Ce roman, c'est l'histoire d'Adrien qui vit une "
pause", pour ne pas dire une rupture amoureuse, depuis 38 jours au moment où son beau-frère, Ludo, lui demande de faire
le discours lors de son mariage avec la soeur d'Adrien. Louer l'amour et le bonheur à deux, au moment où son propre bonheur lui échappe et où sa vie à deux se transforme en vie de solitude, voilà un exercice qui va plonger notre narrateur dans de nombreuses turpitudes.
Unicité de lieu et de moment pour ce livre qui se situe uniquement au cours d'un repas de famille. Mais c'est surtout dans la tête d'Adrien que nous sommes, dans ses pensées ironiques, ses ruminations acerbes et ses tendres souvenirs de son histoire d'amour agonisante.
La plume est ciselée, aiguisée, ironique, drôle, grinçante.
Fabrice Caro a le don de réutiliser des détails d'une anecdote à plusieurs moments du livre pour accentuer les inepties, caricaturer les incohérences, souligner les absurdités. Cette technique empruntée aux humoristes n'a pas manqué de me faire sourire ou rire à de nombreux moments. C'est bien fait, ça crée une connivence avec Adrien.
Autre talent de l'auteur : mettre le doigt sur les petits travers, les détails agaçants qu'on connaît tous sans vraiment les remarquer : les repas de famille aux conversations identiques d'une fois sur l'autre, les rôles immuables tenus par chacun, les silences gênés, les réactions attendues, les cadeaux pourris qui nous sont réservés sans qu'on sache pourquoi... Un sens de l'observation incroyable qui ne manquera pas d'éclairer mon prochain repas de famille, pour le meilleur ou pour le pire...
Mais
Fabrice Caro sait rendre touchant son narrateur en dépeignant un homme seul, manquant de l'assurance que son aimée lui avait un peu donnée. Il cogite, doute, tourne en rond, s'auto-flagelle. C'est de l'auto-dérision bien maniée qui ajoute à la drôlerie du livre tout en lui amenant de la tendresse.
J'ai donc passé un bon moment avec Adrien et sa famille et vous recommande cette lecture pas tout à fait aussi légère qu'elle paraît.