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EAN : 9782845970717
132 pages
Textuel (25/02/2004)
4/5   2 notes
Résumé :
D'une fermeté inébranlable face aux propagateurs de l'intégrisme, Abdelwahad Medddeb aborde toutes les questions qui nous préoccupent aujourd'hui : l'islam est-il soluble dans la République ? L'islam est-il compatible avec la modernité et avec nos institutions ? L'islam est-il rebelle à la critique ? L'Occident est-il islamophobe ? Aux littéralistes fanatisés et mauvais exégètes du Coran, Abdelwahad Meddeb répond par une patiente argumentation empreinte de sa "doubl... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Il s'agit d'une conversation. La très grande érudition de Meddeb permet au lecteur de balayer les époques, les cultures et les modes de pensées avec des mises en perspectives impressionnantes. Il est rappelé les travaux de Germaine Tillon qui mettent en évidence que le voile féminin est une question anthropologique, que la très grande majorité du coran n'est pas violente et que les chiites irakiens seraient favorables à la séparation des questions politiques et religieuses. Il nie que le coran soit intrinsèquement "sombre" et rappelle que la Bible contient des pasages qui pourraient mener par une interprétation aussi radicale que certains du coran à une même intransigeance. Pour lui, c'est le communautarisme, l'absence de textes de nature à remettre en cause les interprétations radicales du coran tels que ceux de Spinoza contre l'Eglise et plus récemment l'américanisation du monde (communautarisme et diffusion des techniques sans remise en contexte dans des projets de sociétés) qui sont les causes du radicalisme contemporain. Au contraire il voit dans les relations que l'Europe entretient avec ses partenaires des éléents de "refondation de l'âme" concomitant à la diffusion de la technique qui empêcherait les dérives actuelles. J'ai particulièrement trouvé lumineuse la synthèse d'un judaïsme où la parole de Dieu se réifie (sur les Tables), d'un christianisme où il se fait chair (Jésus) et d'un islam où elle se fait geste (calligraphie).
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Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
D'un point de vue anthropologique, reste dans le mythe celui qui attribue à Dieu ce qui appartient à la nature humaine. Ou celui qui croit à des histoires fabuleuses, comme un homme qui reçoit les lois de la main de Dieu, ou une vierge qui enfante un Dieu, ou un autre homme qui apporte dans un livre la parole même de Dieu. Mais toutes ses scènes fondatrices ont une haute puissance symbolique qui structure le sujet au-delà même de la croyance.
Pour revenir à l'islam, la scène du Prophète qui reçoit de l'ange le verbe a été pensée par les philosophes à partir des catégories grecques.
Farabî (Xe siècle) puis Avicenne (XI e siècle) ont situé ces séances angéliques sur la scène de l'imagination, où se réalise chez le Prophète la conjonction avec l'Intellect. Ce dispositif donne à la faculté imaginative une qualité qu'elle n'avait pas dans la psychologie aristotélicienne, où l'imagination ne gagne aucune souveraineté, restant servante de l'intellective, reine des facultés. Et l'analyse inaugurée par Farabî est aussi adoptée par Maimonide (XIIe siècle) pour éclairer le phénomène prophétique dans la tradition juive.
A partir de ce reclassement des facultés, Ibn 'Arabî (entre les XIIe et XIIIe siècles) procédera à une inversion radicale de l'appareil psychologique en donnant le premier rôle à l'imagination, dont la présence rayonne comme une dignité ouvrant l'accès à la connaissance de l'Invisible, faisant fi des contraintes spatio-temporelles. Aussi accordera-t-il à l'imagination les prérogatives que la tradition aristotélicienne attribue à l'intellect. C'est ce qui amènera Henry Corbin à en étudier les multiples implications dans sa monographie au titre éloquent, L'Imagination créatrice dans le soufisme d'Ibn 'Arabî. Du reste, ce rôle premier accordé à l'imagination semble comme annoncer la vision qu'en aura Kant.
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Aussi l'islam reste-t-il dans la légitimation de l'acte de penser à la hauteur de l'argumentaire d'Averroes. Pour qu'il progresse dans la voie qui conduit à la liberté, il se doit d'éprouver l'étape ultérieure en s'acclimatant, avec le Traité de Spinoza, à un site qui ignore la contrainte qu'instaure la bid'a: en affirmant le désaccord entre philosophie et théologie, en insistant sur l'interprétation des Ecritures par les Ecritures, selon l'instrument de la raison et de la connaissance la plus profonde de la langue et de l'histoire, pour repérer les incohérences et les constructions a posteriori qui leur ont donné leur forme ultime. Le constat d'un tel désaccord n'est nullement préjudiciable à la religion, il préserve la foi de ceux qui y croient, tout en sauvant le lieu où agit la liberté de penser, situé ailleurs dans l'enceinte de la même cité.
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Que ne fait-on pour honorer le fantasme qui attribue à une origine divine ce qui a été inventé par l'homme! Là encore le recours à Spinoza est des plus précieux : il signale combien son propos colle aux problèmes qui avivent la crise et le malaise que connaît l'islam de nos jours: "(...) on se représentera Dieu comme un régulateur, un législateur, un roi, alors que tous ces attributs appartiennent à la nature humaine seulement et doivent être entièrement écartés de celle de Dieu (...)."
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Sans nul doute qu'il faille revenir à la question de la liberté. S'il y a une déficience en islam, ce sera celle-là, plus que toute autre. Je commencerai par évoquer de nouveau le Traité théologico-politique et son tout dernier chapitre (XX), où Spinoza rappelle que la fin et les fondements de l'Etat sont la liberté. D'elle dépend l'avancement des sciences et des arts. Ceux qui y contribuent ont besoin d'un jugement libre, entièrement affranchi. La vertu du politique est d'accorder aux humains la liberté du jugement et de les gouverner de manière à ce qu'ils vivent dans la concorde malgré leurs opinions diverses et opposées. Il donne en exemple la ville d'Amsterdam où "des hommes de toutes nations et de toutes sectes vivent dans la plus parfaite concorde". La coercition de l'autorité devrait régler toute chose se rapportant aux actions "et que pour le reste il soit accordé à chacun la liberté de penser ce qu'il veut et de dire ce qu'il pense".
Ces paroles méritent d'être adressées à l'islam telles qu'elles, quand bien même elles paraîtraient minimales, élémentaires à une conscience occidentale démocratique. C'est qu'elles portent une vérité exprimée avec la prudence qu'exige l'écriture "en temps de persécution", comme le montre Léo Strauss. Elles sont, en effet, contemporaines du malaise actuel de l'islam.
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L'islam attend son Spinoza pour l'initier au libre examen des Ecritures qui, dans sa prudence même, démonte les préjugés des théologiens ; et il attend son Moses Mendelssohn, qui chercha à réformer le judaisme tout en restant fidèle à l'Aufklrung et à son alliance philosophique avec Lessing, l'auteur de Nathan le Sage, cette fiction qui illustre au nom des Lumières un relativisme religieux qui ne fut pourtant pas étranger à l'islam.
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Videos de Abdelwahab Meddeb (13) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Abdelwahab Meddeb
1/5 L'émission “À voix nue” diffusée du lundi au vendredi sur France Culture se consacre pendant une semaine à délivrer sous forme d'hommage des entretiens avec le poète, islamologue, essayiste et romancier, Abdelwahab Meddeb. 1) Portrait du poète en soufi : diffusion le 22 décembre 2014.
Par Christine Goémé. Réalisation : François Caunac. Attachée d'émission : Claire Poinsignon
Cette série d'émissions a été enregistrée dans d'étranges conditions : notre ami, Abdelwahab Meddeb, était très gravement malade et se savait perdu. Mais il avait décidé de faire face jusqu'au bout. Né à Tunis en1946, Abdelwahab Meddeb était philosophe, romancier, essayiste et homme de radio. Il est mort à Paris le 6 novembre 2014. Dans son émission hebdomadaire du vendredi, « Cultures d'Islam », il a fait connaître pendant 17 ans tous les aspects de l'Islam spirituel dont il mobilisait avec un savoir immense les ressources poétiques, esthétiques et théoriques. Sa conception de l’Islam était l'antidote le plus efficace contre l'Islam radical. Il a analysé dans plusieurs livres importants, ce qu'il appelait « la maladie de l'Islam ». Lui-même se réclamait d'une tradition bien plus riche et bien plus ancienne, celle du soufisme, incarnée notamment par la figure du grand maître de la fin du XII° siècle et du début du XIII°, Ibn'Arabi. Pour Ibn'Arabi comme pour Abdelwahab Meddeb, l'essence divine est certes une et inconnaissable, mais elle se dévoile dans la diversité des créatures. Abdelwahab aimait citer ce vers d' Ibn'Arabi : «Mon cœur est capable d'accueillir toutes les formes ». Cette branche de l'Islam, pour laquelle la femme est un guide vers le Beau et vers l'amour, promeut l'hospitalité, l'accueil de l'étranger, la générosité, la bienveillance, le dialogue, et le débat, et bien entendu la sagesse et la connaissance. Cet Islam-là place au coeur de son dispositif l'imagination créatrice : Abdelwahab Meddeb était avant tout poète... Son dernier livre, paru quelques jours avant sa mort, s'intitule “Portrait du poète en soufi” (éd. Belin).
Source : France Culture
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