Aux premiers jours de guerre, en aout ou septembre 1914, le jeune lieutenant
Adrien Fournier, ingénieur en génie civil est grièvement blessé à la face par un éclat de mortier allemand, alors qu'il effectuait une reconnaissance à cheval sur la Meuse avec deux autres officiers. Les éclats lui ont emporté une partie de la face et de la mâchoire.. Ses amis sont morts. Ne pouvant être soigné sur place, il sera rapatrié en véhicule sanitaire à l'hôpital militaire du Val de Grâce à Paris.... il devra supporter les conditions de transport difficiles et longues dans ces ambulances des débuts de l'automobile.
Il devient le premier patient du service destiné à accueillir les officiers blessés à la face.
Rapidement d'autres officiers le rejoindront. Il se liera d'amitié avec deux autres blessés. Il y restera quatre ans et huit mois, et subira plusieurs opérations après des anesthésies à l'éther . Des opérations de chirurgie balbutiante et expérimentales, au cours desquelles étaient tentées des greffes d'os prélevés sur des nourrissons décédés, de cartilages d'animaux...Les guerres ont toujours fait progresser la médecine et la chirurgie
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La chambre des officiers" est tout d'abord un reportage sur les conditions de soin et de vie de ces Gueules Cassées, soldats, officiers, officiers supérieurs...tous blessés soignés dans des services différents et ne se rencontrant pas, ne se fréquentant pas : l'armée ne mélangeait pas les torchons et les serviettes.
Mais c'est avant tout un livre fort sur les relations humaines.
Ces hommes au visage ravagé, au destin lié par leurs infirmités, voyaient dans l'autre l'image de ce qu'ils étaient devenus : afin de ne pas les traumatiser, tous les miroirs avaient été supprimés. Ils sont tous touchants, forts ou faibles selon les jours, selon leurs souffrances, ensemble ils s'épaulent, se soutiennent face à la forte tentation du suicide qui peut parfois surgir. de cette amitié nait en chacun d'eux la volonté d'envisager le futur, d'affronter le regard des autres et d'abord celui de la famille, la déchéance qui les guette. Par petits groupes, et à l'occasion de petites sorties en ville, ils arrivent à supporter le regard des civils, et celui des femmes : ils sont l'horreur de la guerre, ils n'ont pas eu "la chance de mourir"...ils doivent vivre avec ce regard d'autrui.
Une fois la guerre finie, une fois que la médecine et la chirurgie ne pouvaient plus rien faire pour eux, il retrouvaient la vie civile, les planqués qui avaient pu échapper à la conscription, ils devaient retrouver une place dans cette société, et malgré le manque d'hommes, retrouver leur place auprès des employeurs, trouver une épouse....
Pendant des années, ces Gueules Cassées ont eu besoin de la solidarité nationale, je me souviens que la Loterie Nationale organisait périodiquement dans les années 50-60 un tirage spécial des Gueules Cassées.
Malgré le sujet difficile,
La Chambre des Officiers est un livre agréable à lire et vite lu. C'est un livre profondément humain, un livre sur l'amitié nécessaire pour surmonter bien des difficultés.
C'est aussi un livre qui doit permettre à chacun de changer son regard sur les autres, sur l'infirmité, le handicap...
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