De
Reynaldo Hahn, je ne connais que très peu l'oeuvre musicale, à part Ciboulette, son plus grand succès et quelques airs chantés par de très belles voix mais qui ne me touchent pas réellement. Je ne m'y intéresse vraiment que pour l'amour de
Proust et l' amitié indéfectible que ces deux grands artistes ont su maintenir après leur rupture.
Ce livre qui lui est consacré est une biographie des plus classiques, de bonne tenue, basée sur une véritable recherche d'archives et visant l'exhaustivité.
Je ne reviendrai pas sur le côté anecdotique de la vie du musicien. Tout est dit ICI,
Ce que je retiendrai, c'est que, jeune musicien surdoué, remarqué dès ses 8 ans et entré au Conservatoire de Paris à 11ans, très attaché alors à son maître Massenet, il compose ses premières mélodies à 14 ans.
A 16 ans, en 1890, il frappe par la maturité de son esprit et de sa culture. Il a lu et analysé tous les grands classiques, de Chopin à Liszt, en passant par Beethoven, Schumann, Mendelssohn, Lulli, Rameau... Il sait par coeur des pages entières de Massenet,
Offenbach, Gounod et dissèque, fasciné, les partitions de Wagner: La Tétralogie, Parsifal, Les maîtres chanteurs.
D'autre part, parlant l'espagnol, l'allemand, l'anglais et le français, il lit avec passion :
Flaubert,
Balzac, Dumas, Hugo,
Baudelaire, Régnier,
Sully Prudhomme, Banville.
Par ailleurs, il est connu pour aimer les voyages et la vie mondaine. A 18 ans il passe trois mois d'été à Villers-sur-Mer, dans le Calvados et "son existence évoque alors, par certains aspects, la Recherche du temps perdu: comme à Balbec, la vie de plein air, la mer, le soleil, la baignade, se mêlent aux activités mondaines. ...Visites rendues aux visites, bals, déjeuners champêtres ou dîners..."
Reynaldo adore le monde et partout son charme opère. Il est alors recherché par toutes les maîtresses de maison mais il fréquente surtout le salon de la princesse de Polignac, avenue Georges-Mandel où on joue souvent ses airs et celui de Madeleine Lemaire dont
Proust s'est beaucoup inspiré pour créer le personnage de Madame Verdurin. C'est d'ailleurs là que tous les deux se rencontrent.
En septembre 1995, ils font un voyage en Bretagne, en commençant par Belle-Isle où ils essaient de voir
Sarah Bernhardt, mais en vain. Ils longent alors toute la côte sud.
Proust est enthousiaste, Hahn moins. L'épopée bretonne se termine fin octobre et ils retrouvent très vite leur vie mondaine. Ils fréquentent le cercle des Daudet mais lassé des tristesses subites de Hahn,
Proust est séduit par le jeune
Lucien Daudet, 17 ans.
En juillet 1896, après une lettre cinglante de Marcel à Reynaldo, la rupture est consommée. Plus tard, le dépit amoureux oublié, des liens fraternels les uniront toute leur vie.
En 1900, ils sont tous les deux en Italie avec leurs mères, Hahn est à Rome où il rencontre
Tolstoï et sa femme qui vivent au Grand Hôtel et qui l'invitent plusieurs fois à des soirées russes.
Proust, lui, est à Venise, à l'hôtel de l'Europe, sur le Grand Canal. Ils s'y retrouvent bientôt et leur vie mondaine reprend.
Un soir,
Reynaldo Hahn entraîne tout son monde sur des Gondoles et se met à chanter sur les canaux, applaudis par les habitants aux fenêtres et les badauds.
Cette biographie m'a donné bien envie de lire leur
correspondance maintenant.