C'est un bonheur d'accéder avec une belle intégrale au classique mais formidable et indispensable ouvrage de Robert Anson Heinlein intitulé "L'Histoire du Futur", car pour ne rien gâcher elle constitue un bel livre-objet :
- mais grosse erreur (1/2 étoile en moins ^^), c'est inadmissible qu'un recueil de recueils de nouvelles ne dispose pas d'un sommaire avec le titre et la date de chacune d'entre elle... ici c'est limite faute professionnelle !
- mais gros oubli (1/2 étoile en moins ^^), il n'y a aucune préface pour expliquer aux lecteurs l'ampleur de l'oeuvre et son fil directeur... ce n'est comme si l'auteur n'en avait pas déjà écrit une en 1953, et que les éditions précédentes offraient une tableau chronologique récapitulatif permettant de resituer chacune des nouvelles dans l'ensemble qu'elles constituaient (c'est très gênant qu'une édition en grand format offre moins de contenu qu'un édition en format de poche)
La France eut Jules Verne, l'Angleterre eut H.G. Wells, et les États-Unis eurent la chance, l'honneur et le privilège d'avoir eu Robert Anson Heinlein qui fit de son pays le pays de la Science Fiction par excellence, pour longtemps et peut-être pour toujours !
Né dans une famille fondamentaliste du Bible Belt, Robert Anson Heinlein s'émancipe de son milieu culturel en découvrant les écrits de Charles Darwin, et c'est pour quitter l'environnement étouffant de l'Amérique profonde de l'entre-deux guerres qu'il s'engage dans l'armée. Il se voue corps et âme à la défense de sa patrie, mais après avoir atteint le grade de lieutenant il est réformé pour cause de tuberculose : pour lui, c'est un drame qui hantera toute sa vie. Pour gagner les 50 dollars d'un prix littéraire il écrit en 1939 la nouvelle "Ligne de Vie" / "Life Line", et John W. Campbell lui en offre 70 dollars pour la publier dans Astounding Stories. C'est un miracle : Anticipation, Hard Science, Utopie, Dystopie, Space Opera, ou Planet Opera la Science Fiction ne fut plus jamais la même, et pendant des années et des années il en fut le plus grand champion !
L'auteur a évolué : communiste puis anti-communiste, démocrate puis républicain, conservateur puis progressiste, écologiste et révolutionnaire avant de travailler à nouveau dans l'armée pour les Marchands du Temple qu'il n'avait cessé de combattre (le destin est décidément farceur, et j'aurais bien aimé être le témoin des débats entre l'auteur libertarien convaincu et son ami Isaac Asimov marxiste résolu ^^)... Mais il a toujours défendu les valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité, défendant les femmes et les minorités à une époque sexiste et raciste ou il était dangereux de ne pas penser comme la majorité WASP. Et parce que les inquisiteurs culturels et les commissaires littéraires ont décrété que la SF était de gauche, tout écrivain de SF ayant un jour catalogué à tort ou à raison à droite est forcément traité de vieux con réactionnaire crypto facho (pourtant parmi eux ils en a beaucoup que se posent bien en vieux cons réactionnaires, suivez mon regard ^^) : c'est donc tout naturellement qu'il fut détesté et calomnié et est encore détesté et calomnié par les bobos hispters soixanthuitards... C'est n'importe quoi !
Comme l'expliquait l'excellent Timothée Rey dans sa fabuleuse préface de l'intégrale de "L'Île des morts", dans le monde merveilleux de la Science Fiction qui explore toutes les dimensions de l'espace-temps on peut avoir une approche géographique ou une approche historique comme Olaf Stapledon, Isaac Asimov, Poul Anderson, Cordwainer Smith, James Blish ou Roger Zelazny... de 1939 à 1963 c'est inspiré par Rudyard Kipling, George Bernard Shaw et les grands romanciers américains qu'il rédige un ensemble de nouvelles racontant de petits zooms humanistes en petits zooms humanistes "L'Histoire du Futur", c'est-à-dire la grande histoire de la conquête de l'espace et des étoiles par l'humanité des années 1920 aux années 2600 (humanité qui quitte enfin l'adolescence pour atteindre la maturité) ! L'homme est la mesure de toute chose, par lui elles sont ou ne sont pas : ses écrits n'ont pas pris une seule ride, et franchement en redécouvrant "L'Histoire du Futur" j'avais l'impression de relire le manga "Planetes" de Makoto Yukimura réalisé 2001 à 2004 ! Je ne suis pas très porté sur les nouvelles, mais ici j'ai adoré car elles sont touchantes et émouvantes, profondément humaines et résolument humanistes... (et les bobos hipsters qui ont qualifié l'auteur prétendument réactionnaire et totalitaire d'Antéchrist de la Science Fiction en raison de la pauvreté de ses idées et de son écriture ont sans doute encore trop fumé la moquette ^^)
Tome 1 : "L'Homme qui vendit la Lune"
https://www.babelio.com/livres/Heinlein-Histoire-du-futur-tome-1--Lhomme-qui-vendit-la-L/20173/critiques/1464496
Tome 2 : "Les Vertes Collines de la Terre"
https://www.babelio.com/livres/Heinlein-Histoire-du-futur-Tome-2--Les-vertes-collines-de-/40204/critiques/1501643
Tome 3 : "Révolte en 2100"
https://www.babelio.com/livres/Heinlein-Histoire-du-futur-Tome-3--Revolte-en-2100/40203/critiques/1510709
Tome 4 & 5 : "Les Enfants de Mathusalem" suivi & "Les Orphelins du ciel"
https://www.babelio.com/livres/Heinlein-Histoire-du-futur-Tome-4--Les-enfants-de-Mathusal/40202/critiques/1562106
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Je commence à peine la lecture de cette intégrale parue aux éditions Mnémos de ce classique de l'âge d'or de la SF, que déjà plusieurs choses me choquent !
je parle ici de la présentation et non du contenu.
Comme l'a déjà fait remarquer un contributeur, un sommaire...sommaire, c'est le cas de le dire, aucune information chronologique des nouvelles (ce qui est pourtant la base) juste une date de parution piochée on ne sait où, pas de préface et vous pouvez chercher la table des matières, il n'y en a pas ! Certes, un beau livre, vendu d'ailleurs assez cher, mais foutraque et pire encore, en 60 pages, j'ai déjà relevé plusieurs fautes d'orthographe !
Quant au contenu, ce serait faire injure au grand Heinlein que d'avoir à émettre des critiques sur une oeuvre majeure de la SF américaine
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- Non, Archie, tu ne trompes pas. J’y ai aussi pensé. Des villes décentralisées, des machines pour simplifier la vie de tout le monde, le luxe à la portée de tous... Tout ça est possible, mais j’ai l’impression que nous nous dirigeons aussi vers un océan d’ennuis. As-tu déjà entendu parler des Casseurs réunis, S.A. ?
- De quoi s’agit-il ? Une société de récupération de matériaux ?
- Tu es loin du compte. Tu devrais essayer de lire autre chose que les comptes-rendus de la Société des Ingénieurs. George Bernard Shaw, par exemple. Les Casseurs réunis, ça sort de la préface de sa pièce, Retour à Mathusalem. C’était sa façon sardonique de décrire la puissance combinée de tous les intérêts industriels pour résister à tout changement qui pourrait menacer leurs dividendes. Ta découverte menace tout cet édifice, mon petit gars. Donc tu es en danger, ici et maintenant. À ton avis, qu’est-il advenu de l’énergie atomique ?
Histoire du Futur de Robert Anson Heinlein (Butler, Missouri, 1907 - Carmel, Californie, 1988) que vous allez lire pour la première fois, ou peut-être redécouvrir, est un classique absolu de la science-fiction américaine au même titre que sont des classiques les poèmes homériques, les tragédies d’Eschyle, L’Énéide de Virgile, Les Essais de Montaigne, Les Confessions de Rousseau. Mais qu’est-ce qu’un classique ? Comment une œuvre, quels que soient son domaine artistique, son champ culturel, devient-elle un classique ? Est-ce par son originalité, sa qualité littéraire ? Est-ce par le talent et la maîtrise technique de son auteur ? Ou célèbre-t-on la résistance du texte au passage du temps, sa rémanence dans la culture ? On affirme parfois que l’œuvre est classique par le fait qu’elle si bien l’esprit d’une époque, les angoisses et les aspirations d’un groupe social, d’un peuple tout entier, qu’elle nous transmet, par-delà l’écume des jours, une vérité profonde sur son identité.
Ugo Bellagamba, « Pour que ça continue », préface de la deuxième édition dirigée par Ugo Bellagamba & Éric Picholle (2020), p. 6
Le message d’Histoire du futur est donc parfaitement lisible aujourd’hui, et informe, pour cette génération qui va peut-être le découvrir, toute la lecture du cycle : à l’heure où l’on cherche à tout sécuriser, à garantir l’absolue innocuité d’une politique, ou, pire encore, la moralité d’une décision judiciaire, le « classique » qu’est Histoire du Futur nous adresse un salutaire rappel à la raison.
Ugo Bellagamba, « Pour que ça continue », préface de la deuxième édition dirigée par Ugo Bellagamba & Éric Picholle (2020), p. 11
Tous ceux qui se sont morfondus dans la lecture dirigée de Madame Bovary ou le commentaire de texte d’un extrait de Germinal en ont fait l’expérience : quand on nous force à les admettre comme tels, les classiques ont souvent un goût amer. Et, surtout, une fois l’examen passé, ils finissent par prendre la poussière dans les rayonnages d’une bibliothèque. Mais ce n’est pas toujours le cas. Il y a des classiques que l’on découvre seul, par inadvertance, par curiosité, ou peut-être par magie.
Ugo Bellagamba, « Pour que ça continue », préface de la deuxième édition dirigée par Ugo Bellagamba & Éric Picholle (2020), p. 6
Il n'est pas prudent de laisser les politiciens diriger le monde.
FESTIVAL DES UTOPIALES 2023
L'héritage du mal
Les romains classaient les esclaves parmi les outils. Dans Citoyen de la galaxie de Heinlein, le protagoniste commence esclave puis est libéré, avant de consacrer son existence à la lutte contre le fléau de l'esclavage. Ici, à Nantes, le commerce triangulaire a fait la fortune de la ville. En aura-t-on jamais fini avec l'exploitation sauvage et commerciale de l'humain par l'humain? Comment assumer la mémoire du mal et poursuivre le combat ?
Les intervenants : Bernard Binetruy, Anne Defréville, Michael Roch, Abdourahman Waberi
Moderateur : Karim Si-Tayeb
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