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sur 486 notes
L'Afrique brute, sans fioritures, sans concession. Une écriture belle, simple pour dénoncer les conditions inhumaine des femmes africaines.
Violence, corruption, humiliation, rien n'est épargné ou édulcoré et coup de génie, l'auteur ne tombe jamais dans le miseralisme.
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Un roman très réussi, efficace, qui combine dans une histoire simple, sur un temps court, un bon aperçu de tous les travers d'un pays non nommé qui pourrait être le Congo. Et cela sur un ton suffisamment léger pour que la lecture ne soit pas plombante ni désespérante.
Méréana casse des pierres au marteau, de blocs de grès elle doit faire des sacs de graviers qu'elle vendra une misère, pour survivre, elle et ses 3 enfants. Déjà c'est le premier choc, je n'imaginais pas que ce métier archaïque et inhumain existait, aujourd'hui. Mais si ! Un travail pour les femmes tout en bas de l'échelle sociale.
Méréana est intelligente, elle écoute les informations à la radio, elle comprend que la demande augmente la valeur d'un produit. Ce gravier est nécessaire à la construction du nouvel aéroport, et elle voit que bien d'autres prix ont augmenté. Elle se dit qu'il n'y a pas de raison qu'elles n'en profitent pas aussi. Avec les autres femmes de la carrière, elles se mettent d'accord sur une revalorisation du prix du sac de gravier. Aussitôt dit aussitôt fait. Mais la répression armée est immédiate, les sacs sont confisqués, des femmes sont arrêtées, d'autres blessées. Courageuses, elles font front et maintiennent leurs revendications, en prenant soin les unes des autres. Un groupe très solidaire se crée.
Progressivement nous faisons la connaissance de l'histoire de chacune d'elles, et nous avons en filigrane un portrait de la condition féminine et des institutions du pays. Mariage forcé, répudiation, prédation sexuelle, accouchement mortel, ravages du sida, hôpitaux sans aucun moyens, cout exorbitant de la vie, corruption, népotisme, disparitions inexpliquées, tout y est.
Le meilleur dans tout cela : c'est que cette belle histoire qui conte le malheur, le courage et les aspirations des femmes soit écrite par un homme. Très fin, Emmanuel Dongala ne prétend pas parler au nom des femmes, il s'adresse à son héroïne Méréana, prenant la juste distance qui donne à la fois de la proximité et un retrait respectueux.
Vraiment une très belle lecture.
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-Prix Ahmadou Kourouma (2011) –
Chronique quotidienne de femmes forçats s'aguerrissant à la négociation avec les puissants dans un pays qui pourrait être le Congo-Brazzaville.
On rencontre Méréana, femme divorcée ayant deux fils d'une dizaine d'années et s'occupant de Lyra la fille en bas âge de sa soeur Tamara décédée du Sida récemment.
Celle-ci a sacrifié ses études pour son couple jusqu'à ce que le diktat masculin réveille en elle une soif d'indépendance face à l'inégalité homme-femme imposé par le mariage.
Ça n'a pas été sans conséquences sur son autonomie financière et l'a conduit dans un chantier de casseuses de pierre où elle retrouve une quinzaine de galériennes elles aussi matraquées par le fait d'être femme.
Méré est instruite, informée et aiguisée aux luttes sociales par le biais de sa jeune soeur Tamara, appartenant à des syndicats étudiants et qui avait poursuivi dans ses combats pour la justice avant d'être fauchée dans la fleur de l'âge. Elle va de ce fait trouver légitimité dans un rôle de porte-parole pour engager des négociations concernant une juste rémunération de leur travail dont elles ont bien saisi la nécessité impérieuse en vue de travaux nationaux au rayonnement international.
Méréana et ses collègues d'infortunes vont progressivement braver la culture du silence, la violence de survivre dans cet environnement brutal et l'unilatéralité hégémonique masculine. Elles dérangent et surprennent le pouvoir et l'ordre établit. Elles vont progressivement provoquer le compromis politique, créer la rencontre avec le pouvoir et les dignitaires que cette « révolte » dérange et fait craindre la naissance d'espoirs d'émancipations hors contrôle, presque impensable dans cette région du monde.
Leur combat pour une reconnaissance salariale ne se fera pas sans heurts et va se confronter à la corruption, les violences policières, des emprisonnements autoritaires et autres tentatives de manipulations, de récupérations et l'ambivalence égoïste face à l'espoir tentant d'argent rapide.
On fait connaissance avec le passé de ces femmes, ayant toute un cheminement cabossé, victimes tantôt de l'aveuglement religieux ou autres croyances, de spoliations intrafamiliales provoquant des déclassements sociaux, de crimes impunis car la Loi bafoue la femme et l'homme détient tous les droits.
Les Maux du continent africains sont relatés à travers ce combat de femme, ruissèlement des pétrodollars pour une partie infime s'accaparant le pouvoir, maladie et système sanitaire inégalitaire, protection des femmes inexistantes, enjeux de représentations internationales sans visions de long terme… Mais aussi la culture de cette Afrique, riche, ancestrales, joyeuse et colorée, violente et combative au travers de ses rites funéraires, ses batailles de femmes « de la maison et « second bureau » par exemple.
Les traumatismes féminins trouvent une voix portée par Méré et une écoute dans ces solidarités nouvelles. L'histoire tragique de Batatou notamment est d'une force bouleversante.
Le récit se trouve ponctué de réminiscences personnelles des différents personnages et de retranscriptions d'écoute d'RFI internationales où des « faits divers » montre que la femme est loin d'être à égalité de l'homme, que l'union fait force et permet une prise en compte voir même des changements de mentalités nécessaires et encourageants.
Sympathique de lire cet espoir dans la belle plume d'un homme, Emmanuel Dongala. Les écrivains africains déjà rencontrés à travers mes lectures ont cette force en eux et ce pouvoir de faire évoluer les mentalités. J'ose penser qu'ils doivent être lu par leur contemporaines et contemporains afin de permettre la naissance d'autres Méréana, Batatou, Bileko….





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Ce livre a été recommandé lors du club de lecture Babelio en mai. C'est, pour faire court, un mouvement de revendications sociales de femmes ouvrières en Afrique.

L'histoire est annoncée en quatrième de couverture. J'étais un peu dubitatif au début, me disant qu'il n'y avait pas trop d'intrigue, de fait. J'ai aussi imaginé des témoignages un peu clichés comme il peut parfois en lire dans des chroniques de l'huma.

Et quelle claque j'ai pris, dès les premières pages. Ce livre est un témoignage extrêmement fort, qui montre la misère, l'abnégation et la résilience des femmes en Afrique. le portrait et le quotidien de ces femmes est brossé avec brio. Pas de sentimentalisme larmoyant. Je suis extrêmement admiratif de ces femmes qui luttent pour leur survie, et qui ne demandent rien d'autre que la dignité et le respect.

La narration est étrange (tout est à la seconde personne du singulier), ce qui peut rebuter au début, mais cela rajoute à la singularité de ce roman. Cet ouvrage ma rappelé "les impatientes" dans une certaine mesure.

Magnifique livre à lire - aussi pour se rappeler la vie heureuse qu'on a dans notre société.
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A la lecture, on dirait qu'on est en présence d'un travail universitaire dont le thème serait "Etat des lieux de l'Afrique à travers la condition féminine entre 2005 et 2009" (dates de la rédaction), en version romancée.
Des informations et des faits réels sont insérés dans l'écrit sous forme de roman et pour aller plus vite, il y a même parfois des extraits de journal radiodiffusé. Cela pourrait être intéressant ou agréable à lire s'il n'était exclusivement question de questions d'argent et de questions matérielles. (simple opinion)
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Avec Photo de groupe au bord du fleuve, Dongala signe un livre magnifique et bouleversant.
Que j'aime le Congo de Dongala ! Que son écriture emporte, attire ! J'ai particulièrement apprécié, ici, l'emploi du vocatif (le "tu") qui nous plonge directement dans l'univers de ces femmes, et la découverte progressive de chacune d'entre elles, de la villageoise analphabètes à l'ancienne femme d'affaire. La disparité de ces femmes qui se lèvent et se battent ensemble chasse au loin les clichés et notre vision malheureusement trop uniformes de l'Afrique noire.
Surtout, au-delà de ce constat, Photo de groupe au bord du fleuve est un portrait de femmes absolument juste et émouvant, à la portée universelle.
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La force de ces femmes africaines qui luttent pour leur survie illumine le lecteur. La lucidité et la malice de ces Congolaises pour contrarier la société des hommes qui les écrasent m'ont fait jubiler. Leur solidarité de femmes exploitées est confondante. Ce livre-la nous rend meilleurs.
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Voici une histoire qui fait une large place à la femme africaine moderne puisque il retrace le parcours d'une quinzaine de femmes casseuses de pierres au bord du fleuve. A travers ces portraits de femme, nous découvrons leur passé, leur histoire, leur vie présente, et à travers ces paroles et ces récits, l'auteur nous dresse le portrait social, sociétal et politique du pays.
Ces femmes, dont la porte-parole est Méréana, ne veulent plus se laisser exploiter.
Témoins de leur époque, elles comprennent qu'elles ne peuvent plus continuer à vendre 10000 francs leur sac de pierre, alors qu'il est revendu jusqu'à 50000 francs à ceux qui construisent le nouvel aéroport. Les hommes face à elles ne veulent rien savoir et s'engage alors un bras de fer qui fini dans le sang.
Elles deviennent un symbole, le gouvernement les pense manipulées. Comment des villageoises incultes pourraient tenir tête aux hommes?
Mais ces femmes ne sont pas toutes ce qu'elles paraissent être, et leur parcours reflète effectivement les réalités brutales du pays, où les femmes sont coincées entre leur désir d'être respectées, et les traditions ancestrales qui font d'elles des mineurs éternelles.
Mais tenir tête a du bon, et malgré les risques, l'engrenage se met en marche. Jusqu'où sont-elles prêtes à aller?

L'écriture de ce roman est agréable, rapide. La narration à la deuxième personne nous plonge au coeur de leur vie, comme si nous étions pris à témoins de ce qui se passe. Ces femmes deviennent des amies. On en vient à appréhender le matin, quand elles doivent se rendre au chantier, et à guetter avec elles l'arriver des camions. Vont-ils accepter la transaction? Batatou va-t-elle survivre? Que va devenir Méréana?

Ce livre a été pour moi une belle surprise, j'en avais déjà entendu parler. Quand j'ai eu l'occasion de l'emprunter, je n'ai pas voulu lire les critiques existantes car j'espérais beaucoup de ce titre, et je n'ai pas été déçue. J'ai eu l'impression que ce roman avait été écrit par une femme, bien que ce ne soit pas le cas. Même dans les misères les plus grandes, ces femmes se battent pour la dignité, et leur combat est bien mis en valeur.
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La première surprise de Photo de groupe autour du fleuve, du congolais Emmanuel Dongala, est son écriture à la deuxième personne. "Tu te réveilles le matin et tu sais d'avance que c'est un jour déjà levé qui se lève" ; dès le début de son roman, l'écrivain s'adresse ainsi à son héroïne et n'utilisera jamais le "je" ou le "elle" dans son récit. Ce procédé ne tient pas pour autant le lecteur à distance, au contraire, il permet une empathie certaine avec cette femme qui va se révéler à elle-même au fil du livre. Photo de groupe autour du fleuve décrit la lutte d'un groupe de femmes (casseuses de cailloux) pour une rémunération plus juste mais comme le dit l'une d'entre elles : "Question de dignité, mes amies. Nous ne nous battons pas seulement pour un meilleur prix pour nos sacs, mais aussi pour qu'on nous respecte." Dans un pays africain non nommé mais qui ressemble fort au Congo, Dongala décrit l'héroïsme tranquille de femmes sans cesse bafouées et humiliées dans une société qui se veut une démocratie mais qui ne fonctionne que par la corruption et la concussion. le roman est une sorte de "Feel good Book" dont les bons sentiments ne sonnent jamais de façon niaise, de par la force incroyable de la prose de Dongala, toujours juste et caustique avec un sens de l'humour dévastateur. Intégrées habilement au récit, les histoires personnelles de ces femmes sont marquées par le drame (sida, mariage forcé, grossesse "attrapée dans la rue"...) et la volonté de s'en sortir malgré tout, quitte à casser des pierres pour un salaire de misère, en attendant mieux. Un portrait sans concession d'un pays africain comme beaucoup d'autres, écrit dans une langue chamarrée et ironique, qui a des allures de conte de fées moderne parce que Dongala croit dur comme fer que les femmes sont l'avenir de l'Afrique. Et nous aussi, par la même occasion. Bref, ce livre est une pure splendeur qui se dévore dans un état de quasi euphorie.
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Comme toujours Dongala réussi à nous emmener dans un univers et nous montrer une facette de la vie au Congo.
Après ses autres romans, comme Un fusil dans la main, un poème dans la poche, ou le feu des Origines, l'auteur dresse un portrait où chaque personnage prend vie. Dans ce roman, c'est la vie d'une groupe de femmes dans toute leur diversité qui est retracée, mettant en avant l'action collective qu'elles réussissent à mettre en place pour défendre leurs droits. Ce faisant c'est un portrait de cette Afrique moderne, entre développement et pauvreté, soumise aux contraintes économiques et politiques venues de l'extérieur mais aussi la corruption qui en découle. Ce roman met aussi en avant la force et la joie de vivre, la sape, la rumba qui font danser les corps.
A recommander sans aucun doute.
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