« Ignorant d'où je viens, incertain où je vais. »
Alphonse de LamartineRégine Joséphine est une auteure de jeunesse dont je connaissais quelques-uns de ses albums jeunesse.
On retrouve dans ce roman des thématiques chers à l'auteure : le respect à la différence en abordant les thèmes de l'autisme, des préjugés, du regard d'autrui, et de l'intolérance.
C'est aussi un roman sur les silences et les blessures du passé non guéries.
« Les blessures ne cicatrisent pas toutes… Certaines s'incrustent dans ta chair à la manière d'un tatouage indélébile. »
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Si j'ai accepté de lire ce roman, et je remercie au passage Babelio et les éditions "La Belle étoile" pour leur envoi, ce n'est pas pour son côté feel-good, il m'arrive d'en lire mais ce genre littéraire n'est pas celui qui me plaît le plus.
Si j'ai choisi de lire ce roman, c'est pour les albums jeunesse de qualité de l'auteure dont j'apprécie la sensibilité et la poésie, et pour son choix d'ancrer son récit sur un fond historique. Car
Régine Joséphine a eu la très bonne idée de construire son récit sur le destin tragique de ces pilotes kamikazes japonais, qui par respect et bravoure, écrasaient leur avion sur les navires de la marine américaine.
De la chair à canon…
Ainsi, suivre la voie du vent est celle que suivent ces « samouraïs du ciel ». Mais il existe parfois différentes voies menant à l'honneur.
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Régine Joséphine alterne ainsi les époques et les lieux.
Le récit se déploie sur deux axes spatio-temporels différents mais le lien entre les deux histoires est évident. Un journal intime…
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Le roman débute en janvier 1945 par la mission suicide du jeune pilote japonais Anaka Kiyoshi. Toute sa pensée est tournée vers son désir d'honorer son père et son peuple, et de racheter sa faute, son indignité.
Tout au long du roman, on apprend à comprendre les motivations de ce très jeune soldat de l'air, 19 ans à peine, son idéal de gloire et de dignité, sa volonté de protéger sa famille et de laisser derrière lui une empreinte honorable.
« La mort dans l'honneur, plutôt que la fuite et la vie. »
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Puis le récit s'oriente vers Colombe, une jeune diplômée de l'Education Nationale. Elle quitte la région lyonnaise pour le village-monastère de Sainte-Croix, niché dans la solitude des montagnes.
Le choix de ce village n'est pas dû au hasard. Adoptée à l'âge de deux ans, Colombe veut lever le voile sur le décès de sa mère biologique. En revenant à l'endroit où elle a vécu, Colombe est bien décidée à comprendre les circonstances de sa mort et lever le voile sur le mystérieux carnet noir écrit en japonais, seul souvenir qui lui reste d'elle.
Ce roman est donc avant tout une quête identitaire. A l'image d'Anaka Kiyoshi qui finit par choisir son destin, l'héroïne, recherche sa voie. Ignorante de son passé, de son histoire, elle n'est pas capable de se construire un présent, encore moins un futur.
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C'est l'occasion pour l'auteure de nous parler de ce beau métier qu'est l'enseignement, enrichi par son expérience en tant que professeur des écoles.
Colombe dresse un portrait de cette profession, et témoigne du dynamisme des enseignants, de leur enthousiasme pour intéresser leurs élèves, de leur bienveillance à leur égard. Mais elle se confie aussi sur l'envers du métier, dénonçant la souffrance des enseignants au quotidien, leur isolement, le manque de reconnaissance, le manque de soutien de leur hiérarchie, l'insuffisance de moyens pour travailler dans de bonnes conditions, les phénomènes sociaux qui envahissent l'école.
C'est l'occasion aussi de nous parler du handicap et de l'inclusion. L'auteure nous en parle avec beaucoup de délicatesse et de bienveillance.
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J'ai particulièrement aimé le récit d'Anaka Kiyoshi qui nous permet d'appréhender l'influence d'une éducation culpabilisante, le poids des responsabilités et du devoir inculqué dès la plus tendre enfance, le conditionnement.
Le jeune pilote en est conscient. Son regard met en lumière l'oppression, le manque de liberté de jugement et d'expression.
« Accomplissez votre devoir et rappelez-vous que l'honneur représente plus qu'une montagne alors que la mort n'est que l'équivalent d'une plume… »
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Je choisirai la voie du vent » est un roman sympathique. L'écriture est légère et fluide, les pages se tournent facilement. L'intrigue fondée sur la guerre du Pacifique et ses pilotes japonais est plutôt originale. L'intrigue est bien maîtrisée, mais sa résolution aurait mérité plus de subtilité.