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EAN : SIE175607_268
Éditions G.P. Nantes, Impr. moderne (30/11/-1)
3.33/5   18 notes
Résumé :
Ce récit autobiographique relate les premières années de la vie du jeune Alexis Pechkov, alias Maxime Gorki (1868-1936), qui n'était pas encore devenu le héraut du réalisme socialiste.
Déchiré par le malheur et la misère qui avivent les basses passions de l'individu, entre un grand-père rude, violent, souvent brutal et une grand-mère bonne, pieuse, mais assez faible pour supporter passivement son mari, l'enfant s'éveille à la vie, sans pouvoir toutefois se dé... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Il neige dans mon grenier. La myriade de points blancs qui ne cessent de tomber devant l'unique ampoule faiblement éclairée en est la preuve. Cette poudreuse recouvre le vieux plancher d'une fine pellicule et il me suffit de regarder l'empreinte laissée par mes pas pour me convaincre, définitivement, que ce grenier subit les affres d'un micro-climat poussiéreux. Les toiles d'araignées, elles, me souhaitent la bienvenue en plein visage. C'est que cet endroit est aussi peu fréquenté qu'une datcha en plein hiver sibérien.

Mais je ne suis pas venu ici par hasard. Je désire trouver un livre peu connu d'un auteur, lui, très connu. du moins en Russie. C'est de cette façon que je le découvre: une couverture cuirassée de couleur bordeaux, des pages jaunies par les années qui pourraient se détacher si la main ne prend pas garde à les tourner avec soin. Il suffit de jeter un coup d'oeil sur la reliure pour que je me rende compte que ce livre vient d'un autre temps. Je tiens entre mes doigts Ma vie d'enfant de Maxime Gorki. Analyse.

Cette autobiographie nous plonge, sans introduction, dans la cuisine familiale où le petit Alexis Pechkov (en réalité le vrai nom de Maxime Gorki) assiste à l'agonie de son père couché au sol et à l'impuissance de sa mère face à la mort. A travers ce livre, l'auteur russe se remet dans la peau de son enfance. Il essaie de décrire les événements qui l'ont marqué au fer rouge en utilisant un langage simple et une juste mise à distance des faits. Cette absence de pathos doit certainement nous apporter des indications sur ce qu'était la vie dans une famille modeste de la deuxième moitié du XIXe siècle en Russie: La mort, tout en gardant son aspect tragique, faisait partie intégrante des soucis quotidiens à affronter pour l'entourage. Il n'était pas question de larmoyer longtemps sur son sort et l'enfant était, de manière précoce, face à des difficultés… d'adulte dont il ne mesurait peut-être pas l'exacte portée.

Au delà de ce rapport précoce à la mort, Maxime Gorki essuie les coups de son grand-père. A cette époque, on battait pour des raisons les plus futiles les unes que les autres avec l'éternelle excuse de Dieu : cet alibi malsain qui permet de passer outre l'inexcusable. En lisant ce livre, on se rend compte que l'auteur russe se met à nu et révèle comment son militantisme socialiste trouve son origine dans ce qu'il vécut enfant. Voici ce qu'il écrit après avoir reçu sa première correction :

“ C'est à dater de ce moment que se manifesta en moi cette attention inquiète pour tous les êtres humains. Mon coeur comme si on l'eût écorché devint incroyablement sensible à toutes les humiliations et à toutes les souffrances personnelles ou étrangères. ”

Cette autobiographie ne serait donc qu'un enchaînement de souvenirs négatifs de l'auteur russe? Bien sûr que non. Les épisodes de petits bonheurs inhérents à l'enfance sont aussi présent mais ils prennent toujours une tournure dramatique. Les découvertes propres à l'enfance se finissent trop souvent sous les coups ou les manigances du grand-père que l'on peut allègrement nommé de personne ultra-toxique. Les jeunes années de Gorki furent aussi celles des petites contemplations qu'il transforme en fulgurances poétiques:

“ Chaque bruit, frôlement d'oiseau, froissement de feuille qui tombe, semble étrangement sonore et vous fait tressaillir; mais on s'engourdit bientôt dans le silence qui étreint la terre entière et oppresse les poitrines. Ces minutes divines favorisent l'envol des pensées délicates et épurées, mais elles fragiles et fines comme des toiles d'araignée et les mots sont impuissants à les fixer. A peine apparues, elles s'évanouissent, telles les étoiles filantes, en brûlant l'âme qu'elles caressent, et alarment à la fois d'une vague nostalgie. C'est alors que l'être intérieur se met à bouillonner, des orientations se précisent ; l'âme, si l'on peut dire, prend la forme qu'elle conservera toute sa vie et son visage se crée. ”

Nous venons de le voir, son enfance fût rude malgré les quelques moments de spontanéité. Si l'on place Ma vie d'enfant sur la ligne du temps de la vie de Gorki, nous nous rendons compte que cette autobiographie fut écrite alors que l'auteur russe avait une quarantaine d'années. Cela pose évidemment la question des souvenirs. Dans quelle mesure, ce qu'il écrit avoir vécu quarante ans plus tôt n'a pas été déformé au fur et à mesure du déroulement de sa vie? Sans doute l'essentiel ne réside-t-il pas dans l'exactitude des souvenirs de Gorki mais dans les raisons qui lui ont fait choisir ces souvenirs et pas d'autres.

Enfin, la dualité de moments lumineux au sein d'une vie rude m'a fait penser au film Cria Cuervos où la petite Ana, témoin de la mort de ses parents, se rend compte que ces événements chamboulent déjà quelque-chose en elle sans pouvoir mettre des mots sur cela. Dans Ma vie d'enfant, Maxime Gorki dévoile une réaction qui semble similaire à celle de Ana:

" Jamais jusqu'à ce jour je n'avais vu pleurer les grandes personnes, et je ne parvenais pas à comprendre les paroles que me répétait ma grand-mère :

-Dis adieu à ton père, tu ne le reverras plus jamais, il est mort, le pauvre cher homme; il est mort trop tôt, ce n'était pas son heure.

[…] C'est que ma mère m'impressionne; ses larmes et ses gémissements ont éveillé en moi un sentiment inconnu jusqu'alors : l'inquiétude. "
Lien : https://lespetitesanalyses.c..
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C'est à reculons que Gorki écrit cette autobiographie, à la demande de ses amis, vers la fin de sa vie. Et après avoir fini cet ouvrage, on sait pourquoi. Il y dépeint une enfance dure et violente. On commence à le suivre après la mort de son père : le début de tous ses malheurs. S'en suit une vie d'abandon, sa mère le délaisse aux soins violents de ses grands parents : sa grand-mère qu'il aime beaucoup flirt avec l'alcoolisme, son grand-père sois-disant plein de sagesse n'a de cesse de le battre régulièrement. Peu d'espoirs semblent briller pour cet enfant qui pourtant va connaitre une vie de renom. Malgré une enfance incroyablement sordide pour nous, habitants du XXIème siècle, son cas n'est pourtant pas isolé, et ce roman est en fait d'un réalisme incroyable et raconte la jeunesse de millions de petits russes de la fin du XIXème siècle. Encore une lecture qui éclaire sur les conditions qui ont vu naître tellement de noirceur au cours du XXème siècle, on comprend de mieux en mieux les révolutions successives qui ont secoué la Russie et l'Europe entière.
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Un livre dur et tendre à la fois. La tendresse d'un petit orphelin qui, dès son plus jeune âge, fait face à la mort de son père apparaît déjà dans le premier chapitre. À partir de là, un portrait de toute la famille qui l'entoure émerge, où se croisent besoins et carences qui laissent des traces profondes dans l'enfance de l'auteur. Les descriptions de diverses misères humaines et quelques moments d'ironie donnent de la force à une histoire qui décrit très bien la vie dans la Russie tsariste de cette époque.
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S'il est intéressant de contempler le portrait que le maître du réalisme social a pu tracer de son époque et de ses contemporains, il est également instructif d'en apprendre un peu plus sur la vie que celui-ci a pu mener. Ce premier volume des mémoires de Maxime Gorki est un récit très factuel. C'est simplement l'histoire d'un enfant élevé dans la misère et forgé au rythme des décès des membres de sa famille et de son entourage, un aperçu des évènements marquants de sa jeunesse. On le voit grandir, certes, mais c'est à peu près tout. Aussi suis-je déçu qu'il ne soit jamais question de réflexion politique ni de considération littéraire. de même, le livre ne propose pas réellement d'étude approfondie de la société. de fait, si la lecture est séduisante, elle n'est pas à proprement parler captivante.

Peut-être m'y retrouverai-je plus dans l'un des deux volumes suivants ?

Affaire à suivre.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Longtemps elle grommela en se traînant sur les genoux, tandis qu’assis sur le marchepied du poêle je me creusais la tête pour savoir comment je pourrais bien punir grand-père de sa conduite et la venger du même coup !
C’était la première fois qu’il avait battu sa femme d’une façon aussi infâme et aussi atroce, en ma présence tout au moins. Dans la pénombre je revoyais son visage écarlate et fulminant et ses cheveux qui flottaient en désordre. L’outrage brûlait mon cœur et je souffrais de ne pas imaginer des représailles dignes de l’injure.
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Leurs cris et leurs larmes, les tourments qu’ils s’infligeaient mutuellement, les scènes qui éclataient pour s’éteindre aussitôt, m’étaient devenus si familiers que tout cela ne parvenait plus à me toucher que très faiblement.
Bien longtemps après, j’ai compris que les Russes, obligés de mener une vie indigente, arrivent à chercher dans le chagrin une distraction. Ils s’en amusent comme des enfants, ils s’y complaisent et il est rare qu’ils aient honte d’être malheureux.
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La colère est comme la glace : elle fond à la première chaleur.
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La maison, somme toute, était amusante; et pourtant j'étais accablé parfois d'une invincible tristesse, il me semblait que j'étais comme saturé de quelque chose de pesant, ou que, durant de longues périodes, je m'engourdissais dans un trou profond et sombre, ou encore que mes sens s'abolissaient, que je devenais aveugle et sourd, comparable à un demi-mort...
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Videos de Maxime Gorki (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Maxime Gorki
Gorki et ses fils, correspondance (1901-1934) , traduit du russe et préfacé par Jean-Baptiste Godon, est paru aux éditions des Syrtes.
Près de dix mille lettres de la main de Maxime Gorki sont conservées par les archives de l'Institut de la littérature mondiale de Moscou. La présente correspondance inédite entre l'écrivain et ses fils représente 216 lettres échangées entre 1901 et 1934.
Plus d'info sur https://editions-syrtes.com/produit/gorkietsesfils/
Nos remerciements à la Bibliothèque russe Tourguenev à Paris pour avoir gracieusement accueilli le tournage.
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