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Flaubert : Correspondance - La P... tome 3 sur 6
EAN : 9782070106691
1744 pages
Gallimard (13/03/1991)
4.57/5   7 notes
Résumé :
« La correspondance de Flaubert est, d'un avis presque unanime, l'une des plus belles de notre littérature. Elle représente d'abord un document de tout premier ordre sur la France, surtout bourgeoise, du XIXe siècle. Le Journal des frères Goncourt est limité, en fait, à la vie littéraire et artistique de leur temps ; les nombreux Mémoires ou Souvenirs ont été écrits en vue d'une publication éventuelle et façonnés pour servir le point de vue de leur auteur. Au contra... >Voir plus
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747. À SAINTE-BEUVE.
[Paris, 23-24. décembre 1862.]
Mon cher Maître,
Votre troisième article sur Salammbô m’a radouci (je n’ai jamais été bien furieux). Mes amis les plus intimes se sont un peu irrités des deux autres ; mais moi, à qui vous avez dit franchement ce que vous pensez de mon gros livre, je vous sais gré d’avoir mis tant de clémence dans votre critique. Donc, encore une fois, et bien sincèrement, je vous remercie des marques d'affection que vous me donnez, et, passant par-dessus les politesses, je commence mon Apologie.

Êtes-vous bien sûr, d’abord — dans votre jugement général, — de n’avoir pas obéi un peu trop à votre impression nerveuse ? L’objet de mon livre, tout ce monde barbare, oriental, molochiste, vous déplaît en soi ! Vous commencez par douter de la réalité de ma reproduction, puis vous me dites : « Après tout, elle peut être vraie » ; et comme conclusion : « Tant pis si elle est vraie ! » À chaque minute vous vous étonnez ; et vous m’en voulez d’être étonné. Je n’y peux rien, cependant ! Fallait-il embellir, atténuer, franciser ! Mais vous me reprochez vous-même d’avoir fait un poème, d’avoir été classique dans le mauvais sens du mot, et vous me battez avec les Martyrs !

Or le système de Chateaubriand me semble diamétralement opposé au mien. Il partait d’un point de vue tout idéal ; il rêvait des martyrs typiques. Moi, j’ai voulu fixer un mirage en appliquant à l’antiquité les procédés du roman moderne, et j’ai tâché d’être simple. Riez tant qu’il vous plaira ! Oui, je dis simple, et non pas sobre. Rien de plus compliqué qu’un Barbare. Mais j’arrive à vos articles, et je me défends, je vous combats pied à pied.

Dès le début, je vous arrête à propos du Périple d’Hannon, admiré par Montesquieu, et que je n’admire point. À qui peut-on faire croire aujourd’hui que ce soit là un document original ? C’est évidemment traduit, raccourci, échenillé et arrangé par un Grec. Jamais un oriental, quel qu’il soit, n’a écrit de ce style. J’en prends à témoin l’inscription d’Eschmounazar, si emphatique et redondante ! Des gens qui se font appeler fils de Dieu, œil de Dieu (voyez les inscriptions d’Hamaker) ne sont pas simples comme vous l’entendez. Et puis vous m’accorderez que les Grecs ne comprenaient rien au monde barbare. S’ils y avaient compris quelque chose, ils n’eussent pas été des Grecs. L’Orient répugnait à l’hellénisme. Quels travestissements n’ont-ils pas fait subir à tout ce qui leur a passé par les mains d’étranger ! J’en dirai autant de Polybe. C’est pour moi une autorité incontestable, quant aux faits ; mais tout ce qu’il n’a pas vu (ou ce qu’il a omis intentionnellement, car lui aussi il avait un cadre et une école), je peux bien aller le chercher ailleurs. Le Périple d’Hannon n’est donc pas « un monument carthaginois », bien loin « d’être le seul » comme vous le dites. Un vrai monument carthaginois, c’est l’inscription de Marseille, écrite en vrai punique. Il est simple, celui-là, je l’avoue, car c’est un tarif, et encore l’est-il moins que ce fameux Périple où perce un petit coin de merveilleux à travers le Grec ; ne fût-ce que ces peaux de gorilles prises pour des peaux humaines et qui étaient suspendues dans le temple de Moloch (traduisez Saturne), et dont je vous ai épargné la description. Et d’une ! Remerciez-moi. Je vous dirai même entre nous que le périple d’Hannon m’est complètement odieux pour l’avoir lu et relu avec les quatre dissertations de Bougainville (dans les Mémoires de l’Académie des inscriptions), sans compter mainte thèse de doctorat — le Périple d’Hannon étant un sujet de thèse.

Quant à mon héroïne, je ne la défends pas. Elle ressemble selon vous à « une Elvire sentimentale », à Velléda, à Mme Bovary. Mais non ! Velléda est active, intelligente, européenne, Mme Bovary est agitée par des passions multiples ; Salammbô, au contraire, demeure clouée par l’idée fixe. C’est une maniaque, une espèce de sainte Thérèse. N’importe ! Je ne suis pas sûr de sa réalité ; car ni moi, ni vous, ni personne, aucun ancien et aucun moderne, ne peut connaître la femme orientale, par la raison qu’il est impossible de la fréquenter.

Vous m’accusez de manquer de logique et vous me demandez : Pourquoi les Carthaginois ont-ils massacré les Barbares ? La raison en est bien simple : ils haïssent les Mercenaires ; ceux-là leur tombent sous la main, ils sont les plus forts et ils les tuent. Mais « la nouvelle, dites-vous, pouvait arriver d’un moment à l’autre au camp ». Par quel moyen ? Et qui donc l’eût apportée ? Les Carthaginois ? Mais dans quel but ? Des barbares ? Mais il n’en restait plus dans la ville ! Des étrangers ? Des indifférents ? Mais j’ai eu soin de montrer que les communications n’existaient pas entre Carthage et l’armée !

Pour ce qui est d’Hannon (le lait de chienne, soit dit en passant, n’est point une plaisanterie ! Il était et est encore un remède contre la lèpre : voyez le Dictionnaire des sciences médicales, article Lèpre, mauvais article d’ailleurs et dont j’ai rectifié les données d’après mes propres observations faites à Damas et en Nubie), Hannon, dis-je, s’échappe parce que les Mercenaires le laissent volontairement s’échapper. Ils ne sont pas encore déchaînés contre lui. L’indignation leur vient ensuite avec la réflexion ; car il leur faut beaucoup de temps avant de comprendre toute la perfidie des Anciens. (Voyez le commencement de mon chapitre iv.) Mâtho rôde comme un fou autour de Carthage. Fou est le mot juste. L’amour tel que le concevaient les anciens n’était-il pas une folie, une malédiction, une maladie envoyée par les dieux ? Polybe serait bien étonné, dites-vous, de voir ainsi son Mâtho. Je ne le crois pas, et M. de Voltaire n’eût point partagé cet étonnement. Rappelez-vous ce qu’il dit de la violence des passions en Afrique, dans Candide (récit de la vieille) : « C’est du feu, du vitriol, etc. »

À propos de l’aqueduc : ici on est dans l’invraisemblance jusqu’au cou. Oui, cher maître, vous avez raison et plus même que vous ne croyez ; mais pas comme vous le croyez. Je vous dirai plus loin ce que je pense de cet épisode, amené non pour décrire l’aqueduc, lequel m’a donné beaucoup de mal, mais pour faire entrer dans Carthage mes deux héros. C’est d’ailleurs le ressouvenir d’une anecdote rapportée dans Polyen (Ruses de guerre), l’histoire de Théodore, l’ami de Cléon, lors de la prise de Sestos par les gens d’Abydos.

On regrette un lexique. Voilà un reproche que je trouve souverainement injuste. J’aurais pu assommer le lecteur avec des mots techniques. Loin de là ! j’ai pris soin de traduire tout en français. Je n’ai pas employé un seul mot spécial sans le faire suivre de son explication, immédiatement. J’en excepte les noms de monnaie, de mesure et de mois que le sens de la phrase indique. Mais quand vous rencontrez dans une page kreutzer, yard, piastre ou penny, cela vous empêche-t-il de la comprendre ? Qu’auriez-vous dit si j’avais appelé Moloch Melek, Hannibal Han-Baal, Carthage Kartadda, et si, au lieu de dire que les esclaves au moulin portaient des muselières, j’avais écrit des pausicapes ! Quant aux noms de parfums et de pierreries, j’ai bien été obligé de prendre les noms qui sont dans Théophraste, Pline et Athénée. Pour les plantes, j’ai employé les noms latins, les mots reçus, au lieu des mots arabes ou phéniciens. Ainsi j’ai dit Lawsonia au lieu de Henneh, et même j’ai eu la complaisance d’écrire Lausonia par un u, ce qui est une faute, et de ne pas ajouter inermis qui eût été plus précis. De même pour Kok’heul que j’écris antimoine, en vous épargnant sulfure, ingrat ! Mais je ne peux pas, par respect pour le lecteur français, écrire Hannibal et Hamilcar sans h, puisqu’il y a un esprit rude sur l’alpha, et m’en tenir à Rollin ! Un peu de douceur !

Quant au temple de Tanit, je suis sûr de l’avoir reconstruit tel qu’il était, avec le traité de la Déesse de Syrie, avec les médailles du duc de Luynes, avec ce qu’on sait du temple de Jérusalem, avec un passage de saint Jérôme, cité par Selden (de Diis Syriis), avec le plan du temple de Gozzo qui est bien carthaginois, et mieux que tout cela, avec les ruines du temple de Thugga que j’ai vu moi-même, de mes yeux, et dont aucun voyageur ni antiquaire, que je sache, n’a parlé. N’importe, direz-vous, c’est drôle ! Soit ! Quant à la description en elle-même, au point de vue littéraire, je la trouve, moi, très compréhensible, et le drame n’en est pas embarrassé, car Spendius et Mathô restent au premier plan, on ne les perd pas de vue. Il n’y a point dans mon livre une description isolée, gratuite ; toutes servent à mes personnages et ont une influence lointaine ou immédiate sur l’action.

Je n’accepte pas non plus le mot de chinoiserie appliqué à la chambre de Salammbô, malgré l’épithète d’exquise qui le relève (comme dévorants fait à chiens dans le fameux Songe), parce que je n’ai pas mis là un seul détail qui ne soit dans la Bible ou que l’on ne rencontre encore en Orient. Vous me répétez que la Bible n’est pas un guide pour Carthage (ce qui est un point à discuter) ; mais les Hébreux étaient plus près des Carthaginois que les Chinois, convenez-en ! D’ailleurs, il y a des choses de climat qui sont éternelles. Pour ce mobilier et les costumes, je vous renvoie aux textes réunis dans la 21e dissertation de l’abbé Mignot (Mémoires de l’Académie des inscriptions, tome LX ou XLI, je ne sais plus).

Quant à ce goût « d’opéra, de pompe et d’emphase », pourquoi donc voulez-vous que les choses n’aient pas été ainsi, puisqu’elles sont telles maintenant ! Les cérémonies, les visites, les prosternations, les invocations, les encensements et tout le reste, n’ont pas été inventés par Mahomet, je suppose.

Il en est de même d’Hannibal. Pourquoi trouvez-vous que j’ai fait son enfance fabuleuse ? Est-ce parce qu’il tue un aigle ? Beau miracle dans un pays où les aigles abondent ! Si la scène eût été placée dans les Gaules, j’aurais mis un hibou, un loup ou un renard.
Tout à vous.
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764. À MICHELET.
Croisset, mardi [début d’octobre 1863].
Mon cher maître,
J’ai reçu votre cadeau[1] avant-hier, et (comme les précédents) je l’ai dévoré de suite, tout d’une haleine.

Éblouissement et enchantement, telle est la première impression.

On vous retrouve là entièrement, avec toutes vos grâces et toute votre force ; j’admire (plus qu’un autre, et en homme du métier) cet art qui se dissimule sous une simplicité apparente, ce relief des images saillissant par un mot, quantité d’horizons qui se déploient entre les paragraphes, ce don de faire vivre enfin, qui est la marque des élus en fait de style, votre secret à vous, votre qualité suprême.

Comme tout cela est clair, substantiel, amusant !

Jusqu’à présent je n’avais pas saisi les rapports intimes entre l’Espagne et la France, la différence essentielle de l’Angleterre, ni la physionomie de Dubois qui est, chez vous, toute neuve, il me semble, ni dans quelle mesure le régent était un drôle et sa fille une drôlesse.

Quant au système de Law, voilà la première fois que je le comprends, ce qui n’est pas de votre part un médiocre tour de force.

Quelle charmante chose que le tableau de Paris pendant le système, avec tout ce que vous dites des cafés, des enlèvements, etc. !

Manon Lescaut, enfin, se trouve analysée jusque dans ses entrailles ; ce jugement-là est à mettre par-dessus tous les autres et les dépasse, on n’a plus à y revenir ; à tout ce que vous touchez, vous laissez une empreinte ineffaçable.

Je suis obsédé par votre peste de Marseille comme par le souvenir d’un cauchemar. Vous avez atteint là, ô maître, au dernier terme du pathétique. Aucune description classique de la peste ne m’avait causé un tel frisson ; non seulement on la voit, mais on la sent. Des tableaux entiers, toute une vie, tout un monde en deux lignes : « Sans souci d’odorat, dans sa chambrette obscure, la jolie femme au teint jaune, etc. ». Et quelle psychologie que celle-là (p. 318 et 319) : « Des groupes d’amies, de sœurs », etc. !

Et à travers toutes ces merveilles d’intuition, de reproduction et de langage, l’idée principale, le substratum, le but (la révolution qui vient) ne se perd pas de vue une minute ; tout se rattache à cela dans votre livre, c’est comme l’épine dorsale de ce colosse.

Donnez-nous-en d’autres, cher maître. Croyez bien que je vous admire autant que je vous aime, et acceptez, je vous prie, deux très fortes poignées de main que vous envoie

Votre tout dévoué.

Seriez-vous assez bon pour présenter tous mes respects à Mme Michelet ?
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725. À EDMOND ET JULES DE GONCOURT.
Croisset, samedi soir [début de juillet 1862].
Ce que je deviens, mes chers bons ? Rien du tout. Je suis enfin débarrassé de Salammbô. La copie est à Paris depuis lundi dernier, mais je n’ai jusqu’à présent rien conclu quant à la vente de ce fort colis.

Je me suis enfin résigné à considérer comme fini un travail interminable. À présent, le cordon ombilical est coupé. Ouf ! n’y pensons plus ! Il s’agit de passer à d’autres exercices.

Mais lesquels ? Je rêvasse un tas de choses, je divague dans mille projets. Un livre à écrire est pour moi un long voyage. La navigation est rude et j’en ai d’avance mal au cœur. Voilà.

Si bien que, la venette s’ajoutant à ma stérilité d’imagination, je ne trouve rien. Dès qu’une idée surgit à l’horizon et que je crois entrevoir quelque chose, j’aperçois en même temps de telles difficultés que je passe à une autre, et ainsi de suite.

J’ai lu, d’un seul coup, 33 féeries modernes, tout le répertoire Dennery, Clairville, Anicet Bourgeois ! Quel pensum ! C’est, avec saint Augustin et le cochon de lait, ce que je connais de plus lourd. On n’a pas l’idée du poids de ces fantaisies. Je lis aussi des poésies de Shakespeare, la Bibliothèque des Fées, et j’ai terminé les Misérables. Avez-vous savouré la dissertation sur les engrais ? ça doit plaire à Pelletan.

Quant à mes projets de locomotion, je ne sais encore si j’irai à Vichy. Vous pouvez donc m’écrire ici, en toute sécurité, jusqu’aux premiers jours d’août. Serez-vous à Paris à cette époque ? Mon intention est toujours de commencer mon hiver dès le milieu de septembre prochain, pour faire « gémir les presses ». […].

Le ciel n’est pas plus beau ici qu’en Champagne ; on dirait à sa couleur un pot de chambre mal rincé ; il a des écaillures de vieille porcelaine avec un vague ton jaune au milieu, qui ressemble à de l’urine et tient la place du soleil. La nature est bête comme les hommes, décidément. Quand on a le malheur d’être cloué à ces aimables contrées, on devrait vivre aux lumières, dans une serre chaude.

Il doit y avoir dans quinze jours des courses à Rouen. J’aurai peut-être la visite de Claudin. Ce sera le seul astre de mon été.

Les répétitions de Dolorès aux français commencent mercredi prochain. Quant à Faustine, je soupçonne Fournier de méditer quelque farce désagréable à son auteur. Joli monde ! joli ! joli !

Allons ! Ne vous embêtez pas trop et pensez à moi, qui vous embrasse tous les deux tendrement.
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715. À MADEMOISELLE LEROYER DE CHANTEPIE.

Paris, 24 avril 1862.

Je suis bien aise d’apprendre, par votre dernière lettre, que votre état s’améliore ; tâchez que cela dure. Votre intention de venir à Paris est excellente. Voilà bien longtemps que je vous prêche la distraction, les voyages. Quand espérez-vous mettre ce projet à exécution ? C’est le plus sensé que vous ayez jamais eu ; mais, puisque vous aimez la musique, ce grand soulagement des nerfs malades, je vous conseille de remettre à l’hiver prochain votre voyage à Paris. Vous trouverez alors de quoi vous satisfaire amplement.

J’ai enfin terminé, dimanche dernier, à sept heures du matin, mon roman de Salammbô. Les corrections et la copie me demanderont encore un mois et je reviendrai ici dans le milieu de septembre, pour faire paraître mon livre à la fin d’octobre. Mais je n’en puis plus. J’ai la fièvre tous les soirs et à peine si je peux tenir une plume. La fin a été lourde et difficile à venir.

Mme Sand, dont vous me parlez souvent, est à Paris, pour les répétitions d’un drame qu’elle a fait en collaboration avec Meurice[1]. Je n’ai pas encore eu le temps d’aller la voir ; ce sera pour la semaine prochaine, nous parlerons de vous.

Je ne partage pas toutes vos idées sur les Misérables. Mais, avant d’avoir une opinion arrêtée sur une œuvre aussi considérable, il faut connaître l’ensemble.

Depuis deux mois que je suis à Paris, j’ai vu fort peu de monde, mais ce que j’en sais n’est ni beau ni édifiant. Le sens moral me paraît baisser de plus en plus ; on se rue dans le médiocre. Petites œuvres, petites passions et petites gens : on n’a pas autre chose autour de soi.

Deux curiosités charmantes attirent maintenant les gens de goût : le musée Campana et le jardin d’acclimatation. On peut là rêver, pendant de longues heures, à des époques disparues et à des pays lointains.

Excusez la brièveté de ma lettre, et croyez que mon affection pour vous est plus longue que mon papier.

Mille bonnes tendresses ; le vôtre tout dévoué.
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715. À MADEMOISELLE LEROYER DE CHANTEPIE.
Paris, 24 avril 1862.
Je suis bien aise d’apprendre, par votre dernière lettre, que votre état s’améliore ; tâchez que cela dure. Votre intention de venir à Paris est excellente. Voilà bien longtemps que je vous prêche la distraction, les voyages. Quand espérez-vous mettre ce projet à exécution ? C’est le plus sensé que vous ayez jamais eu ; mais, puisque vous aimez la musique, ce grand soulagement des nerfs malades, je vous conseille de remettre à l’hiver prochain votre voyage à Paris. Vous trouverez alors de quoi vous satisfaire amplement.

J’ai enfin terminé, dimanche dernier, à sept heures du matin, mon roman de Salammbô. Les corrections et la copie me demanderont encore un mois et je reviendrai ici dans le milieu de septembre, pour faire paraître mon livre à la fin d’octobre. Mais je n’en puis plus. J’ai la fièvre tous les soirs et à peine si je peux tenir une plume. La fin a été lourde et difficile à venir.

Mme Sand, dont vous me parlez souvent, est à Paris, pour les répétitions d’un drame qu’elle a fait en collaboration avec Meurice[1]. Je n’ai pas encore eu le temps d’aller la voir ; ce sera pour la semaine prochaine, nous parlerons de vous.

Je ne partage pas toutes vos idées sur les Misérables. Mais, avant d’avoir une opinion arrêtée sur une œuvre aussi considérable, il faut connaître l’ensemble.

Depuis deux mois que je suis à Paris, j’ai vu fort peu de monde, mais ce que j’en sais n’est ni beau ni édifiant. Le sens moral me paraît baisser de plus en plus ; on se rue dans le médiocre. Petites œuvres, petites passions et petites gens : on n’a pas autre chose autour de soi.

Deux curiosités charmantes attirent maintenant les gens de goût : le musée Campana et le jardin d’acclimatation. On peut là rêver, pendant de longues heures, à des époques disparues et à des pays lointains.

Excusez la brièveté de ma lettre, et croyez que mon affection pour vous est plus longue que mon papier.

Mille bonnes tendresses ; le vôtre tout dévoué.
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*INTRODUCTION* : _« […] il m'accompagne, il est sur ma table, dans mon sac de voyage, je l'ouvre souvent, et une phrase, un mot suffit à faire apparaître la grande silhouette aimée de mon oncle ; je revois un de ses gestes habituels, une expression oubliée, j'entends sa voix comme s'il vivait encore…_
_Haine de la bassesse, admiration du beau, large compas ouvert sur toute chose, amour suprême de la forme, religion de l'art, course inlassable vers l'idéal, telle a été la vie de Gustave Flaubert [1821-1880] […] »_ (Caroline Franklin-Grout.)
*CHAPITRES* : 0:02 — _1re pensée ;_
0:10 — *Introduction ;*
0:35 — _2e pensée ;_ 0:46 — _3e pensée ;_ 1:03 — _4e pensée ;_ 1:23 — _5e pensée ;_ 1:37 — _6e pensée ;_ 1:56 — _7e pensée ;_ 2:08 — _8e pensée ;_ 2:28 — _9e pensée ;_ 3:07 — _10e pensée ;_ 3:25 — _11e pensée ;_ 3:40 — _12e pensée ;_ 4:02 — _13e pensée ;_ 4:15 — _14e pensée ;_ 4:31 — _15e pensée ;_ 4:45 — _16e pensée ;_ 5:06 — _17e pensée ;_ 5:21 — _18e pensée ;_ 5:38 — _19e pensée ;_ 6:04 — _20e pensée ;_ 6:14 — _21e pensée ;_ 6:36 — _22e pensée ;_
7:01 — *Générique.*
*RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE* : _Pensées de Gustave Flaubert,_ recueillies par Caroline Franklin-Grout, Paris, Louis Conard, 1915, 106 p.
*IMAGE D'ILLUSTRATION* : https://www.meisterdrucke.us/fine-art-prints/Unknown-artist/927459/Portrait-of-Gustave-Flaubert-%281821---1880%29.html
*BANDE SONORE ORIGINALE* : Scott Buckley — Machina Machina by Scott Buckley is licensed under an Attribution 4.0 International (CC BY 4.0). https://www.free-stock-music.com/scott-buckley-machina.html
*LIVRES DU VEILLEUR DES LIVRES* :
_CE MONDE SIMIEN_ : https://youtu.be/REZ802zpqow
*VERSION PAPIER* _(Broché)_ : https://www.amazon.fr/dp/B0C6NCL9YH *VERSION NUMÉRIQUE* _(.pdf)_ : https://payhip.com/b/VNA9W
_VOYAGE À PLOUTOPIE_ : https://youtu.be/uUy7rRMyrHg
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