de Tituba et ses réflexions. A lire comme un lien entre la femme et la nature, comme une éloge à la féminité et à la sexualité. A vrai dire, ce livre nous enseigne que la « sorcière », pointée du doigts dans toutes les sociétés et toutes les époques, n'est qu'en fait qu'une femme… affranchie et libre de tout obscurantisme.
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Un bon roman qui se lit facilement et qui pourtant aborde des sujets graves: la traite des Noirs, l'intolérance religieuse, l'oppression sur les esclaves dans l'Amérique du XVIIème siècle. Maryse Condé a su rendre attachant le personnage de Tituba, née d'un viol, esclave, déracinée de son île natale, impliquée involontairement dans l'affaire des sorcières de Salem, menacée, persécutée, et pourtant généreuse et si vivante.
Toutefois, l'épisode de Salem est un peu bâclé dans ce roman; il n'est pas présenté avec la force et la pertinence qu'on trouve dans la pièce de théâtre (inoubliable) écrite par Arthur Miller. Je trouve aussi que l'auteure est une "attrape-tout", à l'excès. Par exemple, elle utilise sans vergogne l''héroïne du roman "La lettre écarlate" (de N. Hawthorne). Et dans sa volonté de dénonciation systématique, elle en rajoute (inutilement) avec l'antisémitisme, à travers le personnage de Benjamin Azevedo. Elle ne se gêne pas non plus, pour employer des mots comme « raciste » et « féministe » qui sont anachroniques. Tout ceci m'a un peu gêné.
Le plus intéressant dans le roman, c'est peut-être la la sorcellerie chamanique de Tituba, héritée de sa culture africaine, jamais oubliée dans le Nouveau Monde. Maryse Condé donne des lettres de noblesse à cette pratique, ça m'a donné envie de m'informer au sujet des croyances et des cérémonies magiques des esclaves d’origine africaine.
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Quelle belle idée de donner la parole à Tituba, ce personnage à peine entrevu dans Les sorcières de Salem !
L'histoire de Tituba commence et se finit à la Barbade. Je dois m'attarder sur la forme ici. Je suis littéralement tombée amoureuse de l'écriture de Maryse Condé. D'abord, sa description de la Barbade. Etrangement, malgré les horreurs qui s'y déroulent, c'est l'image d'une Barbade généreuse et magique qui se colle à la rétine. On lit le beau, on lit le mal, mais c'est le beau qui reste. C'est un exercice difficile de raconter le tragique sans tomber dans le pathos ou, à l'inverse de traiter les événements avec trop de froideur.
Le portrait magnifique de Tituta ensuite. C'est une femme libre, mais les hommes auront sa perte. Les malheurs qui la frappent ne l'abattent jamais, ne la transforment pas. Elle ne passe jamais dans le camp du mal, de la vengeance ou de la rancoeur, elle s'évade dans son monde magique. C'est une martyre, une sainte. C'est là tout le paradoxe de l'histoire : les seules bonnes personnes du roman sont perçues par les autres comme des incarnations du mal. Cette lecture m'a éblouie; j'ai tellement aimé Tituba que je ne voulais pas la quitter. J'ai adoré le style de Maryse Condé et je cours me procurer ses autres romans. Et je vais recommander celui-ci à tout mon entourage.



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Tituba, esclave noire, est née d'un viol de sa mère par un blanc. Très vite orpheline elle est recueillie par Man yaga qui lui apprend le secret des plantes et du vaudou.

Tituba à réellement existé et sa vie fut terrible. Après avoir été marié à John Indien, elle sera vendu à un Pasteur Samuel Paris qui l'emmènera à Boston puis à Salem où aura lieu le procès des sorcières de Salem quelques années plus tard.
Dans cette ville puritaine, elle sera accusée de sorcellerie. Samuel Paris va manipuler les gens du village " les possédés" pour arriver à ses fins . On ne sait pas ce qu'est devenu Tituba, l'auteur nous donne sa version.
Ce que l'on sait : une vingtaine de jeunes femmes ont été accusées, quatorze ont été pendues.
Il ne faisait pas bon de vivre aux 17 siècles. Une histoire touchante et une belle écriture, l'utilisation du' je ' rend l'histoire encore plus intense.
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Je salue l'initiative de Maryse Condé : avoir donné une voix à celle qui n'en avait pas, Tituba.

Tituba est une esclave de la Barbade qui a réellement existé. Elle a notamment été au service du révérend Samuel Parris et a été impliquée dans les procès des sorcières de Salem de 1692.
Bien qu'elle soit décrite comme une femme noire, il semblerait d'après d'autres sources qu'elle était amérindienne en vérité.

Ce roman est magnifique, bien écrit, tout en mêlant réalité et imaginaire. On suit toute la vie de Tituba, de sa conception à son décès, sans omettre sa pratique ésotérique ainsi que son passage à Salem. Maryse Condé décrit parfaitement l'univers puritain de l'époque et tord le cou à certains clichés sur les sorcières.
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Ce roman, poignant et réaliste, est un de ceux qui m'a le plus marqué de toutes mes lectures (et elles sont nombreuses).
Cette oeuvre a été un vrai choc, bien écrite, documentée, avec un personnage central intéressant et réaliste, c'est un de mes indispensables en littérature.
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