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EAN : 9782268099958
580 pages
Les Editions du Rocher (02/05/2018)
3.62/5   4 notes
Résumé :
« On n'a pas fini d'interpréter mon voyage à Baden-Baden !... », a dit de Gaulle, peu de temps avant sa mort au colonel d'Escrienne, son dernier aide de camp. Pourquoi le chef de l'État a-t-il choisi de partir en secret pour l'étranger, le 29 mai 1968, provoquant la panique dans son entourage, et au risque de se voir accusé par certains d'avoir fui ? De Gaulle ayant affirmé publiquement avoir envisagé « toutes les éventualités sans exception » (le retrait du pouvoir... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Ayant beaucoup apprécié le livre précédent d'Henri-Christian Giraud, « 1914-1918 : La Grande Guerre du Général Giraud », je suis heureux que Masse Critique m'ait offert « l'accord secret de Baden-Baden », édition enrichie du titre publié en 2008.

En 580 pages, riches de centaines de notes et de renvois, l'auteur étudie mai 68, observe le contexte sociétal international des années 60, et analyse parallèlement le printemps de Prague et les événements de Paris.

H-C Giraud a lu tous les tracts syndicaux, les articles publiés à l'époque dans la presse, a réécouté les bulletins radiophoniques, a décortiqué les mémoires des divers protagonistes (en se donnant la peine de comparer les éditions successives et leurs différences) et a rencontré personnellement les acteurs survivants quatre ou cinq décennies après ce printemps.

Nous avons ainsi une histoire du mois de mai 68 en France, dont je ne connais pas d'équivalent aussi complet, aussi factuel, aussi objectif. Nous découvrons les coulisses des négociations entre Gouvernement et Syndicats et aussi les liaisons directes entre le Préfet de Police Grimaud et les leaders étudiants. Nous revoyons les gesticulations médiatiques des Giscard, Lecanuet, Mitterand et Mendés. Et nous observons l'organisation communiste et la discipline de la CGT dotée d'un service d'ordre sans équivalent à l'époque.

Jour par jour, le lecteur revoit la décomposition de l'état, la désertion de nombre de ministres, l'effondrement des administrations, le retournement de veste de multiples élus, la veulerie d'une partie du patronat, et l'écart entre Paris « révolutionnaire » et la province « réactionnaire ». Tableau déjà vu en juillet 1789 (relire "Les adieux à la reine" de Chantal Thomas), en juin 1940, etc.

Et nous lisons parallèlement le déroulé du mois de mai à Prague, et par ricochet à Moscou, Varsovie et dans les diverses capitales soviétiques. Nous suivons jour par jour, les manoeuvres militaires du Pacte de Varsovie et les pressions politiques exercées sur les responsables tchécoslovaques.

Et dans l'ombre, cachant son jeu et laissant Pompidou piloter au milieu de la tempête, le Général de Gaulle mobilise ses alliés étrangers et ses fidèles, et renverse la situation les 29 et 30 mai. Ces deux journées ont fait l'objet de multiples controverses depuis 50 ans et le voyage à Baden-Baden, l'entretien avec le Général Massu, restent en partie mystérieux.

En inscrivant ces deux journées dans le prolongement des accords noués depuis 1941 entre les gaullistes et les communistes, entre la France et l'URSS, en révélant la visite le 28 mai du Maréchal Kochevoï au Général Massu, à Baden-Baden, Henri-Christian Giraud formule l'hypothèse d'un accord « gagnant- gagnant » entre De Gaulle et le Kremlin laissant Moscou rétablir l'ordre communiste à Prague en sifflant la fin de la récréation étudiante à Paris en demandant à la CGT de remettre les ouvriers au travail.

L'ouvrage est dense et doit être lu une plume à la main, les notes sont en petits caractères et doublent le temps de lecture, les annexes très riches (notamment sur Léo Goldenberg, devenu Léo Hamon et sur les « gaullistes de gauche »), la bibliographie et l'index sont une mine d'or … l'ouvrage édité par les Editions du Rocher est plus proche d'une thèse couronnant le travail d'une recherche académique que d'un livre d'histoire destiné au grand public et, à mon avis, ceci justifierait une édition allégée au format de poche.

Remarquable par son travail documentaire et par le rappel de la « belle et bonne alliance » entre les deux grandes forces issues de la résistance, cet ouvrage est incontournable pour celui qui essaye de comprendre les ressorts des événements de mai 68.

Sa lecture illustre aussi qu'en un demi siècle, les problèmes que notre pays connait aujourd'hui ont bien changé et se sont considérablement compliqués avec une situation économique, sociale et morale ruinée par un demi siècle de gabegie … héritée en partie de mai 68.

Mais ce titre démontre aussi que lorsque la France est au bord du gouffre … elle arrive toujours à se redresser.

Ce en quoi son auteur est bien le digne héritier de son héroïque grand père, aujourd'hui bien méconnu.
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Une réédition fort à propos cinquante ans après, de ce livre paru en 2008 sur ces journées de mai 68 qui ébranlèrent la France, et notamment ce fameux 29 mai où le général De Gaulle fila à Baden-Baden rencontrer Massu, laissant durant quelques heures la France dans le mystère de sa disparition.

Fort à propos car cinquante ans après, ce trou d'agenda fait toujours discussion et Henri-Christian Giraud souhaite dans L'accord secret de Baden-Baden sortir de la polémique pour entrer dans un vrai travail d'historien, peu fait jusque-là. Et, en bon journaliste qu'il fut, ce travail s'accompagne d'une hypothèse sur les vraies raisons de ce saut de puce hors de nos frontières.

Car selon Giraud, certes le pouvoir en 68 est en fin de cycle, De Gaulle est fatigué et tenté de renoncer, la poussée sociale extrêmement forte, et la tentation - ou la crainte pour certains - de faire intervenir l'armée pour régler le chaos interne dans tous les esprits.

Mais ces éléments ne sont pas suffisants et il faut leur ajouter une dimension de politique intérieure liée à la tentation du Parti Communiste de prendre - ou pas - le pouvoir en France. Et en ces temps-là, malgré les dénégations, c'est bien l'URSS qui tire encore secrètement les ficelles stratégiques du PCF. Et de Gaulle, avant d'agir, a besoin de savoir si Moscou laissera les communistes français basculer dans la révolution ou s'ils continueront à être des opposants véhéments, mais passifs.

Sur ces bases, Henri-Christian Giraud nous replonge dans le contexte de l'époque : intérieur, par un travail important de chronographie de ces journées établi grâce aux nombreuses archives et témoignages des acteurs de l'époque ; mais aussi extérieur, en restituant ces événements dans le contexte international de 1968. La guerre froide est toujours présente, l'URSS débute les prémices de sa future mainmise sur la Tchécoslovaquie, les USA et l'OTAN sont vigilants sur toute déstabilisation d'un pays européen, et le travail diplomatique des émissaires est indispensable à tout chef d'état pour sonder les hypothèses avant d'agir.

L'accord secret de Baden-Baden retrace tout le déroulé de ces événements et avance son explication - de loin la plus plausible - en balayant les autres au passage. C'est intéressant, très bien documenté voire même un peu trop parfois, tant les références et renvois sont nombreux ; et cette surdocumentation conduit de temps à autre à une impression de redite. Mais c'est probablement l'inévitable prix à payer à la rigueur historique pour ce livre dont les 500 pages s'avalent sans temps mort.

Merci à Babelio et aux éditions du Rocher pour cette Masse critique instructive !
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Un livre dense qui nous détaille avec précision les différentes tractions qui ont eu lieu autour de cet accord secret. On découvre dès les premières pages que si certains pensaient que les premières "révoltes" faibliraient par elle-même, le général De Gaulle a tout de suite pris les devants.
Un livre très instructif mais parfois difficile à suivre pour les néophytes comme moi.
J'ai apprécié la lecture mais j'ai parfois dû m'y reprendre à plusieurs fois pour suivre les cheminements de toutes ces infos, d'autant plus que le plupart des infos sont données sous la forme de citations.
Je conseille donc ce livre plus particulièrement aux passionnés de cette période riche de l'histoire. Je remercie cependant Masse critique pour cette lecture découverte.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Tirant les conclusions de l'attitude des dirigeants communistes français dans la crise de Mai 68, Youri Doubinine affirme qu'ils se sont comportés de manière responsable en neutralisant les éléments extrémistes et en exprimant le mécontentement dans un cadre constitutionnel. Mais il tient aussi à englober les dirigeants soviétiques dans ce jugement général en disant: « Nous avons tout de suite vu que l'explosion n'était pas révolutionnaire. Nous n'avons à aucun moment pensé que le régime était en danger. » Et, pour preuve, il précise que le 30 mai, jour de la grandiose manifestation gaulliste sur les Champs-Elysées, les diplomates soviétiques étaient si peu sous pression que l'ambassade organisait une réception en l'honneur de son propre départ, prévu le 6 juin.

Mais, concernant cette fameuse réception du 30 mai à l'ambassade soviétique, le diplomate apporte à Maurice Najman une information d'importance : « Tous les protagonistes de la crise étaient la, affirme-t-il. Les invités gaullistes arrivaient au fur et à mesure de la progression de leur manifestation vers la place de la Concorde. »

Incroyable mais vrai !

Dans ses Mémoires, Doubinine se montre encore plus précis :
« II y avait de nombreux invités, écrit-il. On vit venir des militants de l'opposition, ce jour-là ils ne menaient pas de grandes actions. Ensuite les représentants officiels arrivèrent ; ils débarquaient au fur et à mesure, ayant fini leur participation à la manifestation. Ici, les uns et les autres se rencontraient, c'était le caractère unique de ce lieu. Les dirigeants gaullistes serraient la main de Jacques Duclos, un des plus éminents leaders du mouvement communiste en France. Les réceptions diplomatiques servent à donner la possibilité de communiquer. »
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Pour mettre sur pied « son » accord avec la CGT, Pompidou est-il allé plus loin ? Selon Séguy, au cours de leur entretien auquel assistent également Benoît Frachon et André Berthelot, Pompidou touche au vif du sujet avec une brutalité sans fard : « Inutile de tourner autour des vraies questions avec vous, leur dit-il. L'orientation de la politique extérieure du général de Gaulle a beaucoup d'ennemis à l'intérieur et à l'extérieur, y compris parmi ceux que vous souhaitez avoir comme alliés contre nous. Ce sont des adversaires irréductibles de l'ouverture à l'Est. On a pu le vérifier lors du récent voyage du Général en URSS. Ils espèrent, à la faveur des événements dont la France est présentement le théâtre, rétablir le cours de la politique atlantiste de la IVe République. C'est l'essentiel de la situation présente, et j'ai la conviction que vous n'y êtes pas insensibles... Pour ma part je puis vous assurer d'une chose. Je préfère être simple fonctionnaire d'un gouvernement communiste que Premier ministre d'une France dominée par les Américains. »
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Voyez-vous, c'est cela le drame français. Nous serions le pays le plus fort du monde, sans ces lâchages brutaux, sans cette indifférence, au fond, à ce que l'on appelle la nation.
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