Toucher la terre et accepter son silence équivaut à être apaisé par la force, à retrouver son centre, à percevoir le caractère sacré de toute vie. C'est savoir que l'on fait partie d'un tout, d'un environnement global qui se définit par toutes ses composantes et non par l'absence de l'une d'elle.
Bien entendu, les émigrants ne pensaient probablement pas avoir altéré en quoi que ce soit le bien-être des Indiens. D'un autre côté, après que des centaines de milliers de bisons (et peut-être même des millions) eurent commencé à éviter la région de la piste ; après que la Shell River elle-même eut été polluée par les déchets, les carcasses d'animaux, les excréments et l'urine des centaines de têtes de bétail des émigrants ; après que les tombes eurent commencé à grêler la terre des deux côtés de la piste ; après que des centaines et des milliers d'articles ménagers et d'objets personnels de toutes formes et de toutes tailles eurent été jetés au hasard et laissés pourrir sur place, les tribus comprirent qu'elles étaient confrontées à une menace qui mettait en péril non seulement leur sécurité et leur bien-être immédiats, mais aussi leur avenir à long terme.
Peut-être le fait que l'on ait investi une certaine somme dans l'extermination des loups de Yellowstone est-il, pour certains, une raison suffisante pour ne pas les réintroduire ; un raisonnement qui permettrait d'éviter de se demander si leur extermination ne pose pas le problème de la suprême arrogance de l'homme au sujet de la place qu'il occupe dans le grand ordre des choses. En effet, ce type d'investissement devrait être considéré pour ce qu'il n'est que trop souvent : une réponse rapide, commode et superficielle, témoignant d'une philosophie dépourvue de pénétration, d'intelligence et de moralité. Pire encore : ce genre d'octroi de fonds rapide et magnanime vient trop souvent en sanctifier le motif, même si celui-ci est ridicule, politiquement intéressé, brutal ou inefficace.
Les Européens et les Euro-Américains du XIXe siècle avaient tendance à regarder les différences avec crainte et avec méfiance, à les considérer comme des ennemies ou comme des épreuves, toutes choses qui étaient généralement tenues pour des entraves à la civilisation. […] Le terme différent voulant dire alors « inférieur » pour les Américains. Considérer un groupe ou des groupes d'individus comme « inférieur(s) » ou « pas aussi bien que » soi-même, ou la race ou la société dont on fait partie, équivaut à le(s) déshumaniser.
La parenté entre le loup et les premiers peuples de l'île de la Tortue (qu'on appelle aujourd'hui l'Amérique du Nord) remonte à des temps très anciens. Elle s'est formée il y a des millénaires, bien longtemps avant que les bipèdes aient appris l'arrogance.
History Book Review: The Journey of Crazy Horse: A Lakota History by Joseph M. Marshall