AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782842711542
192 pages
La Musardine (15/04/2003)
3.81/5   60 notes
Résumé :
Publié en 1955, interdit très vite, Les Mauvais Anges traîneront pendant de longues années (trente ans !), la malédiction d'une dérision prise à l'époque par la fameuse Commission du Livre, entraînée par l'abbé Pihan, naturellement très averti, sans doute, de ces " amours particulières ".

Pourtant la première édition comportait deux textes, l'un de Max-Pol Fauchet, l'autre de Robert Margerit. L'un et l'autre célébrant le " don de poésie exceptionnel "... >Voir plus
Que lire après Les Mauvais AngesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
« La jeunesse a toujours eu le goût des gestes inutiles et des passions désespérées ».

Par où commencer ? j'ai un tropisme pour les auteurs oubliés ou inconnus. Dans le cas d'Eric Jourdan c'est délibéré. le fils adoptif de l'académicien Julien Green exécrait la notoriété médiatique et les cercles culturels. Paradoxalement, c'est sa disparition en 2015 qui a, selon le journaliste Frédéric Martel, permis la sortie du journal intégral de son père adoptif (voir aussi le bouquin « Rencontres avec Eric Jourdan » pour les plus curieux…).
Quant à cet ouvrage, écrit en 1955 et immédiatement censuré par la Commission du livre, il n'a fatalement pas contribué à la notoriété d'alors de son jeune auteur de dix-sept ans.

“ je posais la main sur son dos, à l'endroit où une mince bouche de soleil mordait la chair, car le soleil s'infiltrait par toutes les fentes des contrevents pour connaître la suite de notre histoire.” le style est minutieux, quoiqu'un peu ampoulé, empreint de poésie et de préciosité et mêle réserve et impudeur. le procédé littéraire, consistant à donner la parole à différents narrateurs est d'emblée intéressant. de cette contrainte, l'auteur peut faire naître un relief plus dense, plus précis et plus complexe et mettre le lecteur à contribution.
« c'est le propre de l'amour de faire éternellement des derniers gestes. ». L'histoire est presque prototypique, l'initiation aux plaisirs, la découverte des sens, la passion adolescente, la cousinade estivale qui prend une forme toute intime, l'histoire « fatal and fated » comme l'écrivait le poète Lord Byron.

“Les impressions fugitives dont la vie tire son feu d'artifice s'évanouissent aussitôt nées (...) fussent les jambes d'un cycliste trop vite aperçues pour qu'un regret ne vint se mêler à l'impuissance de les revoir (...) n'importe quelle scène où la beauté se livre, le propre de leur charme est leur prompte disparition. A seize ans, on en rêve ; à vingt ans, on en meurt de désir. »

« La sensualité des hommes très jeunes est très bornée. le plaisir les retient à peine. Ils sont trop préoccupés de trop de choses nouvelles, et ils continuent à jouer » écrivait Louis Aragon. L'éveil des sens, l'appel de la chair, l'épuisement vain du sujet amoureux dans la fusion avec l‘objet de son désir amène des jalousies, des tentations multiples et d'amères lucidités : “et l'ultime possession, l'idée d'entrer dans un corps ne signifiait rien que l'impuissance à être l'autre », nous naissons et mourrons seuls, l'amour, l'altérité et autrui nous apprennent rudement notre solitude. Mais l'expérience de l'amour est un formidable accélérateur d'éducation : « en huit jours, il fit de nous des hommes. »

“je me voulais libre, libre d'aimer un corps comme le mien.” Il est assez établi que ce qui motiva la censure à l'époque ne fut pas étranger au fait que les deux jeunes cousins s'appelassent Pierre et Gérard.
Pourtant la passion dévorante et dévoreuse que relate ce livre dans tout le velours de sa violence, dans toute la volupté de son innocence, se veut plus universelle que militante, bien que l'impossibilité de vivre au grand jour soit davantage liée au rejet social d'un amour de garçons qu'à la haine entre les Capulet et les Montaigu, « nous butions à chaque instant contre le réel avec l'aveuglement d'oiseaux sur une vitre.”

« Dans les désirs d'un garçon il y a l'envie de posséder aussi la beauté de l'autre. » L'auteur sacrifie, et c'est le malaise du livre, à une forme de mythologie de l'homo-érotisme, où le culte de la virilité des éphèbes, de la dialectique de l'amour et de la domination, de la violence qu'elle soit froide ou irascible, de la destruction d'une beauté irrésistible et indomptable sont omniprésents, de Mishima à Guibert, en passant par Pasolini.

Qu'en pensez-vous ?
Commenter  J’apprécie          676
Pierre et Gérard ont quinze ans, sont cousins, vivent sous le même toit, avec leurs deux pères veufs. Ils ont l'âge des premiers émois, de la découverte libidinale. Ils s'aiment, se haïssent, se blessent, s'entretuent. Eric Jourdan, son auteur, l'aurait écrit à l'âge de 16 ans. C'est impressionnant.

J'ai lu ce livre dans la journée, il n'a pas été sans me rappeller le style légèrement érotique, l'amour de la France d'avant, que l'on retrouvait déjà avec plaisir et délicatesse dans Les amitiés particulières, de Roger Peyrefitte. Les temps ont bien changé, on ne s'aimait pas au début du siècle passé comme on s'aime aujourd'hui. Si les relations hétérosexuelles étaient enlisées dans des codes de conduite lourds et ridicules, rien ne réglait la question de l'homosexualité, si ce n'est une interdiction, la maladie mentale, le péché, la bonne morale.

Pierre et Gérard s'aiment, et ce n'est pas rien. Face à un amour passionnel, qui nous dévore tout au long de la lecture -en deux actes, le premier lu par Pierre, le second par Gérard-, tout est possible. L'amour et la violence se conjuguent avec la même force, créant une relation amoureuse particulière, mais terriblement forte, puissante, ennivrante. On comprend la souffrance des amours masculins de l'époque. S'aimer à la folie, et ? Quel avenir ? S'installer dans un trois pièces dans le marais, possible aujourd'hui, pas à l'époque. le seul choix est de renier l'amour, renier sa vie, ses envies, sa sexualité, son instinct, au profit d'une vie bien rangée.

L'alternative, ultime moment d'amour, est de figer à tout jamais cette relation dans l'état ou elle se trouve. Belle, puissante, et destructrice.

Une lecture agréable pour inités, quand même. À déconseiller si vous êtes célibataire en période de remise en question, doutes, et baisse de moral.
Commenter  J’apprécie          70
Roman écrit alors que l'auteur avait seize ans et censuré lors de sa parution en 1955. Narration d'une idylle sado-maso entre deux cousins de 15 à 17 ans. Écriture classique, roman intéressant de par l'âge des narrateurs et le contexte du début des années 1950. Il m'est difficile de donner une appréciation, je n'ai pas pris de plaisir à lire ce roman.
"Les Mauvais Anges est un récit éminemment charnel, tout entier dédié à la volupté et à la magnificence de la jeunesse. Pierre et Gérard, qui prennent tour à tour la parole pour raconter leur histoire, s'abandonnent avec délectation à la sauvagerie et à la tendresse, à l'orgueil et à la soumission. Leur amour est délice et torture. Esclaves et maîtres au gré de leur plaisir, ils ne souffrent aucune compromission et préfèrent choisir la mort que subir l'usure que le temps imprime aux sentiments et aux corps."
Commenter  J’apprécie          74
Pierre et Gérard sont cousins. Ils passent un été sur les bords de la Loire, pour que Pierre puisse aider Gérard à réviser. Celui-ci a échoué à ses examens et doit donc repasser le bac en septembre. Mais, alors qu'ils passent plus de temps à se baigner et à bronzer au soleil qu'à réviser, le premier baiser est échangé. C'est le début d'une histoire d'amour aussi passionnelle que violente et dont on comprend rapidement qu'elle finira mal : leur famille et les voisins vont se dresser contre eux et ils seront prêts à aller jusqu'au bout pour rester ensemble.

Après quelques jours de réflexion, je pense finalement garder un bon souvenir de cette lecture. Les mauvais anges m'a surpris, m'a fait réagir, m'a un peu interloqué ou gêné parfois. Et c'est bien : au moins j'ai ressenti des choses. Il m'a fait réfléchir. C'est brut, c'est souvent too much pour moi, mais c'est aussi très bien écrit, avec des fulgurances magnifiques (la scène de sexe avec le voisin est un petit bijou).

Je pense sincèrement que si j'avais pu le lire adolescent, j'aurais sans doute été complètement subjugué par cette lecture. Si seulement j'en avais entendu parler avant ! Mais je me dis aussi que peut-être que si je le relisais dans quelques années, je retiendrai autre chose de cette lecture que le caractère insupportable de Pierre et Gérard, et la violence omniprésente du récit. Connaissant désormais l'histoire et les personnages, je pourrais peut-être mieux profiter de la beauté de l'écriture.
Lien : https://ledevorateur.fr/les-..
Commenter  J’apprécie          16
j'ai beaucoup aimer cette histoire d'un amour entre cousins dans un espaces clots. Un genre de je t'aime moi non plus qui fini tragiquement. Tout en finesse si bien qu'on en viens a se demandé comment ce livre à pu etre censuré aussi longtemps
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
« Qu’as-tu, me répétait-il, pourquoi ces larmes, parles-moi, je t’en supplie. » Mais je m’enfonçai dans la solitude par à-coups comme un noyé. Il eut beau supplier, se faire câlin, exiger, je restai muet. J’aimais la chaude impatience des larmes.
Au moment où il me redisait : « Qu’as-tu ? » dans un souffle, je lui jetai ma raison de souffrir : « Je t’aime, c’est tout. »
Il parut ne pas comprendre. Je savais bien qu’elle était impossible à décrire cette peine faite de trop de bonheur. L’amour est un désastre.
Pierre pouvait m’adorer, Pierre pouvait me poursuivre jusqu’au cœur du sommeil, Pierre pouvait me vouloir comme on veut un corps qu’on admire, il ne réussirait pas à me rejoindre si seulement je fermais les yeux pour songer à la nuit, au vent dans le jardin, à la mélancolie d’une promenade nocturne. Un mur de chair était entre nous, et dans ce mur l’amour se refugiait avec son cri d’oiseau blessé comme le rouge-gorge des murailles.
Commenter  J’apprécie          70
La peur était mon drame : j’avais peur de vieillir. Non pas perdre le velouté de notre peau, la fraîcheur de la jeunesse, mais peur de ce que nous allions devenir. Le monde ne m’intéressait pas : la société et toutes ses intrigues ne menaient à rien, ne signifiaient rien, en somme n’étaient que riens. Je m’évadais dans l’amour, et la mort était dans chacun de mes actes. J’étais environné par elle, une fenêtre, un tube de soporifique, un couteau me l’offraient. Ma vie était faite de morts refusées. Cela donnait le prix de mon amour. Pierre le savait sans que je lui en eusse parlé. Mes paroles l’enivraient, il me suppliait de demeurer calme, mais lorsque je l’étais, il craignait à son tour le silence. Ainsi je devais parler à Pierre d’avenir, de passion, de cette vie partagée, et il me cachait la mort et les abîmes de l’amour étaient là contre les abîmes du vide…
Commenter  J’apprécie          71
"Pourquoi m'attaches-tu? Je ne peux plus te fuir, si tu m'ouvrais les yeux, tu t'y verrais toi-même. Ton coeur contre mon coeur, sans se dire qu'on s'aime. Je veux entre tes bras mourir de trop jouir. J'ai crié, tout éclate et mon âme ravie monte dans un abîme... Il faut prendre ma vie. Tu me rends immortel quand tu crois me tuer. Viens, je suis ton désert sans oasis ni terme, je rêve de t'y perdre et j'ai pour abreuver toutes tes soifs mon sang, ma salive et mon sperme."
Commenter  J’apprécie          60
Je deviens fou. Des heures se sont passées, maintenant le soleil se lève ; l’aube et l’aurore m’ont vu couché Pierre, le serrant, la tête sur la tête, le cœur contre son cœur. Pourquoi n’as-tu rien fait pour le sauver, assassin ? L’amour a tué l’amour, qu’on le prenne et qu’on l’enferme ! Je ne voulais pas tuer, que Pierre vive et que je meure ! Comme vous m’avez tenté, vieux présages ! vos oiseaux, vos couleurs, votre miroir, vos livres en savaient plus que moi. Vous étiez sûrs de me répondre et j’entendais, mais je ne pouvais voir. Voici que s’est éloignée de mes mains la coupe d’étourdissement et voici que vous me laissez sans amour, comme si l’absolu se retirait de moi, avec la violence des fleuves en crue qui, après leur passage, ne laissent que de la boue. Oh ! vieillir ! vieux présages, m’annoncez-vous désormais une mort prochaine, dois-je espérer contre mon avenir ?

L’amoureux qui a passé la nuit près de celui qu’il aime voit venir le matin sans crainte et sans savoir que c’est un nouveau jour ; l’amoureux dont la passion est prisonnière de la nuit attend, ne peut dormir et, dès que le bas du ciel connaît un reflet plus pâle, se lève et court pour rattraper le temps perdu ; mais l’amoureux qui n’a plus que le souvenir et un seul cri pour appeler la mort et l’amour méprise les heures, méconnait la nuit, ne dort ni ne veille, n’a de hâte que de mourir. J’étais cet amoureux, mon cri c’était Pierre. Mon corps ce cri.
Commenter  J’apprécie          10
« Mon petit Pierre,
« Je suis jaloux de l’air que tu respires, j’en veux à la lumière de te toucher sous mes yeux. Je suis incapable de dire comme je t’aime et comme je te veux.
Gérard. »
[…] Son amour se révélait un amour jaloux, et pourtant j’avais tout oublié de mon passé, je ne cessais d’avoir son prénom dans la tête, les autres disparaissaient de plus en plus jusqu’à ne plus être, et j’aurai anéanti ceux que j’avais connus avant lui, si ce simple désir ne les avait déjà tués.
Commenter  J’apprécie          30

Video de Eric Jourdan (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Eric Jourdan
Aurielle Marlier, qui signe avec le mystère du domaine Catterton son premier roman jeunesse (à partir de 9 ans), a répondu à quelques questions pour celles et ceux qui n'ont pu se déplacer pour la rencontrer à la librairie Une page à écrire (Janville, 28) samedi 21 avril 2018. À 26 ans, la talentueuse Belge par ailleurs attachée de presse des Editions Jourdan a déjà remporté un franc succès auprès de ses jeunes lecteurs...
autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (178) Voir plus



Quiz Voir plus

Les Amants de la Littérature

Grâce à Shakespeare, ils sont certainement les plus célèbres, les plus appréciés et les plus ancrés dans les mémoires depuis des siècles...

Hercule Poirot & Miss Marple
Pyrame & Thisbé
Roméo & Juliette
Sherlock Holmes & John Watson

10 questions
5270 lecteurs ont répondu
Thèmes : amants , amour , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}