AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782490251001
318 pages
Exils (03/05/2018)
3.75/5   2 notes
Résumé :
« La journée sera rude », dit seulement Damiens le 28 mars 1757 à l'annonce du supplice qu'on lui réserve pour le crime de régicide dont il est accusé. Ces mots, entrés dans la légende, authentiques ou non, ont retenu l'attention de Claire Fourier. Ils scandent comme une antienne le récit de la vie et de la mort de Damiens, personnage hors du commun, dont elle retrace le destin cruel.
Figure incompréhensible pour son époque qui en a fait, Voltaire le premier... >Voir plus
Que lire après Tombeau pour Damiens : La journée sera rudeVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Mais qu'allait-il faire dans cette galère!

Voltaire voyait en Damiens une incarnation du fanatisme religieux, mais avait-il pris la mesure des circonstances qui ont abouti, à le faire condamner par le parlement de Paris, d'abord, puis à le soumettre sur la place de grève à des supplices inimaginables ?

Dans son dernier livre Claire Fourier entreprend de restituer la totalité du parcours de Damiens. Celui que l'on a présenté comme "le bras de Dieu", Robert-François Damiens avait d'un coup de canif éraflé Louis XV . Ce qui fut un simple avertissement, dans son esprit au souverain, a pris une dimension considérable aboutissant à sa peine de mort le lundi 28 mars à l'aube.


Claire Fourier reprend sans cesse les termes "la journée sera rude", car il sera écartelé, il sera aussi soumis à la question, cependant et jusqu'au bout Robert-François Damiens fournira la même version des faits. Il apparaît bien à travers toutes ses déclarations qu'il n'est pas un fanatique, au contraire il semble qu'il soit très bien informé de la façon dont Louis XV dirige le royaume de France.


La journée sera rude pour tous les dignitaires que Damiens aura côtoyé, pour toutes les personnalités du royaume de France qui en coulisse disaient pis que pendre du souverain. La noblesse de l'époque avait si grande frousse que Damiens rapporte les propos divers et variés que les proches de la couronne distillaient non pour glorifier le roi mais pour indiquer qu'il n'était plus en mesure d'être à la hauteur de sa tâche que certains se sont volatilisés.


Si le libertinage du roi a pu sembler le motif pour lequel François Damiens avait si peu d'estime pour cette couronne, en réalité les confidences et les secrets qu'il détenait étaient bien plus explosifs pour Louis XV qu'une simple vie dissolue. Il est intéressant de voir avec quelle précision Claire Fourier a étayé la vie de François Damiens domestique au service des plus grands il était aussi à sa mesure un érudit et fut tout au long de sa vie le témoin lucide de son temps.

Oui Voltaire était bien malvenu de fusiller dans ses écrits ce témoin pour quelques broutilles de bienfaits qu'il reçut de la couronne.


Les relations entre les jansénistes et les dominicains étaient pour lui une preuve essentielle du fanatisme de l'église, ce fanatisme qu'il a pendant des années combattu, explicité, critiqué, à juste titre : peut-être que le cas de Damiens à la lecture d'autres procès a modifié sa façon de voir les conditions d'exercice de la peine de mort.

Mais on est encore loin de la position qui sera celle de Victor Hugo.

Tombeau pour Damien et sans aucun doute un livre d'histoire à diffuser, à commenter, à expliquer et pour ce personnage oublié de l'histoire il conviendrait de procéder comme Claire Fourier à sa réhabilitation

Commenter  J’apprécie          280
La phrase liminaire donne le ton : «  La journée sera rude ». Elle devient une antienne qui ponctue tout le récit et débute chaque chapitre. Claire Fourier nous confie avoir fait siens les mots de son héros, Damiens, «  un brave », pour «  se sentir des ailes », au réveil. Mais qui est cette figure historique que l'auteure ressuscite avec tant de lyrisme, en retraçant sa vie ? Pourquoi a-t-il envoûté à ce point la romancière ?
Deux dates marquent le destin de Damiens : 5 janvier 1757 ( attaque du roi Louis XV) et 28 mars 1757 ( sa mise à mort ). L'écrivaine revisite un pan de l'Histoire.


On retrouve la vivacité, la pétulance de Claire Fourier quand elle apostrophe tantôt le supplicié, tantôt le lecteur, leur confiant ses pensées.
Mais aussi quand elle se met en scène, laissant libre cours à ses réflexions sur la vie, notre société. Elle aime observer ses contemporains, « ouvrant grand ses mirettes » et s'interroge sur le devenir de l'humanité, soulignant « le mal dont les humains sont capables », la peur des gens. Mais en optimiste, glisse un «  I will survive ! »
Elle glisse des allusions à sa santé, à ses multiples examens redoutant le pire, vu « les milliers d'angoisses accumulées dans la vie », mais relativise. Elle nous confie ses goûts, comme la collectionnite de chapeaux ! Les digressions surgissent pour entendre les récriminations d'un mari qui a du mal à supporter l'omniprésence de Damiens . Petits règlements de compte au point de se plaindre de son « cruel époux » qui la « torpille en permanence » !
Mais Damiens n'a-t-il pas eu une vie hors norme, chaotique, pour que la romancière le compare à Patrick Dewaere, et même à Simone Weil ?! Quand elle évoque l'enfance de Damiens, qui n'eut pas de psy pour lui apprendre la résilience, elle rebondit sur la sienne, évoquant la perte de ses parents.

Elle tisse un parallèle entre la vie du supplicié, la sienne,et la nôtre à tous. Ne sommes -nous pas tous écartelés ? Elle ne nous ménage pas quand elle décrit sa détention, puis sa mise à mort. L'auteur en frémit à écrire cette scène insoutenable, le lecteur aussi.


Les 8 tableaux du peintre serbe Milos Sobaïc rendent compte de la barbarie humaine et font écho aux exactions subies par Damiens, ce martyr dont Claire Fourier brosse un portrait très complet, plein de compassion envers son héros qui est affublé de noms divers : «  le grison », « l'Espagnol ». Sa résistance ne préfigure-t-elle pas celle des «  sans -culottes » ?

C'est avec fougue qu'elle retrace la vie de celui dont elle s'est entichée et qui est devenu «  son amant essentiel », elle sait se mettre à sa place, le comprendre. On découvre que son enfance fut marquée par les coups, la perte de sa mère. Il connaît une période plus heureuse, se marie, mais c'est en cachette qu'il voit sa femme, sa fille. On le suit dans son errance en Hollande. En tant que laquais, il a été au service de nombreux notables, jusqu'à ce qu'il entende l'injonction de Gautier :« frapper le roi serait oeuvre méritoire ». On le suit la veille de son «  geste fatal », l'historienne imagine ses tergiversations, ses pensées, ; relate l'attentat, puis les réactions post attentat. D'un côté, les pleureuses qui croient leur « Roy » assassiné, de l'autre, à Paris, on renverse les lys. Elle détaille son arrestation, sa détention, les tortures subies, faisant allusion à celles des jihadistes, s'étonne qu'il ne se soit pas évadé durant la nuit et se fait son avocate jusqu'à la fin de ce récit, rétablit des vérités, ayant compulsé une pléthore de documents. Elle commente le procès, insère la lettre que Damiens a envoyée au roi. La réaction de Voltaire indigne Claire Fourier au point de lui adresser ses griefs : « l'écrivain que tu es n'a pas compris que Damiens avait frappé directement la Couronne parce que l'expression via l'écriture lui était impossible. » On apprend que Victor Hugo, ému par le cas Damiens, a milité pour que l'assemblée vote l'abolition de la peine de mort.
Elle épingle «  les gens de pouvoir » qui «  ont plus de couleurs que n'en a le caméléon ». La voix De La Bretonne résonne, celle que son entourage qualifie de « toquée ». N'est-elle pas atteinte de «  psychostasie », tant Damiens «  a infusé » en elle ? Une passion contagieuse que l'historienne risque de communiquer au lecteur !
Ceux qui connaissent l'oeuvre de Claire Fourier retrouveront son admiration pour le peintre Caspar David Friedrich, reconnaîtront ses allusions à des romans précédents.


Dans ce dernier, truffé de références littéraires, artistiques (le Tableau de Paris de Mercier) qui restitue la période du règne de Louis XV, quand le Pont Neuf était un lieu de commerce, la narratrice réhabilite, avec lyrisme, Damiens, «  le scélérat et fanatique », «  mort en samouraï » à 42 ans. Elle loue sa loyauté, sa vaillance, son panache, sa gentillesse avec beaucoup de tendresse.
N'est-il pas devenu « son berger »,« ce fou de hauteur » pour Montherlant ?

Comme le déclare Todorov ; «  La vie a perdu contre la mort, mais la mémoire gagne dans son combat contre le néant ». Par cet ouvrage, servi par une écriture impétueuse, incantatoire, pleine d'empathie, Claire Fourier a relevé le défi en livrant cette «  ode à un damné », ce « chant d'amour pour un grand vaincu de l'Histoire » à la dimension biblique et offre à Damiens, un tombeau de papier, le sauvant ainsi de l'oubli et cerise sur le gâteau, l'écrivaine gratifie le lecteur de son sourire lumineux habituel!
« Rire pour exorciser, plaisanter pour mettre à distance ce qui fait mal ! »


Le souhait de Claire Fourier sera-t-il exaucé : à savoir : « rebaptiser la place de l'hôtel de ville, place Damiens » ou donner son nom à une rue?
Commenter  J’apprécie          90
« Ce simple d'esprit, instable, à plusieurs reprises serviteurs de magistrats du parlement, s'est peut-être cru le bras armé de cette institution à ses yeux persécutée par le pouvoir royal » Entrée « Régicide » du Dictionnaire de l'Ancien Régime, sous la direction de Lucien Bely, Puf, Paris, 2010

« Sombre, taciturne, parfois violent, tel était cet effronté laquais, fugueur et inconstant. »Louis XV, Jean-Christian Petitfils, Perrin, Paris, 2014

Voici deux descriptions, que j'ai volontairement souhaitées récentes, qui vont, je le sais, faire bondir Claire Fourier qui vient de faire paraître aux Éditions du Canoë, Tombeau pour Damiens – La journée sera rude, avec 8 peintures de Milos Sobaïc, peintre et sculpteur serbe.

Claire Fourier, le dit, le crie, le hurle dans ce livre : « depuis des années j'éprouve pour Damiens un sentiment très doux », sentiment très doux qui flirte avec l'amour au point, de son aveu même, d'en occulter les gens qui l'entoure.

Mais au fait qui est Damiens ?

La suite sur : www.actualitte.com
Lien : https://www.actualitte.com/a..
Commenter  J’apprécie          30


critiques presse (1)
Actualitte
26 juin 2018
Un livre où la ponctuation manque de plus en plus, nous laissant haletants et un peu plus mal à l’aise (si c’était encore possible) avec la nature humaine.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
La journée sera rude,
en d'autres temps tu aurais été un héros, mon cher amour, on est un héros quand on venge le peuple maltraité, tu étais une sorte de Jeanne d'Arc, tu avais des voix, toi aussi, j'entends la tienne, et tu étais pieux, toi aussi, je me rends malade à écrire sur toi sans pouvoir te toucher physiquement, tu deviens mon "amant essentiel", certains se moqueraient de moi, et après!
Je suis désormais indissolublement liée à toi et j'en pleure, je pleure en tapant les mots sur le clavier, et les mots glissent comme des larmes, le lecteur les lira vite, qu'importe, je te rendrai la vie, la vraie, mon Damiens, qu'est-ce que la vraie vie? diront certains, simplement la tension vers la vie, imbéciles! dites-moi donc, bougres d'idiots, à qui peut s'intéresser un poète, je veux dire un auteur qui n'est pas un porc? à l'homme vaincu, trouvez-moi un poète qui se soit attaché aux vainqueurs! on me répondre: vainqueur un jour, vaincu le jour suivant, tout reste dans la balance, il est vrai, cela dit,n'étant capable que de chanter l'amour, et partie pour écrire un livre sur mon amour du genre humain, je composerai plus qu'une biographie, une ode à un damné, un chant d'amour pour un grand vaincu de l'Histoire, je dresserai, puisqu'il n'en a pas eu, un tombeau pour Damiens.
Commenter  J’apprécie          20
Marie (mère de Damiens) est morte du scorbut, ses journées étaient trop rudes, et trop rudes les journées du fils après la mort de sa mère, il a quatorze ans, on est en 1729, on meurt quand on n'est pas aimé, et aussi quand on n'aime pas ou cesse d'aimer, c'est pour ça qu'il faut aimer même les gens qui ne méritent pas notre amour
Commenter  J’apprécie          50
"Ecouter quelqu'un, c'est se mettre à sa place", écrit Simone Weil; je me suis mise à ta place, Damiens.Je vois en toi un frère de Simone Weil. Ce sont deux êtres d'une pureté sauvage, qu'obsède le malheur du peuple, deux êtres assoiffés de vérité et de justice, qui de ce fait, sont tragiquement seuls.
Commenter  J’apprécie          50
sait-on pourquoi les étoiles sont immobiles dans le ciel?
à mon avis, elles sont pétrifiées par le mal dont les humains sont capables,
Commenter  J’apprécie          80
La journée sera rude
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Claire Fourier (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Claire Fourier
Claire Fourier - L'amour aussi s'arme d'acier, route coloniale 4 en Indochine .Claire Fourier - L'amour aussi s'arme d'acier, route coloniale 4 en Indochine aux éditions Dialogues. http://www.mollat.com/livres/fourier-claire-amour-aussi-arme-acier-route-coloniale-indochine-9782918135845.html Notes de Musique : "February (Mumblemix)" by Calendar Girl.
Les plus populaires : Littérature française Voir plus
Livres les plus populaires de la semaine Voir plus


Lecteurs (7) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3205 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}