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EAN : 9782714307682
319 pages
José Corti (10/02/2002)
4.33/5   3 notes
Résumé :
« Il propulse l’œil hors de l’orbite et le voit voyant le monde : c’est qu’il traverse la matière impénétrable des yeux et de tout l’espace, est au visible ; il voit sans fin jusqu’à se voir.
Et il écrit les yeux comme il substitue le visible au toucher ; la main de la nuit se rétracte dans le bras jusqu’à disparaître : elle pense et il pousse alors en elle le visible pour que les signes soient amoncellement d’yeux : il fait doublement exister l’intouc... >Voir plus
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Pour voir, il faudrait que tu élèves des échelles tout autour de ce que je vois, que tu élèves des échelles à toutes les distances avec des barreaux à toutes les hauteurs, puis que nous empruntions chaque échelle et que l’homme monte sur chaque barreau.
Car nous voyons mais nous ne voyons que par un seul endroit de notre corps. Nos yeux se sont ouverts seulement sous notre front.
Je ne vois qu’à l’endroit de mes yeux.
Si tu pouvais voir de partout sur ton corps, si des yeux s’étaient ouverts partout, à toutes les hauteurs, des pieds à la tête, les hommes verraient partout à la fois, les femmes verraient le monde de partout à la fois.
Pour voir, il faudrait que tu suives des yeux ce que je vois et que tu tournes tout autour en reculant d’un pas à chaque tour, ainsi jusqu’au plus loin, jusqu’à ce que tu ne voies plus ce que nous voyons. Puis que tu continues à suivre des yeux ce que je vois et que tu continues à tourner tout autour de ce que l’homme voit en montant d’un pas à chaque tour, ainsi jusqu’au plus haut, jusqu’à ce que tu ne voies plus ce que la femme voit. Puis que tu continues encore à suivre des yeux ce que je vois et que tu tournes tout autour de ce que nous voyons en descendant d’un pas à chaque tour, ainsi jusqu’au plus bas, jusqu’à ce que tu ne voies plus ce que l’homme, la femme et les enfants voient car voir c’est aller jusqu’à ne plus voir, c’est ouvrir les yeux jusqu’à pouvoir les fermer. Voir, c’est aller jusqu’à faire disparaître l’image vue. Voir, c’est aller jusqu’où nous ne voyons plus, c’est aller partout, si loin et si près de ce que vous voyez que ce que vous voyez disparaît.
Voir, c’est comme s’être vu soi-même de partout : du dessus, du dessous, de tous les côtés, de tous les angles, à toutes les distances ; c’est avoir fait le tour complet de son corps entier jusqu’à ne plus voir que le bout de son nez, jusqu’à avoir été si loin et si près de soi que l’on ne se voie plus jamais en entier.
Voir, c’est comme s’être vu soi-même au plus près et au plus loin jusqu’à ne plus se voir soi-même qu’à travers les autres yeux qui nous voient. Voir, c’est aller du plus près au plus loin de ce que nous voyons jusqu’à ne plus voir ce que l’homme voit, jusqu’à voir ce que la femme ne voyait pas.
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Veiller l’autre côté

Le jour les hommes et les femmes ont les yeux levés et les bras baissés de l’autre côté, et les bras levés et les yeux baissés de ce côté. Comme la nuit les femmes et les hommes ont les yeux baissés et les bras levés de l’autre côté, et les bras baissés et les yeux levés de ce côté.

La terre est une boule sans cesse noire et blanche, sans cesse blanche et noire. La terre a deux côtés : un côté nuit quand l’autre est jour, un côté jour quand l’autre est nuit. La terre est une boule où il fait sans cesse jour et nuit, où il fait sans cesse jour quelque part, sans cesse nuit autre part.

La terre a deux côtés avec des hommes qui ferment les yeux d’un côté quand les femmes les ouvrent de l’autre côté.

Il fait nuit de ce côté, et tous les hommes ont fermé les yeux. Il fait jour de l’autre côté et toutes les femmes ont ouvert les yeux. Il fait nuit de ce côté mais sur tous les hommes de ce côté veillent les femmes de l’autre côté où il fait jour. Il fait jour de l’autre côté où il fait jour veillent tous les hommes de ce côté où il fait nuit.

Il fait nuit de ce côté et, sur nous, veille l’autre côté. Il fait jour de ce côté et nous veillons de ce côté.

Le jour, j’ai les yeux ouverts et je veille l’autre côté plongé dans la nuit. La nuit, j’ai les yeux fermés et tous les hommes et toutes femmes me veillent de l’autre côté.

Toutes les femmes et tous les hommes se lèvent de l’autre côté pour que nous puissions tous nous coucher de ce côté. Nous nous levons tous de ce côté pour que toutes les femmes et tous les hommes puissent se coucher de l’autre côté.

Comme si le corps de l’homme et celui de la femme ne s’étaient ouverts qu’en deux endroits : sous le front pour renaître dans l’espace, et entre les jambes pour renaître dans le temps.
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Nous ne voyons pas.
Vous voyez mais ce que vous voyez a une infinité d’angles de vue et chacun d’eux vous donne une vision différente de ce que vous voyez.
Tu ne vois pas.
Je pourrais dire que j’ai vu si j’étais non seulement arrivé à marcher tout autour de ce que je vois mais aussi à voler au-dessus, à ramper au-dessous : et encore faudrait-il que l’homme aille bien plus loin, que la femme entre à l’intérieur de tout ce que les enfants voient pour avoir vu.
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Fermer les yeux c’est s’approcher par le corps et c’est s’éloigner par les yeux. Ouvrir les yeux c’est s’éloigner par le corps et s’approcher par les yeux. Comme si, si je montais très haut au-dessus de la terre, et que je regardais les hommes et les femmes, mes yeux seraient à la fois fermés par l’éloignement de mes yeux et ouverts par l’éloignement de mon corps. Comme si sur la terre j’avais sans cesse les yeux fermés pour l’approche de mon corps et sans cesse les yeux ouverts par l’approche de mes yeux. Comme si sur la terre ou au-delà de la terre j’avais toujours les yeux fermés et toujours les yeux ouverts à la fois.

Comme si notre tête était composée d’une infinité de corps, comme l’univers est composé d’une infinité de terres et de soleils.
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Le monde entier est un œuf. […] Ce sont les processus dynamiques qui déterminent l’actualisation de l’Idée ; Mais dans quel rapport sont-ils avec elle ? Ils sont exactement des drames, ils dramatisent l’Idée. D’une part, ils créent, ils tracent un espace correspondant aux rapports différentiels et aux singularités à actualiser. [ …] Le monde est un œuf, mais l’œuf est lui-même un théâtre : théâtre de mise en scène, où les rôles l’emportent sur les acteurs, les espaces sur les rôles, les Idées sur les espaces. […] Tout est encore plus compliqué […]. Partout une mise en scène à plusieurs niveaux.
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Vidéo de Jean-Luc Parant
CARTE BLANCHE À BERNARD NOËL - LA PLACE DE L'AUTRE Avec Bernard Noël, Jean-Luc Bayard, Léonard Novarina-Parant, Jean-Luc Parant, Laurine Rousselet, Esther Tellermann & autres invités
Né en 1930, Bernard Noël signe son premier livre Les Yeux chimères, en 1953 et en 1958, Extraits du corps. Ce n'est que dix ans plus tard qu'il publie son troisième ouvrage, La Face de silence. La publication de ces poèmes lui ouvre alors les portes de l'édition où il travaille comme lecteur, correcteur et traducteur. À partir de 1971, Bernard Noël prend la décision de se consacrer entièrement à l'écriture. Il compose ainsi une oeuvre majeure, où s'exprime une révolte contre toute tentative de “sensure” - oeuvre couronnée du Prix National de la Poésie en 1992, du Prix Max Jacob en 2005, du prix international de poésie Gabriele d'Annunzio.
Salué par Aragon, Mandiargues et Blanchot, son oeuvre, immense par son engagement et son exigence, compte près d'une centaine de titres (dont le Château de Cène, roman érotique qui lui vaut d'être l'un des derniers écrivains français à subir un procès pour outrage aux bonnes moeurs), ainsi que de très nombreux livres d'artistes.
Dans le cadre de la Périphérie du 36e Marché de la Poésie
À lire - Bernard Noël, le poème des morts, Fata Morgana, 2017 - La Place de l'autre, Oeuvres III, P.O.L., rééd. 2013 - Comédieintime, Oeuvres IV, P.O.L., rééd. 2015.
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