Mélange tristement poétique de nostalgie et de souvenirs de passé et de présent,
Les jours blancs c'est l'écriture à un être cher disparu, c'est le rappel des moments passés, c'est le dur retour à la réalité. Cette réalité du présent ineffable et irréversible. Cette réalité qui nous fait prendre conscience que plus rien ne sera jamais pareil. L'odeur de la vie prend un tout autre sens, remplie de tristesse et d'amertume, de manque et de souvenirs inatteignables. Quand l'être perdu a emporté avec lui une partie de nous-mêmes.
Voici le récit d'
Hélène Pradas-Billaud, ou plutôt, la lettre que celle-ci écrit à son frère, reporter, disparu dix ans plus tôt en Afghanistan dans une explosion. Elle lui raconte cette vie après «sa» mort, cet «après lui». Tel un pont entre deux mondes, le premier disparu et le suivant en construction, cette lettre est une sorte de transition. Elle s'adresse à son frère disparu, un dernier au revoir mais pas un adieu. Se remémore des souvenirs d'enfance, d'adolescence et de jeune adulte mais des souvenirs souvent guillotinés par cette explosion. Cette explosion qui l'a emporté sur le coup, son frère «presque» jumeau. Cette explosion qui démaquille la vie et la montre telle qu'elle est: spontanée, douloureuse, imprévisible. On réalise que chaque seconde est à vivre à 1000 à l'heure sans en perdre une miette et surtout, qu'il est important de profiter des gens que l'on aime tant que l'on en a encore l'occasion surtout avant l'explosion. La vie peut s'arrêter à tout moment.
Comment survivre à ces «jours blancs», éviter les regrets, ne pas être noyé par les souvenirs, apprendre à vivre sans l'autre? «L'après» est le moment le plus cruel pour celui qui reste. L'écriture, cette lettre, voici le baume apaisant d'
Hélène Pradas-Billaud. Ce baume qui va lui permettre de panser cette blessure ouverte depuis maintenant dix ans, à cause de l'explosion. Peut-être le temps aide-t-il lui aussi à apaiser le manque. Mais rien ne peut effacer la cicatrice, remplacer cette partie de nous-mêmes devenue un membre fantôme. On le sent encore mais il n'est plus là.
Par cette lettre,
Hélène Pradas-Billaud nous fait pénétrer l'intimité de ses sentiments, le secret de ses souvenirs. Une écriture mélancolique et poétique accompagne son récit au cours duquel on peut parfois se sentir gêné comme si on lisait la lettre d'un autre. A la fois étranger et proche de ses mots, car qui n'a jamais connu la perte d'un être cher ou qui ne la connaîtra pas? le lecteur écoute les paroles de l'auteure qui glissent dans son esprit à la façon délicate et fragile d'un petit bateau en papier sur une rivière calme et limpide. Image enfantine d'une lettre dont les mots ne demandent qu'à grandir, passer à autre chose. Mais sans oublier.
Je remercie grandement Babélio et les éditions Chèvre-feuille étoilée qui m'ont fait découvrir cette auteure. Véritable bijoux d'écriture,
Les jours blancs est un bel exemple de sagesse face à la perte douloureuse d'un être cher...