Achille Talon, tome 6 : Achille Talon au pouvoir

En cent mots comme en trois, je m'en vais vous démontrer sans me démonter que cet album de l'ineffable Achille Talon vaut intrinsèquement et dans l'absolu trois étoiles et demi.

L'album commence par une simple page où l'enthousiasme de Talon au travail se trouve déconfit par son patron pourtant petit. On rit pour dix et ça compte donc pour 0.5*10 étoiles.

Puis on a une courte liste d'histoires plutôt convenues où Talon et Lefuneste échangent des beignes. Donc au cours plutôt stable de la beigne en étoiles : 5*2.9*1.22.

Ensuite une assez longue série de bons gags dans lesquels Talon tente de prouver les travers de la société de son temps et il faut peu de temps à la société pour le prendre de travers et ramener le prétentieux dans ses clous, gros jean comme devant. Ça compte bien pour 8*4.5 étoiles.

Enfin une longue file de gribouillages de doubles pages où Talon, sous prétexte d'informer le lecteur sur le sacerdoce du dessinateur et ses techniques très profilées de travail, abîme néanmoins du beau papier originellement blanc, ce qui n'échappe pas au directeur de Polite qui compte bien enfoncer ses reproches dans le crâne dudit Talon (et jusqu'au talon d'ailleurs), marteau à l'appui et retenue sur salaire allant de soi. Au bas mot ça ne vaut pas plus qu'un 7*2.2 étoiles.

Je vous épargne les broutilles résiduelles mais j'ajoute quand même 1.5 pour les titres calembours toujours de qualité. A présent je somme le tout et divise par le nombre de doubles pages.
Quod Erat Demonstrandum !!!

Bref on se marre, quoi !

La campagne électorale est lancée !
L'homme de qualité ne s'arrêtera dans sa course folle vers les plus hautes destinées que lorsqu'il aura fait flamboyer ses idées dans les esprits et sur les murs de la ville !
Repetita bis placardent !
Ne lésinons pas sur le slogan !
Il n'a pourtant jamais mis le nez dans la politique.
Avec les dimensions de ce dernier, cela se serait su !
Mais il compte apporter la fraîcheur qui renouvelle toute la stratégie de l'adhésion populaire.
Exaltant apostolat !
Voyez-vous, quand le doigt du destin prend la forme d'une aiguille de montre dans la meule de la vie quotidienne, l'heure de la vérité sonne finalement !
Ce soir, sera-t-il raisonnable de traîner devant la télé ?
Si ce n'est pour scander : "Achille Talon au pouvoir !"
Car ne vous y trompez pas, seul l'homme de qualité peut vous éviter l'insomnie sans appel, la nuit ratée, la crise de lucidité et les remords qui viennent tambouriner à l'huis de votre conscience.
Hop !
"Achille Talon au pouvoir !"
Pour le reste, cet album avec lequel je vous propose de passer la soirée est peut-être, sûrement, le meilleur de tous.
Achille Talon nous y présente "l'homo dessinatans", un dénommé Greg qu'il connaît comme si il l'avait créé ...
Achille Talon nous y donne la recette d'une bonne bande-dessinée ... que Greg, pour notre plus grand plaisir, semble avoir retenue ! ...

C'est un album de gags de Talon qui a du bon et du moins bon. Tout ce qui tourne dans le registre habituel et attendu est plutôt bon comme les gags dans lesquels Talon et Lefuneste en décousent encore et toujours. Par contre, les histoires où on nous explique le sacerdoce du dessinateur ou la manière de remplir des pages est quand même moins bon.

Sixième album publié en 1972 de la série Achille Talon. Au programme quelques bons gags sur le voisinage, la presse, la télé, et une série de planches liés à l'univers de la bande dessinée.

Les gags sur l'art du dessinateur réussissant à remplir ses deux pages hebdomadaires par des tours de passe-passe sont assez délirantes (exemple le Cas nu lard) et conduisent à une fantastique seconde planche dans Jeudi snob, oh, dis : une pleine page remplie de dizaines de personnages de BD de l'époque digne de Où est Charlie. Pour ceux qui y chercheront Newton de la Rubrique à Brac de Gotlib, un indice : suivez la pomme !

Un recueil de gags n'est jamais facilement critiquable. Alors qu'est-ce qu'on peut dire, exactement, sur un tome classique d'Achille Talon ? Outre le fait que nous retrouvons le célèbre intellectuel à la rhétorique si particulière, on rit de toutes les péripéties qu'il endure avec son papa à lui, sa maman et le détestable voisin Lefuneste. Mais fichtre, le titre et la couverture n'ont rien à voir avec le contenu. On aurait pourtant aimé voir notre rondouillard préféré se hisser à la tête du Parti Anti-Cuistre. Mais la politique fera sa grande apparition dans des tomes postérieurs...
Du reste, on est tout de même sur un tome qui n'a rien à se reprocher. Dans les gags mémorables, on retiendra celui de "L'Hebdolirant", celui de la cinéphilie "pour adultes", ou encore celui du dessinateur polynésien, de par leurs diatribes particulièrement envolées où le rôle du second degré est tout particulièrement crucial.