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EAN : 9782364687738
192 pages
Editions du sous-sol (05/04/2024)
4.57/5   38 notes
Résumé :
C’est un pays qui veut et qui ne veut pas se souvenir. Ce sont les fantômes de la dictature et les noyés d’un fleuve mensonger. C’est la recherche d’une forme de vérité et d’une mémoire fuyante dans les rues de Buenos Aires et dans les villes argentines où trente mille personnes ont disparu lors de la dernière dictature (1976-1983), et où des centaines d’enfants furent volés par les militaires pour éradiquer le “gène rouge”.
Quarante ans après le retour de la... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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24 Mars 1976,
« C'était un mercredi, l'automne argentin et la lumière dorée et les rues semées de feuilles jaunes et roussies, et dans les rues du vert du vert, uniformes armes et jeeps,… »,
Le pays se trouve sous le contrôle opérationnel de la Junte militaire,
Le lendemain, un des plus grands quotidiens titre « Tout est normal » !

Émilienne Malfatto écrivaine et photographe , dont j'ai lu et apprécié énormément les trois livres publiés, nous revient avec un nouveau récit poignant sur les pages noirs de l'Histoire de l'Argentine, celles de la terrible dictature de Videla qui sévit le pays de 1976 à 1983. Elle s'appuie sur le travail du photographe colombien Rafael Roa, une trentaine de clichés accompagnent son récit donnant corps et vie aux fantômes et cicatrices d'une des plus terribles dictatures d'Amérique latine.
Très peu de mots, quelques pages, on est déjà au coeur du sujet, celui d'une réalité atroce, inimaginable. Elle soulève le coin d'un lourd tapis sous lequel s'amoncellent quarante années de poussière . Des étudiants, des ouvriers….disparaissent du jour en lendemain, sans traces , “Los desaparecían”, pas de corps, pas de crime. À ces trente mille disparus s'y ajoutent cinq cent enfants volés, nés en captivité ou bien enlevés au berceau , et des milliers de parents qui attendent un retour improbable , miraculeux.

Tout ça, soit disant , pour endiguer le péril rouge….
Torturés à mort, emprisonnés dans des cageots ….en plein Buones Aires ,
Endormis et jetés nus d'un avion dans le fleuve,
Mort au fond de ce même fleuve ou dans des barils de sable et de ciment ou dans des tombes anonymes là-bas en Uruguay….

Même après un à peu près retour à la démocratie après 1983 et le procès de Vidal et ses acolytes en 1985 mettant Vidal et Massena en prison , la machine infernale ne se calmera pas. Huit ans de dictature signifie des tas de militaires mouillés, corps énorme, monstrueux, constitué de milliers de bourreaux, tortionnaires, assassins, officiers et subalternes à la recherche d'une amnistie pour blanchir ce passé de sang et d'horreur….Quarante ans après la plaie est toujours béante et ne se refermera pas de si tôt.'


Malfatto s'intéresse à nouveau à un pan terrible de l'Histoire d'un autre pays que la sienne. Est-ce son nom étranger « Malfatto » qui l'y destine ? Elle se pose aussi la question. J'ai lu de très nombreux livres témoignages , roman ou autres sur les dictatures d'Amérique latine, un sujet qui n'a rien de nouveau pour moi , pourtant le style de Malfatto qui alterne prose et vers libres donne un texte très fort, percutant, poignant, qui m'a encore une fois subjuguée . Quel talent !
Pour qui cela intéresse conseille deux films celui de Santiago Mitre
«  Argentina 1985 » (2023)récit du procès des bourreaux de la dictature et un film beaucoup plus ancien de 1999, “Garage Olympo” de Marco Bechis qui relate justement l'horreur décrit dans ce livre.

“d'un côté la vie normale
le quotidien le foot et les rires
(est-ce qu'on rit aussi en dictature?)
de l'autre la mort la douleur les hurlements “
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Emilienne Malfatto est grand reporter. Ainsi ses livres nous racontent-ils toujours l'actualité internationale, certains faits associés à des lieux emblématiques, que nous connaissons tous mais dont nous avons souvent seulement de vagues idées, des images toutes faites. Son talent, immense, est de nous narrer l'indicible avec poésie et humanité, très loin du style froid et distancié journalistique, mais au moyen d'une plume hypnotique, empathique, sachant allier avec subtilité, faits, étonnements personnels, révoltes en filigrane, témoignages, poésie, rêves, rapports d'autopsie, employant tour à tour douceur pour mieux expliquer puis aussitôt ton cinglant pour mieux dénoncer. Ses mots laissent KO tant ils sont beaux et terribles à la fois, porteurs de vie et de mort. Elle a ce don Emilienne Malfatto, pour mieux nous ébranler et lutter contre l'oubli et l'indifférence.

« Si tu colles ton oreille aux murs lépreux, entendras-tu résonner des cris ?
Ce serait un peu comme un coquillage, tu t'en souviens de ce jeu, on prenait le grand coquillage ramené du Pacifique par l'oncle inconnu, si tu le mets contre ton oreille tu entendras la mer, et tu approchais l'objet nacré, rosé, un peu sexuel, comme un sexe de femme béant, et tu croyais vraiment entendre l'océan, ça soufflait, c'était comme le bruit du vent sur les vagues, comme si le coquillage était plein de ces sons mille fois entendus et qui maintenant résonnaient en lui, le débordaient.
Est-ce qu'il en va de même à la Esma ?
Les murs sont-ils remplis des hurlements, des pleurs, des gémissements ? du martèlement des bottes et des coups de pied et de poing et de bâton et du bruit des viols ?
Et des halètements de douleur des accouchements ?
Et des vagissements des nouveau-nés ? »

C'est avec ce talent que l'auteur nous a raconté, dans « Que sur toi se lamente le Tigre », l'histoire tragique de cette très jeune irakienne tombée enceinte hors mariage après un premier et rapide rapport avec son futur fiancé, faute irrémédiable dans ce pays où l'honneur est plus important que la vie. Elle a reçu pour ce livre coup de poing le prix Goncourt du Premier roman en 2021.
« Les serpents viendront pour toi » avait pour objet l'analyse des crimes commis dans une région gangrénée par le trafic de drogue, la mafia, ainsi que par la présence et le contrôle paramilitaire, à savoir la Colombie.
Dans « le colonel ne dort pas », elle avait réussi la prouesse étonnante d'associer avec virtuosité la poésie à la torture, celle pratiquée en temps de guerre, toute les guerres.

Après l'Irak, la Colombie, et un pays inconnu qui peut être n'importe quel pays où il y a la guerre, Emilienne Malfatto nous convie désormais en Argentine. Dans ce dernier opus, elle s'attaque en effet à une tragédie devenue fait de société dans ce pays, celle des gens enlevés, des bébés notamment, Los desaparcidos, époque sombre et violente. de 1976 à 1983, la dictature d'extrême-droite de Videla a orchestré de façon systématique l'enlèvement, la séquestration, la torture et le rapt des bébés, lorsque les femmes étaient enceintes, par les militaires pour leur propre famille ou pour des couples stériles.
La disparition de celles et ceux qui constituaient une menace rouge et l'enlèvement de leur nourrisson pour les placer dans des familles éloignées du gène rouge.

Quarante ans après le retour de la démocratie, démocratie menacée actuellement, des personnes attendent encore tandis que d'autres se demandent qui elles sont, elles qui ont grandi dans un tissu de mensonges. L'incertitude et le flou, l'ombre de cette sombre période, les fantômes de la dictature, déambulant pour beaucoup dans le fleuve qui leur fut plaque d'acier, sont là, en tapinois, dans ce pays qui veut et ne veut pas se souvenir, où le devoir de mémoire le dispute au besoin d'amnésie.
Les photos du photographe colombien Rafael Rodriguez Roa, sépia sur fond noir, transpirent la mélancolie, les non-dits, le silence douloureux et illustrent délicatement les mots de l'auteure en donnant corps aux fantômes de la dictature.

Nous avons tous vu ces vidéos de vieilles femmes, mères et grand-mères, marcher silencieusement en brandissant la photo de leurs disparus. 30 000 disparus, 300 nouveau-nés enlevés. Il y a ces absents et il y a ces personnes qui les attendent, inlassablement.
Ce livre permet de nous faire ressentir la douleur indescriptible de ces femmes au courage incroyable qui n'ont cessé, durant des décennies, de marcher, parfois au péril de leur vie, mais ce livre permet aussi de savoir quelle était la mécanique glaçante d'enlèvement et de torture, de comprendre comment toutes les personnes impliquées qui ont participé de près ou de loin à ces enlèvements ont pu passer au travers des mailles du filet de la justice après la dictature jusqu'au procès Plan systématique en 2011 où est enfin reconnue l'existence d'une pratique systématique et généralisée de soustraction, rétention et occultation de mineurs et d'un plan général d'extermination d'une partie de la population civile. Videla est condamné alors à cinquante ans de prison.

Emilienne Malfatto ose décrire l'horreur par moment. Pour marquer les esprits, pour ne pas faire de son réquisitoire un simple recueil de mots abstraits. J'avoue que par moment, c'est insoutenable. Mais c'est la vérité, juste la terrible vérité, celle des faits atroces qui ont été perpétrés.
« Après il fallait laver le sol, peut-être leur laissait-on leur nourrisson quelques heures, quelques jours, et puis pour elles rapidement le transfert, les jeunes mères aux chairs déchirées lancées dans le ciel, le grand saut comme les autres, faites-moi disparaitre tout ça, les mères au fond du fleuve, comme des Moïse à l'envers, et les enfants sauvés des eaux du péril rouge, et les bourreaux contents. Et pour l'enfant, une nouvelle vie, vie de mensonge et d'éducation comme il faut, loin de la subversion ».

Une nouvelle fois, l'auteure, en convoquant habilement la poésie, les témoignages, les rêves, les rapports d'autopsie, ses propres sentiments, forme libre et puissante, véritable pied de nez au fantôme de la dictature, acte de résistance et de dénonciation, a fait très fort. Elle a su, de façon poignante et glaçante, exprimer l'immense respect qu'elle ressent pour ces femmes qui ont attendu durant toute leur vie, ne cessant de lutter. Elle a su extirper les victimes du fleuve dans lequel elles ont été plongées par la dictature de Vileda. Elle a su aussi pudiquement convoquer sa propre histoire familiale en quelques lignes touchantes.
Comme Emilienne Malfatto, j'aime l'idée que ce sont ces mamies qui ont lézardé la chape de plomb qui semblait ne jamais pouvoir être soulevée. Ça, les hommes de la dictature ne l'ont pas vu venir. de frêles et vieilles femmes, grâce à une obstination inébranlable, venir à bout de leur puissance et de leur impunité.
Bravo Emilienne Malfatto pour cette mémoire revisitée et ce respect si passionnément exprimé ! le journalisme, ainsi associé à l'empathie et à la poésie, est un formidable vecteur d'instruction et de sensibilisation !


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Tu peux cryer for you Argentina.
Comme ses voisins, l'Argentine a succombé à la mode sombre des juntes militaires dans les années 70. Plus retro que disco. L'uniforme à la Pinochet était très tendance avec barrettes, talonnettes, épaulettes, lunettes noires et médailles plus ou moins en chocolat. Sous prétexte de chasser le guérillero, chacun y allait de son petit coup d'état. « Bons vents » en français, Buenos Aires y est passé en 1976 et la dictature a perduré jusqu'en 1983.
Emilienne Malfatto, poétesse du réel qui s'était intéressée à un bourreau dans « le colonel ne dort pas » n'a pas retrouvé le sommeil en Argentine. Partie sur place en 2022 et 2023, non pas pour une balnéo à Ushuaïa mais pour enquêter sur la mémoire : celle des 30000 personnes disparues durant la période de dictature militaire, celle aussi de la centaine d'enfants nés dans un des 800 centres de détention et de torture du pays et confiés à des familles en panne de descendance, celle enfin de ces mères et grands-mères qui se réunissaient tous les jeudis place de Mai, en face du palais Présidentiel pour lutter contre l'oubli. Corps et mémoires évaporés 40 ans après.
Dans la fiction, les fantômes hantent les vivants pour ne pas tomber dans l'oubli. Dans sa non-fiction, Emilienne Malfatto capte de rares témoignages pour que ses vers libres ravivent le souvenir des disparus. Ecrire pour ne pas tourner la page.
Le récit, initialement un projet journalistique avorté, ne néglige pas l'histoire et évoque le procès des tortionnaires en 1985 et les grâces dont certains ont pu bénéficier par la suite. Il arpente aussi les lieux pour faire parler les murs.
Je trouve que l'écriture instinctive de cette reporter à belle plume gagne à être lue à haute voix. Sa poésie est asymétrique, la rime la déprime et ses mots ressemblent à des fragments d'idées griffonnés sur le vif. Coupez, c'est la prose. Evitez seulement de faire raisonner ses mots si votre moitié essaye de s'endormir à côté. La poésie du moment peut lui échapper.
Le livre est un bel objet, jalonné de photographies de Rafael Roa qui ne sont pas de simples illustrations mais des reflets déformés par un miroir ébréché et un écho, une résonance, s'instaure avec la prose spectrale d'Emilienne Malfatto.
Je vous laisse découvrir le sens énigmatique du titre qui a pris racine dans ma mémoire et tant pis pour l'action. Pas de panpan sur la Pampa.
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J'ai fait un nouveau voyage avec Emilienne Malfatto, en Argentine.
Et vous ?
« Que faisiez-vous en 76
et en 77
et les années qui ont suivi
huit ans c'est long » (p.31)

Comme d'habitude avec Emilienne, ce voyage est un voyage au coeur du noir, du sombre, de l'ombre, du monstre humain.
Du monstre qui avale et fait disparaître les corps, des femmes, des hommes, des enfants à tout jamais.
Par moments, dans un hoquet sinistre il recrache un bébé, un nourrisson, car ceux-là on peut les modeler, ils n'ont pas encore eu la morsure rouge.
Alors après avoir tué leurs parents, c'est le tortionnaire, l'assassin qui va les élever.
Histoire atroce de ces enfants qui ont appelé Papa l'assassin de leur véritable père.
Emilienne avec son style si personnel fait de poésie brute nous entraîne aux portes de l'Enfer et avec une grande clarté nous présente les faits, recueille les témoignages et analyse les impacts encore aujourd'hui sur la population.
Actuellement, il reste 300 enfants enlevés par leurs appropriateurs et jamais identifiés, donc qui vivent probablement sans avoir la moindre idée de qui ils sont véritablement.
Le récit est illustré de photos poignantes et troublantes de Rafael Roa.
Des récits de femmes douloureux, des mères, grands-mères à la recherche toute leur vie des leurs enfants et petits-enfants.

« Et quelque part
une femme teint ses cheveux de noir
pour garder le même visage
pour que le frère disparu puisse la reconnaître
dans la foule
si un jour il revient »
(p.12)

Ces femmes, celles de la place de Mai s'incarnent sous la plume d'Emilienne Malfatto, je n'oublierai pas l'histoire de la tante Susie qui a scruté toute sa vie les genoux des petites filles à la recherche d'un grain de beauté sur le genou gauche, qui lui aurait enfin permis d'identifier sa petite-fille Victoria.

« le disparu n'est pas là mais il prend toute la place, c'est comme une ombre immense qui envahit tout, quand tu te lèves quand tu manges quand tu travailles quand tu te couches et même parfois dans tes rêves il est là. Il est plus présent que jamais, m'a dit un jour une de ces femmes au foulard blanc de la place de Mai, une grand-mère, une mère, une de ces femmes qui n'ont que des récits terribles à raconter, récit-épine plaie béante, le cri du loup est le hurlement. »(p.31)

Avec son habituelle économie de mots, Emilienne Malfatto nous livre un récit court et percutant, mêlé d'ombres et de quelques flaques de lumière.

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Un choc . Cette lecture est un choc , de par son fond et de par sa forme .
Le fond ?
L'auteure revient sur la dictature en Argentine de 1976 à 1982 et particulièrement sur l'élimination des "rouges" et le vol de leurs bébés .
Le sujet est déjà poignant, mais la forme du récit lui donne encore plus de puissance . Des chapitres courts, entre récit et poésie, agrémentés de magnifiques photos qui saisissent admirablement l'âme , d'un être ou d'un lieu.
Tout est bien ici . Il y a une accroche récurrente autour de Victoria , bébé volée, qui est devenue Marie Sol, une fois appropriée par un couple de militaires. C'est d'une puissance absolue.
'Victoria, qui est encore Marie Sol' ou
"Pour que Marie Sol
tout doucement
devienne Victoria
redevienne Victoria"

Au delà du texte , sublime donc, il y a l'histoire , sombre au possible , de cette Argentine aux mains de la "panthère rose", il y a ces mères et grands mères à qui on a dit de circuler et qui circulent encore chaque semaine 45 ans plus tard sur la place de Mai.

Il y a sans doute un peu d'histoire personnelle derrière ce vol d'identité, dont ont pâti au moins 500 enfants, pour cette auteure dont la famille a fui le bruit des bottes en Italie.
Enfin , il y a la peur avec l'arrivée au pouvoir argentin d'un descendant du pire.

Je finis par quelques lignes , presque au hasard

Aujourd'hui, elle adore se présenter, bonjour, je suis Victoria,et dans ces mots banals il y a des années de douleur de lutte et de résilience, comme renaitre à vingt ans, trente ans ou quarante ans, comme un jeu de construction qu'il faudrait entièrement refaire, avec les mêmes pièces, tu démontes et tu remontes, ce sont les mêmes matériaux mais agencés différemment. Et il ne faut pas se briser dans l'entreprise.

Une vraie expérience de lecture , avec qui plus est un très bel objet entre les mains.
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critiques presse (3)
Bibliobs
24 juillet 2024
L'écrivaine et journaliste livre un texte crépusculaire sur les victimes de la dictature militaire.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LaLibreBelgique
17 mai 2024
Dans “L’absence est une femme aux cheveux noirs”, Emilienne Malfatto et Rafael Roa ravivent les stigmates du passé au contact d’un présent terrible.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LeFigaro
12 avril 2024
Il se dégage de cette histoire terrible, qui aurait pu n'être qu'une enquête politique, une poésie où se reflète magnifiquement le soleil noir de la mélancolie.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
C'est un pays qui ne veut pas se souvenir
Une ville de mensonge
Buenos Aires aux longues avenues et aux relents
humides
où l'espagnol a l'accent italien
où le fleuve ressemble à la mer
où on prétend avoir oublié
C'est un pays étrange où il manque des gens
c'est comme ça
comment le dire autrement
il en manque quelques milliers
on les a emmenés et ils ne sont jamais revenus

Et quelque part
une femme teint ses cheveux de noir
pour garder le même visage
pour que le frère disparu puisse la reconnaitre
dans la foule
si un jour il revient

et ici dans la grande ville de la furie sur les vitres des bus
les affiches du recensement
comment compte-t-on ceux qui manquent
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Et dans les rues de Buenos Aires où pulsaient les voix de
Cerati et de Mercedes Sosa il y avait la tante Susie
qui observait les jambes des petites filles
parce qu'elle savait que Victoria
qui était encore Maria Sol à l'époque
avait un grain de beauté sur le genou de gauche
alors la tante Susie scrutait les genoux et cherchait
le grain de beauté
pendant des années
tu imagines
ca fait combien de genoux
et quand la mode changea et que les jupes
s'allongèrent
Susie alla dans les piscines de la ville
pour continuer à scruter le genou gauche
de toutes les petites filles brunes qui pouvaient être
Victoria
et ainsi pendant des années
(p.134)
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ça sonne mieux en espagnol
dictadura
tu entends mieux le bruit des bottes
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Imagine des années dans la peur et l'obscurité, la torture qui rythme les journées, quelle phrase affreuse, elle ne devrait pas exister mais c'est comme ça, elle existe.
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C'est comme si tout le pays était un cimetière et qu'on
marchait en permanence sur des os
où ai-je lu cette phrase
(p.45)
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Vidéo de Émilienne Malfatto
VLEEL 217 Rencontre littéraire avec Emilienne Malfatto, Le colonel ne dort pas, Éditions du Sous-Sol
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