Achille Talon, tome 32 : Achille Talon et la traversée du disert

Il ne sera pas dit qu' Achille Talon, l'homme de qualité, n'ait pas connu, comme tout un chacun, sa traversée du "disert".
Mais comme il n'existe pas dans sa vie d'endroit sûr à partir du moment où il y a mis les pieds, l'engrenage infernal et mathématique y était inévitable !
Donc Boum !
Il entraîne sa famille, sa dulcinée, un voisin pris presque au hasard et un canard innocent, dans un pique-nique qu'il aurait voulu jovial.
Mais c'était sans compter sur Jules-Fernand Pinasse des Bouches du Rhône et sur Omer-Alfons Leubemans d'Anderlecht, deux irrécupérables évadés démoniaques, qui avaient un besoin pressant de ravitaillement et d'otages pouvant favoriser leur fuite et éventuellement les faire rire ...
Publié en 1982, "La traversée du disert", est le 32ème album des aventures d'Achille Talon.
Disons-le tout net, ce n'est pas le meilleur.
Mais sa lecture est plaisante.
Et il y est abordé de grandes et profondes questions métaphysiques et philosophiques :
- peut-on faire confiance à un auteur de bandes-dessinées pour dominer une situation sérieuse ?
- Les bandes-dessinées ont-elles cessé depuis longtemps d'être éducatives ?
- La frontière est-elle vraiment à 200 mètre juste de l'autre côté de la buvette ?
De plus on y apprend quelques indispensables détails authentiques et vérifiables :
- dérivée de la de Dion 1903, la voiture d'Achille Talon, "l'Achilles", robuste et peu coûteuse, sortit en 1908 des ateliers britanniques de B. Thomson & C°, Ltd, à Frome, dans le Somerset, England !
- que l'évasion des capitaux, c'est pas beau !
- et que Greg, même s'il est, n'allons pas l'ébruiter, "un expert mondial* dans l'art de mesurer son effort au plus juste", nous offre ici, avec "la traversée du disert", un bon moment de détente ...

* laissons à Achille Talon la responsabilité de ses déclarations.
Il connaît Greg comme si il l'avait créé !

Tout commence par un gentil pique-nique en famille.
Tout va pour le mieux, si ce n'est l'inévitable Lefuneste qui gâche la quiétude bucolique avec sa radio beuglante.

Et puis patatras, la joyeuse petite bande se retrouve prise en otages par des prisonniers évadés.

Comment Talon, sauvera t'il la situation ?

Vous le saurez en lisant cet album, qui pour moi, est un des plus drôles de la série.

Entre le transistor increvable qu'on arrive pas à faire taire, le preneur d'otage qui est incapable d'identifier Pétard la mascotte palmipède de talon, et les digressions du philosophe bedonnant, on passe un très bon moment.

A la condition bien sûr de savoir apprécier l'humour de Greg, qui fut à la BD franco-Belge ce que Michel Audiard fut au cinéma français....

De très bonnes idées... et beaucoup de maladresse.
Greg avait de très bons partis pris, à savoir principalement la montagne paradisiaque se transformant au fil du récit en un enfer absolu : les tribulations sont nombreuses, abracadabrantes, noyant les héros dans un tourbillon démentiel de dangers et de violence absurde toujours montrée de manière ironique. Mais il ne suffit pas de tout ça pour qu'une histoire où Achille Talon se fait prendre en otage devienne un chef-d'oeuvre incontestable de la bande dessinée franco-belge. Greg se pompe en effet lui-même, faisant revenir les gags ayant fait mouche dans "QRN sur Bretzelburg", en faisant ainsi un album bancale, se perdant parfois dans des diatribes trop longues. Sans doute son livre le moins glorieux.