Ô chevaux, la lumière est pourtant innocente est le second ouvrage que je lis de
Furukawa Hideo, après
Soundtrack. Ce roman m'avait déjà pas mal déboussolée.
Ici il ne s'agit pas d'un roman. L'auteur, originaire de la province de Fukushima a suivi la catastrophe du 11 mars 2011 et des jours suivants sur un poste de télévision. Un choc sans commune mesure et l'impossibilité de quitter l'écran des yeux (ça m'a rappelé en quelque sorte la stupeur paralysante que j'avais ressentie lors des attentats du 13 novembre 2015; les yeux voient, les oreilles entendent, mais la connexion avec le cerveau semble avoir des ratés dans le processus de compréhension).
Saisi d'une sensation intense d'intemporalité, il éprouve comme une culpabilité de n'être pas dans sa région d'origine. Un mois après le tsunami, il part accompagné de trois autres personnes pour le Tôhoku, ce Nord-est du Japon devenu zone sinistrée toujours sous la menace nucléaire des sites Daiichi et Daini de Fukushima.
Si jusque là j'ai suivi les propos de l'auteur, j'avoue qu'il m'a perdue par la suite. Son récit part dans des directions pour le moins surprenantes. On a ainsi un résumé de l'Histoire de l'ère dite des Provinces Combattantes ainsi que des portraits de Nobunaga Oda puis Hideyoshi Toyotomi. Un historique aussi de l'élevage des chevaux dans la ville de Sôma, dans le Tôhoku, depuis le XIVème siècle. Ce, raconté par l'un de ses personnages qui s'est invité au cheminement vers la zone sinistrée de Furukawa et ses comparses.
Larguée. Paumée. Je suis passée à côté de ce que voulait exprimer l'auteur. Il dit lui-même à un moment, parlant de ses précédents romans (plus nombreux que les trois ouvrages jusqu'ici traduits en français), qu'il ne comprend pas pourquoi ses textes ne sont pas toujours compris. Ouf, voilà qui me rassure quelque part. Ça n'est pas qu'une question de clés de compréhension manquantes à la lectrice occidentale que je suis; ses compatriotes s'y perdent aussi.
Je me suis raccrochée par-ci par-là à ses descriptions du désastre qui s'étend sous ses yeux là où le tsunami et les séismes ont frappé si fort. On mesure son désarroi face à l'incapacité qu'il éprouve à admettre ce qu'il a sous les yeux. le tsunami a tout emporté et le néant s'est installé à sa suite.
Ce livre est loin d'être inintéressant mais il faut accepter (se résigner) de ne pas tout comprendre des méandres de réflexion de l'auteur. La vision de ce cheval blanc errant dans un territoire méconnaissable et déserté de toute humanité est poignante et donne un autre angle de l'ampleur de la catastrophe.
A noter aussi un très beau texte sous forme de poème qu'il rédige à New York début mai 2011 (cf. un extrait dans mes citations sur l'ouvrage)