AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782917897522
Editions Presque lune (31/01/2020)
4.12/5   39 notes
Résumé :
Qu'emporteriez-vous si, une nuit, vous étiez contraints de quitter votre maison pour toujours ? A quels compromis seriez-vous disposés à vous résoudre et où finiraient vos ambitions, les rêves et l'amour ? Inspiré d'une histoire vraie, Khalat raconte ce qui se cache derrière l'un des nombreux visages qui peuplent nos villes, celui d'une femme et de sa marche forcée, de la naïveté au désenchantement, de la Syrie à l'Europe.
Que lire après KhalatVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Ce roman graphique est attirant au premier regard : son format 24,5 x 17,5 m'a plu, pas trop pesant, il trouve sa place partout, il est là mais on peut l'oublier et le retrouver à l'envie. Juste le bon format avec sa couverture cartonnée bien dense dont le dessin superbe de Khalat, lumineuse et digne, projette sa présence jusqu'au lecteur happé par son regard. Menton relevé, pommettes colorées de vie, longs cheveux ondulés sur l'avant du corps pour la partie droite, rejetés à l'arrière de l'autre côté. Les hommes et femmes qui l'entourent sont esquissés et déjà semblent des ombres dans le crayonné de gris caractéristique du dessin de Guilia Pex. Dos couleur vieux rose avec la tranche du livre plus soutenu... Impossible d'avoir cette émotion de lecture sur ebook, j'en suis persuadé !
L'histoire est véridique, recueillie par un humanitaire italien, Davide Coltri. Guilia Pex s'en est inspirée pour nous raconter l'histoire de Khalat, une jeune kurde syrienne, de la province de Qamishli, éprise de littérature française, venue étudier à l'université de Damas puis obligée de fuir son pays lors de la guerre civile du fait de son appartenance à la minorité kurde. Ses rêves sont détruits, reste sa volonté de résister à la violence et de sauver sa famille. Elle s'enfuit à travers huit pays et plusieurs camps de migrants – dont celui de Domuz en Irak – pour trouver finalement refuge en Allemagne. Dès l'introduction, ces vers des illuminations de Rimbaud frappent fort : « Les sentiers sont âpres. Les monticules se couvrent de genêts. L'air est immobile. Que les oiseaux et les sources sont loin ! Ce ne peut être que la fin du monde en avançant. »
La violence et la guerre sont en toile de fond mais ce qui est montré ici à travers les dessins et le texte percutant, ce sont les ressentis de Khalat et de sa famille dans des évènements où plus rien n'est maitrisé, où la seule aide arrive d'opérations humanitaires ou d'initiatives individuelles, évitant que tout se dérobe d'un coup sous les pas.
Guilia Pex nous interpelle directement, cela remue d'autant plus que ses dessins sont vibrants de vie et d'émotion – les yeux, les mains, les bouches, sur la plupart des planches, magnifiquement dessinés. Quatrième de couverture : « Qu'emporteriez-vous si, une nuit, vous étiez contraints de quitter votre maison pour toujours ? A quels compromis seriez-vous disposés à vous résoudre et où finiraient vos ambitions, les rêves et l'amour ? »
J'aime ce livre, j'aime ce qu'il raconte de notre humanité. Je ne me résous pas à ce que cette plante dépérisse dans son pot, j'ai toujours espoir qu'en l'arrosant, en lui portant une attention au long court, elle repartira et se redressera, fabriquera de nouvelles feuilles, de nouvelles pousses... Et souvent ça fonctionne ! Je parle de plante en pot parce que chaque chapitre commence par un petit dessin en milieu de page : 1/ la petite plante en pot, 2/ la même plante fanée, 3/ une valise, 4/ une petite tente, 5/ un colis ouvert (aide de survie), 6/ des montagnes, 7/ un gilet de sauvetage, 8/ une cheminée (un vrai logement retrouvé), et enfin une dernière page : un livre crayonné avec écrit Prévert sur la couverture (celui offert par son professeur de français...).
J'ai apprécié la page d'introduction rappelant succinctement le contexte historique entre mars 2011 – printemps arabe – jusqu'à l'exode massif vers l'Europe en 2015. On a également une belle carte de Syrie crayonnée, indiquant les zones à majorité kurde au nord de la Syrie ainsi qu'une magnifique double page avec la carte des pays traversés par Khalat dans sa fuite vers l'Europe.
« Nous, les kurdes, nous survivions en silence ou dans les mots murmurés entre les minces cloisons de nos maisons. Pour les maîtres d'école, pour les employés de l'état civil, pour l'état comme pour tout le monde, notre langue en revanche n'existait pas. de même que nous autres n'aurions pas dû exister. »

Davide Coltri est écrivain, vit à Beyrouth et s'occupe de projets éducatifs dans les situations d'urgence humanitaire. Dans le passé, il a travaillé en Irak, en Sierra Leone, au Népal, au Soudan, en Tanzanie, en Turquie et en Syrie où il a collecté de nombreux témoignages de réfugiés en difficulté qui traversaient les frontières à la recherche d'un nouveau pays acceptant de les accueillir. Il décrit non seulement les guerres civiles et les violences, mais aussi la solidarité, la résistance et l'espoir pour tenter de construire une vie différente.

Guilia Pex est née en 1992 dans la province de Milan. Elle étudie la photographie, expérimente le mélange des genres, mêlant ses clichés au dessin, trouvant son style entre des lignes nettes au crayon et des aquarelles légères. Elle découvre le récit Khalat de Davide Coltri tiré du recueil d'histoires « Dov'è casa mia » et accepte la proposition d'un éditeur italien de l'adapter. Elle illustre avec une grande sensibilité et un souci du détail qui amplifie le pouvoir de l'écriture : les mains, les yeux sont mis en avant de dessins denses ; les couleurs vives irradient au milieu d'un jeu de gris et de noirs. Il s'agit du premier roman graphique de cette dessinatrice qui possède visiblement un grand talent. Cela pique un peu les yeux à chaque page mais ce n'est pas la tristesse du malheur, pas du tout, c'est l'émotion de la vie qui cherche son chemin dans les situations les plus tragiques et de l'art à son service.

Découvert grâce à l'excellent blog « Les miscellannées d'Usva » que je remercie vivement. https://lesmiscellaneesdusva.wordpress.com/2020/04/15/khalat-de-giulia-pex-dapres-davide-coltri-presque-lune-2020/ La chronique est excellente, pas un avis de commande mais un ressenti profond et des renseignements complémentaires sur un roman graphique exceptionnel sur la forme comme sur le fond. Je dédie aussi cette chronique au blog « La tête dans les dessins » : https://jedessinedesfemmesetalors.wordpress.com/2020/09/15/le-brun-et-la-blonde/ où on peut découvrir des dessins tout à fait remarquables.
******
Visitez mon site Bibliofeel ou Clesbibliofeel afin de voir la photo personnelle de ce magnifique roman graphique ainsi que quelques planches remarquables... et bien d'autres articles.
Lien : https://clesbibliofeel.blog
Commenter  J’apprécie          110
Khalat est syrienne, d'origine kurde. Grâce au soutien de son frère Muhsen, elle part étudier à Damas au lieu de se marier. Mais ISIS progresse en Syrie et en Irak, et la famille de Khalat envisage l'exil. « Nous, les Kurdes, nous survivons en silence ou dans les mots murmurés entre les minces cloisons de nos maisons. Pour les maîtres d'école, pour les employés de l'état civil, pour l'État comme pour tout le monde, notre langue en revanche n'existait pas. de même que nous autres n'aurions pas dû exister. » (p. 258) Avec ses parents et son très jeune neveu, la jeune fille entame un long voyage vers l'Europe. Dans sa maigre valise, quelques vêtements et un livre de Prévert. Même l'espoir semble parfois trop encombrant quand il faut tout laisser pour se lancer vers l'inconnu afin de se reconstruire, peut-être, une autre vie ailleurs.

La douceur du crayonné et des couleurs contraste avec l'horreur des situations que vivent les personnages. Sur une page, un fil barbelé déchire le regard. Je suis restée sans voix devant une double page montrant la mer sous le ciel nocturne. Et je retiens surtout la beauté des visages auquel le crayon donne un grain poudré qu'une véritable peau ne renierait pas.

Le sujet des migrants – politiques, climatiques, sexuels, etc. – n'en finit pas d'être cruellement actuel. Je vous conseille la lecture de textes qui m'ont beaucoup émue récemment : L'archipel du chien de Philippe Claudel et L'opticien de Lampedusa d'Emma-Jane Kirby.
Commenter  J’apprécie          100
Giulia Pex a décidé de retranscrire en bd le journal intime d'une exilée syrienne. Un récit juste, sur une triste réalité, et qui montre toute la violence présente dans ces pays. La nécessité de devoir partir sur un chemin long et dangereux, pour quitter une terre à laquelle on tient, mais sur laquelle nous ne sommes pas en sécurité. le dessin, crayonné, de l'autrice, contraste avec toute la dureté de l'histoire, et apporte de la douceur avec des couleurs pastels, et des expressions de visages réalistes. Une très jolie bd, sur un sujet toujours brûlant d'actualité, qui montre sans tomber dans le pathos, ce que vivent et ressentent ces populations exilées.
Commenter  J’apprécie          30
@Khalat a été pour moi un coup de coeur. Ce roman graphique m'a profondément touchée. La vie de Khalat, son insouciance volée juste parce qu'elle est née syrienne dans une famille kurde à un mauvais moment de l'histoire, à notre époque. Sa dignité dans les épreuves traversées, son périple de camp de migrants en camp de migrants jusqu'à son arrivée en Allemagne. le fond, la forme. J'ai tout aimé. Chaque mot, chaque dessin explosent comme un feu d'artifice d'émotions. Et cependant, cette histoire vraie est tout en retenue.

Pour info, afadeau, de la communauté babeliote, a fait de @Khalat une excellente critique.
Commenter  J’apprécie          32
Une interprétation en Bd très féminine de cette femme qui vit comme réfugiée, fuyant la tyrannie syrienne. Que ce soit dans Khalat, l'Odyssée d'Hakim ou L'arabe du futur; chaque évocation du régime syrien fait frémir.
Giulia Per utilise un style très épuré et pudique, mais elle décrit bien l'impression de peur et d'oppression de tous ces gens.
Commenter  J’apprécie          30


critiques presse (1)
BoDoi
28 octobre 2020
Jamais pesant et toujours vibrant d’émotion, ce témoignage nécessaire est précieux et bouleversant. Une histoire vraie terriblement humaine, intime et à portée universelle.
Lire la critique sur le site : BoDoi
Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Qu’emporteriez-vous si, une nuit, vous étiez contraints de quitter votre maison pour toujours ? A quels compromis seriez-vous disposés à vous résoudre et où finiraient vos ambitions, les rêves et l’amour ?
Commenter  J’apprécie          40
« Nous, les Kurdes, nous survivons en silence ou dans les mots murmurés entre les minces cloisons de nos maisons. Pour les maîtres d'école, pour les employés de l'état civil, pour l'État comme pour tout le monde, notre langue en revanche n'existait pas. De même que nous autres n'aurions pas dû exister. » (p. 258)
Commenter  J’apprécie          10
Muhsen me disait toujours que l'avenir est un éventail de possibilités, jamais un tourbillon qui nous aspire.
Commenter  J’apprécie          00

autres livres classés : État islamiqueVoir plus
Les plus populaires : Bande dessinée Voir plus

Autres livres de Giulia Pex (1) Voir plus

Lecteurs (82) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3190 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}