J'avais adoré "
Automne en Baie de Somme" tant pour son esthétique que pour son scénario et j'étais bien déterminée à guetter les autres saisons que le duo
Philippe Pelaez et
Alexis Chabert ne manquerait sans doute pas de concocter, Vivaldi du neuvième art qu'ils sont en passe de devenir.
"Hiver à l'Opéra" m'a happée dès sa couverture qui, si elle n'a pas la blancheur et les tons froids qu'on prête d'ordinaire à l'hiver, flamboie grâce à son rouge profond, grâce surtout à son esthétique on ne peut plus Art Nouveau. Et puis son titre! L'hiver -c'est la plus belle chez Vivaldi- et l'opéra. Pour moi, amoureuse éperdue des romans du XIX°siècle et de tout ce qui fit ce siècle de tumulte et de Belle-Epoque, l'opéra, c'est l'Opéra Garnier, le fantôme et tout un imaginaire se mettant en branle!
On retrouve dans cet ouvrage magnifique l'inspecteur Broyan que nous avions laissé à l'issue d' "
Automne en Baie de Somme". L'homme de l'art a été révoqué de la police après avoir battu à mort le responsable de la mort de sa fille... Toujours aussi sombre, toujours aussi tourmenté, le père éploré fraye avec un groupuscule de nationalistes aussi inquiétants que dérangeants. le crime, étrangement, va rappeler l'inspecteur à sa vocation première: en ce mois de décembre 1896, le tout Paris qui se presse à l'Opéra Garnier, découvre avec terreur le corps supplicié du colonel Tréveaux -chargé de la sécurité du président
Félix Faure- se balançant au-dessus de la scène, répandant son sang de Christ en croix sur les spectateurs... Broyan est là aussi, qui se lance à la poursuite du meurtrier en parallèle de ses anciens collègues. Il ne se doute pas encore que ce crime n'est que le premier d'un longue série et que ce dernier va le mener au coeur d'une enquête étrange et enténébrée où le spiritisme et les fantômes, les siens et ceux des autres, tiennent le premier rôle...
L'intrigue, fortement inspirée de
Gaston Leroux et de son désormais classique "
Le Fantôme de l'Opéra" n'est pas foncièrement originale mais elle est haletante et envoutante. Elle est surtout au service de l'atmosphère de la bande dessinée, qui est pour moi son point fort: surnaturelle, oppressante, malaisante même, elle parvient aussi à nous ensorceler grâce à sa mélancolie tenace et à son contexte des plus romanesques.
Que j'aime ces enquêtes étranges, sombres et historiques!
Et quel écrin pour ces dernières: une fois encore Peleaz et Chabert nous régalent infiniment, tant du point de vue du scénario, fouillé et complexe, que des graphismes magnifiques et de leur époustouflante esthétique!
Vivement le printemps (aux Halles? A la Charité? Au Père Lachaise?) Vivement l'été.