À la suite de la Methodenstreit opposant Gustav von Schmoller à
Carl Menger, l'École historique allemande née avec Bruno Hildenbrand, Karl Knies et Wilhem Roscher avait qualifié ses opposants économistes d'École autrichienne d'économie : le qualificatif « autrichien » étant alors une marque de dédain pour montrer la supériorité des Allemands sur les Autrichiens, un peu comme des Français le feraient avec des Belges. Certes, les économistes de cette école étaient principalement d'origine autrichienne, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Quant à l'École historique allemande dont
Max Weber a été un des représentants d'une troisième vague, elle a peu ou prou disparu du paysage intellectuel contrairement à l'École autrichienne d'économie - elle a donné des Prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel dont Hayek - un demi-prix dans son cas - et inspirés les politiques économiques de certains états ici et là.
On peut voir comme une espèce de retour de bâton de l'histoire le qualificatif de « krautrock » - rock choucroute - utilisé par la presse musicale anglaise dont on connait la capacité à inventer des courants musicaux - on pense au post-rock inventé par
Simon Reynolds pour qualifier l'album Hex des sous-estimés Bark Pyschosis et dont les principaux groupes censés faire partie s'en défendent comme les montréalais de Godspeed You! Black Emperor - pour parler des groupes qui émergèrent dans les années 1960 et 1970 comme Neu, Tangerine Dream,
Popol Vuh, Amon Dul, Can, voire Kraftwerk, même si ces derniers ont toujours été à part - « Au milieu des autres groupes expérimentaux allemands, ironiquement labelisés « krautrock » (rock choucroute), comme Can, Tangerine Dream,
Popol Vuh, Faust, Klaus Schulze ou Neu, ils ne font ni du rock instrumental, ni du planant, ni de l'atmosphérique ou du Wagner techno. Déjà, ils sont à part »,
Jean Rouzaud, Contre-culture, p. 255 - et furent inspirés entre autres par la musique de Karl-Heinz Stockhausen et les débuts du robotisme et de la ré-industralisation de l'après-guerre.
Lorsque
Julian Cope, musicien de rock anglais sous son nom d'artiste ou avec des groupes comme The Teardrop Explodes, Queen Elizabeth ou Brain Donnor, écrivain, artiste, antiquaire - il a écrit un livre sur le sujet - s'intéresse au cas du Krautrock ou à « la grande kosmiche Musik » comme il la qualifie, cela donne Krautrocksampler. Petit guide d'initiation à la grande kosmische musik, et la réunion des deux - Cope et le Krautrock - est détonnant, au sens d'explosif. En français, c'est d'abord aux éditions Kargo que l'ouvrage a été publié avant qu'elles ne se sabordent en 2008, ce qui n'est pas étonnant vu leur dénomination.
Mais revenons à
Julian Cope et au Krautrock.
Julian Cope est un gars totalement barré, certains groupes du krautrock - Can, Faust, Popol Vuhl, etc. - le sont totalement également. Cope s'attaque à son sujet avec une grande admiration et passion, en amoureux de cette musique, et traite son sujet en deux parties : la première est consacrée à la description de la dynamique de ce courant de musique et la deuxième est consacrée, comme c'est souvent le cas des livres sur la musique, à une espèce de Top 50 du Krautrock - cette partie est la moins intéressante des deux et la plus frustrante du fait de la subjectivité de cette exercice de classements comme en témoigne le dernier essai de
Jacques Attali, Les chemins de l'essentiel.
Petit guide d'initiation mais grand livre sur la musique et devenu une référence sur le Krautrock, Krautrocksampler est à lire. Attention, seule la colle (de la première de couverture) est livrée - la weed n'est pas livrée avec le livre, ni les albums des Can, Faust, Popol Vuhl et autres groupes cosmiques et pourtant tous ces joyeux drilles ont dû en usé et abusé.