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EAN : 9782081363298
237 pages
Flammarion (06/05/2015)
4.11/5   294 notes
Résumé :


— Raconte-moi précisément ce qui s'est passé dans les convois...
— Plus tard...
Je rêve de recueillir cette histoire qui est aussi la mienne et elle s'y oppose comme une gamine butée.
— Quand plus tard ?
— Quand tu auras eu ton bébé. »
Aravni garde farouchement le silence sur son passé. Sa petite-fille, Valérie, aimerait pourtant qu'elle lui raconte son histoire, l'Arménie, Alep, Constantinople et Marseille. Dans ce... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (80) Voir plus Ajouter une critique
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Le génocide arménien, horreur du 20ème siècle dont les livres d'histoire ne parlent pas, toujours non reconnu par les turcs à ce jour ! Valérie TORANIAN, elle, a décidé d'en parler, à travers le destin d'Aravni, sa grand-mère paternelle, surnommée Nani par tous ses petits-enfants.

L'étrangère, c'est elle. Une survivante qui préfère se taire. Mais sa petite-fille aimerait pourtant qu'elle lui raconte son histoire. Elle, enfant issue d'un mariage mixte, continuellement écartelée entre ces deux origines, française et arménienne. Elle devra pourtant attendre que celle-ci, tout à la fin de sa vie, accepte d'en livrer quelques bribes ! Valérie découvrira alors l'horreur.
Car Aravni a tout vécu ou presque : la perte de tout ses proches (exceptée sa tante), la déportation, « les marches de la mort », la famine, les massacres...Et enfin la survie, envers et contre tout. Mais au prix de tant de souffrances et de sacrifices ! Seul son immense amour pour son fils lui apportera un peu de lumière et de bonheur.

Vous l'aurez compris, j'ai adoré ce roman, qui est un magnifique hommage d'une petite fille à sa grand-mère, un merveilleux portrait de femme courageuse, absolument émouvant. L'écriture de Valérie TORANIAN est poignante, tous les sentiments humains y sont décrits : la haine, la lâcheté, l'horreur, mais où l'amour restera plus fort que la haine, à travers l'héritage arménien qu'Aravni tient par-dessus tout à transmettre à ses petits-enfants, et arrière petits-enfants.
C'est également un témoignage de l'auteur sur sa propre vie, qui raisonne particulièrement en moi, issue également de parents « d'origine et de confession » différentes.

Pour conclure, ce roman raisonne comme un hommage à tous ces rescapés de génocide, quel qu'il soit, qui ont décidé au plus profond d'eux-mêmes d'être plus fort que la haine. A lire à tout pris.

Pour finir deux passages forts, qui m'ont particulièrement marqué, parmi tant d'autres qui résument à eux seuls ce splendide roman :

"Le fait que les Turcs refusent jusqu'à aujourd'hui de reconnaître le génocide des Arméniens rend fou. Ce serait comme dire aux descendants des Juifs dans une Europe où les nazis auraient gagné la guerre : il ne s'est rien passé..."

« L'entreprise d'extermination totale passe par la déshumanisation des victimes : faites-en des animaux, hagards, prêts à tout pour survivre ; ils oublieront qu'ils ont été des hommes et des femmes, ils perdront leur éducation, leurs valeurs, leur solidarité. Une fois qu'ils auront déserté l'espèce humaine, il n'y aura plus d'obstacle moral à les tuer tous….. » Ma grand-mère, drapée dans son admirable orgueil,......., refusait de devenir la bête qu'ils voulaient qu'elle devienne ».

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Amassia, juillet 1915. Aujourd'hui, l'on fête Artavar. La fête jusqu'ici préférée d'Aravni. Mais, aujourd'hui, il n'y a pas de messe, ni de prêtre. Les hommes ont tous été arrêtés il y a quelques jours. Dont le père et le mari d'Aravni. Elles apprennent qu'apparemment les Turcs les auraient même exécutés. Aujourd'hui, la jeune femme, âgée de 17 ans, accompagnée de sa mère, de sa petite soeur et de sa tante n'ont d'autre choix que de fuir ce pays. Emportant les quelques richesses qui leur restent, celles qui n'auront pas été pillées par les Turcs, elles embarquent dans le premier convoi. En chariot ou à pied, c'est un long cortège qui laisse derrière lui Amassia, une ville qui, d'ici dix jours, sera vidée de ses 13000 arméniens. Un convoi qui s'éclaircira au fil des jours, soumis aux viols, aux enlèvements d'enfants et à la maladie...
Valérie adore sa grand-mère, Aravni, alias Nani. Mais, elle en a un peu honte. Pas vraiment belle, un corps masif, une grosse poitrine, un peu bizarre. Et trop étrangère, trop différente de sa famille maternelle. Gamine, elle allait sans hésiter s'empiffrer de ses tire-bouchons et prenait du plaisir à regarder la télé, alors interdite par son père, et suivre avec Nani les feuilletons. Ne parlant que quelques mots de français, sa présence compensait à elle-seule le manque de conversation. Pourtant, Aravni en aurait des choses à raconter... le génocide, l'exil, les horreurs...

Avec beaucoup d'émotions, Valérie Toranian nous plonge à la fois dans le passé de sa grand-mère et dans ses propres souvenirs lorsqu'elle était plus jeune. Elle retrace, pas à pas, le parcours ô combien difficile d'Aravni. La fuite, la misère, les séparations, la maladie, les morts autour d'elle... et le génocide arménien que les Turcs, encore aujourd'hui, refusent de reconnaître. Aravni, une femme forte et courageuse qui se sera battue toute sa vie durant. Un portrait de femme saisissant raconté aujourd'hui par sa petite-fille qui alterne brillamment ses propres souvenirs et le destin tragique de sa grand-mère. Un portrait puissant et émouvant d'une grand-mère si attachante, parfois têtue et revêche. Un récit sensible et étonnant où l'humour n'est jamais bien loin. Pour ne pas oublier...
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Que faire face à la carapace du silence, non celle de l'oubli, mais au contraire, d'une mémoire trop vive, trop présente ? Comment pouvoir transmettre, se souvenir quand on nous interdit l'accès à notre histoire familiale, si dure et innommable soit-elle ? Comment arriver à retisser ce lien pour se réapproprier ses racines ?

Les parents pensent qu'il suffit de ne pas en parler pour que la douleur s'amenuise, pour que le coeur et l'esprit oublient et qu'on puisse enfin exister. Les enfants s'étourdissent dans des commémorations et des batailles nécessaires contre l'oubli et son travail de sape, au risque de se perdre et ne plus vivre dans cet ici-maintenant qui de toute façon, ne ferait plus sens, sans ce combat mené. Et les petits-enfants entre rien et tout, ne savent pas comment vivre avec, faire comprendre ou partager ce mal-être.

Aravni, Vram (qui se fait appeler Georges), Valérie (que l'on nomme Astrig) sont les 3 générations de l'étrangère qui, chacune à leur manière, vont devoir batailler avec cette horreur que la Turquie a de plus en plus de mal à faire passer pour une guerre civile, doublée d'une famine : le génocide arménien. Les faits historiques sont tenaces et n'ont que faire de la volonté des uns ou de la mémoire des autres. Ils ne disent, n'acquiescent ni ne nient : ils sont.

"Le fait que les Turcs refusent jusqu'à aujourd'hui de reconnaître le génocide des Arméniens rend fou. Ce serait comme dire aux descendants des Juifs dans une Europe où les nazis auraient gagné la guerre : il ne s'est rien passé..."

Aravni a eu ce destin tragique des victimes de ce génocide ; entre chance inouïe et instinct de vie, elle s'en est sortie. Valérie Toranian, nous raconte là, autant l'histoire d'Aravni, que la sienne propre. Celle d'une gamine qui s'accroche aux jupons de sa Nani et s'empiffre de pâtisseries orientales, d'une adolescente qui, contre l'indifférence et le négationnisme, veut « savoir », pouvoir brandir cette vérité tue, puis d'une future maman qui, tel un scribe, cherche à lutter contre l'oubli en recueillant la parole avant qu'elle ne s'éteigne, avec au creux du ventre, un petit bout d'homme et d'Arménie…

Il faut lire ce livre, cette danse incertaine à la recherche de la vérité, ce fil tendu à craquer de la parole désirée, entre Aravni qui ne peut dire et Valérie qui veut entendre pour consigner les faits, les inscrire dans l'histoire familiale pour pouvoir « tenir debout », génération après génération.

Entre malice et réelle souffrance – palpable – Aravni lézarde, ruse face à Astrig – entre compréhension et exaspération – hantée par l'urgence de savoir avant qu'il ne soit trop tard.

Et cet épilogue...
Lien : http://page39.eklablog.com/l..
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Aravni est Arménienne. A 15 ans, elle est obligée de fuir et de traverser les pires situations lorsqu'elle est confrontée au génocide en 1915. De sa traversée de Turquie, dans les convois, à son arrivée à Paris plusieurs années plus tard, Aravni ne dit rien. Elle préfère ne pas se rappeler en espérant que sa mémoire oubliera...
Valérie Toranian signe ici un magnifique hommage à sa grand-mère paternelle. Tendre et aimante, elle évoque la vie de cette femme forte et courageuse, tant à travers les souvenirs de son passé, que ceux de sa vie en France, au milieu de ses petits enfants. D'une écriture émouvante, parfois dure, Valérie Toranian nous touche profondément...
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Valérie Toranian rend hommage à sa grand-mère paternelle, Aravni, arménienne, arrivée en France dans les années 1920 après avoir échappé au génocide perpétré et non reconnu par les Turcs.
Valérie, petite fille, jeune fille, jeune maman, nous raconte son enfance aux côtés de sa grand-mère, de sa famille.
Très agréable à lire, avec des personnages touchants, le roman se partage entre les chapitres de l'enfance de Valérie et le récit très douloureux de la fuite de sa grand-mère devant l'horreur.
Celle-ci doit se résigner à perdre les siens, à errer sur les routes, dans les convois.
Aravni va être abritée en Syrie, à Alep puis avec son deuxième mari, ils vont entreprendre un voyage et arriver à Marseille et ensuite à Paris où elle ne sera pas au bout de ses peines.
Grâce à Aravni et à son fils Vram, ses trois petits-enfants fréquenteront des cours à l'école arménienne et ne perdront pas le lien avec leur culture paternelle.
La mère de Valérie est française, professeur de latin. Aravni va être choquée par sa belle-fille mais les deux femmes s'entraideront, se respecteront et s'estimeront beaucoup.
C'est un livre magnifique, d'une très belle écriture avec des scènes douloureuses mais aussi des passages très humoristiques lors de l'enfance et la jeunesse de Valérie. Le choc des cultures est désopilant. Valérie ressent aussi l'injustice envers ses amies juives dont le passé cruel est reconnu et pas le sien.
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critiques presse (3)
Lexpress
11 mai 2015
Tout comme ces mots de Méliné, ce roman vrai de Valérie Toranian (...) devrait résonner longtemps.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Liberation
30 avril 2015
L’ex-directrice de «Elle» publie le roman d'un riche et douloureux héritage.
Lire la critique sur le site : Liberation
LesEchos
29 avril 2015
Pour Valérie, son passé resta longtemps une « citadelle imprenable », jusqu'à ce qu'elle découvre enfin les clefs. Et nous l'offre en partage.
Lire la critique sur le site : LesEchos
Citations et extraits (120) Voir plus Ajouter une citation
À l'époque, la vérité était une bataille dans laquelle on prenait des coups. Cent ans après le génocide, elle le reste encore.
 
Ce déni d'Histoire est un nœud coulant qui empêche tout Arménien, non pas de vivre, mais de respirer normalement. Être rescapé des camps de la mort, quand on est juif, doit rendre fou pareillement, mais « on » sait de quoi on parle. Même si ceux qui l'ont vécu sont condamnés à une impossibilité de le dire, et ceux qui les écoutent à une impossibilité d'appréhender avec justesse l'ampleur de l'entreprise d'extermination, il existe une compassion consensuelle face à l'innommable et à la souffrance.
Dans mon cas personnel, je voyais rarement de la compassion, quelquefois de la curiosité, souvent de la suspicion.
Enfant, adolescente et même adulte, combien de fois je me suis retrouvée à me lancer dans de longues explications sur l'Arménie (mais c'est où ?), son histoire (vous parlez arabe ?), le génocide (mais comment ça se fait, c'était quand, combien de morts ?).
Il y a ceux qui écoutent poliment, mais qui pensent qu'on dramatise des événements, certes regrettables, mais bon, c'était la guerre, tout le monde a souffert, et dans les tranchées aussi, c'était dur.
Il y a ceux qui veulent vous confondre : « Mais si ce que tu dis est vrai, comment se fait-il qu'on n'en parle jamais, de ça, en cours d'histoire, qu'il n'y ait pas de film, pas de livres, hein ? »
Quand je tente d'expliquer que les Turcs empêchent toute tentative d'écriture de l'histoire, qu'ils sont puissants et qu'ils ont les moyens de faire pression sur des États, on me soupçonne d'être en crise de paranoïa aiguë. Les Turcs, puissants ? Les gens ne connaissent pas plus la Turquie que l'Arménie, ou plutôt autant la marche turque de Mozart que le papier d'Arménie dans les drogueries.
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— Tu l’aimais ?
Comme les enfants qui ne se lassent pas d’entendre la scène augurale de l’histoire d’amour entre leurs parents, je rêve d’un chapitre romanesque pour ma grand-mere, un épisode qui la détache du tragique. Je voudrais équilibrer les émotions de la spectatrice que je suis. Je voudrais qu’au cœur du malheur surgisse une scène d’amour kitsch et rassurante : un coucher de soleil sur le Bosphore.
— Je me suis mariée avec lui parce que Kémal arrivait et qu’il fallait partir. Partir seule pour une femme, c’etait Impossible. Il me tournait autour...
Je vois mon coucher de soleil sur le Bosphore se perdre en mer, torpillé par le pragmatisme de ma grand-mère. Je ne m’y résous pas complètement.
— Mais on dit qu’il était brillant, intelligent, que c’etait Un grand orateur...
Elle consent du bout des lèvres :
— Oui, il parlait bien...
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Je voudrais être juive parce qu'on parle du génocide des Juifs dans les livres, dans les films et dans les débats des Dossiers de l'écran sur Antenne 2, et que c'est rassurant d'être une victime reconnue. Le fait que les Turcs refusent jusqu'à aujourd'hui de reconnaître le génocide des Arméniens rend fou. Ce serait comme dire aux descendants des Juifs dans une Europe où les nazis auraient gagné la guerre : il ne s'est rien passé, c'était la guerre et ses dommages collatéraux et vous avez émigré pour aller faire fortune ailleurs. Il y a presque autant de preuves du génocide arménien que de l'holocauste juif. Elles sont dans les archives turques (dont l'accès libre est refusé aux historiens), dans les archives allemandes (en accès libre), dans les archives américaines (en accès libre également). Mais la Turquie refuse, gouvernement après gouvernement, depuis Mustafa Kémal, de reconnaître ce crime de son passé et fait pression pour empêcher les Arméniens d'en faire état.
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Le matricule à cinq chiffres, tatoué sur la peau des déportés d’Auschwitz. Je savais parfaitement de quoi il s’agissait : ma connaissance de la déportation juive était infiniment supérieure à celle des marches de la mort arméniennes. Je regardais le tatouage en silence. Je me disais que Mathilde avait de la chance. Sa grand-mère, contrairement à la mienne, avait une preuve.
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Sur les photos de famille, elle se tient raide, l'air distant, presque froid. J'ai longtemps mis cette expression sur le compte d'une timidité face à l'objectif, mais il n'en est rien. Elle pose en femme respectable. Chacun doit comprendre qu'aucun des drames de sa vie n'a eu raison de ses bonnes manières, héritage de sa mère et de l'éducation stricte donnée aux filles. Sous la chair ronde, un corset de convenances articule son corps dans une vigilance permanente.
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