Merci,oui, ÉNORME merci à Babelio et aux éditions de l'herne pour m'avoir envoyé cet opuscule.
Il ne fait pas 100 pages mais son contenu m'a retournée comme une crêpe.
D'abord en me révélant mes approximations ,je connaissais vaguement
Hannah Arendt pour avoir couvert journalistiquement le procès d'Eichmann en Israël et sa pendaison.
Je n'avais jamais entendu parler de
Karl Jaspers,psychiatre et philosophe germano- suisse (1883-1969) qui fut son prof de philo à l'université de Heidelberg et avec qui elle écrivit plusieurs essais. Il l'a aidée à éclaircir le cheminement intellectuel qui l'a conduite à prendre des positions très controversées lors du procès d'Eichmann.
Dans ce petit livre j'ai de nouveau été mise en face des " comités juifs"( Judenräte) mis en place par Hitler et acceptés par les dignitaires juifs, consistant à dresser eux mêmes la liste des Juifs et de leur patrimoine qu'ils remettaient aux autorités nazies, présumant qu'ainsi ils en sauveraient.
J'avais une petite dizaine d'années quand j'ai entendu parler pour la première fois de ça et alors que je m'interrogeais avec véhémence sur ce bien fondé on m'avait rétorqué que sans ces Judenräte ça aurait été pire. Et cette réponse m'avait tellement terrorisée et fait ressentir de la honte, honte pour l'espèce humaine qui accepté d'en faire tuer beaucoup pour en sauver un peu, que j'avais enfoui au fond de moi le " problème de conscience" que cela m'avait posé. Plus d'1/2 siècle plus tard me voilà,à travers quelques pages de nouveau confrontée à ça et dans quelques lignes,avec quelle force !
Hannah Arendt me donne une réponse et je vais maintenant devoir construire la mienne propre en m'informant davantage sur ces Judenräte.
Hannah Arendt a décidé de se tenir à une ligne de conduite pour retranscrire le procès : constatation des faits et pas affirmation de ses opinions. Son attitude fondamentale,afin d'être aussi droite d'un point de vue éthique que juridique, c'est " faire apparaître les faits de façon froide,et oeuvrer avec passion en faveur de l'authenticité".
Elle travaille sur les faits et les problèmes d'ordre juridique qu'elle soulève sont passionnants.Elle a vraiment forcé mon admiration par l'acuité de son intelligence, son intransigeance, et l'étendue de ses connaissances.
Il s'agit certes du procès d'Eichmann mais à travers cet homme qui est responsable de ses actes c'est indéniable, mais ne comprend pas où est le mal car subjugué par l'ascension d'Hitler et constatant que tout le monde autour de lui partage les aspirations du Führer, il ne peut se représenter avoir mal agi. Au début il est contre l'extermination mais en quelques semaines il se range à côté du plus grand nombre,la majorité ne pouvant avoir tort et son idole , Hitler,non plus
À travers le personnage d' Eichmann ,
Hannah Arendt dénonce la totalité de l'effondrement moral subi non seulement par lui,et par l'Allemagne dont elle met en cause la résistance très tardive, mais même,par toute l'Europe qui n'a pas compris que les 6 millions de morts déportés n'étaient qu'un palier( pardon! pardon!) vers une extermination encore plus radicale.
Ce livre m'a extrêmement bouleversée,et ma lecture a été tronquée et faussée par le fait que je n'ai pas lu même en extrait son livre
Eichmann à Jérusalem,où elle relate le procès.
J'ai souligné tellement de passages dans ce tout petit livre,corné tellement de pages que je ne sais pas si je vais réussir à y isoler des citations qui aient du sens et vous donnent envie d'entrer dans l'analyse d'Arendt.
En tout cas,un livre pour ne pas mourir idiot.
car la Bête immonde n'est pas morte,nous rappelle l'auteur. Elle n'a pas de racines et s'étend rapidement,elle n'a pas de racines et il est difficile de la circonscrire.