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3,36

sur 1165 notes
Bon. Euh. Pfffou.
Que dire. Qu'écrire. J'avais pensé à être dans un minimalisme épuré, mais j'ai eu le sentiment d'une histoire d'amour entre Teddy Slexique et Gérard Menjoui. La queen publie ainsi un court, que dis-je une péninsule de mots collés les uns aux autres sans liant. Sans assaisonnement. C'est fade et gris. Soit. Pourquoi pas une novella bien sentie ? Même pas. Mon coît littéraire fut coupé sans élan dans une horde de détails qui ne font pas corps. En 1935 ce texte aurait peut-être agité la sphère mondaine d'entre deux guerres. En 2022 être outré par un « lâche-moi la grappe » s'apparente davantage à un podcast pour la famille Bélier. Tu te rends compte !? Je lui ai dit « lâche-moi la grappe », qu'elle violence ! J'ai davantage vibré devant Les feux de l'amour saison 56, épisode 2390.

Dire que je me suis ennuyé serait faux, je n'en ai même pas eu le temps. À peine ouvert je terminais la dernière phrase, circonspect devant un je-ne-sais-quoi. Rempli de vide charnel. Je résume : Annie Ernaux a couché avec un étudiant âgé de trente ans de moins. Lui, aime Europe 2 et Nulle part ailleurs, elle le regarde manger des frites, vous avez le début, l'élément déclencheur et la fin. À ce rythme là chaque phrase peut devenir un roman à lui tout seul. Je ne suis pas aussi dur car le prénom de cet étudiant commence par un A. Je n'ai pas été éconduit par Annie Ernaux et Dieu m'en garde j'aurais été triste de voir que notre histoire se résume à ces mots sans vie et sans chair dans un si petit livre qu'il ne correspond à aucun ordre de grandeur sur l'échelle de Dexter (l'échelle de Richter pour les mauvais livres).

J'entends déjà les puristes dire qu'il faut la prendre comme un ensemble et non de manière isolée. Sur sa capacité à s'introduire en elle-même tel un foetus littéraire ou sa brillante lucidité, son inénarrable simplicité (si je veux du simple j'appelle Orelsan. Basique. Simple. Basique) sur les bribes de son existence et qu'il faut lire le reste de ses textes. Sûrement. Mais là la chérie c'est un fashion faux-pas. Je ne peux m'empêcher de penser que Pascal, 56 ans prestidigitateur à la retraite dans le Calvados a sûrement bien plus de choses succulentes à nous raconter. Ce fut ainsi un coup pour rien où l'écriture de cette chronique a pris davantage de temps que la lecture dudit ouvrage. Au moins je peux rapidement me tourner vers une autre lecture.

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La classe !
Un ouvrage atypique par sa brièveté (même si Annie Ernaux ne nous a pas encore jamais écrit de pavé, là c'est autre chose, entre 10 et 20 minutes de lecture !). Toutefois, une fois accepté cet étrange postulat d'un récit ultracourt vendu tout seul, on est confronté une fois de plus à l'immense talent d'Annie Ernaux, qui, le moins que l'on puisse dire, n'écrit pas pour ne rien dire. C'est d'une grande profondeur, et cela éclaire joliment les relations entre la vie et l'oeuvre d'Annie Ernaux. Condition féminine, rapport au milieu d'origine, Normandie, voyages, amour, âge...Il y a beaucoup de choses dans ce livre très dense qui pourrait constituer une superbe petit cadeau...
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« Si je ne les écris pas, les choses ne sont pas allées jusqu'à leur terme, elles ont été simplement vécues. » Cette phrase est en exergue de ce très court récit autobiographique. Quelques pages qui racontent une relation intense mais hors norme, que ça soit lors de son déroulement en 1999, ou encore aujourd'hui : une histoire d'amour entre une femme de cinquante- quatre ans et un étudiant de trente ans son cadet…

« J'espérais que la fin de l'attente la plus violente qui soit, celle de jouir, me fasse éprouver la certitude qu'il n'y avait pas de jouissance supérieure à l'écriture d'un livre. » Pour Annie Ernaux, l'amour et les mots sont intimement liés, et cela depuis son plus jeune âge. Ce court texte n'échappe pas à la règle, voguant entre l'un et les autres.

« Il me vouait une ferveur dont, à cinquante- quatre ans, je n'avais jamais été l'objet de la part d'un amant. » Et malgré les regards en biais qui suivent le couple, on ne peut que se rendre compte de la véracité de l'adage : « l'amour n'a pas d'âge ». Alors pourquoi accepte- t- on qu'un homme soit en couple avec une femme de trente ou vingt ans de moins que lui, alors que, lorsque c'est la femme qui est l'aînée du couple, on ne croit pas une seconde à la véracité de leur relation, et on crie presque à l'inceste ?

« Il m'arrachait à ma génération mais je n'étais pas dans la sienne. » Malgré la force des sentiments qui les lient, l'auteure et son amoureux se retrouvent en décalage sur les souvenirs sociétaux qui les ont construits. Mais pour l'auteure, cette relation a clairement été l'occasion de replonger, durant quelques mois, dans ce qui fut sa jeunesse…

Au final, une vingtaine de pages qui se savourent d'une traite et qui remettent en bouche la saveur des phrases si bien tournées d'Annie Ernaux, et qui donne très envie de se replonger dans « L'Evènement » (2000), né à la fin de cette relation.
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Pour une fois, le marketing ne s'est pas trompé : « le jeune homme » est une parfaite introduction à l'oeuvre d'Annie Ernaux.
On glose sur ces hommes qui s'entichent de femmes beaucoup plus jeunes qu'eux, voulant prouver, dans un dernier sursaut d'orgueil, qu'ils n'ont rien perdu de leur pouvoir de séduction. Qu'en est-il du contraire ? Annie Ernaux y répond avec pudeur et profondeur, lestée des tabous, soucieuse de ne pas altérer son jugement sous le poids des conventions, rejoignant parfois Houellebecq qu'on avait tant brocardé sur un sujet similaire : « Elles connaissaient leur place dans la réalité du marché sexuel, que celui-ci soit transgressé par une de leurs semblables leur donnait de l'espoir et de l'audace »
C'est une femme d'âge mûre qui s'enivre de la jeunesse de son partenaire (« Il me vouait une ferveur dont, à cinquante-quatre ans, je n'avais jamais été l'objet de la part d'un amant »). Une femme lucide, qui avance en funambule, entre le désir de ressusciter les premiers émois du corps et la peur de céder à sa cruauté, dans le pâle éclat du miroir (« Je répondais que le présent suffisait, ne disant jamais que le présent n'était pour moi qu'un passé dupliqué ».
L'écriture d'Annie Ernaux est un modèle de justesse et de retenue. On peut exprimer tant de sentiments par les détours et les ellipses ! Comme ce magnifique passage où, écoutant un disque des Doors et se laissant entraîner par le plaisir, l'auteure évoque ainsi le point culminant de sa jouissance : « À un moment je cessais d'entendre la musique ».
C'est un livre qu'il faudrait mettre entre les mains de cette génération d'auteurs qui confond originalité et provocation, précision et pertinence.
Et vous, quel roman d'Annie Ernaux conseillerez-vous ?
Bilan : 🌹🌹
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J'avais beaucoup Aimé « La place », du même auteur, dans le sens où Annie Ernaux démontait par l'exemple (consciemment ?) le déterminisme social et autre bourdieuseries ; si on ajoute à ça quelques évocations de notre chère Normandie…

Quoi dire du « Jeune Homme » ? si ce n'est que cet encore plus petit bouquin que « La place », une quarantaine de pages, vient corroborer l'idée qui traverse « La place », une génération plus tard…

Le style est toujours aussi minimaliste, comme dénué de pathos bien qu'il s'agisse d'une aventure amoureuse qui replonge la narratrice dans son passé estudiantin à Rouen.
Une lecture rapide, qui va droit au but et qui donne à mon avis une profondeur supplémentaire à « La place »…
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J'adore Annie Ernaux et j'ai été ravie qu'elle reçoive le prix Nobel, mais je ne peux pas m'enthousiasmer pour ce roman qui est vraiment trop court.
Certes, la quatrième de couverture n'a pas tort quand elle nous dit que ce livre va nous éclairer sur le rapport d'Annie Ernaux au temps et à l'écriture.
Certes, les romans d'Annie Ernaux sont toujours relativement courts, allant à l'essentiel avec son écriture plate et ses mots justes.
Certes, l'histoire qu'elle raconte est peu commune et présente un intérêt indéniable.
Alors pourquoi ne pas en avoir pas fait un livre à part entière? Pourquoi s'être contentée de ces quelques pages qui laissent le lecteur sur sa faim?
Je n'ai pas d'explication et c'est la première fois que je suis déçue par un roman d'Annie Ernaux.
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Dans ce très court récit intimiste Annie Ernaux raconte et intellectualise la liaison qu'elle a vécue dans les années 90 avec un "jeune homme". Elle a alors 54 ans, elle est professeure, agrégée de Lettres et lui un simple étudiant de 25 ans. Une aventure qui va se transformer en une histoire d'amour qui durera plusieurs années.

Une histoire audacieuse, scandaleuse, que la narratrice assume pleinement, la relation d'une femme d'âge mûr, de condition aisée et un peu "bourgeoise" avec un jeune étudiant, de 30 ans son cadet, issu d'un milieu populaire, ce milieu même qu'elle n'a eu de cesse de fuir dans sa jeunesse.

Ce jeune homme agit pour Annie Ernaux comme "le porteur de sa mémoire". Chaque événement passé avec lui ravive ses souvenirs et lui rappelle ses années de jeunesse. Avec lui, elle a l'impression de revivre ce qu'elle a vécu près de 30 ans plus tôt. "Avec lui, écrit-elle, je parcourais tous les âges de la vie, ma vie".
Elle a l'avantage d'être en "position dominante" et "aimait à penser comme celle qui pouvait changer sa vie." Ce jeune homme, selon l'autrice, était "dans la première fois des choses, cela impliquait pour elle une forme de cruauté." Elle ajoute : "Invariablement, à ses projets d'avenir avec moi, je répondais - le présent suffit." D'ailleurs cette relation s'achèvera quand, se sentant prête, Annie Ernaux aura décidé d'y mettre fin.

De nombreux thèmes assez classiques sont traités dans ce court roman autobiographique, à la plume pertinente, élégante et factuelle : la mémoire, les souvenirs, le regard des autres, le temps qui passe, la vieillesse, le désir vital d'écriture. J'ai apprécié le ton vif, libre, sans aucune concession de ce livre, qui malgré tout m'a laissée assez dubitative. Peut-être suis passée un peu à côté...

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#Challente solidaire 2023

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La lecture de cette trentaine de pages écrites par Annie Ernaux a créé chez moi un malaise que j'ai mis du temps à analyser. Qu'est-ce qui me déplaisait dans ce bref récit d'une liaison passagère ? La différence d'âge entre l'écrivaine et le jeune homme ? Non. La condition d'étudiant de l'un et la notoriété reconnue de l'autre ? Non. La passion amoureuse ? Pas davantage. Alors ?
La vérité est que je me suis mise à la place de ce jeune homme. Plus exactement, je me suis mise dans la place qui est faite à ce jeune homme par Annie Ernaux. Celle d'un accélérateur de création : « C'est peut-être ce désir de déclencher l'écriture du livre […] qui m'avait poussée à emmener A. chez moi boire un verre […] », « Je travaillais continûment à mon récit et, par une stratégie résolue de distanciation, à la rupture. À quelques semaines près, celle-ci a coïncidé avec la fin du livre. » Par ailleurs, Annie Ernaux instaure un rapport de domination, reposant sur un profit (un donnant-donnant : tu me donnes du plaisir, je te paie des voyages). Mais, il n'y a pas de profit réciproque quand on place son amant dans une position subalterne : « J'étais en position dominante et j'utilisais les armes d'une position dont, toutefois, je connaissais la fragilité dans une relation amoureuse ».
Faut-il avoir l'audace de dire les choses pour en décolorer l'humiliation de les avoir pensées et écrites ? Suffit-il de se coller l'étiquette de la bourgeoise pour utiliser jusqu'à plus soif celle de transfuge de classe ?
Oh ! Que ce petit livre brûle, comme un minuscule fagot jeté dans le feu d'une gloire littéraire ! Il n'y aura eu presque aucune grâce accordée à ce jeune homme, sinon le malheur de sa naïveté.
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Je retrouve la plume précise et incisive d'Annie Ernaux qui en quelques mots bien choisis nous ouvre une porte sur une pléthore de pensées et de sentiments. "Avoir un métier avait été la condition de ma liberté" ... une telle phrase résonne tellement en moi!
Elle nous raconte dans ce court roman son aventure avec un jeune homme de 30 ans de moins qu'elle, mais ce n'est pas pour cela qu'il est si marquant : "il était le porteur de la mémoire de mon premier monde" ...
J'aime cette autrice qui assume ses faiblesses et parle ouvertement de la difficulté des personnes qui "changent de monde", ces "transfuges de classe" ... quelle horreur d'ailleurs cette expression! Cela vient quand même du verbe latin "fuir" et fait référence aux soldats qui passent à l'ennemi!
Pour moi elle est brillante du point de vue littéraire ET social ...
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Ce n'est pas parce qu'un livre est court qu'il est superficiel. Ce texte publié par Annie Ernaux juste avant l'obtention de son prix Nobel de littérature m'a suffisamment intéressée avec ses trente-huit pages pour que je passe un excellent moment de lecture, parce qu'en racontant une histoire d'amour, elle écrit sur le rapport au temps et à l'écriture.
"Le jeune homme" qui fût son amant avait trente ans de moins qu'elle. C'est lui qui écrivait son amour comme Yann Andrea a envoyé des lettres à Marguerite Duras avant de la rencontrer. C'est une référence pour moi, même si la relation d'Annie Ernaux avec A. est moins houleuse et surtout moins arrosée. D'ailleurs, elle fait un clin d'oeil à Duras (je ne sais pas si c'est volontaire) en évoquant son voyage à Capri où ils boivent des campari.
Quand elle est avec son jeune amant, Annie Ernaux raconte les regards choqués quand la différence d'âge est flagrante (il a l'âge d'être son fils) parce que c'est elle, la femme, la plus vieille. Quand c'est l'inverse cela heurte moins.
Cette histoire d'amour elle l'a écrite pour que les choses puissent aller jusqu'à leur terme mais elle l'a d'abord vécue pleinement.


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