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EAN : 9782889441020
157 pages
Slatkine et Cie (31/10/2018)
4.09/5   45 notes
Résumé :
« Je n’étais pas du matin mais, dans la rue, j’ai pris l’habitude de me lever aux aurores. Ça m’évite de croiser les gamins qui partent à l’école. Je ne veux pas qu’ils me voient. Je ne veux pas me voir dans leurs yeux. »

Après trois hivers passés dans la rue, avec l'aide de Éloi Audoin-Rouzeau, Christian Page, 46 ans, raconte le quotidien d’un SDF. En écrivant le roman de sa vie, il décrit la langueur des jours et le temps qui s’accélère, le regard d... >Voir plus
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Monsieur Page,

Comme d'habitude lors des opérations « Masse critique » je commence par consulter la liste des livres proposés mais cette fois, je me suis arrêté dès la lettre B sans aucune envie d'aller voir plus bas. « Belleville au coeur », c'était celui là et pas un autre. « Mon » 11e qui me manque toujours autant malgré l'océan qui berce aujourd'hui mon quotidien, ce Paris populaire loin des Elysées et de leurs chants, votre titre ne me laissait pas d'autre choix que de le demander.
J'ai quand même été voir de quoi il retournait et le sujet n'a fait que rendre votre livre encore plus nécessaire dans ma petite bibliothèque.
Premier uppercut, ce constat d'Eloi, lui qui vous a accompagné pendant l'écriture de votre livre, un soir de partage du froid d'un bout de trottoir, du confort d'un carton, d'une couverture, d'un duvet. Un soir comme tous les soirs où l'amnésie du monde semble faire de vous un passager clandestin de la vie. Un soir comme tous les soirs où quelques volutes de fumée aident à expulser une rage qui pourrait naître du trop plein de regards mêlant gêne, dégout, pitié, dédain et autres réjouissances du genre...
« Je me souviens de leurs regards. Souvent furtifs, tous différents. Jamais je ne me suis senti tant observé et, étrangement, aussi invisible ».

Vous ne condamnez pas, vous ne jugez pas le passant qui passe, celui qui tourne la tête. Vous savez que la plupart du temps ce n'est dû qu'à la peur. Celle d'être mis face à l'éventualité d'un futur qui peut venir frapper à la porte de n'importe qui. Vous le savez mieux que quiconque, vous qui avez servi de grands crus aux stars, et vous le rappelez très justement.
J'admire le ton que vous avez donné à votre livre, les chemins que vous lui avez fait prendre. Plutôt que la rage contre un système, plutôt que la haine contre la société vous avez fait ressortir du beau à travers des amitiés fortes, des moments de solidarité dans un « milieu » où contrairement à ce que je voulais croire elle n'existe pas toujours pour ne pas dire rarement. Malgré la peine du quotidien, vous êtes là, debout. Quelques béquilles venues d'herboristeries artisanales ou de distilleries vous ont peut être aidées à tenir, et alors ? Vous êtes, avec certains de vos amis, debout quand tant de bien pensants courbent l'échine et vont jusqu'à ramper pour un peu plus de superflu, pour un peu plus de pouvoir, pour un peu plus d'inutile quand tant n'ont même pas le minimum.
Un brin désabusé, on le serait à moins, mais pas haineux. Et pourtant, comment pouvons nous nous résigner à vivre dans une société qui accepte que des gens dorment dehors. Je vous ai entendu dire à Griveaux de bouger son cul lui et les politichiens de tous poils mais bon… là encore vous êtes bien placé pour savoir, en tant qu'ancien activiste du DAL du temps de la rue du Dragon, que le politicien est lent en actes dans certains domaines.
Des trois catégories de gens que vous citez, je me classe dans la masse des timides, malheureusement. Ascendant samaritain en cas d'urgence mais timide quand même. J'espère que des babélioteurs comprendront après avoir lu votre livre.
La gorge se serre parfois à la lecture même si vous ne faites rien pour ça. Vous ne nous servez pas une longue plainte, juste un quotidien avec ses petits bonheurs et ses angoisses.
Parmi ces petits bonheurs, vous m'avez appris l'existence des « cafés suspendus ». Je vais aller fouiller sur le net voir si ici à Lorient, certains bars ont le petit sticker. Et puis ces gens qui aident pour une nuit, pour une soupe, ce sont des sourires. Sourire que j'ai eu aussi au cours des pages qui parlent des missions. J'avoue que j'aime bien l'anti clérical ( à ne pas confondre avec ceux qui croient à quelque chose et contre qui je n'ai rien) mais je sais reconnaitre quand l'acte se joint à la parole, même si vous êtes obligés d'écouter le prêche du bon samaritain de service.
Ces trois ans de vie que vous m'avez fait partager je ne les souhaite à personne contrairement aux quelques heures de lecture que vous m'avez offerte.
J'en profite pour remercier aussi Babélio et votre éditeur Slatkine & Cie.
Merci monsieur Page et espérons qu'un jour la planète sera une belle ville au coeur sans limite.
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Ce que j'ai ressenti:

***Quitter une vie…
Christian Page a perdu son quotidien confortable, sa petite famille, et se retrouve à la rue… Comme ça, un peu par hasard, un peu par inaction, anéanti par le tour du destin venu le foudroyer… Avec Belleville au coeur, il nous confie ses journées grises…Il est difficile de quitter cette histoire de vie, de rester insensible à la galère d'un homme, de s'apercevoir qu'un tel dérapage peut survenir à tout moment…SDF, vivre dans les rues de Paris, survivre chaque heure de chaque jour, il nous sensibilise sur les indifférences et les stigmatisations de la société.

« Dans la rue, on n'a pas droit à l'erreur, on tombe pour un rien. »

***Quitter la liberté…
« Ma liberté, je vous la laisse…« …Jour après jour, il lutte pour sa vie, tout en tenant à rester un homme digne, avec le peu de moyens qui lui reste, un sac à dos comme compagnon de route. Il se raconte, parle des quotidiens difficiles et des réalités de cette vie de cauchemar, avec quelques fois, des jours chanceux et d'autres, désastreux. La rue, c'est de l'entraide autant qu'un danger permanent…Des gestes simples comme se laver ou dormir, devient une épopée journalière et rythme ses vies de misères…

« Cette nuit-là, il a erré comme un fantôme jusqu'à l'épuisement. »

***Laisser une fleur…
La lecture a toujours été la bouée de sauvetage de Christian Page, alors déposer des mots d'espoir dans ce témoignage était comme, une fleur qui pousserai au milieu du béton…Parce qu'il en reste encore, de ces personnes qui vivent sur les pavés, des inconnus qui se perdent dans les rues, des corps que l'on retrouvent, sans vie, au détour d'une intersection…Ce Belleville au coeur est un joli cri du coeur, pour que tous les autres ne soient plus invisibles…J'ai été très touchée par cette lecture.

« La justice ne vous protège pas, nous, les misérables. Elle nous attaque, elle nous traque, elle nous enterre. »



Ma note Plaisir de Lecture 9/10
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Vivre dans la rue...
Christian Page, comme dans un journal, nous retrace son parcours avec beaucoup de sincérité, d'humanité sans jamais tomber dans le pathos. du jour au lendemain, n'être plus rien, presque plus un humain. Un livre qui démontre la pauvreté, la précarité, l'insécurité, de réels problèmes de société. Il y a ceux qui n'osent pas, ceux qui font semblant de ne pas voir et ceux qui aident. (Les bons samaritains comme il les appelle). N'est-elle pas la population la plus transparente au monde? Authentique et touchant!

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- On ne sera plus là ce soir.

Une phrase et la vie de Christian Page, 46 ans, va basculer.
Trois petits mots sur un bout de papier, dix ans de vie commune qui explose.
Puis le trou noir ... réveil 1 an plus tard, mais trop tard ..... Huissiers ...... LA RUE
On est le 17 avril 2015.

Trois hivers passés dans la rue ; Christian Page raconte le quotidien d'un SDF. Il décrit la langueur des jours, le temps qui s'accélère, la violence, la pitié, les trucs pour survivre et surtout le regard des autres.

C'est poignant, c'est révoltant, c'est dur.

Combien en a t-on croisé de ces femmes et ces hommes, en ville, sans "jamais les voir" !

Très beau livre qu'il a dédié en hommage à ces milliers d'êtres humains en marge de la Société. (lui s'en est sorti).

L'hiver est là.

Chaque jour, en France, 1 SDF meurt dans la rue.
(même en été)

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Christian Page était sommelier dans un restaurant des quartiers chics parisiens. Tout bascule lorsqu'il rentre du travail un soir d'avril 2015 et découvre que sa femme est partie avec leur fils. C'est alors que commence une longue descente aux enfers qui se terminera par une saisie d'huissiers, il ne lui restera plus rien...Pour seule maison, son sac à dos.
Christian va alors connaître ce monde de la rue où les règles et les codes sont bien spécifiques. Un monde dans lequel on vieillit 2 fois plus vite, où certains tombent dans la folie, la maladie, l'alcoolisme, la drogue, où la violence est reine. Un monde constitué de prostituées, de migrants, de punks, de « clochards »….ces catégories qui ne se mélangent pas, comme pour mieux se protéger. Un microcosme dans lequel se fréquentent des hommes de toutes origines, de tous milieux sociaux. Chacun a son histoire. Ses raisons d'avoir atterri sur le trottoir. Personne ne se juge, le passé est le passé, le présent c'est la galère.

Son quartier c'est Belleville. Et plus précisément la place Sainte-Marthe, son QG, à proximité de la Mission protestante qui lui permet quelques heures par jour de pouvoir manger au chaud et d'avoir la bienveillance de bénévoles, ces « Samaritains », ces « Saints ». Ses camarades de rue sont Nassim, un ancien professeur de français tombé dans l'alcoolisme, et « Monsieur le Maire », un vieux Guinéen portugais.
Son quotidien est le même : survivre. Car dans la rue tout devient plus compliqué : trouver un endroit où dormir sans se faire dépouiller, agresser, un endroit abrité des intempéries et où il pourra installer ses cartons et son couchage à même le sol, quand il n'y a pas de picots ou de galets... La galère de la toilette : 2 heures de files d'attente pour espérer se doucher avec ses chaussettes à cause du risque de tétanos. Manger restera finalement l'un des points les moins périlleux car comme il le dit : « Dans la rue, à Paris, la nourriture n'est jamais un problème, on peut faire dix repas par jour, si on veut. […] Celui qui écrit qu'il a faim sur son petit carton est un menteur. Ou le type le moins démerdard de la planète. C'est triste à dire mais c'est la vérité. ». Et ce sac…cet énorme sac…sa maison…ce fardeau qui l'empêche de bouger et de se déplacer comme il le voudrait.

Dans ce livre écrit avec l'aide d'Eloi Audoin-Rouzeau, il y raconte son quotidien par des anecdotes. Comme le jour où il a été réveillé au petit matin par les jets d'eau des agents municipaux de la mairie de Paris, trempant toutes ses affaires personnelles. Un fait qui arrivera jusqu'aux oreilles de la Maire, grâce à Twitter. Car Christian est ultra connecté, il possède un téléphone portable qui lui permet de suivre l'actualité et de raconter sa vie de « Clodo le plus populaire de Belleville ».
Une anecdote m'a particulièrement bouleversée, celle d'un soir d'hiver, en plein « Plan grand froid » : Christian s'apprêtait à dormir dehors faute de place en accueil d'urgence. Mais un voisin, voyant sa détresse, lui a payé une chambre d'hôtel. Cette générosité lui a alors permis de survivre cette nuit-là.

L'histoire de Christian Page, c'est l'envers du décor à Paris. C'est la description de ce monde pourtant si visible mais que chacun tente d'ignorer. Cette misère qui se trouve sous nos yeux. Un journal de rue, véritable hymne à la solidarité. Des faits durs mais toujours racontés avec humour, comme pour éviter toute pitié, dédramatiser et alléger ses propos.
J'ai refermé ce livre émue, mais surtout honteuse de me plaindre de broutilles lorsqu'on sait ce que vivent ces hommes et ces femmes dans la rue. On relativise alors et on se sent tellement impuissant face à toutes ces vies qui tombent chaque jour de plus en plus dans la déchéance. Jusqu'à mourir pour certains à même le sol, dans le plus triste anonymat…
Ce livre c'est un véritable coup de poing, un témoignage fort et bouleversant qui met en lumière ces hommes invisibles et pourtant si nombreux.
Lien : https://aurelivres57.wordpre..
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Lundi dernier, quand le dernier rapport du Collectif des Morts* a été publié, la presse titrait sur le prochain débat à l’Assemblée nationale : chocolatine ou pain au chocolat ?
Faut croire que le sujet est plus brûlant que les huit enfants qui sont morts dans la rue cette année.
Voilà, voilà. Dans les prochaines semaines, on va payer un tas d’attachés parlementaires, de secrétaires, de rapporteurs, pour discuter de l’appellation d’une viennoiserie. Ca me rappelle le débat sur le nom des nouvelles régions : tous ces cons qui s’inquiétaient de devoir bientôt cohabiter avec des étrangers qui diraient « poche » au lieu de « sac en plastique ». Le repli identitaire a été déclenché comme un incendie en France et plus aucun des pyromanes, intellos ou politicards, ne sait comment l’éteindre. L’’étau va continuer à se resserrer. Un jour, on sera allé tellement loin que la rue de Belleville va s’entretuer avec la place Sainte-Marthe, sous prétexte qu’on n’est pas du même pâté de maison.
Moi, j’aurais préféré que l’Assemblée nous rassemble et débatte sur ces huit enfants qui ne mangeront plus ni chocolatines, ni pains au chocolat.

*Le Collectif Les Morts de la rue est une association loi de 1901 créée en 2002. Il mène des actions liées aux décès de personnes vivant ou ayant vécu dans la rue.
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Elle m'a dit :" C'est pas normal qu'il y ait des Français dans la rue!" Je lui ai répondu que j'étais bien d'accord avec elle, mais que je n'étais pas exactement français*. Elle a pas trop compris ce que je voulais dire et elle est partie en marmonnant avec ses sacs à provisions. Je sais que beaucoup de gens pensent la même chose, c'est l'époque qui veut ça. Le repli devient roi, comme dirait mon Nassim.
(...)
Il y a des choses qu'on ne devrait pas dire ici. Ici à Belleville, parce qu'on reste un bastion dressé contre la connerie humaine. On n'est pas n'importe où. On a été le premier quartier à offrir des logements vacants aux migrants espagnols qui fuyaient la guerre civile. Et pendant la commune, on est le dernier quartier à avoir tenu les barricades contre les Versaillais.
Ici, on croit à l'accueil, au brassage parce que tous les migrants du monde sont passés par là, Polonais, Arméniens, Juifs, Tziganes, Arabes, Chinois. "On est ensemble", comme disent les Maliens. Même si ça ne se voit pas toujours et si on y croit plus vraiment, au fond ça reste vrai: on est tous dans le même bateau. Et quand ça se voit, eh bien, c'est beau à voir. Et ça s'entend aussi, et c'est beau à entendre. Dans notre tour de Babel, ça parle wolof et verlan, arabe et titi, et moi, je veux que ça dure.

* Christian Page est Suisse.
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Le rituel est toujours le même. Je déplie mon matelas maison sur les galets normands, matériel primitif anti SDF des années 1990. Rien à voir avec ces belles sculptures en cerceaux métalliques conçus par les industriels inventifs des années 2000 ou ces très récents pieux aiguisés qu’on commence à voir un peu partout, bien plus coupants que les piques des grilles des Buttes-Chaumont, où l’idée me prend parfois d’aller dormir au vert. Ce ne sont que des galets coulés dans un lit de béton. Vous croyiez que c’était décoratif ? Non, c’est pour nous.
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Contre le découragement, la tristesse, le rire fut une arme d'une redoutable efficacité. Un cri pour la vie.
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L'attention minuscule, les mots bons, les mots doux : ça nous manque plus que tout le reste. C'est ce qui nous réchauffe le plus, très loin devant la douche, le lit et la soupe.
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Chronique du livre "Belleville au coeur" (Christian Page, Eloi Audoin-Rouzeau)
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