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4,28

sur 486 notes
Un roman en forme de terrible liste de tous les sévices et privations dont font l'objet les femmes africaines.
Bien sûr, si le lecteur a les yeux ouverts, il n'apprendra pas grand chose sur la discrimination des femmes et sur la politique dans sa version la plus sordide, mais le ton, assorti du tutoiement, nous fait entrer dans l'intimité de ses femmes bafouées. C'est en cela que ce livre m'a plu. Il nous fait entrer dans ce monde comme un ami de la famille. Mais c'est aussi pour cela qu'il est difficile de ne pas pleurer, hurler, pour finir démoralisé en le lisant.
Une seule critique cependant. La fin me semble, malheureusement peu crédible. Mais qui aurait pu supporter la vérité ?
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Sous forme romancée, ce livre est un véritable manifeste féministe et en le refermant, je me dis qu'il n'est pas simple d'être femme en Afrique (en l'occurrence au Congo).
Elles sont une quinzaine à casser des pierres au bord du fleuve qui traverse la capitale du Congo. Tout démarre le jour où elles décident d'augmenter le prix de vente de leur sac de pierres : répression, arrêt du chantier puis l'émergence d'un mouvement solidaire et social entre toutes ces femmes pour lesquelles la vie n'a pas été tendre.
Méréana est l'héroïne du roman et le porte-parole du groupe et on va découvrir progressivement quel fut le parcours qui l'a mené au bord du fleuve, elle la femme instruite et intelligente qui ne devrait pas faire un travail si avilissant. On va aussi découvrir les chemins de vie de ses autres compagnes d'infortune et de combat.
Pas facile donc d'être une femme en Afrique noire….entre la condition assignée par les hommes et la corruption généralisée. On apprend qu'une veuve peut être chassée de sa maison par la famille du mari défunt même si elle l'a elle-même financée en grande partie, qu'un mari infidèle peut en toute impunité contaminer sa femme du VIH sans se préoccuper de ses soins, qu'un mari quitté peut ne pas payer de pensions alimentaires et abandonner ses enfants avec la bénédiction de la Justice, etc….
Je salue l'auteur (masculin !) pour avoir dressé un portrait très chaleureux, plein d'humour et d'empathie envers ces femmes victimes quotidiennes des hommes. Il y a parfois une certaine naïveté dans l'histoire mais qui n'est pas dérangeante. En revanche, comme certains l'ont souligné, je suis moins convaincue par la forme narrative à la deuxième personne (inhabituelle et plutôt perturbante !).
Ce fut malgré tout une lecture enrichissante et un bien agréable voyage au Congo.
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Les femmes en Afrique ...quelle misère!

L'auteur nous raconte l'histoire d'un groupe de femmes qui cassent des pierres pour faire du gravier. Ces femmes ne sont pas aussi bêtes que les hommes et le pouvoir voudraient le croire, elles comprennent que leur gravier est recherché et demande une augmentation du prix d'achat. Alors s'engage un combat , difficile, pour obtenir cette augmentation et la dignité d'être payée correctement.

Au fur et à mesure on découvre l'histoire de ces femmes, viols, abandons, dépouillées par la famille, accusées de sorcellerie tout est bon pour déconsidérer les femmes tant par les hommes que par d'autres femmes. Quant au pouvoir, corruption et violence avancent main dans la main pour mâter tout ce qui dépasse.

Ce roman donne une image rude de l'Afrique, les hommes, les femmes, les traditions, le sida, le pouvoir, rien n'est laissé dans l'ombre et on comprend combien il faut d'énergie pour vivre dans ces conditions. C'est un peu effrayant et désespérant mais toutes les histoires de ces femmes sont émouvantes et passionnantes , chacune est digne d'intérêt et l'espoir très réaliste qui les habite , les rend très humaines.

Un roman magnifique et un auteur talentueux.
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Méréana, après une énième inconduite de son mari, quitte le foyer conjugal pour élever seule ses deux enfants et sa nièce dont la mère, sa soeur, est décédée. Dépourvue de revenus, elle rejoint un groupe de casseuses de pierre au bord du fleuve où elles vendent leurs lots à des prix dérisoires.
Bientôt, le gouvernement annonce la construction d'un nouvel aéroport. Effet immédiat, le cours du gravier s'envole mais seuls les intermédiaires, les transporteurs en profitent. le groupe, dès lors amené par Méréana va mener une lutte pour obtenir un meilleur prix d'achat de leurs marchandises.
Entre arrestations arbitraires, coups, blessures et intimidations émanant des hautes sphères du pouvoir, elles tenteront de garder la tête haute.

Beau récit qui montre la force de volonté et la dignité de ces accidentées de la vie. Cependant, la noblesse de leur combat ne saurait faire l'économie de la solidarité, de la sororité et d'un certain réalisme : sur le plan personnel car les parcours de vie supposent des choix de batailles parcimonieux ; sur le plan systémique car elles affrontent les conséquences d'une corruption ordinaire, d'un service public réduit et défaillant (état des infrastructures, hôpitaux…), et, surtout d'un patriarcat encore à l'oeuvre où la femme subit.

Le ton engageant et le style agréable du roman donnent de la force au propos qui offre un exposé concret sur la condition des femmes dans certains endroits de la planète.
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« Photo de groupe au bord du fleuve » s'attache aux destins brisés de plusieurs femmes qui cassent des cailloux au bord d'un fleuve africain pour une somme misérable. La construction d'un aéroport fait monter le prix des sacs de gravier et elles entament une grève afin d'être augmenté. Auront-elles gain de cause ?

Petit à petit on découvre l'univers intime des femmes qui gravitent autour de Méréna, désignée porte-parole grâce à son diplôme… Divorcée, elle élève seule ses enfants et la fille de sa soeur morte du sida.

Le récit pétillant d'Emmanuel Dongala rend hommage à la dignité de ces femmes à la vie quotidienne particulièrement difficile.

Il n'occulte pas les aspects sombres de la société africaine, et Méréna et ses compagnes d'infortune sont confrontées aux ravages de la corruption, du sida, du machisme et du poids de certaines coutumes ou croyances.
Ces femmes se font belles, s'entre-aident, vont à hôpital, assistent à une veillée funèbre, s'effondrent le soir terrassées par la fatigue, préparent le repas des enfants, se battent…

Pourtant, elles n'oublient pas de rêver, de faire des projets, et l'humour est présent à chaque chapitre. Loin de tous clichés, Emmanuel Dongala, né de mère centrafricaine et de père congolais, porte un regard passionnant sur le rôle des femmes dans la société africaine.
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Waouh, juste waouh, je viens de me prendre une claque littéraire en plein visage.

Nouvel auteur, nouvelle plume, nouveau pays. Et je dis oui à tout. Je viens tout juste de refermer ce livre et j'ai un petit pincement au coeur à l'idée de quitter ce groupe de femmes et de ne plus les côtoyer. Chaque femme a son histoire, son passé, son rêve et chaque femme a été confrontée à cette société patriarcale, à cette société pourrie et corrompue. Elles ont toutes connu de terribles malheurs : le viol, la persécution, l'humiliation, la pauvreté, la haine et tout cela à cause de quoi ? A cause du simple fait d'être une femme, d'être dans un corps de femme.

L'héroïne principale est tenace, forte, fière et courageuse. Sa répartie m'a fait beaucoup rire. La solidarité qui se dégage de ce groupe m'a rendu fière d'être une femme, et m'a montré à quel point on peut déplacer des montagnes quand on est unies et rassemblées autour d'une cause juste.

La plume de l'auteur est très agréable. Cela m'étonne toujours de voir des hommes décrirent aussi bien le psychisme d'une femme, de les voir se mettre dans la peau d'une femme et de réaliser l'un des plus beaux hommages à la férocité de ces dernières. Comme quoi tout homme a une part de féminité en lui, et toute femme a une part de masculinité en elle.

Malgré les nombreux passages durs et poignants, ces femmes gardent la tête haute, dédramatisent, s'encouragent, rigolent et ne lâchent jamais rien. On est jamais dans le pathos, on ne stagne pas et on ne fait qu'avancer.

Le fait d'avoir incorporé ça et là des brides d'informations de la radio était très original et tellement démoralisant. L'impression que le monde regorge de faits divers, que les femmes se font massacrer tous les jours et ce, aux quatre coins du monde.

Un livre fort, poignant et majestueux. L'un des plus beaux hommages que j'ai pu lire au courage de la femme.
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Quelle belle lecture. C'est clairement un roman marquant et que je relirai sans doute un jour !
Dans une passe difficile, Méréana décide de casser des cailloux au bord du fleuve pendant quelques semaines, afin de se payer une formation et remettre sa famille à flots. Au même moment, la construction d'un aéroport dans le pays fait que ces sacs de graviers deviennent une denrée recherchée… Méréana, la plus « éduquée » du groupe, se retrouve alors porte-parole des casseuses de cailloux, qui veulent augmenter de 50 % le prix de leur travail. C'est alors le début d'un bras de fer avec les politiques, car leurs revendications risquent d'écorcher l'image lisse qu'ils souhaitent donner de leur pays à ce moment-là.

Honnêtement, en débutant ce roman, je ne pensais pas qu'il me passionnerait autant. Une lutte sociale ? Merci bien, j'ai lu Germinal… Mais ce roman va plus loin et est véritablement féministe : l'auteur dénonce les injustices dont sont victimes les femmes, souvent par « tradition » et nous propose de magnifiques portraits de femmes, fortes et solidaires.
Au-delà de Méréana, nous faisons connaissance avec plusieurs femmes abîmées par la vie : une femme d'affaires ruinée par sa belle-famille à la mort de son mari, une villageoise dont tout le village, y compris ses enfants, a voulu brûler la tente dans son sommeil pour sorcellerie, une femme qui s'est enfuie de son village à 13 ans la nuit de ses noces… En demandant le juste de prix de leur labeur harassant, c'est un peu de dignité qu'elles veulent récupérer, une preuve qu'elles ne valent pas moins que les hommes et que les un peu plus riches.

Emmanuel Dongala nous dépeint des situations dramatiques, mais terriblement concrètes et a priori encore d'actualité… le patriarcat a de beaux jours devant lui, mais c'est avec de petites avancées et des prises de conscience telles qu'il nous le montre dans ce roman que le monde évoluera peu à peu.
C'est un très beau roman, sensible et engagé, que je suis heureuse d'avoir trouvé !
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Méréana, comme toutes ses compagnes d'infortune du chantier, a eu son lot de misères dans sa vie.
Sa soeur est morte du sida, puis elle s'est séparée de son mari aujourd'hui ministre car elle avait perdu toute confiance en lui après avoir vu ce qu'il était arrivé à sa soeur, ne doutant pas que la contamination venait du mari de celle-ci, en plus de ses deux garçons elle élève la petite fille de sa soeur et la voilà aujourd'hui réduite à casser des cailloux pour gagner sa vie.
Mais voilà, ce matin-là, elle sait que plus rien ne sera jamais pareil et qu'aujourd'hui ne sera pas une journée ordinaire sur le chantier.

Ensemble, toutes ces femmes vont refuser de continuer à vendre leur sac de cailloux dix mille francs mais vont exiger vingt mille francs, espérant en obtenir quinze mille francs, car elles ne supportent plus de se faire spolier par des hommes qui gagnent de l'argent sur leur dos alors qu'elles arrivent à peine à subvenir à leurs besoins :"Quand ils nous battent au foyer, nous ne disons rien, quand ils nous chassent et prennent tous nos biens à la mort de nos maris, nous ne disons rien, quand ils nous paient moins bien qu'eux-mêmes, nous ne disons rien, quand ils nous violent et qu'en réponse à nos plaintes ils disent que nous l'avons bien cherché, nous ne disons toujours et aujourd'hui ils pensent qu'en prenant de force nos cailloux, encore une fois, nous ne dirons rien. Eh bien non ! Cette fois-ci ils se trompent ! Trop, c'est trop !", d'autant que le chantier de l'aéroport est un formidable argument pour appuyer leur demande : puisqu'ils ont tant besoin de cailloux, ils finiront par céder.
Mais très vite, et comme c'est bien souvent le cas en Afrique, ce conflit mineur dégénère en drame : l'une des ouvrières mère de deux enfants en bas âge est mortellement touchée.
Et c'est tout le système politique qui se mêle à ce conflit : de la ministre de la Femme et des Handicapés, au ministre de l'Intérieur à la femme du Président, car dans le même temps le pays s'apprête à accueillir la réunion des femmes de chef d'Etat de tout le continent africain qui fête son dixième anniversaire.
Au final, ces femmes réussiront à obtenir gain de cause sans toutefois changer le monde de par leur action, mais elles en ressortiront grandies, plus fortes, et avec de l'espoir : "elles savent maintenant que la vie offre d'autres alternatives pour manger, s'habiller et se soigner que de casser la pierre."

Méréana, le personnage principal, est une femme instruite qui n'aurait jamais dû se retrouver à casser des cailloux.
Tous les matins, elles écoute les nouvelles à la radio, et elle s'indigne lorsqu'elle entend que dans un autre pays une jeune fille a été lapidée après avoir été violée : "Deux fois punie, une fois parce que violée et une deuxième fois parce que lapidée. La simple raison ? Elle était née femme ! Au secours, les hommes sont devenus fous. Dieu, ces hommes qui jettent des pierres prétendent le faire en ton nom : si tu ne les arrêtes pas, si tu laisses ce rime ignoble impuni, c'est que toi aussi tu es devenu fou comme eux."
Elle réfléchit aussi beaucoup, particulièrement sur la condition des femmes en Afrique et en mêlant sa propre histoire avec les confessions qu'elle recueille d'autres femmes, elle en arrive à penser que l'Afrique est sans nul doute le pire endroit sur Terre pour une femme : "Ce fut sur ces mots que vous vous séparâtes ce jour-là alors que dans ta tête tu te demandais, en te référant à ce que toi aussi tu avais vécu, s'il y avait pire endroit pour une femme sur cette planète que ce continent qu'on appelle Afrique."
Mais voilà, la vie lui a tracé un tout autre destin que celui d'une épouse aimante au foyer attendant le soir le retour de son mari, et elle va donc se retrouver à partager le quotidien de femmes au vécu différent du sien mais avec comme point commun d'avoir toutes beaucoup souffert dans leur vie.

Le personnage de Méréana est très fort et très attachant, c'est la femme la plus instruite et ce n'est pas innocemment qu'elle est désignée à l'unanimité par les femmes du chantier pour être leur porte-parole.
Avec sa force de caractère et une sagesse qu'elle puisera dans le souvenir de sa soeur, elle finira par s'attirer le respect de tous, à commence par la ministre de la Femme et des Handicapés, et pourquoi pas, trouvera l'amour au bout du chemin.
Mais ce qui est encore plus fort, c'est l'osmose entre toutes ces femmes qui ont eu des vies marquées par la misère, la guerre, les violences sexuelles et domestiques, le poids des traditions et de la famille, l'abandon; et qui finissent par s'unir pour apprendre que toutes ensemble elles sont plus fortes et qu'elles peuvent réussir à obtenir quelque chose dans la vie.
Derrière l'histoire narrée dans ce livre s'esquisse l'espoir, pour toutes ces femmes et plus généralement pour les femmes africaines, et indirectement aussi pour le lecteur.
Comme quoi, même sans instruction et en étant de simples "casseuses de cailloux", on peut finir par concrétiser des projets et se créer une nouvelle vie.
L'autre point fort de ce roman, c'est la description sans concession que fait l'auteur du système politique complètement gangrené dans cette Afrique qui n'a plus rien d'une image de carte postale ou de guide touristique.
Si l'auteur est sans pitié, l'histoire l'est tout autant, et si j'ai été déstabilisée au début par une narration à la deuxième personne du singulier quelque peu hésitante, j'ai vite fini par être happée par l'histoire et à vouloir connaître la suite et le dénouement de cette aventure qui se conjugue quasi exclusivement au féminin.
L'auteur, outre le système politique, y décrit également de façon assez précise le mode de vie et les coutumes, ainsi je retiens l'expression du "deuxième bureau" désignant les maîtresses des hommes mariés.
Après la lecture du livre "Une si longue lettre" de Mariama Bâ, que Méréana évoque d'ailleurs au début du récit, "Photo de groupe au bord du fleuve" apporte une description plus proche de notre époque de la vie domestique en Afrique, mais contient également des passages faisant sourire ainsi que des drames, et j'avoue avoir été particulièrement touchée émotionnellement par le vécu de certaines des femmes du chantier.
Ce roman est de plus assez visuel alors que paradoxalement il ne contient pas beaucoup de description, cela est dû à mon avis au style narratif qui finit par impliquer le lecteur à l'histoire et lui donne l'illusion d'y assister en tant que spectateur.
Le style narratif est à lui seul une forme de mise en scène, mais il est aussi question à plusieurs reprises dans le livre d'une autre forme de mise en scène, par la photographie.
Le titre du livre n'est pas anodin, à plusieurs reprises toutes ces femmes vont se photographier ensemble sur le chantier, pour garder une trace et un souvenir de leur lutte.
D'ailleurs, à la toute fin du livre, Zizina, la fille d'une des femmes du chantier, demandera à Méréana comme souvenir "une photo de groupe au bord du fleuve", ainsi les presque dernières lignes du livre résonnent comme un écho à son titre.

"Photo de groupe au bord du fleuve" est un livre qui m'a beaucoup touchée et qui apporte un éclairage sans concession ni fioriture sur l'Afrique contemporaine.
C'est une illustration parfaite du roman social et humaniste, entremêlant drame et humour dans une histoire qui prend le lecteur aux tripes et au coeur.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
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"Photo de groupe au bord du fleuve" n'a pas la violence de "Johnny, chien méchant" du même auteur (et qui fait partie d'une de mes plus grande claque littéraire), mais il dénonce tout autant les travers d'une société africaine, vraisemblablement la République du Congo.

Pour cela, le lecteur fait la rencontre de Mereana, mère célibataire qui devient la porte-parole d'un groupe de femmes casseuses de cailloux, luttant pour les vendre à un prix plus "raisonnable". Les conditions de vie, les inégalités homme femme, le machisme, la corruption y sont décrits clairement et simplement. A travers ses nombreux personnages, mais bien différenciés, Emmanuel Dongala pose en mots les maux de cette communauté.
Ce roman féministe termine sur une note d'espoir bien agréable tant les situations et histoires personnelles évoquées peuvent être dures, voire cruelles, mais pourtant toujours réalistes et credibles.

J'ai pris le temps de m'imprégner de ce roman et le conseille vivement.
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e suis bien incapable de dire comment j'ai connu ce livre qui figurait depuis des mois dans la liste toujours plus grande des ouvrages que je souhaite découvrir, afin continuer à voyager jusqu'au jour du grand départ...
Emmanuel Dongala, que j'ai découvert avec ce titre m'a transporté au coeur de l'Afrique Noire...non pas le noir couleur de peau, mais le Noir de la corruption, de la condition des femmes, de l'obscurantisme des sorciers, des superstitions, des viols, des mariages forcés, des veuves que la belle famille spolie et jette à la rue, le noir des dictateurs brassant des milliers, presque des millions de francs CFA pour les meilleures bouteilles de champagne et méprisant une population qui tous les jours trime pour manger. C'est aussi le noir du Sida, des magouilles..
Photo de groupe au bord du fleuve, (il faudra attendre les dernières pages pour en comprendre le titre) est le film de quelques jours de la vie de quelques femmes africaines, l'histoire d'une grève, d'une répression.. Méréana, Ma Bileko, Iyissou, Laurentine Paka, Anne-Marie Ossolo, Moyalo, Moukiétou, Batatou, et quelques autre ont toutes été contraintes par les hasards de la vie, les séparations ou les viols, de se retrouver chaque matin au bord du fleuve afin de réduire en gravier, au marteau, les blocs de pierre qu'il charrie et laisse sur les rives.
Il leur faut un jour sous le soleil pour obtenir un sac de gravier, vendu dix mille francs..un sac que des marchands revendent cinquante mille francs au dictateur qui se fait construire un aéroport international...Parce qu'elles sont des femmes qui ont chacune le besoin personnel de gagner un peu d'argent, elles sont les premières victimes du principe partagé à tous les niveaux du pays : gagner toujours plus de fric sur le dos des plus faibles et vivre dans l'opulence en les exploitant, en ignorant leurs souffrances. Et ceci si possible bien sûr, grâce à la charité internationale, aux dons et crédits octroyés au titre du développement. Pourquoi donc leur payer le gravier plus cher ?
Dans ce système politique et social, l'homme a tous les droits : celui de répudier sa femme, de violer des gamines... mais bien sûr aucun devoir...Une femme n'a pas d'enfant ? Il est impensable que l'homme soit stérile, c'est la faute de la femme qui sera alors jetée à la rue ! Et"....un mari, comme un chef, ca se respectait."
Cette grève sera réprimée par la police qui tirera et tuera... ce qui nous donne l'occasion de découvrir l'hôpital, le système de santé, le fonctionnement du régime policier, la torture.
Je vous laisse découvrir la suite, faite de manipulations, de pressions, de promesses et de bassesses et j'en passe.
Vont-elles obtenir satisfaction
Méréana est la porte parole de ces femmes grévistes. Elle a été jetée à la rue par son mari député pro-gouvernemental. C'est elle la narratrice du livre. Elle prend donc le lecteur à témoin en le tutoyant, tout au long du livre. Cette forme narrative nous interpelle, nous indigne, nous fait aussi souvent sourire.
Chaque matin de grève, au réveil Méréana écoutera la radio locale, forcément gouvernementale, dont l'auteur retranscrit les informations en début de quelques chapitres : Sourires ou indignations garantis.
Critique d'une certaine Afrique, celle de ces dictateurs, ce serait trop long de les citer, "Photo de groupe au bord du fleuve" est aussi un plaidoyer pour nous faire prendre conscience de la condition de certaines femmes, celles qui n'ont pas pu s'élever ou qui sont tombées, celles qui ont créé des entreprises, celles qui sont proches du pouvoir...Critique féroce de cette Afrique dans laquelle tous les modes de gouvernement cohabitent, comme cohabitent des femmes multimillionnaires, chefs d'entreprises dynamiques et des femmes au bas de l'échelle sociale.
Mais rien n'est acquis : si les ascensions sont rapides, elles peuvent être suivies de chutes encore plus rapides.

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